Le Tartan et la Rose d’Écosse - Annina Alba - E-Book

Le Tartan et la Rose d’Écosse E-Book

Annina Alba

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Beschreibung

"Le Tartan et la Rose d’Écosse" vient conclure une série de quatre recueils comprenant "L’Ombre Claire", "La Dame Blanche" et "Le Cœur d’une Sassenach". Ces ouvrages, inspirés à la fois par la série télévisée "Outlander" et par le vécu de l’auteure, promettent d’émouvoir les âmes sensibles et les esprits en quête d’aventure.


A PROPOS DE L'AUTRICE

Annina Alba, née d’une mère française et d’un père américain, doit son épanouissement à sa mère et à l’enseignement qu’elle a reçu. Élevée dans un cadre empreint d’affection et de valorisation de la littérature, de la poésie et de l’écriture, elle a cultivé un amour pour la poésie qui perdure encore aujourd’hui.

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Annina Alba

Le Tartan et la Rose d’Écosse

Partie IV

Recueil

© Lys Bleu Éditions – Annina Alba

ISBN : 979-10-422-2471-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122- 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122- 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335- 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À celles qui m’aiment avec beaucoup d’indulgence,

Mes amies, mes sœurs de cœur de pure insouciance,

À feue grand-mère courage de ma petite enfance,

Au visage ridé, empreint de tant de bienveillance.

À Maman, disparue mais qui éternellement serait,

Car sa beauté d’âme n’avait d’égale que sa bonté,

Et depuis lors, chaque visage que je me composerai,

Alternerait en joie, gratitude et vieillesse attristée.

À son prolongement, au mien, à ma fille adorée,

Gillian, ma toute belle, mon trésor, ma beauté,

Rien, jamais ne pourrait m’empêcher de l’aimer,

Puisque dans mon cœur, elle fleurirait à jamais.

Inspiré d’un amour-passion au travers de l’Histoire du XVIIIe siècle de l’Écosse, de l’Amérique et de la France.

Prologue

La passion en moi, jamais ne s’éteint, elle mûrit simplement tandis que les traits de mon visage s’alourdissent et vieillissent et certains s’étonneront peut-être de me voir continuer l’écriture en étant pour partie inspirée de la série télévisée à succès « Outlander ».

Certes, en premier lieu, cette aventure imaginaire m’attire, car elle prend racine en Écosse, nation qui m’est totalement inconnue, mais qui a toujours éveillé en moi, un vif intérêt pour ses paysages si beaux et son climat souvent chargé de pluie, pour son Histoire et l’originalité de sa culture, mais elle m’invite également au voyage par l’esprit outre-Atlantique, là où une partie de ma propre histoire familiale a commencé.

Après trois premiers recueils publiés sous l’influence de cette série, je me suis longuement interrogée et j’ai réalisé au fur et à mesure du temps que par le biais de cette fiction faite de romance et de drames, inexorablement, je retrouvais quelques-uns de mes souvenirs heureux et plaisants et d’autres bien moins agréables.

Cette épopée romanesque est ainsi devenue l’élément déclencheur pour que je reprenne la plume après une pause de trente années me libérant alors du poids insoupçonné, celui de mes souvenirs, de mes craintes et de mes désespoirs.

Irrésistiblement attirée par l’insondable néant et l’absolu, ainsi, j’offre ce modeste recueil comme une ode passée et présente aux êtres de chair pleins de douceur, de violence, de beauté et de laideur.

Introduction

En 1945, Claire Randall, infirmière de guerre, est mariée à Franck Randall, officier dans l’armée britannique.

À la libération, le couple qui se retrouve après cinq ans de séparation, part pour l’Écosse et décide de vivre une seconde lune de miel.

Franck, historien de profession, descendant de Black Jack Randall (capitaine des dragons dans l’armée britannique du XVIIIe siècle), entreprend alors des recherches, passionné par la généalogie de sa famille.

