La légende de Yamuni - Jérémie Labbe - E-Book

La légende de Yamuni E-Book

Jérémie Labbe

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Beschreibung

Quand une prophétie dicte le monde…

Cédiria est une cité entourée par un désert et un océan qui bascule dans le vide au bout du monde. Sur cette cité isolée règne un empereur despotique du nom de Cléon. Un jour, une météorite traverse le ciel et s’écrase devant la cité, au centre du cratère se trouve un homme, sans nom ni mémoire, portant une marque étrange : YAMUNI

Un roman fantastique dans la grande tradition du genre

EXTRAIT

C’était devenu un rituel chaque soir pour l’empereur Cléon. Après avoir diné dans son immense et somptueux palais de marbre blanc, l’empereur, un homme de taille moyenne à la peau très claire, toujours vêtu de ses habits noirs cousus d’or et de broderies, partait ensuite faire sa promenade dans les luxuriants jardins impériaux du palais. La profusion de verdure et de fraîcheur de ces jardins tranchait avec l’aspect sableux et poussiéreux des habitations en bois du reste de la cité de Cédiria. Le palais était situé sur une petite butte aux abords de la cité, ce qui permettait à l’empereur depuis son palais de dominer toute la cité. Le palais et les jardins étaient entourés de hauts remparts en pierre blanche avec de hauts créneaux pointus. L’empereur aimait avoir ce sentiment de supériorité sur son peuple, le sentiment d’être intouchable.

A PROPOS DE L’AUTEUR

Je suis né le 17/05/1988 sur la commune d'Argenteuil. J'ai passé la première partie de mon enfance dans le Val d'Oise. Puis à l'âge de 8 ans mes parents sont partis vivre à Landerneau près de Brest. J'ai fais mes études en Bretagne, après un bac scientifique je me suis finalement tourné vers les métiers du commerce. A 27 ans j'aimerais réussir à vivre de ma passion d'écriture en partageant mes histoires.

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Jérémie Labbé

La légende de Yamuni

La cité de Cédiria

Chapitre 1

C’était devenu un rituel chaque soir pour l’empereur Cléon. Après avoir dîné dans son immense et somptueux palais de marbre blanc, l’empereur, un homme de taille moyenne à la peau très claire, toujours vêtu de ses habits noirs cousus d’or et de broderies, partait ensuite faire sa promenade dans les luxuriants jardins impériaux qui entouraient le palais. La profusion de verdure et de fraîcheur de ces jardins tranchait avec l’aspect sableux et poussiéreux des habitations en bois du reste de la cité de Cédiria. L’édifice était situé sur une petite butte aux abords de la ville, ce qui permettait à l’empereur depuis son bureau de dominer toute la cité. Le bâtiment et les jardins étaient entourés de hauts remparts en pierre blanche avec de hauts créneaux pointus. L’empereur aimait avoir ce sentiment de supériorité sur son peuple, le sentiment d’être intouchable. Ce soir-là, il était en compagnie de son général en chef des armées : le général Victus, son véritable bras droit. C’était un homme extrêmement dur, d’une stature imposante, d’une force naturelle et qui avait une réputation de féroce guerrier au combat. Il portait une armure rouge vif avec une fine cape noire par-dessus. Il ne revêtait jamais de casque à l’inverse de tous les soldats de l’empereur. Les deux hommes marchaient dans les allées gravillonnées, entre les pelouses, les fontaines et les statues représentant les anciens empereurs. Cléon profitait de ce type de sortie pour faire le point sur les affaires de la cité.

–Général Victus, je vous ai fait venir ce soir pour avoir votre rapport concernant les récentes activités des rebelles, cela fait maintenant des mois et des mois que je vous ai donné l’ordre d’enquêter sur ces rats et je n’ai pas l’impression que vous ayez obtenu le moindre résultat ! Or l’avancement de cette mission est prioritaire pour moi.

