Dans les yeux de Minnà - Angela Battistini-Coti - E-Book

Dans les yeux de Minnà E-Book

Angela Battistini-Coti

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Beschreibung

Découvrez seize contes ou scénettes qui vous ramènent en enfance...

Avis à toi, lecteur ! Quel héritage léguer à nos enfants, petits et grands ? Quand la terre se déglingue, quand les climats s’affolent, quand les hommes dans leur aliénation s’entêtent, et quand tous nos petits devront quitter, un jour, ce qu’on leur a labor-i-eusement bâti, alors, que leur restera-t-il ? La parole, comme un souffle, qui leur porte notre amour, quelques petits cailloux poucets qu’ils pourront ramasser, et un regard espiègle et tendre, pour les accompagner de bons conseils ! Minnà, c’est ta grand-mère, prévenante, conciliante, irrémédiablement aimante, qui toujours t’appartient. Elle est aussi une maman dévouée, malmenée, parfois joyeuse, souvent saignante. Bien avant, elle était cette jeune femme vibrante et enthousiaste, cette jeune fille radieuse et vive, cette fillette enjouée et rêveuse, et ce bébé joufflu et bien dodu. Le tout te dessine la Vie, une étincelle que tu peux saisir pour t’éclairer, ou encore piétiner. A ton aise !

La littérature, les contes et les histoires nous permettent de nous rattacher à un passé révolu, à des souvenirs et à des anciens rêves. Cette occasion nous est donnée par Angela Battistini-Coti grâce à son recueil de scénettes attendrissantes.

EXTRAIT

On dit volontiers que les cousins et les cousines sont les premiers amis. Ils partagent leurs souvenirs d’enfance, leurs fous rires, leurs bêtises et leurs rêves accrochés à leurs branches sur le seul et même arbre qu’ils ne pourront jamais couper !
Car le bonheur, c’est une cousine qui sera comme une sœur sur un bel arbre à papillons !
Parfumé, florifère, généreux, il enchantera, tout au long de leurs étés, leurs sommeils de pleines panicules de lilas colorés !

À PROPOS DE L'AUTEUR

Angela Battistini-Coti est née en 1956 à Ajaccio, en Corse. Après une carrière de professeure de Lettres à Paris, en Corse, et à l’étranger, elle entame, dans ce recueil, de cocasses, poétiques et savoureuses causeries intergénérationnelles, pour les grands et les petits.

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Angela Battistini-Coti

Dans les yeux de Minnà

2019

1 Âne qui pisse dans l’oreille d’un rat

Décembre 2018

Dans ma prairie, à Baracci, il y a un âne qui braie à tous vents, tout le temps. Peut-être a-t-il un problème de digestion…

Pourtant, l’herbe est bien grasse dans ma prairie, juste quelques fois la mer, quand elle est lasse, y vient et s’y prélasse, l’hiver surtout, après tempête. Car ma prairie s’étend le long de l’embouchure du Baracci, un torrent qui descend les gorges rouges des Martini.

Chaque matin, je rends visite à mon âne : je lui donne un câlin, deux carottes, et une tapette sous l’encolure.

Il s’ébroue, donne deux coups de rein, braie et revient tout gentil, le regard humide et doux, renifler ma poche, par à-coups.

J’aime mon âne. Je l’ai prénommé Trissotin : à ses heures, il joue au poète et tisse ses braiements d’épouvantables « hi-han ! » fort amusants et terriblement pédants.

Il aime vaquer à ses affaires par sauts et gambades tandis qu’à côté, je me gave de figues à la gorge bien ouverte, cueillies sur l’arbre, blanches ou noires, selon. Ce sont les blanches, mes préférées, douces, sucrées et moelleuses à souhait.

Mon âne me regarde et, à cheval sur le tronc tortueux du vieux figuier, je lui lance mon cri d’animal : « Té ! Té ! »

Alors, baissant ses joues pour renifler l’odeur fraîche des herbes, le voilà qui pisse et envoie un puissant jet jaunâtre tout fumant et à l’odeur âcre.

Un rat des champs se tenait là, l’oreille tendue et en alerte. Il grignotait, y mettant tout son cœur, avec force frénésie, une prune bien mûre qui pourrissait déjà. Le jet bouillant d’urine brune remplit en moult giclures et jusqu’à la lie, l’oreille en calice cornu du rat pacifique, à moitié défaillant.

« Tsi ! Tsi ! Tsi ! » s’étrangle à demi noyé le pauvre animal, sautant d’un pas sur le côté pour reprendre haleine et s’ébrouer avec vigueur de cette douche pisseuse et impromptue.

Levant les yeux, éberlué, il voit comme sur un écran géant un dentier éclatant de blancheur : Clac ! Clac ! Clac ! celui de mon âne, hilare, et qui ruait de rire.

Qu’à cela ne tienne, notre rat dignement remet sa vengeance à plus tard, confiant qu’il est en sa cervelle aux trente-et-un-mille neurones hautement connectés, cinquante-cinq couches de cellules communicantes entre elles et deux-cent-sept différents sous-types de neurones en réseau. Il était certain d’être en capacité de gérer à son avantage leur flux électrique exceptionnel.

