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Extrait : "MADAME DE RONCHARD (après avoir salué M. Martinel, qui lui donnait le bras, va s'asseoir à droite, puis) : Gilberte ! Gilberte ! GILBERTE (quittant le bras de Jean) : Ma tante? MADAME DE RONCHARD: Le café, mon enfant! GILBERTE (s'approchant de la table) : J'y vais, ma tante. MADAME DE RONCHARD: Prends garde à ta robe!"
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Seitenzahl: 90
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EAN : 9782335068436
©Ligaran 2015
À ALEXANDRE DUMAS FILS
Hommage de grande admiration et d’affectueux dévouement.
GUY DE MAUPASSANT
JACQUES NORMAND
JEAN MARTINEL, neveu de M. Martinel, artiste peintre, célèbre déjà et décoré, 30 ans.
LÉON DE PETITPRÉ, frère de Gilberte Martinel, jeune avocat, 30 ans.
M. MARTINEL, ancien armateur havrais, 55 ans.
M. DE PETITPRÉ, ancien conseiller à la Cour, officier de la Légion d’honneur, 60 ans.
Dr PELLERIN, médecin très élégant, 35 ans.
Mme DE RONCHARD, sœur de M. de Petitpré, 55 ans.
HENRIETTE LÉVÊQUE, surnommée MUSOTTE, petit modèle, ancienne maîtresse de Jean Martinel, 22 ans.
Mme FLACHE, sage-femme, ancienne danseuse de l’Opéra, 35 ans.
GILBERTE MARTINEL, fille de M. et Mme de Petitpré, mariée le jour même à Jean Martinel, 20 ans.
LISE BABIN, nourrice, 26 ans.
DOMESTIQUES.
La scène, de nos jours, à Paris.
Le premier et le troisième acte dans un salon, chez M. de Petitpré.
Le deuxième acte dans la chambre de Musotte.
Cette pièce a été représentée pour la première fois, à Paris, sur la scène du Gymnase, le mercredi 4 mars 1891.
Un salon sévère et de grand style chez M. de Petitpré. Table au milieu. Canapé à droite. Chaise et fauteuil à gauche. Porte au fond donnant sur une galerie. Portes latérales. Lampes allumées. On sort de table.
M. de Petitpré, M. Martinel, Mme de Ronchard, Léon de Petitpré, Jean, Gilberte, en robe de mariée, mais sans couronne ni voile.
Gilberte ! Gilberte !
Ma tante ?
Le café, mon enfant !
J’y vais, ma tante.
Prends garde à ta robe !
Mais non, mais non, ce n’est pas ma sœur qui sert le café aujourd’hui. Le jour de son mariage ! C’est moi qui m’en charge… À Mme de Ronchard. Vous savez que je peux tout faire, ma tante, en ma qualité d’avocat.
Oh ! je connais tes mérites, Léon, et je les apprécie…
Trop bonne.
… pour ce qu’ils valent !
V’lan ! le petit coup de patte… Ça ne manque jamais. Offrant une autre tasse à Martinel. Trois morceaux, n’est-ce pas, monsieur Martinel, et un peu de fine champagne ? Je sais vos goûts. Nous vous soignerons bien, allez !
Merci, mon ami.
Tu en prends, père ?
Oui, mon fils.
Et vous, les jeunes époux ? Les jeunes gens absorbés ne répondent pas. La cause est entendue ! Il replace la tasse sur la table.
Vous ne fumez pas, je crois ?
Jamais, merci.
Ça m’étonne. Mon frère et Léon ne s’en passeraient pour rien au monde, même un jour comme celui-ci… Quelle horreur que le cigare !
Une bonne horreur, Clarisse.
Presque toutes les horreurs sont bonnes, ma tante ; j’en connais d’exquises.
Polisson !
Viens fumer dans le billard, puisque ta tante n’aime pas ça !
Le jour où elle aimera quelque chose en dehors de ses caniches !…
Allons, tais-toi.
Ils sortent l’un et l’autre par le fond.
Voilà les mariages comme je les aime et comme on n’en fait pas souvent ici, dans votre Paris. Après le lunch, offert en sortant de l’église, tous les invités s’en vont, même les demoiselles d’honneur et les garçons d’honneur. On reste en famille, puis on dîne avec quelques parents. Partie de billard ou partie de cartes, comme tous les jours ; flirt entre les mariés… à ce moment, Gilberte et Jean se lèvent et sortent lentement par le fond, en se donnant le bras ; puis, avant minuit, dodo.
Ce qu’il est commun !
Quant aux jeunes gens, au lieu de partir pour l’absurde voyage traditionnel, ils se rendent tout bonnement dans le petit logis préparé pour eux. Je sais bien que vous trouvez que ça manque de chic, de genre, de flafla. Tant pis ! j’aime ça, moi.
Ce n’est pas dans les usages du monde, monsieur !
Le monde ! Il y en a trente-six mille mondes. Tenez, rien qu’au Havre…
Je ne connais que le nôtre… se reprenant. le mien, qui est le bon.
