Je t'ai rêvée - Tome 3 - Eva B. - E-Book

Je t'ai rêvée - Tome 3 E-Book

Eva B.

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Beschreibung

Alors que le quotidien des trois amis reprend doucement son cours, d'autres difficultés semblent se profiler à l'horizon...

Dans ce troisième tome, nous retrouvons Yohann, Greg et Lena plus soudés que jamais par le drame qu’ils ont vécu. Lena est sortie du coma, mais il lui reste un grand travail de rééducation à surmonter. Greg continue à courir de bras en bras, mais il revient toujours inlassablement vers Emily, son seul véritable amour, malgré les avertissements de Yohann. Quant à ce dernier, il rêve d’un enfant avec sa belle Rachel…

Après tant de drames, Yohann, Greg et Lena seraient-ils à l'aube d'une nouvelle vie ? Découvrez sans plus attendre le troisième tome d'une saga de romance à couper le souffle !

EXTRAIT

Je me revois rire avec Yohann pendant qu’il me raccompagnait au garage. J’avais prévu d’aller voir Emily, oui, j’avais envie de passer la soirée avec elle. On était mal lui et moi avec l’histoire de Lena. On ne savait pas où elle était ni si elle allait bien. Je me souviens m’être dit que j’avais besoin des bras de Mily, parce je savais qu’auprès d’elle je m’apaiserai. Je pourrai retrouver les forces qui me manquaient et dont j’allais sûrement avoir besoin dans les jours à venir. J’ai mis du temps pour arriver sur le pont de la Tournelle, ça roulait mal. J’ai appelé Emily pour lui dire que je venais… Je lui ai demandé si elle voulait dîner dehors… Elle a dit… qu’elle n’en avait pas trop envie. J’ai mis de la musique et puis j’ai reçu un message de Théo. La photo de Lena, Quai aux fleurs. Je me rappelle avoir pilé d’un coup sec en la reconnaissant et avoir retiré mon téléphone de son support pour regarder la photo de plus près, mais Théo m’a appelé… Je ne sais plus où je suis à cet instant. Est-ce que j’ai repris la route ? Non, je ne sais plus.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Eva B. a toujours aimé lire et mûrissait depuis longtemps l’idée de passer du côté de l’écriture. Alors, quand la maternité dans laquelle elle travaillait a fermé ses portes, elle s’est dit que rien n’arrive par hasard, et elle a décidé de relever le défi d’écrire ! Ainsi naquit le premier tome de Je t’ai rêvée.

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Chapitre 1 Greg

Je lui ai juste demandé si elle était disponible ce soir.

Elle a répondu en me demandant si on pouvait dîner ensemble. Forcément.

Alors j’ai menti en disant que je bossais.

Je veux juste coucher avec Andréa, je ne veux rien d’autre et elle n’aura rien de plus.

J’accepte quand même d’aller boire un verre au Krakenavec elle. Je ne connais pas l’endroit, mais je sais qu’il a bonne réputation au niveau de la clientèle, mais aussi d’un point de vue musical.

Quand j’arrive à vingt et une heures trente, elle est déjà là et discute avec un gars. Ce que j’apprécie moyennement voire pas du tout, alors je prends la décision d’abréger rapidement les préliminaires mondains.

— Salut, dis-je en posant une main dans son dos, me présentant de face au gus qui me dévisage.

— Salut ! répond-elle les yeux pétillants ?

Elle me claque deux bises et s’excuse auprès du type en changeant de place pour m’accompagner. Le gars est défait et je ne peux m’empêcher de lui faire un clin d’œil en me retournant, alors qu’on part au bout du bar. Il me toise. Je jubile.

La musique très house est assez forte et nous devons vraiment parler fort pour nous entendre, ce qui m’exaspère. Je fais comprendre rapidement à Andréa que nous serions mieux ailleurs, mais elle semble bien ici et je dois me résoudre à patienter. C’est le prix si je veux arriver à mes fins ce soir. Elle me questionne dans tous les sens et là encore je n’approuve pas. Elle a beau être très mignonne et super bien gaulée, je ne passe pas un casting pour me marier avec elle. Il va falloir que je lui mette les points sur i avant qu’il y ait malentendu. Je dois cependant être malin et agir avec douceur si je ne veux pas qu’elle se braque. Je suis étonné, je pensais que ça irait plus vite dans la mesure où quand on s’est vus au Shot, elle avait été plutôt réceptive (voire entreprenante) et qu’elle m’a relancé plusieurs fois depuis.

Je décide de passer la vitesse supérieure et me rapproche d’elle en changeant de place pour m’asseoir à ses côtés.

— Andréa, je dois te dire que je te trouve vraiment très très jolie. On a dû te le dire souvent et je ne suis pas original, mais c’est la vérité, dis-je en penchant la tête vers elle.

— Merci, c’est gentil. Et non, on ne me le dit pas si souvent ! répond-elle en souriant.

Je passe un bras derrière elle et le pose sur le dossier de la banquette, prêt à ferrer la demoiselle.

— Greg, je peux te poser une question ? s’enquit-elle.

— Encore ? dis-je en rigolant. Vas-y, je t’écoute.

— Tu… tu es un mec sérieux ? Je veux dire, tu cherches la femme de ta vie ?

Je perds mon sourire en une fraction de seconde et me ferme comme une huître.

— Heu… qu’est-ce que tu veux dire par la femme de ma vie ? dis-je en fronçant les sourcils.

— Quelle drôle de question ! La femme avec qui tu vas te marier et avoir des enfants, tiens !

— Oh… alors ma réponse est non, dis-je en reprenant mon bras pour joindre mes mains devant moi sur la table.

— Tu as déjà signé un CDI, c’est ça ?

— Un quoi ?

— Un CDI. Dans ta vie privée, je veux dire, lance-t-elle en me regardant avec insistance, comme si je ne comprenais pas ce qu’elle me disait.

— Oui, j’en ai eu un et je n’en veux plus. J’ai donc eu LA femme de ma vie, si on ne doit en avoir qu’une !

— Pourquoi une seule ?

— Oui, c’est vrai ça… dis-je avec un sourire satanique, sachant très bien où je mène la discussion. Pourquoi une seule et pourquoi pas dix ? Vingt ? Ou même trente !

La pauvre Andréa comprend qu’elle s’est elle-même fourvoyée. Je suis adroit, je sais me servir des gens, de ce qu’ils disent et je sais habilement retourner leurs paroles pour les désavantager. Tant pis pour elle. C’est le coup classique et je gagne toujours.

