Maupassant: Poésies complètes - Guy De Maupassant - E-Book
SONDERANGEBOT

Maupassant: Poésies complètes E-Book

Guy de Maupassant

0,0
1,99 €
Niedrigster Preis in 30 Tagen: 0,99 €

oder
-100%
Sammeln Sie Punkte in unserem Gutscheinprogramm und kaufen Sie E-Books und Hörbücher mit bis zu 100% Rabatt.
Mehr erfahren.
Beschreibung

Ce livre numérique comprend des poésies complètes complètes Maupassant. L'édition est méticuleusement éditée et formatée. Guy de Maupassant (1850 - 1893) a marqué la littérature française par ses six romans, dont Une vie en 1883, Bel-Ami en 1885, Pierre et Jean en 1887-1888, mais surtout par ses nouvelles, (parfois intitulées contes), comme Boule de suif en 1880, les Contes de la bécasse (1883) ou Le Horla (1887). Ces œuvres retiennent l'attention par leur force réaliste, la présence importante du fantastique et par le pessimisme qui s'en dégage le plus souvent mais aussi par la maîtrise stylistique. La carrière littéraire de Guy de Maupassant se limite à une décennie – de 1880 à 1890 – avant qu'il ne sombre peu à peu dans la folie et ne meure à quarante-trois ans.

Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:

EPUB

Veröffentlichungsjahr: 2019

Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Guy De Maupassant

Maupassant: Poésies complètes

e-artnow, 2019 Contact: [email protected]

Table des matières

DES VERS
Le Mur
Un Coup De Soleil
Terreur
Une Conquête
Nuit de Neige
Envoi D’Amour Dans Le Jardin Des Tuileries
Au Bord De L’Eau
Les Oies Sauvages
Découverte
L’Oiseleur
L’Aïeul
Désirs
La Dernière Escapade
Promenade A Seize Ans
Sommation Sans Respect
La Chanson Du Rayon De Lune
Fin D’Amour
Propos Des Rues
Vénus Rustique
AUTRES POEMES Et Textes
“Au Moment Où Phébus…”
Au Bord De La Mer
Légende De La Chambre Des Demoiselles A Etretat
“Mais Dans Le Cloître Solitaire”
Dernière Soirée Passée Avec Ma Maîtresse
Le Dieu Créateur
La Saint-Charlemagne
Souvenirs
Sur La Mort De Louis Bouilhet
L’Espérance Et Le Doute
Les Voeux
Le Sommeil Du Mandarin
Voici Mon Compliment
À Mon Ami Louis Le Poittevin Sur Son Mariage
Fête De La Saint-Polycarpe
“Vers D’Album”
Enfant, Pourquoi Pleurer ?
Le Moulin
Sabbat
Sonnet
À Une Dame En Lui Envoyant Un Bout De La Corde D’Un Pendu
La Madone
Sous Une Gueule De Chien
Sur Un Éventail
“On m’a dit qu’en des mains exquises…”
La Coquille
La Galanterie
Les Subtils
Par-Delà
Le Divorce Et Le Théâtre
Sur Et Sous L’Eau
La Femme De Lettres
La Lune Et Les Poètes
Petits Voyages
Les Attardés
Vérités Fantaisistes
Le Fond Du Coeur
Contemporains
Messieurs De La Chronique
Souvenirs

DES VERS

Table des matières

(1880)

Le Mur

Table des matières

Les fenêtres étaient ouvertes. Le salon Illuminé jetait des lueurs d’incendies, Et de grandes clartés couraient sur le gazon. Le parc, là-bas, semblait répondre aux mélodies De l’orchestre, et faisait une rumeur au loin. Tout chargé des senteurs des feuilles et du foin, L’air tiède de la nuit, comme une molle haleine, S’en venait caresser les épaules, mêlant Les émanations des bois et de la plaine À celles de la chair parfumée, et troublant D’une oscillation la flamme des bougies. On respirait les fleurs des champs et des cheveux. Quelquefois, traversant les ombres élargies, Un souffle froid, tombé du ciel criblé de feux, Apportait jusqu’à nous comme une odeur d’étoiles.