Naturellement. Enfin, madame, tout simple qu’il soit, il est fait, ce mariage, et j’espère que vous avez admis en grâce mon pauvre neveu, qui jusqu’ici…
Il le faut bien, puisqu’il est le gendre de mon frère et le mari de ma nièce.
Ça n’a pas été tout seul, hein ? Je suis joliment content que ce soit fini, moi, quoique j’aie passé ma vie dans les difficultés…
Vous ?
… les difficultés commerciales et non matrimoniales.
Vous parlez de difficultés, vous, un Crésus, qui donnez cinq cent mille francs de dot à votre neveu ! Avec un soupir. Cinq cent mille francs ! ce que m’a mangé feu mon mari…
Oui… Je sais que M. de Ronchard…
Ruinée et abandonnée après un an de mariage, monsieur, un an !… Juste le temps de comprendre combien j’aurais pu être heureuse ! Car il avait su se faire adorer, le misérable !
Une canaille, enfin !
Oh ! monsieur ! C’était un homme du monde.
Ça n’empêche pas !…
Mais ne parlons pas de mes malheurs. Ce serait trop long et trop triste. Tout le monde est si heureux ici.
Et moi plus que tout le monde, je l’avoue. C’est un si brave garçon que mon neveu ! Je l’aime comme un fils. Moi, j’ai fait ma fortune dans le commerce…
Ça se voit.
… le commerce maritime ; lui, il est en train de faire la gloire de notre nom par sa renommée d’artiste ; il gagne de l’argent avec ses pinceaux comme j’en ai gagné avec mes bateaux. Les arts, aujourd’hui, madame, ça rapporte autant que le commerce et c’est moins aléatoire. Par exemple, s’il est arrivé aussi vite, c’est bien à moi qu’il le doit. Mon pauvre frère mort, et sa femme l’ayant suivi de près, je me suis trouvé, garçon, seul avec le petit. Dame ! je lui ai fait apprendre tout ce que j’ai pu. Il a tâté la science, la chimie, la musique, la littérature. Mais il mordait au dessin plus qu’à tout le reste. Ma foi, je l’ai poussé de ce côté. Vous voyez que ça a réussi. À trente ans, il est célèbre, il vient d’être décoré…
Décoré à trente ans, c’est tard pour un peintre.
Bah ! il rattrapera le temps perdu. Se levant. Mais, je bavarde, je bavarde… Excusez-moi. Je suis un homme tout rond. Et puis, je suis un peu animé par le dîner. C’est la faute à Petitpré, son bourgogne est excellent, un vrai vin de conseiller à la cour. Et nous buvons bien, au Havre ! Il va finir son verre de fine champagne.
En est-il assez, du Havre !
Là ! voilà la paix faite entre nous, n’est-ce pas ? une vraie paix qui dure, que ne rompt pas une niaiserie comme celle qui a failli rompre ce mariage.
Une niaiserie ?… Vous en parlez bien à votre aise ! Mais puisque c’est chose faite… C’est égal, je rêvais pour ma nièce un autre… berger que celui-là. Enfin, faute de grive, on mange un merle, comme dit le proverbe.
Un merle blanc, madame ! Quant à votre nièce, c’est une perle. Et le bonheur de ces enfants fera le bonheur de mes derniers jours.
Je le souhaite, sans oser l’espérer, monsieur.
Allez, je possède bien la connaissance des mérites des femmes… et des vins supérieurs.
Surtout !
Voilà tout ce qu’il faut dans la vie.
Les mêmes, plus Petitpré, paraissant au fond, avec Léon.
Puisque ça se passe comme tous les jours, voulez-vous faire une partie de billard avec moi, monsieur Martinel ?
Je crois bien. J’adore le billard.
Comme papa !… Et il paraît que quand on aime le billard, c’est une passion. Vous êtes deux petits passionnés, quoi !
Voyez-vous, mon garçon, quand on avance dans l’existence, et qu’on n’a pas de famille, il faut bien se réfugier dans ces plaisirs-là. Avec la pêche à la ligne pour le matin, le billard pour le soir, on possède deux goûts sérieux et captivants.
Oh ! oh ! la pêche à la ligne ! Se lever de grand matin ; s’asseoir, les pieds dans l’eau, sous la pluie et le vent, dans l’espoir de prendre tous les quarts d’heure un poisson gros comme une allumette… Un goût captivant, ça ?
Mais sans doute. Croyez-vous qu’il y ait un amoureux au monde capable d’en faire autant pour une femme pendant dix, douze ou quinze ans de sa vie ? Allons donc, il y renoncerait au bout de quinze jours !
Ah ! certes !
Moi, je me connais… Je n’attendrais pas la semaine !
Vous voyez bien.
Allons, mon cher Martinel. En cinquante, voulez-vous ?
En cinquante, ça va ! À tout à l’heure, madame de Ronchard !
En est-il assez, du Havre !
Martinel et Petitpré sortent par le fond.
Léon, Mme de Ronchard.
C’est un brave homme, ce M. Martinel. Peu cultivé, mais gai comme le soleil et droit comme une règle.
Il manque de distinction.
Et vous, ma tante !
Tu dis ?
Je dis : Et vous, ma tante… Vous vous y connaissez… et vous pouvez juger mieux que personne… avec votre grande habitude du monde.