Je la dévisage puis étudie ses lèvres longuement. Elle vire à l’écarlate. Mon charme opère.

— Donc tu vas juste vouloir coucher avec moi, c’est ça ?

Je fronce à nouveau les sourcils, l’air offensé.

— Ces mots ne sont pas très élégants dans une bouche aussi jolie, dis-je en fixant encore ses lèvres que j’ai très envie de mordre.

— Réponds quand même s’il te plaît, siffle-t-elle en baissant les yeux, visiblement contrariée.

— Bien sûr que j’en ai envie, je ne vais pas te mentir et je ne suis qu’un homme ! Comment pourrais-je ne pas avoir envie d’une femme comme toi ?

— Et si je dis oui, on se reverra ?

Je prends cette fois un air outré par sa question même si elle est ma foi très pertinente.

— Je ne comprends pas ta question, dis-je sèchement. Tu crois que je veux tirer mon coup et te jeter tout de suite après ? T’ignorer et faire comme si je ne te connaissais pas ? Je me sens vexé, Andréa… et si tu me penses comme ça, je crois que je ne vais pas rester. Oui… je vais te laisser, c’est mieux, dis-je en pinçant les lèvres et en secouant la tête, faussement dévasté.

— Non… attends, ce n’est pas ce que je voulais dire Greg, relance-t-elle gênée. C’est juste que… ça m’est arrivé déjà, alors…

— Alors, ne me compare pas à ces branquignols s’il te plaît ! C’est une insulte. Que crois-tu ? Que je me tape une nana par jour et que je tiens un tableau de chasse ? Écoute ma belle, je ne cherche pas à me caser parce que pour moi, c’est trop compliqué. Et puis honnêtement, ça changerait quoique je te dise oui ? Ce pourrait être vrai, mais on ne se connaît pas ! Comment savoir si on se convient toi et moi si on n’essaie rien ! Peut-être que c’est toi qui ne voudras pas me revoir !

Voilà. C’est verrouillé et je sais que dans peu de temps on sera sorti de cet endroit bruyant pour aller au calme et s’envoyer en l’air.

— Et si c’est le contraire ? Si je veux te revoir ? Si je tombe amoureuse ?

— Et pourquoi Andréa ? Tu veux souffrir ?

— Non évidemment, mais pourq…

— Alors ça n’arrivera pas. On y va ? dis-je en lui coupant la parole.

Je me lève en lui tendant une main pour l’aider à s’extirper de la banquette, puis la laisse passer devant pour rejoindre la sortie. J’en profite pour lorgner discrètement son derrière mis en valeur par son jean. Elle a un cul à tomber et je sais déjà ce qui va lui arriver. J’ai déjà un scénario tout fait… Machiavélique, je souris en sentant pointer une érection. Je me mords les lèvres et en rajoute même en croisant le regard du gars avec lequel elle discutait tout à l’heure, quand nous sortons.

— Si ça ne te fait rien, on va chez moi, avance-t-elle en montant dans le taxi.

— Ça me va ! dis-je en souriant, ravi de ne pas avoir à aborder le sujet.

Quand la miss donne son adresse au chauffeur, je suis encore plus satisfait de savoir qu’elle habite non loin de l’île Saint-Louis et je me dis que je n’aurai même pas à courir après un taxi tout à l’heure. Je pourrais même rentrer à pied.

Le taxi nous dépose et elle farfouille un bon moment avant de trouver ses clefs. Je me moque d’elle gentiment et hésite même à allumer une cigarette pour passer le temps. Elle finit par les trouver et nous entrons enfin.

L’appartement est petit, mais décoré avec goût. Une pièce principale avec un coin salon, un autre avec une table et des chaises en face d’une petite cuisine ouverte. Visiblement, Andréa aime la verdure, car il y a des plantes en nombres, des petites, des grandes, des vertes et des fleuries, suspendues ou au sol… Il y en a partout. Trop à mon goût, mais c’est un truc de fille et je ne suis pas étonné. Un chat déboule de nulle part et commence à brailler en venant se frotter à mes jambes. Andréa se dépêche pour lui donner à manger et plaisante sur le fait qu’il ronronne en me reniflant le pantalon. Je n’ai pas spécialement envie de le caresser, mais je fais un effort pour lui être sympathique et m’accroupis pour passer ma main sur son pelage roux. Il me regarde en fermant à moitié les yeux et j’ai l’impression qu’il louche. Il n’est pas très beau et miaule d’une étrange façon. Bizarre ce chat, on dirait qu’il est défoncé à la coke.

— Tu aimes les chats ? me demande-t-elle.

— Pas spécialement, mais j’en ai un… C’est quoi la marque du tien ?

Elle pouffe en levant les sourcils.

— Pourquoi t’en as un alors ? On ne dit pas une marque, mais une race et Caramel est un chat de gouttière.

— J’ai pas vraiment choisi, mais c’est une longue histoire…

— Ha, je vois… C’est celui que vous aviez à deux, c’est ça ? Ton ex t’a laissé la bestiole ? Mâle ou femelle ?

— Absolument pas. C’est un chat qui s’est invité chez nous et qui ne veut plus partir. C’est un garçon et il s’appelle le chat.

— Chez NOUS ? relève-t-elle instantanément.

— Je vis avec mon meilleur ami, Yohann.

Je me relève et demande si je peux me laver les mains, puis je retire mon manteau, ma veste et relève les manches de ma chemise. Avec discrétion, je glisse un préservatif dans la poche de mon pantalon. Andréa m’accompagne à la salle de bain et tout en lorgnant sur les veines de mes avant-bras, en profite pour se démaquiller. Je trouve ça plutôt spécial, mais je ne dis rien et quand elle se penche sur le lavabo alors que je m’essuie les mains, j’en profite pour lui mater les fesses à nouveau. Je pose mes mains sur ses hanches avec un sourire diabolique, la lèvre inférieure coincée entre mes dents. Elle se fend d’un immense sourire dévoilant une dentition parfaite et me lance presque à voix basse :

— C’était quand la dernière fois ?

Je lève les yeux pour la regarder dans le reflet du miroir.

— La dernière fois ? dis-je tout en sachant très bien de quoi elle parle.

— La dernière fois que tu as couché avec une fille !

Je regarde ma montre en souriant et réponds froidement :

— Il y a deux heures. Pourquoi ?

— Comme ça. Pour savoir. Tu peux me laisser deux minutes s’il te plaît, dit-elle.

Je ne suis pas certain qu’elle ait compris que je plaisantais, mais tant pis, après tout je m’en fous.