Les femmes regardaient, assises mollement, Muettes, l’oeil noyé, de moment en moment Les rideaux se gonfler ainsi que font des voiles, Et rêvaient d’un départ à travers ce ciel d’or, Par ce grand océan d’astres. Une tendresse Douce les oppressait, comme un besoin plus fort D’aimer, de dire, avec une voix qui caresse, Tous ces vagues secrets qu’un coeur peut enfermer. La musique chantait et semblait parfumée; La nuit embaumant l’air en paraissait rythmée, Et l’on croyait entendre au loin les cerfs bramer. Mais un frisson passa parmi les robes blanches; Chacun quitta sa place et l’orchestre se tut, Car derrière un bois noir, sur un coteau pointu, On voyait s’élever, comme un feu dans les branches, La lune énorme et rouge à travers les sapins. Et puis elle surgit au faîte, toute ronde, Et monta, solitaire, au fond des cieux lointains, Comme une face pâle errant autour du monde.

Chacun se dispersa par les chemins ombreux

Où, sur le sable blond, ainsi qu’une eau dormante, La lune clairsemait sa lumière charmante. La nuit douce rendait les hommes amoureux, Au fond de leurs regards allumant une flamme. Et les femmes allaient, graves, le front penché, Ayant toutes un peu de clair de lune à l’âme. Les brises charriaient des langueurs de péché.

J’errais, et sans savoir pourquoi, le coeur en fête. Un petit rire aigu me fit tourner la tête, Et j’aperçus soudain la dame que j’aimais, Hélas! D’une façon discrète, car jamais Elle n’avait cessé d’être à mes voeux rebelle: «Votre bras, et faisons un tour de parc», dit-elle. Elle était gaie et folle et se moquait de tout, Prétendait que la lune avait l’air d’une veuve: «Le chemin est trop long pour aller jusqu’au bout, Car j’ai des souliers fins et ma toilette est neuve; Retournons.» Je lui pris le bras et l’entraînai. Alors elle courut, vagabonde et fantasque, Et le vent de sa robe, au hasard promené, Troublait l’air endormi d’un souffle de bourrasque. Puis elle s’arrêta, soufflant; et doucement Nous marchâmes sans bruit tout le long d’une allée. Des voix basses parlaient dans la nuit, tendrement, Et, parmi les rumeurs dont l’ombre était peuplée, On distinguait parfois comme un son de baiser. Alors elle jetait au ciel une roulade! Vite tout se taisait. On entendait passer

Une fuite rapide; et quelque amant maussade Et resté seul pestait contre les indiscrets.

Un rossignol chantait dans un arbre, tout près, Et dans la plaine, au loin, répondait une caille.

Soudain, blessant les yeux par son reflet brutal, Se dressa, toute blanche, une haute muraille, Ainsi que dans un conte un palais de métal. Elle semblait guetter de loin notre passage. «La lumière est propice à qui veut rester sage, Me dit-elle. Les bois sont trop sombres, la nuit. Asseyons-nous un peu devant ce mur qui luit.» Elle s’assit, riant de me voir la maudire. Au fond du ciel, la lune aussi me sembla rire! Et toutes deux d’accord, je ne sais trop pourquoi, Paraissaient s’apprêter à se moquer de moi.

Donc, nous étions assis devant le grand mur blême; Et moi, je n’osais pas lui dire: «Je vous aime!» Mais comme j’étouffais, je lui pris les deux mains. Elle eut un pli léger de sa lèvre coquette Et me laissa venir comme un chasseur qui guette.

Des robes, qui passaient au fond des noirs chemins, Mettaient parfois dans l’ombre une blancheur douteuse.

La lune nous couvrait de ses rayons pâlis Et, nous enveloppant de sa clarté laiteuse, Faisait fondre nos coeurs à sa vue amollis. Elle glissait très haut, très placide et très lente, Et pénétrait nos chairs d’une langueur troublante.