Pendant ce temps, Claire parcourt la lande écossaise en quête d’herbes aux vertus guérisseuses. Elle se retrouve alors transportée dans l’Écosse révoltée de 1743 où elle vivra de palpitantes aventures remplies de dangers, de passion et de rencontres inattendues.

Le temps des choses et des hommes ne semble pas encore avoir d’emprise sur mon envie de romance et de voyage dans des contrées lointaines. Amoureux(es) de mots tendres et de nostalgie, de confidences nues et sincères, j’ai grand plaisir à vous retrouver pour la quatrième fois.

Rejoignez mon univers à part, intime et authentique !

Chapitre 1

Cœurs et Corps

À cœur et à cri

Comme échouée au milieu d’un champ de bruyère,

Une girandole1 d’épines se fiche sous ma chair,

Debout, je traîne un corps de pierre, une saine colère.

Face au cercle de la lune de sang2, telle une statue figée,

De jour en jour, ton absence me déchire tout entier,

Je reste là, car mon cœur, lui, a choisi de t’accompagner.

À l’arrivée d’une autre saison, morne et sans nom,

Des premières neiges, puis au temps des moissons,

Ma respiration est vaine, pareille à une punition.

Là-haut, une flopée d’étoiles tapit la nuit d’Eden,

Elles scintillent en surface au nord du loch Leven3,

Puis éclatent, coulant à flots en gouttes de gemmes4.

Couché sous tes mains, je me souviens qu’il battait fort,

Nous étions alors encerclés, tout près de Culloden Moor5,

Il te fallait me quitter, je choisissais d’accueillir la mort.

À cœur et à cri, nous avions fait l’amour en sanglots,

Il m’avait semblé un instant entendre le cri d’un oiseau,

Alors, perdu en toi, j’avais caressé le velours de ta peau.

Nos âmes enchaînées, nos corps chauds de sueur,

Mon souvenir resterait intact sous ton avant cœur6,

Tu serais l’emprunt sur ma vie, le son de mes heures.

Cœur à vif

Oui, elle est feue mon âtre et feue ma seule déchirure,

C’est vrai qu’au fil de l’âme, peu à peu au fil des jours,

S’endort le lit de la rivière dans le sein de son berceau,

Siège dans l’alfange7 la petite mort et son noir tombeau.

Soudain, me crève les yeux, le reflet abstrait et éphémère,

De l’ébauche fugace de son sourire, d’un regard pur et clair,

Aussi éclatant que la blancheur d’un gros quartier de lune,

Celui qui naguère nimbait ses mèches rondes et brunes.

Mais, aux tout premiers airs de l’alouette qui grisolle8,

Quand dansera enfin le soleil à la fête des tournesols,

Sans sa main dans la région du cœur qu’elle abrite,

Que vaudra le sang de ma vie qui déjà se délite ?

Désormais, dans ma poitrine ouverte, résonnent le vide,

La peine affichée à l’identique sur nos visages livides,

Tes larmes qui engendraient d’autres encore plus amères,

Qui se brisaient en une seconde, aspirées par la pierre.

Mais, le frimas9 de l’hiver se libère de son manteau d’hermine,

Au nez froid des clochers, il goutte et tremble puis dégouline,

Il traîne encore dans la saison des jonquilles nouvellement nées,

Comme une brise musicienne à l’essence de fleurs de pommiers.

Cette brise emprisonne les empreintes de ses lèvres sur ma joue,

La coulée d’or transparent de ses yeux, de ses cheveux fous,

Sa tentative restait vaine de retenir le temps et mon corps,

Éffrontément, couvait la voix d’un saphir à queue d’or10.

Des adalies11 sur les arbres agitent leurs bras pleins de fanes12,

Similaires aux pompons verts des cheerleaders sur le stade,

Il y a aussi le pont des âmes, au beau milieu de la charmille13,

Je le franchis sans peine avec cet espoir qui très vite s’éparpille.

