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Quand le passé refait surface, l’avenir est en jeu. Pierre, citadin attaché à ses racines, voit sa vie bouleversée par la perte de son père. Il quitte la France pour la Martinique, où il découvre que l’histoire de sa famille cache des secrets liés à la fortune de son grand-père. Avec l’aide de Julie, son amie de confiance, il entreprend une quête pour révéler une vérité qui pourrait bien bouleverser leur destin. Jusqu’où iront-ils pour lever le voile sur un héritage potentiellement destructeur ?
À PROPOS DE L'AUTRICE
Anne-Marie Tauleigne considère l’écriture comme un vecteur essentiel pour transmettre un héritage précieux aux générations futures. Dans son premier ouvrage, "Les liens bafoués", elle examine avec subtilité la notion d’héritage tout en explorant les dynamiques complexes de l’amitié entre un garçon et une fille.
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Seitenzahl: 120
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Anne-Marie Tauleigne
Les liens bafoués
Roman
© Lys Bleu Éditions – Anne-Marie Tauleigne
ISBN : 979-10-422-4546-7
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Julie avance d’un pas alerte dans la petite ruelle de Saint-Guilhem-le-Désert, pittoresque village touristique de l’Hérault où affluent les touristes dès les beaux jours. Le vent lui fouette le visage, pas plus de 5° à 19 h, et la nuit a déjà fait son apparition. Elle jette un rapide coup d’œil autour d’elle, pas âme qui vive à l’horizon. Son cœur se serre à l’idée qu’un inconnu pourrait sortir de l’embrasure d’une porte cochère et l’accoster. Elle pourrait hurler, se débattre sans que personne ne l’entende. Des images tout juste sorties de son imagination l’assaillent et lui font presser encore un peu plus le pas. Plus que quelques mètres et elle sera chez elle dans son petit cocon ; maison héritée de sa grand-mère maternelle, aménagée avec goût, dans un confort simple, mais douillet, qui allie charme d’antan et style contemporain. La maison offre, en rez-de-chaussée, un bel espace de vie lumineux qui donne sur un petit jardin clos en vieilles pierres du pays et, à l’étage, une grande chambre parentale avec une porte-fenêtre ouvrant sur un balconnet qui surplombe le ruisseau. La journée, le soleil inonde l’habitation exposée plein sud. C’est un véritable havre de paix qu’elle apprécie par-dessus tout ; mais voilà, son côté peureux refait surface à chaque fois que l’hiver pointe son nez et que le village se vide de ses touristes et habitants saisonniers.
De mars à décembre, elle travaille dans la boutique de vente de cristaux sur la place à l’entrée du village. Elle y adore l’ambiance et se plaît à renseigner les acheteurs novices et les curieux sur les bienfaits de ces pierres toutes aussi belles les unes que les autres. Travailler ici avait été une véritable aubaine lorsqu’elle décida de s’installer définitivement dans le village en 2020, abandonnant ses études d’avocat à l’âge de 22 ans ; et d’une boutique vieillissante et poussiéreuse, elle en avait fait un véritable petit joyau. Son propriétaire, Georges, qui avait parcouru le monde entier pour aller chercher jusque dans les mines les cristaux et pierres semi-précieuses, envisageait de prendre un peu de repos bien mérité. Georges était une source intarissable de ce monde minéral et elle se délectait de ses paroles quand il racontait ses périples dans des contrées lointaines, la genèse des pierres, leurs propriétés et comment elles pouvaient agir sur le corps humain ou en protection. Depuis, elle n’avait de cesse de vouloir se perfectionner, elle adorait s’en servir lors de ses méditations et des expériences parfois étonnantes en découlaient.
Ça y est, la voilà arrivée. Elle presse l’interrupteur et une lumière douce illumine la pièce. Elle souffle un bon coup pour évacuer tout le stress qui l’avait assailli quand elle entend toquer à la porte.
Prise au dépourvu, elle venait de dire n’importe quoi de complètement irréaliste puisqu’elle venait tout juste de franchir le seuil de l’entrée.
Elle tend l’oreille et entend les pas qui s’éloignent, elle ouvre la porte et saisit rapidement le foulard de soie aux couleurs chatoyantes qui avait appartenu à Marie, sa grand-mère, et dont elle ne pouvait se séparer.
Entre la grand-mère et la petite fille, des liens étroits s’étaient créés à la mort de ses parents survenue alors qu’elle avait 18 ans la laissant sans autre famille qu’elle. Mais la relation entre elles était déjà bien installée par la fréquence des séjours de Julie passés à Saint-Guilhem depuis sa plus tendre enfance. La plupart des week-ends et toutes les vacances, Julie était là, à arpenter les ruelles, elle en connaissait tous les recoins, tous les détours. Adolescente, c’étaient les chemins d’excursion qui partent du village qu’elle empruntait avec enthousiasme, au début avec sa famille, puis, plus tard, avec des camarades de son âge qu’elle retrouvait l’été ; il y avait tout d’abord Patrick toujours enthousiaste et farceur, Benjamin plutôt timide, Caroline l’espiègle de la bande et Lina la sagesse incarnée. Combien de fois avaient-ils pris le chemin du château en se faisant des blagues inspirées de la légende…
Elle referme à double tour et se laisse glisser sur le sol pour reprendre ses esprits ; encore toute tremblotante à l’idée que cet homme, dont elle a vu son ombre s’engouffrer dans la maison, un peu plus loin, l’avait certainement suivi.
Qui est-il ?
Pourquoi ne l’avoir jamais croisé ?