J’épiais ma compagne, et je sentais grandir

Dans mon être crispé, dans mes sens, dans mon âme, Cet étrange tourment où nous jette une femme Lorsque fermente en nous la fièvre du désir! Lorsqu’on a, chaque nuit, dans le trouble du rêve, Le baiser qui consent, le «oui» d’un oeil fermé, L’adorable inconnu des robes qu’on soulève, Le corps qui s’abandonne, immobile et pâmé, Et qu’en réalité la dame ne nous laisse Que l’espoir de surprendre un moment de faiblesse!

Ma gorge était aride; et des frissons ardents Me vinrent, qui faisaient s’entrechoquer mes dents, Une fureur d’esclave en révolte, et la joie De ma force pouvant saisir, comme une proie, Cette femme orgueilleuse et calme, dont soudain Je ferais sangloter le tranquille dédain!

Elle riait, moqueuse, effrontément jolie; Son haleine faisait une fine vapeur

Dont j’avais soif. Mon coeur bondit; une folie Me prit. Je la saisis en mes bras. Elle eut peur, Se leva. J’enlaçai sa taille avec colère, Et je baisai, ployant sous moi son corps nerveux, Son oeil, son front, sa bouche humide et ses cheveux!

La lune, triomphant, brillait de gaieté claire. Déjà je la prenais, impétueux et fort, Quand je fus repoussé par un suprême effort. Alors recommença notre lutte éperdue Près du mur qui semblait une toile tendue. Or, dans un brusque élan nous étant retournés, Nous vîmes un spectacle étonnant et comique. Traçant dans la clarté deux corps désordonnés, Nos ombres agitaient une étrange mimique, S’attirant, s’éloignant, s’étreignant tour à tour. Elles semblaient jouer quelque bouffonnerie, Avec des gestes fous de pantins en furie, Esquissant drôlement la charge de l’Amour.

Un Coup De Soleil

Table des matières

C’était au mois de juin. Tout paraissait en fête. La foule circulait bruyante et sans souci. Je ne sais trop pourquoi j’étais heureux aussi; Ce bruit, comme une ivresse, avait troublé ma tête. Le soleil excitait les puissances du corps, Il entrait tout entier jusqu’au fond de mon être, Et je sentais en moi bouillonner ces transports Que le premier soleil au coeur d’Adam fit naître. Une femme passait; elle me regarda. Je ne sais pas quel feu son oeil sur moi darda, De quel emportement mon âme fut saisie, Mais il me vint soudain comme une frénésie De me jeter sur elle, un désir furieux

De l’étreindre en mes bras et de baiser sa bouche! Un nuage de sang, rouge, couvrit mes yeux, Et je crus la presser dans un baiser farouche. Je la serrais, je la ployais, la renversant. Puis, l’enlevant soudain par un effort puissant, Je rejetais du pied la terre, et dans l’espace Ruisselant de soleil, d’un bond, je l’emportais. Nous allions par le ciel, corps à corps, face à face.

Terreur

Table des matières

Ce soir-là j’avais lu fort longtemps quelque auteur. Il était bien minuit, et tout à coup j’eus peur. Peur de quoi? Je ne sais, mais une peur horrible. Je compris, haletant et frissonnant d’effroi, Qu’il allait se passer une chose terrible… Alors il me sembla sentir derrière moi Quelqu’un qui se tenait debout, dont la figure Riait d’un rire atroce, immobile et nerveux: Et je n’entendais rien, cependant. Ô torture! De sentir qu’il se baisse à toucher mes cheveux, Qu’il est prêt à poser sa main sur mon épaule, Et que je vais mourir si cette main me frôle!… Il se penchait toujours vers moi, toujours plus près; Et moi, pour mon salut éternel, je n’aurais Ni fait un mouvement ni détourné la tête… Ainsi que des oiseaux battus par la tempête, Mes pensers tournoyaient comme affolés d’horreur. Une sueur de mort me glaçait chaque membre, Et je n’entendais pas d’autre bruit dans ma chambre Que celui de mes dents qui claquaient de terreur.