— OK. Tu as deux minutes, dis-je en agitant deux doigts, tout en reculant vers la porte de la salle de bain. Deux minutes !

— Sinon quoi ? me lance-t-elle avec arrogance en levant le menton dans ma direction.

Je la regarde au fond des yeux.

— Tu veux vraiment savoir ?

— Vas-y, dis-moi, répond-elle avec malice.

— Très bien, je vais te montrer alors.

Je refais deux pas en avant et avant qu’elle ne puisse réagir, je l’attrape et la couche sur mon épaule, l’entraînant de force dans la dernière pièce de l’appartement que je devine être la chambre. Elle me martèle le dos à coups de poing en riant tout ce qu’elle peut. Je pousse la porte du pied, entre, la bascule sur le lit, puis m’allonge sur elle en me calant sur les avant-bras. Elle pose ses mains sur mes joues et vient aussitôt poser ses lèvres sur les miennes. Je me laisse faire et rapidement ma langue attrape la sienne… Nous nous embrassons à pleine bouche. Même si je n’aime pas ça particulièrement il ne m’en faut pas plus pour me mettre à bander. Elle le sent et ouvre grands les yeux en gémissant à moitié. Les muscles de mes bras se contractent et je me sens durcir dans son entrejambe. D’un coup adroit je me libère de mes chaussures et je plie ma jambe droite afin qu’elle écarte davantage les cuisses. Je l’embrasse goulûment et à ses gémissements je devine qu’elle adore ça. Déjà à l’Eden j’avais compris, mais là elle met les watts et je crains soudain pour ma langue qu’elle mord à moitié quand elle ne m’enfonce pas la sienne au fond de la gorge. Sa main derrière ma tête me maintient presque bloqué et je dois forcer pour me libérer. Je m’appuie sur un coude afin de dégager son corps et soulève son pull, puis d’une main d’expert je détache son soutien-gorge et m’empresse de venir embrasser ses seins qui n’attendent que ça. Au contact de mes lèvres et de ma langue, Andréa se tortille et son corps se tend. Elle est déjà bien excitée et je me dis que je ne vais pas avoir de mal à la faire jouir. Je glisse une main dans ma poche de pantalon pour y prendre le préservatif et souris intérieurement en pensant à Yo…

Elle me pousse alors et je bascule sur le dos, puis elle retire rapidement son jean, sa culotte et son pull. Je la regarde faire tout en déboutonnant lentement ma chemise, puis je défais ma ceinture sans me presser tout en la regardant au fond des yeux. Trouvant sans doute que je suis trop lent, elle s’agite et vient m’aider. En moins de cinq secondes, mon pantalon et mon caleçon ont volé et elle est à califourchon sur moi. Elle est musclée et je sens ses cuisses se serrer sur mes hanches. Elle se soulève alors et attrape mon sexe pour le guider jusqu’au sien, bien décidée à tenir les rênes. Je la stoppe net en attrapant ses deux mains.

— Hop hop hop, mademoiselle… doucement… tu vas me faire mal si tu continues comme ça et puis il manque un petit quelque chose je crois… dis-je en trouvant la capote à tâtons.

— Si tu y tiens… Donne, je vais te le mettre, rétorque-t-elle d’une voix étouffée.

— Oui j’y tiens et je vais le faire si tu permets, dis-je en déchirant l’emballage avec mes dents.

Elle me regarde tandis que j’enfile mon petit costume puis se penche sur moi pour m’embrasser de nouveau. Je crains alors d’étouffer. Cette fille a un côté bestial et je me dis qu’elle doit vraiment aimer le sexe. Les rapports de force me stimulent quand je baise et je suis partant pour lui donner ce qu’elle attend. Une fois prêt, c’est moi qui viens la chercher et la placer sur mon giron pour qu’elle s’empale. Elle ne se fait pas prier et à ses jambes qui tremblent je comprends qu’elle est déjà en train de prendre son pied. Elle penche la tête en arrière en gémissant et commence à monter et descendre sur mon sexe tendu dans un rythme soutenu. Elle est vraiment bandante et je viens l’aider à mon tour en la soutenant sous les fesses que je pétris en même temps. Je me redresse pour qu’elle ralentisse et reprends ses seins en bouche. Elle m’attrape alors la tête me maintenant avec force contre elle. Elle me tire les cheveux brutalement et je sens ses cuisses s’écarter encore pour que je la pénètre le plus possible. Cette position me plaît, mais je veux prendre les rênes… La passivité n’est pas mon truc. Alors je fais en sorte de la faire tomber sur le côté. Elle ne se laisse pas faire et tente de résister, mais je reste heureusement plus fort qu’elle et je réussis à la faire céder. Elle gémit encore quand je me retire. Je l’observe quelques secondes avant de m’immiscer de nouveau en elle, d’abord doucement, puis j’accélère mon va-et-vient lui donnant ce qu’elle désire, assurément. D’un coup de hanche, elle me force à m’enfoncer plus encore, entoure ses bras et ses cuisses autour de moi et je sens ses ongles me percer la peau du dos. Je n’apprécie pas la douleur que je ressens et pourtant je me sens presque gonfler encore plus en elle. Ses jambes frémissent de façon incontrôlable et je sais qu’elle jouit intensément. Je ralentis la cadence, je transpire et j’ai soif, mais je n’en ai pas fini… Je lui laisse une minute pour récupérer, elle ne dit rien et petit à petit elle retrouve une respiration normale. Elle sourit et me regarde alors que je me retire de nouveau.

— Tourne-toi, dis-je fermement et sans sourire.

Elle s’exécute, apparemment ravie du ton que j’ai pris. Je le savais. J’imagine bien cette fille virer dans le sadomasochisme un jour ou l’autre et il y a fort à parier que ce serait une dominante. Je secoue la tête pour chasser cette idée et me concentrer sur ce que j’ai à faire. Pour l’instant, elle va juste jouir comme moi je le veux, mais je vais lui faire plaisir et la maltraiter un minimum.