En vérité, ma tendre mélancolie me vient du fond de ma vallée,

Du temps d’avant qui donnait, que ma terre d’avril me dérobait,

Et demain malgré tout, je mettrai un pied hors du lit de la veille,

Énumérant mes intervalles éveillés et mes sursauts de sommeil.

Abalourdi14, posant le premier pas sur la lame du plancher,

J’abîmerai mes yeux au-dehors vers les lueurs de l’adret15,

Pour compagnon, mon arc et mon carquois garni de flèches,

Je traquerai le cerf au port de seigneur, aux abattures16 sèches.

Plus transparent que l’air, qu’un frôlement de baiser papillon,

J’accueille avec joie, l’évocation du dernier jour de la passion,

De vos jambes pressées cheminant sur les trottoirs en macadam17,

Du nez criblé de soleil de mon enfant, des yeux de ma femme.

Ah, si seulement mon buste aptère18 avait des ailes dans le dos !

Je rejoindrai le vent, le tonnerre, la pluie et même plus haut,

Je m’y agripperai avec force, j’y grefferai ma seule blessure,

Mourir ainsi en gage d’amour ne serait que simple brûlure.

Le serment murmuré

Voleuse de plumes et même marchande d’or,

Ta tête bouclée reposée sur l’oreiller de coton,

Se promènent sur ta joue les reflets de l’horizon.

Quand bien même, pour la gloire ou pour un empire,

De peur d’être évincé, de manquer l’un de tes sourires,

Je garderai mes pupilles bleues toujours grandes ouvertes.

Alors, puisque l’amour te sied tellement à merveille,

Toi, la femme qui manie si bien la tendresse,

Je te prends pour cœur, pour unique maîtresse.

Mais comment puis-je t’avouer sans rougir un peu,

Ce que m’inspire la vue de tes courbes délicieuses,

Cet enfer délictueux, cette parade amoureuse !

Ainsi, comparable à la tendresse de deux corolles,

Ta bouche à la teinte rougeâtre d’une embrune19,

S’épanouira-t-elle sous la mienne éclairée de lune ?

En ravisseur inoffensif, mes doigts t’agrippent,

Doux bracelets d’entrave autour de tes bras,

Ils caressent ta peau dénudée, en tenue d’apparat.

Mais hélas, au cadran de notre désamour en devenir,

En côtoyant le jour l’enfer des grands de ce monde,

Tu me maudiras, tu béniras le mort-né dans la tombe.

Alors, dans le temps de mes insomnies, de nos désaccords,

Sans l’étau de mes mains que tu chasseras de ton corps,

Je ne serai qu’une âme errante, un corps vide et sans abri.

Il n’y aura plus aucun sourire sur ton visage d’albâtre,

De tes lèvres finement cousues avec des mots rageurs,

Tu arrêteras net sous ma poitrine, le tic-tac de mon cœur.

Mais demain, ou dans le temps bref d’un interlune20,

Je te retrouverai, je chercherai encore parmi la brume,

Tu portes mon sang, mon existence mi-folie, mi-raison.

En secret

Auprès d’une lune très grosse et inféconde,

En une toute minuscule fraction de seconde,

Lorsqu’apparaîtront les fantômes de la nuit,

Je vacillerai telle la flamme d’une bougie.

Pourtant, à l’aube seulement je m’endormirai,

D’un sommeil âpre, mais toujours trop léger.

Au réveil, hélas aux côtés d’une autre femme,

Le jour deviendrait insignifiant et sans âme.

Alors solitaire, je te verrai ma première amante,

Apparaître dans mes ténèbres flamboyantes,

Ton corps parfait, l’ombre de ton cœur blessé,

Les larmes qu’au matin, tu m’avais abandonnées.

Ainsi, indifférent, jetant ma vie aux quatre vents,

Dans ce temps qui ne m’appartient plus vraiment,

Errant dans l’inconnu, réfugié dans ma chrysalide,

J’aurai les yeux humides, je porterai un cœur avide.