Un craquement se fit soudain; fou d’épouvante,

Une Conquête

Table des matières

Un jeune homme marchait le long du boulevard

Et sans songer à rien, il allait seul et vite, N’effleurant même pas de son vague regard

Ces filles dont le rire en passant vous invite.

Mais un parfum si doux le frappa tout à coup

Qu’il releva les yeux. Une femme divine Passait. À parler franc, il ne vit que son cou; Il était souple et rond sur une taille fine.

Il la suivit – pourquoi? – Pour rien; ainsi qu’on suit Un joli pied cambré qui trottine et qui fuit, Un bout de jupon blanc qui passe et se trémousse. On suit; c’est un instinct d’amour qui nous y pousse.

Il cherchait son histoire en regardant ses bas. Élégante? Beaucoup le sont. – La destinée L’avait-elle fait naître en haut ou bien en bas? Pauvre mais déshonnête, ou sage et fortunée?

Mais, comme elle entendait un pas suivre le sien, Elle se retourna. C’était une merveille. Il sentit en son coeur naître comme un lien Et voulut lui parler, sachant bien que l’oreille

Est le chemin de l’âme. Ils furent séparés Par un attroupement au détour d’une rue. Lorsqu’il eut bien maudit les badauds désoeuvrés Et qu’il chercha sa dame, elle était disparue.

Il ressentit d’abord un véritable ennui, Puis, comme une âme en peine, erra de place en place, Se rafraîchit le front aux fontaines Wallace, Et rentra se coucher fort avant dans la nuit.

Vous direz qu’il avait l’âme trop ingénue; Si l’on ne rêvait point, que ferait-on souvent? Mais n’est-il pas charmant, lorsque gémit le vent, De rêver, près du feu, d’une belle inconnue?

De ce moment si court, huit jours il fut heureux. Autour de lui dansait l’essaim brillant des songes Qui sans cesse éveillait en son coeur amoureux

Les pensers les plus doux et les plus doux mensonges.

Ses rêves étaient sots à dormir tout debout; Il bâtissait sans fin de grandes aventures. Lorsque l’âme est naïve et qu’un sang jeune bout, Notre espoir se nourrit aux folles impostures.

Il la suivait alors aux pays étrangers; Ensemble ils visitaient les plaines de l’Hellade Et comme un chevalier d’une ancienne ballade Il l’arrachait toujours à d’étranges dangers.

Parfois au flanc des monts, au bord d’un précipice, Ils allaient échangeant de doux propos d’amour; Souvent même il savait saisir l’instant propice Pour ravir un baiser qu’on lui rendait toujours.

Puis, les mains dans les mains, et penchés aux portières D’une chaise de poste emportée au galop, Ils restaient là songeurs durant des nuits entières, Car la lune brillait et se mirait dans l’eau.

Tantôt il la voyait, rêveuse châtelaine, Aux balustres sculptés des gothiques balcons; Tantôt folle et légère et suivant par la plaine Le lévrier rapide ou le vol des faucons.

Page, il avait l’esprit de se faire aimer d’elle; La dame au vieux baron était vite infidèle. Il la suivait partout, et dans les grands bois sourds Avec sa châtelaine il s’égarait toujours.

Pendant huit jours entiers il rêva de la sorte, À ses meilleurs amis il défendait sa porte; Ne recevait personne, et quelquefois, le soir, Sur un vieux banc désert, seul, il allait s’asseoir.

Un matin, il était encore de bonne heure, Il s’éveillait, bâillant et se frottant les yeux; Une troupe d’amis envahit sa demeure Parlant tous à la fois, avec des cris joyeux.

Le plan du jour était d’aller à la campagne, D’essayer un canot et d’errer dans les bois, De scandaliser fort les honnêtes bourgeois, Et de dîner sur l’herbe avec glace et champagne.