Le rongeur dépité et haineux s’éclipsa le plus dignement qu’il pût, laissant le baudet herbivore à longues oreilles, tranquille, consommer goulûment le plus paisiblement du monde ronces, jeunes pousses d’arbustes, et autres chardons.

L’occasion ne se fit point attendre. Une nuit que, bien repus, il dormait profondément, le rongeur rancunier harangue ses semblables, les ameute si bien, qu’ensemble, en meute, ils l’attaquent rageurs, depuis sa queue touffue jusqu’à son humide et tendre museau. Pauvre bête effarée ! Péniblement, l’âne se redresse, tape l’air de ses sabots, s’ébroue, cabre l’échine : rien à faire, les teigneux aux canines acérées n’en démordent pas. Pourtant, l’âne têtu ne se soumet point, ayant depuis toujours et pour tout dire, horreur particulière des despotes querelleurs.

Mais avant de se lancer à l’aventure la tête nue, il flaire, tâte délicatement du sabot, gratte avec son antérieur le sol pour en vérifier la texture, évalue ses chances de fuite avec attention et prudence, tournicote et s’agite pour se gratter les flancs et le dos. Cerné de toutes parts, seul contre tous, que faire ?

Il se secoue, s’ébroue, et puis se roule comme s’il voulait prendre une douche !

Ce « bon à tout faire » depuis plus de trois-mille ans vise alors un reflet dans la nuit : c’est la lunette que mon Missia, tapi dans l’abri de jardin, utilise pour viser, en poste, les sangliers. Mon âne n’est pas bête ! À petits pas meurtris, il s’approche de la maisonnette, et, quand il est tout près, lance un cri puissant et si strident qu’il déchire la nuit. Missia bondit de sa cachette, en un temps trois mouvements, pointe sur le baudet un jet d’eau si fort qu’il asperge le tout, dispersant les rats toujours prompts à quitter les premiers leur navire, délivrant ainsi le pauvre être !

C’est qu’il est affectueux, mon bourricot, il demande de la tendresse, il se contente de peu et, s’il dérange parfois, c’est sans le faire exprès.

Mais, sachez-le, il a une excellente mémoire : il saura toujours reconnaître l’engeance des rats belliqueux et, s’il le peut, tout en ruminant son avoine, il s’affaissera dessus, prenant son temps, et lui pètera au nez, pour l’étouffer.

Tout le monde ne peut pas savoir que l’amour seul fait danser mon âne !

Et finalement, nul ne sait mieux que l’âne où le bât blesse… D’ailleurs, ce n’est pas le singe ou le tigre que je crains dans l’homme, mais c’est l’âne !

2 Beau front, beaux yeux…

Janvier 2019

Chante, chante, mon beau soleil qui résiste à la froidure

Sous le ciel bleu la terre est dure

Et la gelée sous nos pieds se transforme en miroirs silencieusement dorés

Qui nous éclairent les sentiers.

« Missia, Missia, ne vois-tu rien venir ? »

La fée du logis s’ennuie. Elle attend la visite du petit qui tarde un peu à venir.

Beau front,

Jolis yeux,

Nez charmant,

Menton saillant,

Guili-guili-guilis…Le jour s’étire encore un peu. Désert dans les rues. Les derniers rayons illuminent encore le haut des bâtiments et la lumière pleine d’espoir dans le givre d’hiver ravive tout ce qui pourrait être triste mais ne l’est pas.

« Missia, Missia, ne vois-tu rien venir ? »

Dehors, je n’entends pas un bruit. Et ce froid, ce froid, solide et dur comme un étain !

Où sont la fleur exquise qui frémissait au vent,

Et ces yeux pétillants, ou rieurs, des vrais petits bonheurs ?

Voici un quart de siècle, nous étions jeunes et beaux,

Nous marchions en riant, nous allions de l’avant,

Nous étions amoureux

Nous étions amoureux…

Et les yeux dans les yeux.

Puis la routine qui prend le pas

Sur tout,

Qui épuise et effrite, sans bruit, tout doucement, à petits pas…

Beau Front,

Beaux yeux,

Joli nez,

Bouche d’argent,

Menton fleuri,

Guili-guili-guilis…

Vois, ma main caresse doucement tes cheveux.

- « Missia, Missia, ne vois-tu rien venir ? »

Je veux du bruit et des couleurs

Du mouvement, de jolies fleurs,

Des rires en pluie de graines

Des enfants joyeux à la pelle…

Je veux courir et respirer à pleins poumons

Enchanter les espaces et les monts

Poursuivre les papillons

Siffler comme un pinson…

Si la terre peut encore donner

Si l’océan peut encore vibrer

Missia, ensemble, enfilons une à une les merveilles du monde

Pour offrir leurs grenades sucrées

Au bel enfant du bois charmant.

Pour lui, tu as planté l’olivier et la vigne

Un jour, il cueillera ses grappes pleines

Pour, à la lune, sucer les grains violets

Et qui vivra verra…

Beau front,

Jolis yeux,

Petit nez charmant,

Bouche d’argent

Beau cœur d’enfant,

Guili-guili-guilis…