D’une main, je la force à écraser sa tête sur l’oreiller et de l’autre lui maintiens les poignets dans le dos. Je la pousse à écarter les cuisses pour qu’elle s’expose totalement en l’obligeant à se cambrer le plus possible. Elle obtempère et gémit. J’enroule ses cheveux autour de mon poignet et tire suffisamment pour lui relever la tête, puis je relâche ses mains et lui gifle les fesses. Elle tremble et lâche un cri avant de me demander crûment de la baiser. J’avoue que ça m’excite follement, alors je m’empresse de la contenter en m’enfonçant rapidement en elle. Elle m’offre son sexe sans pudeur et continue de s’écarteler pour que la pénètre le plus possible. Je la sens partir de nouveau quand elle hoquette, alors je ralentis, mais j’ai de plus en plus de mal à me retenir. Je lui claque le derrière encore une fois. Elle sursaute, puis grogne avant d’avancer la tête pour que je lui tire les cheveux plus fort. Je resserre ma prise et l’oblige à tendre le cou pendant que je la pilonne de plus belle. Et puis, je la libère pour attraper ses fesses en y enfonçant mes doigts et dans une poussée ultime, je jouis.

Je ruisselle de sueur. Elle retombe à plat ventre sur les draps et je me laisse tomber sur elle.

Black-out.

Chapitre 2

Quand j’ouvre la moitié d’un œil, il fait jour et je ne comprends pas tout de suite où je me trouve. Un instant je suis persuadé d’être avec Emily et je viens me coller naturellement au corps nu qui dort près de moi. Je me penche pour l’embrasser tout en cherchant son sein et son parfum que je reconnaîtrai parmi des milliers. Mon cerveau s’active alors et ordonne à mes yeux de s’ouvrir. Je sursaute et m’arrache du corps d’Andréa comme si je venais de prendre une décharge électrique.

— Oh putain, non ! dis-je affolé.

Je regarde ma montre que je n’ai pas retirée hier soir.

Il est huit heures trente ! Je saute du lit en catastrophe sous le regard médusé d’Andréa.

— Qu’est-ce qui se passe ? demande-t-elle en se redressant.

— J’avais pas prévu de rester et… putain… MERDE !

J’enfile mes fringues à la va-vite, remets mes chaussures et tout en boutonnant ma chemise, cherche mon téléphone. Bien entendu, Yohann est furieux et inquiet.

Je l’appelle. Il décroche avant même la fin de la première sonnerie.

— DIS-MOI QUE TU VAS BIEN ! hurle-t-il.

— Oui ça va, t’inquiète pas, je suis déso…

— Arrête de me dire de ne pas m’inquiéter, Greg. ARRÊTE ! Tu me casses les couilles ! Où tu es, bordel ? !

— Je suis pas loin. Je suis là dans dix minutes.

— Je t’attends et j’espère que je vais me calmer d’ici là, sinon je vais te péter les dents, je te promets.

— J’arrive.

Je reviens vers la chambre et sans y entrer, je fais un signe à Andréa.

— Tu t’en vas ? me demande-t-elle en faisant la moue.

— Heu… oui. C’était cool ma belle… On se téléphone, OK ? Je dois y aller.

— Tu m’appelles tout à l’heure ?

— Je ne sais pas si je pourrais… On se voit bientôt, d’accord ?

— J’espère… Fais attention au chat en ouvrant la porte s’il te plaît.

Inutile de dire que je pique un sprint d’enfer et que je bats tous les records du monde d’athlétisme, car en moins de dix minutes je suis quai de Bourbon.

Il pleut et j’arrive trempé, essoufflé et pas fier.

Yohann ouvre la porte avant même que je mette ma clef dans la serrure. Il n’a pas l’air content. Vraiment pas.

La porte ouverte, il me regarde de la tête aux pieds puis tourne les talons sans dire un mot.

Je me déshabille, gardant juste mon caleçon, et dépose mes vêtements gorgés d’eau dans la buanderie pour ne pas en mettre partout.

Yo est au bar devant un café. Je m’approche et je devine en le regardant, que mes yeux trahissent mon inquiétude. Il a l’air très fâché et je visualise facilement les rouages qui ont dû s’activer toute la nuit dans sa tête.

— Vas enfiler un t-shirt, tu veux. Rachel est à la salle de bain.

Je m’exécute. Sans un mot, je file mettre un bas de survêtement et enfile la veste qui va avec.

Je suis poisseux et je me sens dégueulasse, mais je dois recevoir la soufflante que je mérite avant même de penser à prendre une douche.

Je reviens vers Yo qui n’a pas bougé d’un iota. Il serre ses mâchoires nerveusement en m’observant avec une pointe de mépris.

— T’en as pas marre ? dit-il sans desserrer les dents.

Je ferme les yeux et secoue la tête, puis je prends place en face de lui.

Il est habillé, il sent bon, rasé de près, la cravate nouée à la perfection. Je l’envie. Je dois puer comme un rat mort et je me sens mal.

— Vraiment Yo… je suis désolé. Je comprends pas… Je me suis endormi…

— Ouais. La dernière fois, t’as pas compris non plus quand t’as oublié de mettre ta capote. Cette fois, tu comprends pas parce que tu t’es endormi ? Et bien sûr ça non plus, ça t’arrive jamais hein ? dit-il ironique. Et ton téléphone tu l’avais perdu ? Ta copine aussi ? J’ai tenté de la joindre…

Je me passe une main dans les cheveux puis sur ma barbe naissante. Je me dis que je ne dois pas ressembler à grand-chose.

— J’étais crevé et puis… j’ai cru que j’étais chez Mily…

Il lève la main pour m’interrompre.

— Ha non, laisse Emily en dehors de ça s’il te plaît Greg, écoute-moi bien, je n’ai pas à te dire ce que tu dois faire et si je veux que tu rentres c’est parce que j’ai peur. Je te l’ai déjà dit cinquante fois, je ne supporterai pas qu’il t’arrive quoi que ce soit. Je flippe, c’est comme ça. Maintenant, t’es pas mon fils. T’es majeur et tu dois savoir ce que tu as à faire. Mais je trouve qu’en ce moment tu fais beaucoup de trucs irréfléchis et ça ne me rassure pas. Est-ce que tu peux comprendre que je m’inquiète et que c’est malheureusement justifié ? C’est pas difficile Greg, dès que t’es pas avec moi, tu fais des conneries. Tu t’en rends compte ?

Je soupire et baisse les yeux.

— Ouais… enfin non pas vraiment… Sur le moment, je pense que tout va bien… C’est après que ça part en sucette… Mais t’exagères, je fais pas tant de conneries que ça…

— Ha non ? dit-il en relevant les sourcils.

— Ben non, à part le coup de la capote… Bon OK, j’ai déconné, mais quoi d’autre ?

Il soupire à son tour et me regarde, stupéfait.