Il répondit d’abord, plein d’un parfait dédain, Que leur fête pour lui n’était guère attrayante; Mais quand il vit partir la cohorte bruyante, Et qu’il se trouva seul, il réfléchit soudain

Qu’on est bien pour songer sur les berges fleuries; Et que l’eau qui s’écoule et fuit en murmurant Soulève mollement les tristes rêveries Comme des rameaux morts qu’emporte le courant;

Et que c’est une ivresse entraînante et profonde De courir au hasard et boire à pleins poumons Le grand air libre et pur qui va des prés aux monts, L’âpre senteur des foins et la fraîcheur de l’onde;

Que la rive murmure et fait un bruit charmant, Qu’aux chansons des rameurs les peines sont bercées, Et que l’esprit s’égare et flotte doucement, Comme au courant du fleuve, au courant des pensées.

Alors il appela son groom, sauta du lit, S’habilla, déjeuna, se rendit à la gare, Partit tranquillement en fumant un cigare, Et retrouva bientôt tout son monde à Marly.

Des larmes de la nuit la plaine était humide; Une brume légère au loin flottait encor; Les gais oiseaux chantaient; et le beau soleil d’or

Jetait mainte étincelle à l’eau fraîche et limpide.

Lorsque la sève monte et que le bois verdit, Que de tous les côtés la grande vie éclate, Quand au soleil levant tout chante et resplendit, Le corps est plein de joie et l’âme se dilate.

Il est vrai qu’il avait noblement déjeuné, Quelques vapeurs de vin lui montaient à la tête; L’air des champs pour finir lui mit le coeur en fête, Quand au courant du fleuve il se vit entraîné.

Le canot lentement allait à la dérive; Un vent léger faisait murmurer les roseaux, Peuple frêle et chantant qui grandit sur la rive Et qui puise son âme au sein calme des eaux.

Vint le tour des rameurs, et, suivant la coutume, Leur chant rythmé frappa l’écho des environs; Et, conduits par la voix, dans l’eau blanche d’écume De moment en moment tombaient les avirons.

Enfin, comme on songeait à gagner la cuisine, D’autres canots soudain passèrent auprès d’eux; Un rire aigu partit d’une barque voisine Et s’en vint droit au coeur frapper mon amoureux.

Elle! Dans une barque! Étendue à l’arrière, Elle tenait la barre et passait en chantant! Il resta consterné, pâle et le coeur battant, Pendant que sa Beauté fuyait sur la rivière.

Il était triste encore à l’heure du dîner! On s’arrêta devant une petite auberge, Dans un jardin charmant par des vignes borné, Ombragé de tilleuls, et qui longeait la berge.

Mais d’autres canotiers étaient déjà venus; Ils lançaient des jurons d’une voix formidable, Et, faisant un grand bruit, ils préparaient la table Qu’ils soulevaient parfois de leurs bras forts et nus.

Elle était avec eux et buvait une absinthe! Il demeura muet. La drôlesse sourit, L’appela. – Lui restait stupide. – Elle reprit:

Nuit de Neige

Table des matières

La grande plaine est blanche, immobile et sans voix. Pas un bruit, pas un son; toute vie est éteinte. Mais on entend parfois, comme une morne plainte, Quelque chien sans abri qui hurle au coin d’un bois.Plus de chansons dans l’air, sous nos pieds plus de chaumes. L’hiver s’est abattu sur toute floraison; Des arbres dépouillés dressent à l’horizon Leurs squelettes blanchis ainsi que des fantômes.

La lune est large et pâle et semble se hâter. On dirait qu’elle a froid dans le grand ciel austère. De son morne regard elle parcourt la terre, Et, voyant tout désert, s’empresse à nous quitter.

Et froids tombent sur nous les rayons qu’elle darde, Fantastiques lueurs qu’elle s’en va semant; Et la neige s’éclaire au loin, sinistrement, Aux étranges reflets de la clarté blafarde.