Quelle âme peut bien venir se perdre dans un village complètement fantôme à cette époque de l’année ?
Que de questions qui l’assaillent sans en avoir, en retour, les réponses.
Après avoir repris ses esprits, elle se relève lentement, se prépare une collation et s’assoit sur le confortable canapé en cuir blanc. Elle ferme un instant les yeux et repense à la journée éprouvante qu’elle venait de vivre.
Ça a commencé le matin par la crevaison du pneu de sa voiture alors qu’elle était en route vers Aniane où elle avait décroché un job temporaire comme serveuse dans la petite brasserie du village. Fort heureusement, un homme d’une trentaine d’années, à l’allure sportive, s’était arrêté et lui avait apporté son aide. Son sourire chaleureux et sa bonne humeur lui avaient fait oublier cet incident. Lors du service de midi, elle avait dû faire face à un drôle de loubard qui n’avait pas arrêté de lui décocher des regards insistants accompagnés de paroles lourdes de sens qui l’avaient mise mal à l’aise. Et comble de la journée, son patron lui avait demandé si elle ne pouvait pas, exceptionnellement, assurer le service jusqu’à 18 heures, car Emilie, l’autre serveuse, serait en retard. Elle n’avait pu refuser, malgré qu’elle allât rentrer de nuit.
Elle secoue la tête comme pour chasser ses idées désagréables et ouvre les yeux. Son regard se fixe de stupeur en voyant assise en face d’elle, sur le rocking-chair, Marie qui la regarde et lui sourit, puis disparaît. Surprise, Julie se demande pourquoi cette apparition. Depuis son décès, elle s’était invitée plusieurs fois dans ses rêves toujours avec douceur et bienveillance, mais jamais en apparition ; pourquoi aujourd’hui ?
Julie se lève et se dirige vers sa chambre, « mieux vaut aller se coucher », pense-t-elle.
Elle prend une rapide douche et s’engouffre dans les draps soyeux au parfum subtil de lavande.
« Demain sera un autre jour », se dit-elle avant de s’endormir.
Le soleil n’a pas encore fait son apparition quand Julie descend prendre son petit déjeuner, elle ouvre les volets et quelle surprise, de gros flocons de neige virevoltent et s’écrasent sur l’épais tapis blanc qui recouvre déjà le sol. Heureusement, elle ne travaille pas aujourd’hui, c’est le jour de fermeture de la brasserie. Elle ira toutefois voir Georges qui commence à préparer l’ouverture du magasin qui aura lieu dans deux semaines. Après avoir avalé à la hâte une tasse de chicorée, elle décide de faire un peu de ménage avant de sortir. C’est vers dix heures qu’elle prend sa pelle dans la cave voûtée qui jouxte la maison pour déblayer l’épais manteau blanc. Active dans ses mouvements de pelles, elle n’aperçoit pas l’homme qui s’avance vers elle d’un pas alerte.
Elle sursaute en reconnaissant la voix d’hier soir et tourne la tête vers lui.
Elle le regarde s’éloigner quand elle lui crie sans réfléchir.
Ça y est, le déblaiement est terminé, elle pose sa pelle et commence sa marche périlleuse vers la place du village, ses pieds s’enfoncent d’une dizaine de centimètres dans la poudreuse ; jamais elle n’aurait pensé qu’il en tombe autant ici et à cette époque de l’année, mais ce changement climatique éphémère la rend joyeuse et c’est en souriant qu’elle se présente devant Georges en train de déballer ses dernières trouvailles.
La matinée se passe dans la bonne humeur quand Julie aperçoit Pierre venir vers eux.
Georges relève la tête.
La journée se passe dans une ambiance bon enfant et du temps que Julie s’attaque au ménage, Pierre aide Georges à déplacer les lourdes caisses remplies des pierres nouvellement acquises.
La journée terminée, tout en remontant la ruelle qui les mène vers leurs chez-soi respectifs, Julie et Pierre se remémorent gaiement la tête de Georges quand il vit Pierre, du cri strident de Julie surprise par l’énorme Gecko qui avait élu domicile dans la boutique, des batailles de boules de neige et des blagues bon enfant qui avaient agrémenté cette belle journée.
En vingt-quatre heures à peine, ils étaient devenus les meilleurs amis du monde.
Pierre, comme chaque soir, ouvre son ordinateur pour communiquer par WhatsApp avec son père et découvre dans ses mails un étrange message.
« Pierre, s’il te plaît, peux-tu rentrer au plus vite. Signé papa. »
Pierre laisse un rapide message à Julie qu’il glisse sous la porte.
« Désolé, obligé de partir, j’espère revenir très bientôt. Signé Pierre. »
Pierre prend le premier avion pour rallier la Martinique au plus vite, le message laissé par son père l’inquiète d’autant qu’il n’a pu le joindre par téléphone.
Pierre récupère ses bagages et s’élance vers l’extérieur de l’aéroport pour prendre un taxi.
Les courses vers Les Trois Îlets, où se concentrent les plus belles résidences de l’île, augurent toujours de très bons pourboires et le taximan est ravi d’avoir hérité d’une telle course.
Le trajet est long, mais Pierre arrive enfin au domicile patriarcal, il gravit rapidement les marches du perron laissant le chauffeur remettre les bagages aux domestiques qui s’étaient précipités.
Il embrasse chaleureusement Amami, aux services de la maison depuis de longues années.
Elle lui montre des yeux le chemin de la chambre sans dire mot.
Pierre monte quatre à quatre les escaliers et toque à la porte.