— Tu me sidères Greg. Tu te rends même pas compte…

Il se lève et prépare deux cafés. J’en meurs d’envie, ça tombe plutôt bien. Il fait ensuite glisser la tasse fumante jusqu’à moi et prend la sienne pour aller fumer dans la véranda. Je le suis.

— Je peux te poser une question ? dit-il en me tournant le dos, les yeux perdus sur les toits de Paris.

— Bien sûr, réponds-je en tirant sur ma cigarette.

— Est-ce que tu te souviens de l’accident ? Quand tu as sauté, je veux dire ?

Sa question me transperce le cerveau. Je m’attendais à tout sauf à ça. Pourquoi maintenant ? Je refoule ce truc depuis des semaines… Je refuse clairement d’y penser et là d’un seul coup, c’est l’électrochoc. Il met le doigt sur ce qui me fait sans doute le plus souffrir dans ma vie aujourd’hui. Je secoue la tête, puis la baisse et me la prends entre les mains, ma cigarette coincée entre deux doigts.

— Pourquoi tu veux savoir ça Yo ? Qu’est-ce que ça peut faire si je me souviens ou pas ?

— Réponds-moi s’il te plaît.

Je réfléchis une seconde. Je ne veux pas lui mentir et quand bien même je le voudrais je ne pourrais pas, car il le saurait. Yohann sait toujours tout.

— C’est pas dans l’ordre. J’ai des bribes de souvenirs, des flashs. Jamais le jour. C’est plutôt la nuit dans mes rêves. J’ai quelques images, mais c’est décousu.

— Tu te souviens de quoi ? continue-t-il calmement, toujours sans me regarder.

— Yo… c’est dur de parler de ça. J’ai pas envie.

— Moi non plus Greg, j’ai pas envie, et pourtant je pense qu’il faut le faire.

— Mais pourquoi ? dis-je en relevant la tête.

— Parce que je pense que tant qu’on n’aura pas mis le nez dedans, ça va créer un désordre dans notre vie. On doit le revivre, le verbaliser pour le digérer. On fuit pour essayer d’oublier ce qui fait mal… Ça ne va pas… La fuite n’est qu’un détour, mais un jour il faudra regarder la réalité en face. Plus on attend, plus ce sera difficile. Tu comprends ce que je veux dire ?

Il écrase sa cigarette, se retourne enfin vers moi, puis enfonce les mains dans ses poches de pantalon.

— Oui je comprends, dis-je en soufflant. Je vais essayer Yo. Je te promets, je vais essayer.

Nous échangeons un regard assez long pour que l’un et l’autre soient rassurés sur nos intentions. Le genre de regard qui se passe d’explication et que nous connaissons bien lui et moi. Il s’avance et me passe la main dans les cheveux en partant se resservir un café.

Il réapparaît quelques minutes plus tard pour me dire qu’il accompagne Rachel pour un rendez-vous et qu’il passera voir Lena vers onze heures.

Je lui assure de le retrouver à l’hôpital pour onze heures trente afin de prendre le relais.

Je n’embrasse pas Rachel tellement je me sens pouilleux. Elle est belle, vraiment très belle, et elle sent merveilleusement bon… de loin. Ils sont magnifiques tous les deux et cette idée me fait du bien au point que je frissonne.

Quand la porte claque derrière eux, je fonce sous la douche et y reste un long moment. Je fais le vide, me délectant de l’eau qui me brûle la peau. Je repense à ma soirée avec Andréa et j’en suis mal à l’aise. Non… je n’ai pas aimé ce plan. Elle est certes très mignonne avec un cul d’enfer, mais ça ne suffit pas, et j’en garde une sensation étrange… Pourtant si je me suis endormi, c’est que je devais être bien avec elle ! Non… j’étais crevé et surtout… Non… Si… Je pensais être avec Emily.

Je sors de la douche et me sèche à peine, enroule une serviette autour de ma taille, puis attrape mon téléphone pour l’appeler. Je me demande ce qu’elle fait, si elle va bien… J’ai envie de la voir. Je lance l’appel puis me ravise et raccroche. Je fais encore n’importe quoi, c’est certain. Yohann m’interdirait de faire ça et il aurait raison. Je m’assieds dans le canapé et balance mon téléphone. Je suis défait.

Soudain, je pense au chat. Je ne l’ai pas vu ce matin. Je parcours l’appartement rapidement du regard. Je l’appelle, mais rien. J’épluche l’appartement pièce par pièce, sors sur les terrasses, secoue le paquet de croquettes… Pas de chat.

Mon humeur déjà au fond des chaussettes descend encore d’un cran. Merde ! Finalement, je l’aimais bien ce chat. Pourquoi il s’est barré ? J’étais pas là hier soir… Il m’en veut ? Il va peut-être revenir après tout… Il est quand même vachement plus beau que celui d’Andréa. Je souris. Il est sacrément moche le sien, en plus il a pas l’air très intelligent. Elle l’a appelé comment déjà ? Caramel ? Je trouve ça nul, mais j’avoue, ça lui va bien.

Je me refais un café et allume une nouvelle cigarette. Je pense que je n’ai pas même demandé à Yo s’il avait des nouvelles de sa grand-mère… Je suis vraiment une merde.

Je décide aussitôt de rectifier le tir et appelle la mienne.

— Hey mamie ! dis-je en entendant sa petite voix.

— Mon chéri ! s’exclame-t-elle. Comment vas-tu ?

— Tout va bien… Et toi, dis-moi ?

— Oh moi, ça va… C’est Loulou qui ne va pas fort… Tu sais…

— Oui, je sais et je t’appelais pour ça justement.

— Vincent et Alice sont arrivés à Genève, mais je ne les ai pas encore vus. Ils vont sans doute venir aujourd’hui ou demain.

— Je pense aussi. Comment va-t-elle ?

— Mal. Elle n’a pas voulu se soigner avec les drogues des médecins. J’ai fait ce que je pouvais avec mes plantes, mais dès le début je lui ai dit que c’était plus grave. Cette tête de cochon n’a rien voulu entendre… Alors bien sûr son état a empiré au point qu’à l’hôpital de Sallanches, ils n’ont pas voulu la garder… Gregory, dis-moi ce qui ne va pas…

Je sursaute. J’avais oublié que ma grand-mère ressentait les choses même à distance. Elle magnétise les gens et les guérit quand elle en est capable. Je repense au nombre de fois où elle nous a «  réparés » avec Yohann quand on était gamins… On se déboîtait toujours des coudes, des chevilles ou des genoux… Elle nous remettait en place rapidement et nous massait des heures avec du camphre. Je ferme les yeux et je peux presque sentir cette odeur si particulière, qu’on respirait finalement à longueur de temps.