–Sire, répondit Victus d’une voix calme et posée, nos recherches avancent, certes pas aussi vite qu’espéré, mais ces rebelles sont lâches et se cachent dans les égouts de la cité, c’est un véritable labyrinthe là-dessous, ce qui nous rend la tâche compliquée. Quand ils sortent, ils se fondent dans la population, ils utilisent l’identité d’autres citoyens ou usent tout simplement de fausses identités. J’ai ordonné aux patrouilles d’augmenter le nombre de contrôles des papiers mais malgré cela nous avons des difficultés pour les suivre et les ficher correctement ou alors nous n’arrêtons pas les bonnes personnes. Toutefois nous avons appris une information des plus importantes.

Victus prit son temps et arborait un fier sourire avant d’annoncer la nouvelle.

–Il semblerait que leur chef soit un certain Noa Hols. D’après ce que nous avons appris, c’est véritablement lui le cerveau de ce mouvement. Si nous le neutralisons, nous stoppons net cette misérable révolte. Nous avons pu dresser un portrait de lui et avons récupéré plusieurs identités sous lesquelles il se cache. Ce n’est plus qu’une question de temps avant que nous ne mettions la main dessus ; et avec lui la rébellion s’effondrera comme un vulgaire château de cartes.

–D’où tenez-vous ces informations général ? Vous m’avez l’air bien sûr de vous concernant ce… Noa Hols. Vous pensez vraiment que la rébellion ne tient qu’avec une seule personne?

–Nous tenons nos informations d’un rebelle que nous avons capturé lors d’une descente dans le sous-sol d’un bar clandestin situé non loin du port.

Victus affichait toujours un large sourire, cette fois de satisfaction.

–Après de longues séances de torture il nous a livré tout ce que nous désirions savoir. Nous devons capturer ce Noa Hols et ensuite nous le ferons parler. S’il est bien leur chef il nous livrera l’identité de chaque rebelle, il nous révélera chaque cachette qu’ils utilisent ; et nous irons les débusquer un par un s’il le faut. Quant à lui, nous en ferons un exemple pour dissuader le moindre esprit de révolte dans la tête des villageois.

–Vous n’avez attrapé qu’un seul prisonnier ? Comment être sûr de la véracité de ses propos ?

–La plupart se sont échappés dans les égouts dès notre arrivée, nous n’avons pas réussi à les rattraper. L’un d’entre eux a même préféré se donner la mort devant nous en avalant un poison. Mais soyez sûr sire que nos méthodes d’interrogatoire ne laissent pas de place au doute, le prisonnier nous a dit tout ce qu’il savait.

–J’aimerais voir ce prisonnier.

–Malheureusement monseigneur ; il fut, je l’avoue, très dur de le faire parler, nous avons dû pousser l’interrogatoire assez loin et il n’a pas survécu à ses blessures.

–Êtes-vous certain qu’il vous a dit la vérité ? Ou ne cherchait-il pas à vous envoyer sur de fausses pistes, voire dans un piège, nous devons rester prudents.

–J’ai effectué moi-même tous les interrogatoires et je peux vous assurer avoir vu cette lueur dans ses yeux avant de mourir. Une lueur de peur et de soumission, il aurait été incapable d’inventer de tels mensonges.

–Enfin cela reste maigre général, dois-je vous rappeler qu’ils ont réussi à nous subtiliser un de nos aéroglisseurs ! J’ai déjà fait exécuter les gardes qui surveillaient le hangar cette nuit-là, je n’aimerais pas avoir à punir le général de mes armées parce qu’il est incapable de retrouver un appareil de cette taille dans ma cité…

Il y eut un silence pesant.

–Justement sire, le prisonnier nous a donné des lieux où les rebelles auraient pu cacher l’aéroglisseur. Nous les surveillons en ce moment même au cas où ce Noa Hols y ferait une apparition. Notre priorité est d’attraper cet homme et ainsi de couper la tête pensante de cette organisation.

L’empereur dévisagea Victus.

–Très bien ça suffira pour ce soir général.