Fuyant la douleur d’un passé et l’esprit en déroute,

Dorénavant juste vivant, je tenterais une autre route,

Mais nulle autre que toi ne peut porter mes cicatrices,

Car qui peut guérir la mémoire rompue au sacrifice ?

Trop tôt privé du fruit de nos deux sangs entremêlés,

Je suis devenu invisible imaginant ta gorge parfumée,

Ta chevelure entre mes doigts, indomptée et luxuriante,

Qui fleurait bon le jasmin d’hiver et la rose Amaranthe21.

Dans le reflet de ton regard, jadis se révélait mon âme,

Tes yeux me faisaient la cour, tu étais ma belle, ma femme,

Aujourd’hui, dans un jeu d’ombres folles et indiscrètes,

Mon existence se déconstruit, j’en accepte la défaite.

Je veux à nouveau sentir tes griffes douces ou bien féroces,

Le contour de ta chair aguichante au jour de nos tendres noces,

Dévorer tes lèvres, me contant le futur qui ne m’appartient pas,

Vivre par toi et pour toi, vieillir dans ton lit et dans tes bras.

Je sais qu’au plus profond de moi, je te retrouverai en secret,

Mais comment vaincre, ma toute belle, mon être aimé ?

Car tu restes l’absente, je ne peux plus effleurer ta main,

Viens remonter mon cœur, redonne-moi le goût du miel et du vin !

En souvenir d’avant

Vacillaient peu à peu issues du ciel,

De grosses traînées de gouttes de pluie,

De feu de paille, il y a plus de vingt ans,

Ses cheveux à présent viraient à l’or pâle.

Mes poings avidement avaient frappé,

Au sein mourant des perles de rocailles,

Célébrant l’amour sacrifié enfin revenu,

Le souvenir m’avait ainsi guidé vers lui.

Par-dessus l’horizon, j’avais cheminé,

Jusqu’aux marches menant au destin,

Puis, avec une lenteur quasi irréelle,

Sa nuque blonde et bouclée était tombée.

Dans ce nouveau berceau d’allégresse,

Où tous les deux, nous étions abrités,

Sur nos têtes, une voûte de lys blancs,

Se mêlait aux senteurs d’encre de nuit.

Dans notre gorge le nectar du raisin,

Son cœur battant tout comme le mien,

Je pouvais le sentir cet oiseau palpitant,

Au creux de ma main, contre mon sein.

Sa bouche plus légère qu’une plume d’air,

Embrasait ma chair, autrefois suffocante,

Sur mon corps, le souffle de son parfum,

Je sublimais ce cœur désormais tout neuf.

Enlacés

De toute éternité, à cet instant précis, je réalise,

Qu’aujourd’hui, à tout jamais la mémoire existe,

De nos paupières chargées de pure mélancolie,

De nos regards flirtant et fleurant bon l’amour.

Et quand nos deux mains jointes auront bâti un foyer,

S’effacera de notre cœur le sang de nos veines bleues,

Et les rides de joie sur nos visages aux traits épuisés,

Se disperseront en éclats de rire dans l’univers glacé.

À chaque nouveau siècle qui chassera le précédent,

Le cri de mon grand amour, à l’aune de mon départ,

Restera dans le temps, comme nos tout derniers mots,

Avec l’amour de l’homme qui avait déniché mon âme.

Hélas, mille fois perdue, sa main sur mon drap ivoire,

Bien souvent, elle venait glisser sous ma tendre peau,

Elle accompagnait sur mon giron, la rivière nacrée,

Qui dégringolait en petits cliquetis de perles froides.

Sur la colline aux soldats, ainsi ne régnera que le silence,

À l’endroit même où jadis j’enlaçais sa stèle de pierre,

Notre âme redeviendra pieuse et presque repentante,

Nos souvenirs réfugiés dans la rumeur des jours.