— Ça va mamie… On travaille beaucoup ces derniers temps avec Yohann, alors on est un peu fatigués. Mais on va venir vous voir bientôt, c’est promis.

— Oui, vous allez venir bientôt… répète-t-elle presque à voix basse. Il va falloir venir.

— mamie…

— Tu dois prendre soin de toi Gregory… Promets-moi que tu feras attention.

— Je te le promets.

— Comment vont ta sœur et Emily ? Et la petiote ?

— Victoire, tu veux dire ? ! Mamie c’est la sœur de Yohann ! Ça va… Emily et Lena vont bien aussi… Mais on en parlera quand on se verra, d’accord ? Il faut prendre soin de toi aussi.

— Je suis contente de vous voir même si j’aurais préféré que ce soit dans d’autres circonstances. Grégory ?

— Oui mamie, je t’écoute…

— Yohann et toi vous êtes des hommes maintenant. N’ayez pas peur de ce que vous ne maîtrisez pas. Servez-vous de ce que la vie va vous donner, bientôt. Vous n’en serez que plus forts.

— Je ne comprends pas mamie… De quoi parles-tu ?

— Nous en discuterons. Bientôt. En attendant, prenez bien soin de vous. Je t’embrasse mon chéri.

— Moi aussi je t’embrasse.

En raccrochant, je suis perplexe. Soit ma grand-mère est en train de perdre les pédales, soit elle a voulu me transmettre un message que je suis bien incapable de décrypter. Quoi qu’il en soit, ses derniers mots me perturbent et me laissent inquiet.

Je m’arrange pour arriver en même temps que Yohann à l’hôpital et lui fais part de l’échange que j’ai eu avec Gabrielle. Il trouve lui aussi que c’est étrange et vu les derniers événements, nous commençons à réfléchir au moyen de partir en Haute-Savoie assez rapidement. Notre souci reste Lena, nous ne voulons pas la laisser. Notre seule alternative sérieuse serait Emily, mais Yohann refuse catégoriquement que je l’appelle pour lui en parler. Il me dit qu’il s’en chargera dans l’après-midi. Je me garde alors bien de lui dire que j’ai eu envie de lui parler et de la voir dans la matinée, car je crois qu’il me casserait les dents pour de vrai.

Chapitre 3

Jeudi 16 février — 4 h 55

— Yo… réveille-toi.

— Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ? marmonne-t-il sans bouger, le nez des cheveux de Rachel.

— Le chat…

— Mhhh…

— Yo, s’il te plaît…

— Mais quoi ? fait-il en se retournant enfin vers moi, agacé.

— Le chat… Il s’est multiplié.

— Quoi ? dit-il en bâillant. Qu’est-ce que tu racontes ?

— Ils sont plusieurs.

— Putain Greg… T’es somnambule ou quoi ?

— Viens.

Je ressors de sa chambre et attends qu’il me rejoigne, puis me dirige sans plus attendre vers la mienne. J’ouvre la porte sans entrer et d’une révérence, je montre le spectacle à Yohann.

Il reste bouche bée, observant la scène sans bouger, puis vient recouvrir sa bouche avec sa main droite, stupéfait, les yeux ronds comme des soucoupes.

Sur le lit, le chat est installé avec quatre petites boules de poils qu’il lèche tour à tour en ronronnant.

— Oh putain, lâche Yo. C’est pas vrai…

— Il les a ramenés et me les a collés sous le nez. T’imagines ma surprise…

— Elle. Elle te les a ramenés tu veux dire, parce qu’à priori c’est une femelle. Bon, va falloir emmener tout ce petit monde à la SPA, on peut pas les garder… C’est impossible, dit-il sans se lâcher le menton.

— C’est pour ça qu’il était si gros !

— Greg… Elle.

— Oui, elle… Bon, je les mets où les Aristochats en attendant ?

— On va les emmener dans la véranda, ça me parait pas mal non ?

— Ouais ça me va. J’espère juste qu’ils vont pas revenir dans mon lit.

— Ferme ta porte, ça devrait suffire.

Nous emmenons les quatre bébés chats dans la véranda. Ils sont tous gris bleu presque rayés, sauf un qui est vraiment tout gris. Ils poussent des petits cris quand on les attrape, apparemment pas contents qu’on les enlève à leur repas. Quant à la mère, elle nous suit en miaulant et en cherchant à récupérer ses petits en nous barrant le chemin.

On installe ensuite tout le monde sur un plaid dans les coussins près de la baie vitrée qui donne sur la grande terrasse, en nous disant qu’ils y seront bien.

Je ne suis pas super enthousiaste à l’idée de les emmener à la SPA et de les abandonner… J’avoue, je me suis attaché à ce chat (qui est donc une chatte au final) et je commence à élaborer deux trois plans pour qu’on garde la mère au moins et refiler les petits. Un pour Jules, un pour Emily, un pour mes parents ou ma grand-mère et le dernier pour ceux de Yohann… Peut-être que Sam en voudrait un ? Je suis sûr que dans le lot de nos collaborateurs on trouverait preneur aussi. Et Théo ? Oui, ça devrait marcher. Il faut juste que j’arrive à convaincre Yo et ça… C’est pas gagné.

Nous retournons nous coucher vu qu’il est très tôt, mais comme je le craignais, une fois dans mon lit le sommeil ne revient pas. Je passe en revue les différents soucis qui me polluent la vie depuis quelque temps. Je les accumule.

Je pense d’abord à Emily, puis à Lena et ma grand-mère, celle de Yohann Louise, et à Andréa. Que des femmes en fait… Je souris malgré moi et encore plus en songeant au chat qui finalement est une fille aussi. Décidément, elles m’en veulent. Ce n’est sans doute pas un hasard si les choses arrivent de cette façon, du moins j’en suis persuadé. J’ai quelque chose à comprendre avec tout ça, mais quoi ? Ce qui est sûr, c’est qu’en ce moment je mets la barre des emmerdes à un niveau stratosphérique.

Je tourne et je vire encore et encore, incapable de me rendormir. Je suis trop énervé. Mes pensées finissent par me mener là où je redoute le plus d’aller. Au soir de l’accident. Je lutte et refuse de toutes mes forces, mais les images affluent et je me sens pris en otage.

C’est sans doute le moment… Oui, mon cerveau a décidé que c’était maintenant on dirait. Alors à regret je ferme les yeux, respire à fond, et laisse venir ces souvenirs que j’occulte volontairement depuis toutes ces semaines.