Les deux hommes remontaient l’immense escalier de marbre blanc qui menait des jardins au palais. Il fallait monter les cent marches qui le composaient pour arriver à l’entrée principale et se retrouver sur une grande esplanade en forme de cercle, entourée de majestueuses colonnes.

–Tenez-moi informé de l’évolution de tout cela, nous aviserons en fonction de votre réussite ou de vos échecs… Vous pouvez disposer général.

–À vos ordres sire et merci pour votre écoute.

Victus mit un genou au sol, la tête baissée, le poing sur le cœur pour saluer l’empereur.

Il y eut un nouveau silence, les deux hommes se trouvaient maintenant en haut des marches du palais. De là, ils surplombaient absolument toute la cité, ils pouvaient voir d’un côté l’immense étendue du désert de sable au-delà des remparts de Cédiria, de l’autre le port et la mer qui s’étendait à l’horizon. Tout était calme, Victus toujours le genou au sol ne put s’empêcher de faire une promesse à son souverain : « Sire je vous assure que nous trouverons cet appareil dès demain, même si je dois retourner la ville tout entière pour cela, même si je dois… »

Le général ne put terminer sa phrase. Il y eut comme un puissant coup de tonnerre mélangé au bruit d’une sirène, le vacarme semblait venir de bien plus loin que la cité, mais il n’y avait pas eu un seul éclair, le ciel était bleu, sans le moindre nuage. Cléon et le général regardaient tout autour d’eux avec étonnement, n’arrivant pas à identifier ce phénomène. Puis, un trait de lumière se dessina dans les airs, une brillante étincelle jaune vif déchira le firmament au-dessus de la cité. L’étincelle se déplaçait à vive allure, elle venait sur Cédiria. Un bruit violent résonna à nouveau tout autour d’eux, tout autour de la cité. Il était si fort qu’il semblait faire trembler les murs de la ville. L’empereur et Victus restèrent bouche bée devant ce spectacle. La scène ne dura que quelques secondes ; mais pour eux le temps sembla suspendu. Puis, cet éclair de lumière vint s’écraser sur le sol à l’autre bout de la cité. Le bruit cessa instantanément. C’est alors qu’apparut un épais nuage de fumée noire s’élevant par-dessus les habitations des bas quartiers de la cité.

Après un moment d’incrédulité, une figure de fer était revenue sur le visage de l’empereur. Il ne pouvait se permettre de montrer le moindre signe de faiblesse ou d’ignorance devant Victus. Sans détourner le regard de la scène à laquelle il venait d’assister, Cléon s’adressa à son général : « Victus prenez une patrouille armée et allez immédiatement sur place, si c’est un coup des rebelles je veux savoir ce qu’il s’est passé. Dites aux villageois trop curieux que nous avons fait le test d’une nouvelle arme, s’ils insistent dans leur curiosité, dites-leur que nous n’hésiterons pas à la réutiliser… sur eux cette fois-ci.»

Le général Victus n’ajouta pas un mot. Il descendit précipitamment les marches du palais. Cléon attendit que son général soit arrivé en bas avant de regagner l’intérieur de sa forteresse. L’empereur était inquiet, depuis plus de mille ans sa famille régnait sur cette cité de père en fils. Cédiria était l’unique ville de ce monde et chaque nouvel empereur au cours de sa formation apprenait que rien ne devait jamais venir de l’extérieur afin de préserver la cité. C’était ce que son père lui avait appris, qui lui-même l’avait appris de son père. Depuis le premier empereur, c’était l’une des règles fondamentales.