Ici, désormais, sous l’attraction du fin disque d’opale,

Vivra un couple de vieux chênes, au front haut et gris,

Le tronc enterré très près de nos cendres sous le marbre,

Il sera comme nous étions, forts et intimement enlacés.

Fleur d’amour

Sous la sagesse des plis de son corsage,

Son cœur s’anime lorsque je l’étreins,

Ses mains s’ouvrent comme l’ostensoir22

J’y abandonne mon âme et mon destin.

Mi ombre, mi-enchanteresse dissimulée,

C’est une créature étrange et indéfinie,

Ma fleur d’hiver aux lèvres pourprées23,

Est « ruisseau » de mes yeux, l’air de ma vie.

Jadis désunis, le temps d’un point-virgule,

Je n’y pouvais rien, son amour était mien,

À présent, à chaque heure que je bouscule,

Je m’endors paisiblement contre son sein.

Ses yeux papillonnent à la venue des songes,

Dans cette clarté monotone d’un demi-jour,

Le ciel bleu de nuit s’ouvre sur le monde,

Il protège son être autrefois privé d’amour.

Maintenant et à jamais, sur le fil de sa mémoire,

Je lui souffle un baiser, une mélodie murmurée,

Sur sa joue poudrée, à la lisière de ses paupières,

Les astres brillent, tournent autour d’une lune noire.

L’unique témoin est un beau et grand silence,

Parler devient inutile, ma voix reste éteinte,

À l’horizon gracieux et tellement immense,

J’offre l’offense, mes mensonges et mes craintes.

Il était un jour

Il était un jour où tu n’étais que mien,

Avec des mots poètes, en alexandrins,

Tu m’accueillais au premier matin.

Il était un jour où sous mon corsage,

Mon cœur n’était guidé que par le courage,

Et notre temps alors n’avait plus vraiment d’âge.

Il était un jour où mon corps était à terre,

Ma voix hurlant dans le bruit du tonnerre,

Soufflait son brasier de peine et de colère.

Il était un jour, où près de moi, très sage,

Tu me contais l’histoire du futur voyage,

Dans mon époque, dans ma propre page.

Mais, à présent, je sais que tout a changé,

Et si j’ai fait un rêve, si je t’ai croisé cette nuit,

C’est que l’espoir m’est à nouveau permis.

Mes rides et mes larmes en valaient la peine,

Car j’ai rêvé que ma vie n’était pas vaine,

Que tu n’étais pas tombé, mort sur la plaine.

De notre petite enfant, j’étais la mère si comblée,

Que j’ai rêvé d’un dieu indulgent qui te sauvait,

Mes rêves insensés ne pouvaient alors que se réaliser.

J’aurai sans doute des comptes à rendre un de ces jours,

Pour le cœur valeureux, pour celui que je désirais toujours,

Pour un vin entamé, pour ma plus belle histoire d’amour.

Entourés tous les deux par la meute des hommes au-dehors,

Il sera pourtant là, au moment où le ciel de l’automne s’endort,

Pour une nouvelle première nuit que je passerai contre son corps.

Et avant même que le cri de l’orage n’inonde mes oreilles,

Mon dernier amour comblera mes rêves de ses merveilles,

Réparant mon cœur au passage tout juste sorti du sommeil.

Alors, j’ai rêvé que ma vie ne serait plus cet enfer d’ici,

Que nous passerions ensemble ce qui nous reste de vie,

J’y pense si souvent que j’en tremble et mon cœur aussi.

L’anneau de sang

À l’aube de mes justes noces impures et infidèles,

Dans ma robe de promise, j’avais le buste adonisé24,

Sous un ciel limpide, en marche vers la petite église,

J’accaparais tout le soleil, en cette heure d’éternité.

Sur mes cheveux, point de couronne de mariée,

Ni de boutonnière fleurie sur sa poitrine robuste,

Mais un large plaid de cérémonie sur son épaule,

Une rapière 25dans un fourreau posé sur sa hanche.