Je me revois rire avec Yohann pendant qu’il me raccompagnait au garage. J’avais prévu d’aller voir Emily, oui, j’avais envie de passer la soirée avec elle. On était mal lui et moi avec l’histoire de Lena. On ne savait pas où elle était ni si elle allait bien. Je me souviens m’être dit que j’avais besoin des bras de Mily, parce je savais qu’auprès d’elle je m’apaiserai. Je pourrai retrouver les forces qui me manquaient et dont j’allais sûrement avoir besoin dans les jours à venir. J’ai mis du temps pour arriver sur le pont de la Tournelle, ça roulait mal. J’ai appelé Emily pour lui dire que je venais… Je lui ai demandé si elle voulait dîner dehors… Elle a dit… qu’elle n’en avait pas trop envie. J’ai mis de la musique et puis j’ai reçu un message de Théo. La photo de Lena, Quai aux fleurs. Je me rappelle avoir pilé d’un coup sec en la reconnaissant et avoir retiré mon téléphone de son support pour regarder la photo de plus près, mais Théo m’a appelé… Je ne sais plus où je suis à cet instant. Est-ce que j’ai repris la route ? Non, je ne sais plus.

Je crispe mon visage et serre les yeux très fort, comme si ça pouvait m’aider. Mes doigts s’agrippent aux draps, j’ai l’impression de faire un effort surhumain.

Je pense me souvenir des lumières qui s’étalent sur mon pare-brise dans la pluie glaciale. Mes essuie-glaces essaient tant bien que mal de faire leur boulot, mais il pleut vraiment beaucoup. Il me semble voir la Cathédrale, noire, imposante et effrayante… J’accélère. Je n’entends plus Théo. Est-il toujours en ligne ? Je sais juste qu’il est sur le pont Saint Louis, que Lena est à quelques mètres de lui et que je dois faire vite.

Mes yeux me brûlent comme ce soir-là et ma respiration se saccade.

Je ne peux pas me garer, mais tant pis… Non, je ne sais plus… Je ne suis plus très sûr.

Je dois être au bout du pont puisqu’il est interdit aux voitures. Je me vois sortir de l’Audi et puis… Un mur de ténèbres se matérialise soudain pour m’engloutir. Je sais pourtant où je dois regarder, mais mes yeux refusent d’y aller.

Je ne suis pas capable. Non, pas encore.

Je me lève d’un bond, les yeux pleins de larmes et le cœur affolé. Ça ne sert à rien que je reste dans ce lit. Je me sens tellement mal que j’en ai presque la nausée.

J’attrape et enfile un short, un t-shirt à manches longues, des chaussettes, des baskets, un bonnet… Je vais aller courir pour ne plus penser. Je ne veux plus penser, je voudrais oublier.

Il n’est alors pas encore six heures quand je dévale les escaliers, bien décidé à me mettre une dose dans les jambes et dans la tête.

Sans vraiment réfléchir, je me retrouve à prendre l’itinéraire que j’ai pris en voiture le soir de l’accident. Je m’en aperçois quand je traverse le pont de la Tournelle en devinant la Cathédrale perdue dans un épais brouillard. Avec les lampadaires qui l’entourent, comme des soldats disciplinés eux aussi embourbés dans la brume, ses contours se dessinent maladroitement dans la nuit et la rendent encore plus angoissante que ce soir-là. Certains la trouveraient sans doute magnifique, mais personnellement elle me fait flipper. Je ralentis ma course et hésite sur mon chemin. Et si j’y allais ? Si je me confrontais à mes souvenirs une bonne fois pour toutes ? Peut-être que Yohann a raison ?

Non.

Je fais demi-tour et repars sur l’île Saint-Louis. Je dois réfléchir et j’ai besoin de quelques minutes supplémentaires. En passant par le pont de Sully, je rallonge mon parcours. Je verrais quand je serai quai de la Tournelle. Je relance la machine et cours aussi vite que je peux. Il fait froid, mes poumons me brûlent, ma gorge se serre et je n’ai plus de salive pour déglutir. Je maintiens mon allure de fou et finalement me retrouve rapidement là où je ne veux toujours pas être, inspirant le brouillard qui m’étouffe presque. Notre Dame se découvre petit à petit et m’attire malgré moi. Je baisse les yeux pour ne plus la voir et bifurque rue de Poissy. Je n’y arrive toujours pas, il n’y a rien à faire. Je traverse le boulevard Saint-Germain. Je pourrais prendre à droite, mais je continue comme si j’avais le diable aux trousses jusqu’à la rue des Écoles, et enfin je me décide à tourner. Je prends donc la rue des Bernardins, bien conscient que si je vais au bout, je me retrouverais là où j’ai laissé ma voiture au moment de l’accident.

Je ralentis de nouveau en arrivant sur le quai de l’Archevêché, au pied de la Cathédrale. Elle est démesurée et je me sens minuscule, fragile, complètement perdu… Non, décidément elle ne m’inspire toujours rien qui vaille, et j’ai même l’impression que ce géant de pierre est prêt à me dévorer.

Je sais que je m’approche de plus en plus du lieu maudit et je redoute de devoir passer sur ce petit pont. J’ai la gorge en feu et mes cuisses me brûlent tout autant, mais ce n’est rien comparé à la douleur qui me tord le bide.

Quand je pose le premier pied sur le pont Saint Louis, j’ai la sensation de prendre un coup derrière les oreilles et j’en perds mon souffle. Je ne veux pas m’arrêter ni regarder. J’accélère tout en sentant mon estomac se soulever. Je n’ai rien mangé, je ne risque pas de vomir ! Et pourtant… en arrivant de l’autre côté, je dois m’arrêter pour essayer de soulager la tension qui compresse mon corps. Il fait encore nuit et je ne vois pas ce que je régurgite, mais j’ai un goût de sang dans la bouche. Je suis plié de douleur et je dois m’appuyer au petit mur de pierre pour ne pas tomber. Je reprends mon souffle péniblement et crache encore, pendant que mes jambes tremblent sans que je ne puisse les contrôler. Je vais devoir me retourner pour rentrer à la maison qui n’est plus qu’à une cinquantaine de mètres, mais je vais inévitablement frôler l’endroit fatal. Je tourne la tête en traversant le pont et puis je me stoppe à nouveau. Je ferme les yeux et me fais violence pour affronter mes souvenirs, ma douleur. À voix haute, je m’encourage, me dis que je dois le faire et surtout que je peux y arriver. Je prends alors une longue inspiration, et me confronte enfin aux images insoutenables que mon cerveau a occultées depuis des jours.