Chapitre 2

Le général Victus partit sur les lieux de l’explosion à bord de l’aéroglisseur qui l’avait déposé au palais. La flotte de l’empire était uniquement constituée de ce type d’appareils. C’étaient de longs vaisseaux en acier noir avec deux grandes portes coulissantes de chaque côté, deux ailes posées sur le toit de l’engin sur lesquelles étaient fixés des réacteurs silencieux pouvant pivoter dans tous les sens et dégageant une lumière bleu vif. À l’avant, sous la cabine de pilotage, il y avait deux canons qui eux aussi pivotaient afin de pouvoir tirer dans quasiment toutes les directions. Un aéroglisseur pouvait contenir une vingtaine de soldats mais une personne seule pouvait le piloter. Ces engins étaient d’ailleurs extrêmement maniables, ils permettaient de passer au-dessus des maisons mais ils ne pouvaient pas s’élever de plus d’une centaine de mètres d’altitude. La flotte d’aéroglisseurs représentait la puissance de l’empereur car personne ne comprenait comment de tels engins pouvaient fonctionner. Seul Cléon connaissait le secret de l’énergie qui les faisait fonctionner, la même énergie qui faisait fonctionner les fusils des soldats ou encore l’éclairage du palais ou celui de l’arène. Le mystère autour de cette énergie renforçait le pouvoir divin de l’empereur. Ces extraordinaires pouvoirs étaient incompréhensibles des villageois. Eux vivaient dans de simples maisons de pierres et de bois, sans aucun confort.

Les soldats de l’empire portaient une armure noire moulée sous la forme d’un corps musclé, des jambières noires et un casque noir avec une visière teintée qui recouvrait entièrement leur visage. Il était impossible de différencier un garde d’un autre quand ils portaient leurs armures. Chaque soldat était également équipé d’un fusil d’assaut à énergie qui causait plus de dégâts qu’il n’était précis.

Après avoir survolé juste au-dessus des habitations, l’aéroglisseur du général fit un tour au-dessus de la zone sinistrée. L’épaisse fumée noire empêchait de voir quoi que ce soit. Victus ordonna au pilote d’atterrir près de la zone. Dès l’engin posé, les hommes sortirent, arme en main. Le général sortit en dernier et s’adressa au commandant Pritor : « Commandant établissez un périmètre de sécurité autour de la zone, que personne n’entre ou ne sorte, fouillez tout de fond en comble, je veux retrouver la chose qui s’est écrasée ici et les rescapés s’il y en a. Mettez les haut-parleurs de l’aéroglisseur en marche et dites aux villageois de rester enfermés chez eux pour leur sécurité. Envoyez des hommes les interroger pour savoir ce qu’ils ont vu. Si certains refusent d’obéir vous pouvez utiliser la force. Faites venir deux autres aéroglisseurs, nous aurons besoin de plus de soldats pour quadriller la zone. »

Le commandant Pritor s’exécuta, tous les soldats se mirent en action autour de la zone sinistrée. Pritor attrapa son communicateur, un petit boîtier noir muni de plusieurs boutons, accroché sur son armure au niveau du torse. Chaque bouton avait sa fonction, ils permettaient de communiquer soit avec tous les soldats, soit uniquement avec les commandants ou encore, avec les différents lieutenants de l’armée. Le son de sa voix arrivait directement dans les casques de chaque soldat. Pritor demanda à ce qu’on lui envoie immédiatement deux aéroglisseurs remplis de gardes.

Pendant ce temps la fumée se dissipait peu à peu, la terre et le sable projetés par ce qui semblait être un crash retombaient doucement. Aucune habitation n’avait été touchée. La zone accidentée était une grande place à l’extrémité nord-ouest de la ville, proche des remparts, où se déroulait chaque matin un marché de fruits et de légumes.

Quelques minutes plus tard Pritor revint faire son rapport au général Victus.

–Mon général, au rapport.

–Allez-y commandant.

–Une grande partie de la place s’est transformée en cratère, impossible de savoir quelle en est la cause pour le moment, nous n’avons trouvé ni trace d’explosif, ni débris d’un quelconque appareil, pas le moindre bout de métal. Il n’y a que de la terre et du sable. Les hommes continuent de fouiller la zone, la fumée qui se dégage du cratère rend difficile les recherches.

Pendant qu’ils parlaient, les deux aéroglisseurs qu’ils avaient demandés venaient de se poser aux côtés du premier.

