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Comment comprendre le peuple d'en bas quand on vit l'aisance ? Le personnage principal décrit très bien sa situation, les petits boulots, les larcins pour survivre, l'amour, et celle qui lui manque tant...
Un florilège de situations, une valse des mots et des sentiments, amitié, amour, et au bout du chemin une lueur d'espoir ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Gildas FERE n'en est pas à son coup d'essai. Déjà bien connu pour ses textes bien ciselés et engagés dans la défense du plus démuni, pour une justice sociale, il nous réale de ses textes à sens profond.
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Seitenzahl: 39
A un ami qui n’a pas d’amis…
A tous ceux qui vivent à la marge…
« La télé ? (…) Tu m’as compris ! L’opinion à domicile, comme l’eau courante.
Plus besoin de bouger un arpion. L’homme, faut l’isoler, le mettre sous un béret.
Sans quoi il attrape la réflexion. Qui dit bistrot dit contact. Pas de bistrots aux HLM.
Quand tu prendras ton verre de Beaujolpif à un distributeur automatique,
la France sera finie.
Nettoyée. »
RENE FALLET
PARIS AU MOIS D’AOÛT
1964
« Et je marche dans les rues
Sans savoir vraiment
Ni comment ni pourquoi
Je m’appelle Michel mais tout le monde m’appelle Mimi.
Je vis seul dans une ancienne chambre d’hôtel.
14 m².
Un frigo qui ne ferme plus.
Un micro-ondes.
Une douche.
Un évier.
Le strict minimum.
J’ai bientôt cinquante-huit piges et toujours pas de Rolex au poignet gauche.
Pourtant, j’en ai volé quelques-unes.
Ai-je raté ma vie ?
Je ne sais pas.
En tout cas, ma vie n’est pas une monotone ligne droite.
J’ai loupé bien des virages.
Dans moins de deux heures, je suis attendu au Commissariat central de Caen.
Une connerie.
Une de plus.
Comment j’en suis arrivé là ?
Moi, le loup solitaire qui tourne en rond dans sa piaule de 14m² en attendant que le téléphone sonne.
C’est sûr, elle finira par appeler.
J’ai peut-être manqué des virages mais je suis toujours en vie.
Et j’y tiens à ma vie.
Même si elle n’est pas tous les jours rose.
Ma putain de vie !
Tu ne voulais pas que je devienne Ministre ?
Mon père a cassé sa pipe dans les rues de Rouen.
Il avait tout juste quarante-trois ans.
Je ne l’ai jamais vu.
Peut-être je lui ressemble un peu.
Il faisait la manche près du Gros Horloge et dès qu’il avait trois sous, il allait les boire.
Il a fait huit gosses.
D’après ce que je sais, je suis le deuxième.
Les autres, je ne connais pas tous leur blase.
Peut-être on se ressemble un peu.
Peut-être il y a quelqu’un sur cette Terre qui s’inquiète de savoir ce que je suis devenu.
Peut-être.
Peut-être pas.
Pas de famille, pas d’ancêtres, pas d’héritage.
Rien.
Trimbalé de familles d’accueil en foyers, je suis même passé par la case prison.
Comme au Monopoly.
Un jeu d’argent, un jeu de riches.
Moi, j’aime bien les riches.
Surtout leur pognon.
Faut savoir partager…
Je ne me prends pas pour Arsène Lupin mais quand même, il y en a qui en ont trop.
Tu ne vas pas me faire croire qu’il faut absolument un 4X4 à 60000 euros pour aller au gratin.
De toute façon, je n’aime pas les signes extérieurs de richesse.
Ça m’énerve.
Ça me rend dingue.
Alors, j’emprunte…
Après tout, c’est un boulot comme un autre.
Le problème c’est que c’est illégal et qu’il faut savoir être discret.
Mon vrai travail, puisqu’il faut bien un vrai travail dans notre société, c’est peintre en bâtiment.
J’ai même le C.A.P.
Je me débrouille pas mal.
J’en ai repeint des cages d’escalier et des gymnases, des salles de classe et des hôtels.
Un bon coup de pinceau.
Un bon coup de pied de biche aussi…
J’ai fini par lui inventer un prénom à mon paternel.
Je l’ai appelé Pierrot.
Comme dans la chanson de Renaud.
« Pierrot mon gosse, mon frangin, mon poteau,
Mon copain tu me tiens chaud… »
Si la DDASS ne s’est pas trompée, il était arrivé d’ex-Yougoslavie à l’âge de sept ans.
Il traînait dans les rues.
Il n’a jamais mis les pieds dans une école.
Lire, écrire, compter, il ne savait pas.
Moi, oui.
Je n’étais pas mauvais en classe.
Pourtant je ne foutais rien.
Un cancre intelligent disaient les profs.
J’ai arrêté ma scolarité à quatorze ans avec un bout de papier en poche.
Le Brevet des collèges.
Ils appelaient ça le BEPC.
C’est là que j’ai commencé à voler des vélos.
Parfois même des mobylettes.
Quand les autres gamins jouaient au foot ou faisaient leur communion, moi je collectionnais les emmerdes et les placements.
Ça ne rigolait pas tous les jours dans ces tôles.
Souvent, le vendredi soir, avec mes compagnons d’infortune, on faisait le mur.
On fumait des clopes, on buvait des bières et on rentrait bien amochés vers quatre heures du matin.
A seize ans, j’ai réussi à me tailler pour de bon.
J’étais libre.
Enfin…