Je suis près des escaliers qui descendent au bord de l’eau, là même où les pompiers ont ramené Lena à la vie. Je me penche légèrement et observe la rambarde ; mes yeux se troublent et mes mâchoires se contractent. J’ai de nouveau la nausée. Je penche la tête en arrière sans lâcher le mur, pour prendre le plus d’air possible. J’y suis. Le brouillard se dissipe dans ma tête et tout devient fluide…

J’ai d’abord vu Théo de dos et devant lui, j’ai deviné Lena. Je suis descendu de ma voiture et avant même d’atteindre le pont, je l’ai vue basculer. Je n’ai pas réfléchi. J’ai hurlé en me précipitant à l’endroit où elle venait de se laisser tomber, j’ai sauté la rambarde et j’ai plongé sous les cris horrifiés de Théo. D’autres hurlements de passants ont accompagné ma chute… Oui, j’arrive presque à les entendre…

Ma tête s’est fracassée en touchant l’eau noire de la Seine, j’ai eu très mal. Légèrement sonné, je me suis senti aspiré par le courant… J’ai lutté pour remonter en surface… J’ai cherché Lena que j’ai trouvée rapidement alors qu’elle partait telle une poupée de chiffon dans les vagues agitées, ne cherchant pas à résister. J’ai nagé aussi vite que j’ai pu pour la rattraper et je sais que j’ai prié. Je ne sais plus quoi ou qui, mais j’ai imploré le ciel pour qu’on se sorte de là, elle et moi.

J’ai dû aller chercher mes forces au-delà de ce qu’un humain est capable de fournir, c’est certain. Quand enfin j’ai saisi le manteau de Lena, elle s’enfonçait sous l’eau… Là encore, j’ai bataillé avec le courant pour la remonter, ensuite pour me rapprocher au plus près de la rive, là où le courant était moins fort, tout en maintenant sa tête en surface pour qu’elle puisse respirer. Je devais tenir le coup, trouver quelque chose pour m’agripper le temps que quelqu’un vienne. Il le fallait, sinon on coulerait tous les deux. Je ne pouvais pas nager à contre-courant en tenant Lena, pour regagner l’autre côté du pont sur la plage de pierre, c’était impossible. Et puis, j’ai entendu le bruit d’un moteur… J’ai compris que les secours étaient là. On était sauvés. Je n’ai lâché Lena que lorsqu’ils nous ont ramenés sur la berge. Ensuite, tout est allé très vite… J’ai cru qu’elle était morte. Je ne pouvais pas détacher mes yeux de ce corps qui ne bougeait pas. Les pompiers s’agitaient autour d’elle pendant que d’autres arrivaient dans un ballet de sirènes et de lumières. Je me suis demandé si je n’étais pas spectateur de tout ça, mort moi aussi. Ce n’est qu’au moment où j’ai aperçu Yohann que j’ai repris contact avec le réel… Oui, c’est là que j’ai compris que j’étais vivant.

Je parcours, en marchant lentement, la distance qui me sépare encore de la maison, tout en jetant quelques coups d’œil en arrière, comme pour m’assurer de laisser au passé ces moments tragiques. Je suis vide, fatigué, mais satisfait malgré tout.

Mon éprouvante sortie m’a pris à peine trente minutes, mais j’ai l’impression d’avoir couru un marathon. Mes cuisses me brûlent toujours et je tremble encore en passant la porte de l’appartement. Je me jette sur une bouteille d’eau, puis une fois un bon litre avalé, je prends appui de mes mains sur le bar en baissant la tête histoire de me recentrer. L’exercice est difficile. Je sais que je viens de subir une pression énorme et que j’ai dépensé toute mon énergie, aussi bien physique que psychologique.

La maman chat me rejoint, saute sur le bar et vient coller sa tête à la mienne en ronronnant… Je la laisse faire et en éprouve un réconfort indescriptible. Je n’aurai jamais imaginé qu’un animal puisse me faire autant de bien. Je la caresse puis lui donne à manger avant de filer sous une douche brûlante bien méritée. Une fois lavé et calmé, je m’installe avec la famille chat et un café grand format dans la véranda, en attendant que Yohann se lève pour lui raconter ma balade matinale.

À nouveau, je trouve apaisement et soutien dans ses bras qui me serrent fort, une fois mon sac vidé et quelques larmes versées. Nous parlons longuement à cœur ouvert. Je pense que nous en avions, tous les deux, grand besoin. C’est Rachel qui met fin à notre conversation en se levant une heure plus tard et je lui en veux presque de rompre sans le vouloir, ce moment solennel. Yohann et moi échangeons un regard complice et je peux voir dans ses yeux toute la fierté qu’il éprouve à mon égard à cet instant. Mon cœur explose et à nouveau je sens une larme rouler sur ma joue. Je suis à fleur de peau et j’ai du mal à gérer les émotions que je ressens… Un mélange de tristesse, de soulagement, de fatigue et je ne sais quoi encore. Quoi qu’il en soit, je me sens faible et je voudrais que Yohann reste avec moi. Je sais pourtant que la journée s’annonce longue, car même si je suis épuisé, un boulot monstre m’attend dans le 17e.

Paradoxalement, je dois bien avouer que je me sens plus léger, maintenant que je me souviens de ce putain de soir qui a fait basculer nos vies, et j’ai l’impression d’y voir plus clair. Yohann avait raison.

Yohann a toujours raison.

 Chapitre 4Yohann

Jeudi 23 février

Greg a décollé de bonne heure ce matin. Il n’a même pas attendu que je sois levé pour partir, c’est assez rare. Il s’est remis la tête dans le guidon et ne pense qu’à travailler, ce qui n’est pas plus mal au final. Au moins, il laisse Emily tranquille. Je ne suis pas certain qu’il n’y pense pas, mais il ne dit rien.

Il s’occupe des petits chats et passe beaucoup de temps avec, même si à vrai dire ils ne font pas grand-chose d’autre que rester agrippés à leur mère, pour manger et dormir. Il n’a pas trouvé de prénoms originaux jusqu’à maintenant, alors il les a numérotés de un à quatre, ce qui nous fait mourir de rire Rachel et moi. Je ne lui ai pas reparlé de la SPA, mais il va pourtant falloir qu’on s’en occupe, car plus on tarde, plus il aura du mal à s’en séparer.

Enfin pour l’heure ils profitent et je me dis en les regardant dormir qu’ils ont bien raison.