–Où en est l’interrogatoire des villageois ?

–Nous attendions justement plus d’hommes pour commencer.

–Bien commandant. Dites aux hommes d’accélérer les recherches ainsi que les interrogatoires.

–À vos ordres mon général.

Pritor allait exécuter les ordres, lorsqu’un soldat sortit à la hâte de l’épaisse fumée noire.

–Commandant au rapport.

–Je vous écoute soldat.

–Vous devriez venir voir cela, nous avons retrouvé quelqu’un au milieu du cratère.

–Est-il encore vivant ?

–Oui justement.

Le soldat marqua une pause.

–Et c’est plutôt étrange.

Pendant ce temps la fumée s’était dissipée presque entièrement, laissant apparaître un cratère large sur une vingtaine de mètres et profond sur dix bons mètres. Victus et Pritor suivirent le soldat jusqu’au centre du cratère. Ils arrivèrent devant le corps inerte et recroquevillé d’un homme totalement nu, sa peau était mate, ses cheveux bruns et son corps athlétique. Le soldat reprit :

–Ses signes vitaux sont faibles commandant et il est inconscient, mais il est bel et bien vivant, de plus, il ne porte aucune marque sur son corps qui pourrait laisser entendre qu’il s’est retrouvé au milieu d’une explosion. Il n’a aucune cicatrice, aucune brûlure. Il porte juste ce tatouage sur son avant-bras. À part lui, il n’y a absolument rien ici, pas d’acier ni de fer, uniquement des cailloux, de la terre et du sable.

Pritor semblait à la fois étonné et fasciné de la découverte, il se tourna vers Victus.

–Général, quels sont vos ordres ?

–Couvrez-le ! Et transportez-le jusqu’à la prison de Doel’an… Mettez-le dans une cellule individuelle et prévenez-moi dès qu’il aura repris connaissance. Je m’occuperai personnellement de son interrogatoire.

–À vos ordres mon général.

Pritor se tourna vers le soldat.

–Vous avez entendu les ordres soldat ! Exécution.

Chapitre 3

L’homme se réveilla sonné, les oreilles bourdonnantes, le corps en sueur. Il était dans une cellule sombre et humide. Il n’y avait aucune ouverture dans les murs, le sol était froid, en terre battue et dégageait une odeur de moisi. Seul l’encadrement autour de la porte laissait passer un fin trait de lumière blanche. Derrière la porte, on entendait des cris. Des cris de douleur, des cris de torture. On entendait des coups de fouet qui claquaient sur la peau d’autres prisonniers et des geôliers qui proféraient des insultes et des menaces. Ce vacarme et cette ambiance étaient le quotidien de la prison de Doel’an.

L’homme entendit des bruits de pas se rapprocher de sa cellule. Le trait de lumière qui dépassait de la porte fut coupé à deux reprises. Deux gardes se tenaient derrière. L’un d’eux ouvrit la trappe pour regarder dans la cellule. L’homme fut ébloui par ce soudain trop-plein de lumière.

–C’est celui-là, fit la voix rauque d’un des deux gardes, on dirait qu’il a repris connaissance.

–Très bien, dans ce cas on l’amène en salle d’interrogatoire pour le commandant, reprit le second garde avec une voix encore plus grave.

La lourde porte de métal s’ouvrit dans un grincement terrible. L’homme n’était pas assez fort pour se lever seul, ses jambes étaient faibles et sa vision trouble. Les deux gardes l’attrapèrent par les bras et le traînèrent hors de la cellule.