Oh! La terrible nuit pour les petits oiseaux! Un vent glacé frissonne et court par les allées; Eux, n’ayant plus l’asile ombragé des berceaux, Ne peuvent pas dormir sur leurs pattes gelées.

Dans les grands arbres nus que couvre le verglas Ils sont là, tout tremblants, sans rien qui les protège; De leur oeil inquiet ils regardent la neige, Attendant jusqu’au jour la nuit qui ne vient pas.

Envoi D’Amour Dans Le Jardin Des Tuileries

Table des matières

Accours, petit enfant dont j’adore la mère Qui pour te voir jouer sur ce banc vient s’asseoir, Pâle, avec les cheveux qu’on rêve à sa Chimère Et qu’on dirait blondis aux étoiles du soir. Viens là, petit enfant, donne ta lèvre rose, Donne tes grands yeux bleus et tes cheveux frisés; Je leur ferai porter un fardeau de baisers, Afin que, retourné près d’Elle à la nuit close, Quand tes bras sur son cou viendront se refermer, Elle trouve à ta lèvre et sur ta chevelure Quelque chose d’ardent ainsi qu’une brûlure! Quelque chose de doux comme un besoin d’aimer! Alors elle dira, frissonnante et troublée Par cet appel d’amour dont son coeur se défend,

Au Bord De L’Eau

Table des matières

I

Un lourd soleil tombait d’aplomb sur le lavoir; Les canards engourdis s’endormaient dans la vase, Et l’air brûlait si fort qu’on s’attendait à voir

Les arbres s’enflammer du sommet à la base. J’étais couché sur l’herbe auprès du vieux bateau

Où des femmes lavaient leur linge. Des eaux grasses, Des bulles de savon qui se crevaient bientôt S’en allaient au courant, laissant de longues traces.

Et je m’assoupissais lorsque je vis venir, Sous la grande lumière et la chaleur torride, Une fille marchant d’un pas ferme et rapide, Avec ses bras levés en l’air, pour maintenir

Un fort paquet de linge au-dessus de sa tête. La hanche large avec la taille mince, faite Ainsi qu’une Vénus de marbre, elle avançait Très droite, et sur ses reins, un peu, se balançait.

Je la suivis, prenant l’étroite passerelle Jusqu’au seuil du lavoir, où j’entrai derrière elle.

Elle choisit sa place, et dans un baquet d’eau, D’un geste souple et fort abattit son fardeau. Elle avait tout au plus la toilette permise; Elle lavait son linge; et chaque mouvement Des bras et de la hanche accusait nettement, Sous le jupon collant et la mince chemise, Les rondeurs de la croupe et les rondeurs des seins. Elle travaillait dur; puis, quand elle était lasse, Elle élevait les bras, et, superbe de grâce, Tendait son corps flexible en renversant ses reins. Mais le puissant soleil faisait craquer les planches; Le bateau s’entr’ouvrait comme pour respirer. Les femmes haletaient; on voyait sous leurs manches La moiteur de leurs bras par place transpirer

Une rougeur montait à sa gorge sanguine. Elle fixa sur moi son regard effronté, Dégrafa sa chemise, et sa ronde poitrine Surgit, double et luisante, en pleine liberté, Écartée aux sommets et d’une ampleur solide. Elle battait alors son linge, et chaque coup

Agitait par moment d’un soubresaut rapide Les roses fleurs de chair qui se dressent au bout.

Un air chaud me frappait, comme un souffle de forge, À chacun des soupirs qui soulevaient sa gorge. Les coups de son battoir me tombaient sur le coeur! Elle me regardait d’un air un peu moqueur; J’approchai, l’oeil tendu sur sa poitrine humide De gouttes d’eau, si blanche et tentante au baiser. Elle eut pitié de moi, me voyant très timide, M’aborda la première et se mit à causer. Comme des sons perdus m’arrivaient ses paroles.