Près de la veine du poignet qui palpitait furieusement,

Dans sa main, scintillait l’anneau d’union et de sang,

Comme enveloppée par la brume, sous l’œil du Divin,

Se scellerait le temps d’un amour dont je me languirai.

Trois fois hélas, ultimes soupirs d’un amour déchiré,

Aujourd’hui, je vis, mais en vain et bien moins fort,

Je ne pleure pas, la couleur de mes larmes est invisible,

Sans l’ivresse de ses lèvres pourpres, je deviens muette.

C’était hier je crois, quand sous forme de gouttes de pluie,

Les siennes sont venues fondre avec la buée de mes carreaux,

Dehors, envahi de joyeux volatiles fleuretant et muguetant26,

Mon jardin avait perdu de son parfum doux et entêtant.

Là-haut, deux inséparables, deux grands albatros hurleurs27,

Cherchaient à s’aimer dans un tourbillon de sarabandes28,

Le mâle me rappelait un peu le mien, noble faiseur d’amour,

Celui dont la mèche lui caressait le front dans un souffle d’or.

Ah, si seulement, j’étais « aile » pour m’éloigner de cette terre !

Ainsi, protégée d’une vieille lune, le vent m’aurait ainsi déposée,

Tout au creux de lui comme un oisillon réfugié dans son nid,

Alors, enfin, j’aurai pu croire encore à la tiédeur de son corps.

L’espoir du soupirant

Ce n’est pas vous faire offense, ma tendre Dame,

Que de venir vous faire l’offrande de ma flamme !

Alors, soyez à moi, courrez, venez vite me secourir,

Je vous aime comme à vingt ans, je vous admire.

Votre être, votre corps de solitude deviendront les miens,

D’un feu d’incertitude, je bâtirai votre vie, votre destin.

Je serai votre armure, cette ombre qui se fond dans le noir,

La force et parfois la faiblesse dans l’horreur et le désespoir.

Nul autre que moi, je le sais, ne peut vous espérer davantage,

Et aucune autre que vous ne peut exister, embellir mon paysage.

En dehors du chemin, je vous perdrai, mais je vous retrouverai,

Dans l’avenir peut-être ou bien même dans le cercle du passé.

Mon âme tout entière, mes mains à jamais seront les vôtres,

L’otage de vos yeux, le disciple, le cœur partagé et l’apôtre.

Faites de moi un homme, épousez mon anneau de bronze,

C’est celui de l’amour fou des derniers amants du monde.

L’étreinte forcée

Au jardin, le jasmin se fait compagnon de la vigne vierge,

Sur des pétioles29 nés de feuilles orphelines et avortées,

Escalade une parure de baies sauvages, noires bleutées,

De sa fragrance fruitée et mielleuse, déjà il me submerge.

Pareils à des petits gris30, à la coque luisante et colorée,

Elles se rétractent, puis elles vrillent sur elles-mêmes,

Dans le bruit blanc et sec des variations qui sont miennes,

J’entends le souffle des combes31, celui des vallons agités.

À la nuit rouge, avant l’aube dorée où le jour se farde,

Étourdie de sommeil, ivre de liqueur et de vin fou,

Il court, il luit sous ma peau, dans les veines de mon cou,

Le cœur du délit qui se fracasse et qui bat la chamade.

Mais la lune est grise, mon esprit s’égare et il divague,

Broyée par le dernier souvenir, par l’ultime au revoir,

Au-delà de nous, de nos regards obscurs et hagards,

Nul amour n’écorche nos lèvres étrangères et fades.

Mais, à âmes égales, nos os nous soutiennent encore,

Roulant dans la cavité grenat de nos cœurs creux,

Brûlent les images privées du feu de l’amoureux,

Passent les larmes chauffant le froid de nos corps.

J’aspire au désir délétère32, à rejoindre le néant de l’hôte,

Il s’insinue sous la soie grège recouvrant mon corps fou,