Le prisonnier retrouvait sa vision au fur et à mesure mais il se sentait toujours aussi faible. La prison où il se trouvait était à la fois sombre et délabrée. Enterré sous terre, l’éclairage provenait d’un tube transparent qui courait au plafond le long des couloirs. Par endroits, quelques lucarnes laissaient passer la lumière de l’extérieur. Après avoir traversé le corridor principal, ils arrivèrent dans un vaste hall. Celui-ci était extrêmement bruyant et puait la transpiration. Réparties sur trois étages, il y avait des centaines de cellules aux vieux barreaux rouillés ; on y accédait par un grand escalier en fer qui desservait chaque étage. Les cellules étaient remplies de toutes sortes de prisonniers : des voleurs, des assassins, des traîtres à l’empereur… La prison de Doel’an renfermait beaucoup de personnes venant de différents horizons. Certains étaient de vrais criminels notoires, d’autres avaient eu le malheur de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment, ou encore d’avoir subi un coup de folie de la part de l’empereur. Quelle que soit la raison qui vous ait amené à Doel’an, la sortie était la même pour tous : l’arène de Cédiria ; celle-ci était située juste au-dessus de la prison.

Les gardes et le prisonnier traversèrent le hall pour arriver sur un monte-charge situé sous le grand escalier en fer. L’un des gardes tira sur un levier pour actionner le mécanisme. Un bruit métallique résonna dans tout le hall, ça grinça un peu, puis ils se mirent à descendre lentement. Plus ils s’enfonçaient dans la prison, et plus l’obscurité était présente, mais le vacarme de la machine étouffait maintenant les cris provenant des étages supérieurs. Le monte-charge s’arrêta brutalement. À ce niveau-là, il n’y avait plus un bruit. Le couloir était étroit, entièrement bétonné et desservait plusieurs portes métalliques. Les gardes traînèrent le prisonnier jusque dans une salle d’interrogatoire. La pièce était carrelée du sol au plafond. Un carrelage blanc à l’origine, mais sali par les années. Au milieu de la pièce se trouvaient une table et deux chaises en acier disposées de part et d’autre de la table.

L’homme fut installé sur l’une des chaises. La pièce était faiblement éclairée par la lumière blanche qui sortait du tube de verre translucide fixé au plafond. Ce tube traversait toute la salle et repartait vers le couloir. Une bonne moitié de la pièce était dans la pénombre ; Pritor fit un pas en avant pour sortir de cette obscurité.

–Soldat vous pouvez nous laisser.

Les deux gardes saluèrent leur commandant et sortirent de la pièce. Pritor fit lentement le tour de la pièce, dévisagea l’homme un bon moment puis resta debout face à lui.

–Quel est votre nom ?

L’homme, toujours un peu groggy, releva sa tête et à son tour dévisagea Pritor.

–Où… Où suis-je ? demanda-t-il à voix basse.

Pritor ne prêta pas attention à ces paroles et continua son interrogatoire.

–Que faisiez-vous sur les lieux de cette explosion ? Êtes-vous un rebelle ?

–Je… je ne me souviens de rien… que… qu’est-ce que je fais ici ? Où sommes-nous ? Qui… Qui êtes-vous ?

L’homme avait du mal à tenir sa tête droite, il bafouillait et était désorienté. Pritor respira profondément et posa ses mains sur les épaules de l’homme, il le regardait droit dans les yeux.

–Je vous pose la question encore une fois, qui êtes-vous ?

–Je ne sais plus… lâcha-t-il en baissant la tête.

Pritor attrapa le menton de l’homme et lui souleva la tête.

–Si vous voulez que je vous aide dites-moi qui vous êtes !

–Où sommes-nous ?

Pritor soupira ; il lâcha l’homme, se redressa, et parla d’une voix forte pour être sûr que les gardes derrière la porte l’entendent.

–Vous êtes à la prison de Doel’an, nous vous avons trouvé sur le lieu d’un attentat rebelle et pour ce crime vous serez condamné à combattre dans les arènes. Il semblerait que vous ayez totalement raté votre coup.

Sur ces mots Pritor donna un violent coup de matraque dans la nuque de l’homme qui tomba de sa chaise et s’effondra sur le sol. Pritor tapa du poing sur la porte.

–Gardes mettez-le dans la cellule commune, celui-ci part pour l’arène.

–À vos ordres mon commandant.

