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De Guy de Maupassant, on connaît La Maison Tellier et d'autres textes assez lestes. Mais ses écrits érotiques méritent d'être redécouverts. Ce volume rassemble une pièce "absolument lubrique" (selon son auteur), À la Feuille de rose, Maison turque, des poèmes extraits du Parnasse satyrique et le recueil Des vers, dont certaines pièces furent poursuivies par la justice. À la Feuille de rose a pour cadre une maison close. Afin de duper un couple de bourgeois normands, le lieu a été déguisé en hôtel hébergeant un harem turc. Madame y découvre des plaisirs variés, au fil de dialogues cocasses et de scènes très libres. L'idée venait de Flaubert, qui aurait ri à gorge déployée en assistant à la pièce aux côtés d'Émile Zola et d'Edmond de Goncourt et la commenta par un "c'est très frais" ! Longtemps ignorée, la poésie érotique de Maupassant nous réserve également des surprises : certains poèmes semblent bien chastes, alors que d'autres, comme le simplement nommé 69, sont d'une grivoiserie très explicite. C'est donc avec le sourire que l'on lira ce vrai Maupassant des bordels.
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Seitenzahl: 36
Veröffentlichungsjahr: 2018
Miché
maquereau
Crête de Coq
garçon de bordel
Monsieur Beauflanquet
Maire de Conville
Madame Beauflanquet
Mairesse de Conville
Léon
amoureux de Madame Beauflanquet
Raphaële – Fatma – Blondinette
Employées du bordel
Un capitaine retraité, un jeune homme, un sapeur, un Marseillais, un Anglais.
La scène se passe à Paris de nos jours
dans un salon de bordel.
Un salon, tenture d’Orient, trois portes au fond,
divans à droite et à gauche.
Eh bien ! Crête de Coq, tout est-il prêt ?
Oui, Monsieur.
Allons, dépêchons, dépêchons, il ne faut pas perdre une flanelle, les affaires ne vont déjà pas si bien.
Monsieur, on vient d’apporter vos nouvelles réclames.
(Il lui donne un paquet.)
(lisant) Ah ! bien, il faudra tâcher d’en distribuer discrètement.
Comptez sur moi, Monsieur.
Voyons ça (il lit) « À la feuille de Rose, maison turque, salons et cabinets meublés. »
Bien meublés.
(lisant) « Société choisie, sécurité, petits soins et discrétion. Cette maison organisée sur un pied tout nouveau à l’instar de la Turquie, se recommande tout particulièrement à l’attention du high life. On emploie toutes les langues. »
C’est pas bête, ça. Vous avez eu là une fière idée, patron.
J’ai habillé mes femmes en turques. Voilà !
Une maison turque, on ne trouve pas ça tous les jours, et puis le bourgeois, c’est friand des turques.
Sans cela, ma foi, je ne sais pas comment je m’en serais tiré.
Vous n’avez que trois femmes dans la maison.
Une qui a perdu ses dominos.
L’autre qui tue les mouches et renverse les visiteurs.
Il n’y a plus que Raphaële de présentable.
(soupirant) Ah ! Raphaële, aussi elle a été au poste toute la semaine.
As-tu fini ?
Si vous croyez que c’est agréable de voir la femme qu’on aime...
Tout ça c’est des bêtises, tu veux prendre ma suite, n’est-ce pas ? Eh bien, faut pas risquer à perdre ta situation par des sensibleries. Allons, je vais voir si elles s’habillent là-haut.
(Il sort.)
(seul) Raphaële ! (il brosse le canapé.) Allons bon, encore une tache que je n’avais pas vue (il prend une cuvette sur le canapé et frotte la tache.) Ah ! putains ! Va, elles pourraient pourtant bien faire attention. En voilà une qui ne s’est pas servie de capote. Mais, c’est vrai en ai-je pour ce soir ? (il ouvre un tiroir et en sort une poignée de capotes.) Trois heures (il compte doucement) une, deux, trois (il en trouve une pleine de sang.) Ah ! je ne pourrai jamais nettoyer celle-là, six... sept,... dix, huit... En voilà une crevée.
(Il l’examine et souffle dedans.)
Ah malheur !... si elle a servi à Blondinette, en voilà un de pincé.
(Il souffle dans une autre.)
Ah ! celle là pourra resservir. Je crois que ce sera la dernière fois par exemple. Allons, nettoie, lave, brosse, frotte, savonne. Qui l’eut dit il y a cinq ans lorsque j’étais au séminaire. Ah ! misérable créature, qu’as-tu fait de moi ! Pourquoi le Ciel a-t-il voulu que je rencontrasse cette maudite petite blanchisseuse qui repassait alors mes surplis, et, grâce à laquelle j’en suis réduit maintenant à repasser des capotes. Sale métier, va ! les femmes, jusqu’où nous font-elles tomber !... Je ne pourrai jamais détacher celle là. Il est vrai qu’elle est encore plus bas que moi. Ah ! Raphaële, elle vit là dedans, sans remords et sans regret du passé. Et je l’aime toujours pourtant... En voilà une que j’ai oubliée. J’ai des distractions aujourd’hui. Malheureux Crête de Coq ! Elles m’ont nommé Crête de Coq, les gueuses. S’appeler Crête de Coq, quand je devrais aujourd’hui m’appeler l’Abbé Lecoq ! Ah ! les femmes, les femmes !