Chapitre 4

Shaq observait l’homme que les gardes venaient de balancer dans la cellule commune comme un vulgaire sac. Celui-ci était plutôt costaud, il était torse nu et ne portait qu’un pantalon trop court et déchiré dans son bas. Au milieu d’une trentaine de prisonniers, Shaq se leva et s’approcha de lui comme s’il se sentait obligé de venir l’aider.

–Comment vas-tu ? lui demanda Shaq. Ils jettent les prisonniers n’importe comment dans cette cellule.

L’homme leva la tête et vit un homme noir, le crâne rasé. Il était à la fois très fin et très grand, il devait mesurer pas loin de deux mètres. Celui-ci lui souriait et lui tendait une main pour l’aider à se relever. Le visage abîmé par les années, Shaq avait une quarantaine d’années mais en faisait légèrement plus. C’était une personne qui gardait le sourire et l’espoir en permanence, même dans les lieux les plus sombres comme celui-ci.

–Où est-ce qu’on est ? lui demanda l’homme.

–Ils t’ont mis dans la cellule commune. Enfin comme tu peux le voir c’est plus une fosse commune où ils nous jettent plutôt qu’une véritable cellule, dit-il toujours avec un grand sourire aux lèvres.

La fosse où ils se trouvaient était creusée sur une bonne dizaine de mètres en profondeur, de forme rectangulaire, les murs en argile rouge étaient lisses, impossibles à escalader. Sur un des murs en largeur, un tuyau ressortait d’où s’écoulait un filet d’eau. L’eau coulait ensuite au milieu de la fosse jusqu’à une grille rouillée qui rejoignait les égouts. En haut, des gardes faisaient le tour sans vraiment se préoccuper de ce qui pouvait se passer en bas dans la fosse. Malgré le nombre important de prisonniers pour une seule cellule, l’ambiance était extrêmement calme. Chacun attendait en silence l’appel qui les conduirait à leur mort. La fosse commune était située directement sous l’arène. L’avant-dernière étape avant la mort. L’homme reprit :

–Non, non, je veux dire qu’est-ce que je fais ici ? Pourquoi on est là ? dit-il totalement troublé.

–Et bien tu es à la prison de Doel’an mon ami ! Et tu as dû faire quelque chose qui n’a pas plu aux yeux de l’empereur. Alors bienvenue en enfer! Et comment est-ce qu’on peut t’appeler ?

–Et bien je… je n’en sais rien. Je ne m’en souviens pas.

–Tu ne sais plus comment tu t’appelles ? Ce n’est pas banal ça, ils ont dû vraiment frapper fort sur ton crâne.

–Non pas que je me souvienne non plus, à vrai dire, je ne me souviens de rien du tout, absolument rien.

–C’est quoi la dernière chose dont tu te rappelles ?

–D’avoir était jeté ici. Avant ça, je me souviens vaguement d’un homme en uniforme me criant dessus. Mais à part ça, c’est le vide total.

Il y eut un long silence puis Shaq attrapa le bras gauche de l’homme et le retourna. Écrit en lettres capitales et dans une calligraphie des plus simples, un tatouage s’étirait : YAMUNI.

–Yamuni ! s’exclama Shaq, c’est sûrement ainsi que tu t’appelles, et tu as justement pensé à te le faire tatouer pour ne pas l’oublier.

Shaq éclata encore de rire.

–En tout cas c’est comme ça qu’on va t’appeler ici si tu n’y vois pas d’inconvénients ! Tu sais, tu as de la chance d’être tombé sur un gars comme moi ! Je veux dire, un gars qui sait lire !

–C’est toi qui m’es tombé dessus, remarqua Yamuni.

–Bien vu, je me nomme Shaq !

Il lui tendit sa main. Yamuni la lui serra.

–Enchanté Shaq.

Et il sourit à son tour.

–On fait quoi ici au juste Shaq ?

–On attend.

–On attend quoi ?

–Et bien, on attend avant d’aller dans l’arène.

Le sourire de Shaq laissa place à un visage sombre. Il y eut un silence puis Shaq reprit :