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Poésie sensible et universelle
Coups de gueule, coups de cœur, coups d’œil, oreille tendue et petites respirations tendres, ironiques, bucoliques mais toujours en quête d’un peu plus d’humanité et d’universalisme. La sensibilité personnelle qui porte ce recueil, parfaitement revendiquée, est assurément ancrée dans l’environnement et la culture des îles de l’ouest méditerranéen.
Un recueil poétique très personnel, sans visée intimiste. Il se veut l’écho de voix multiples et de faits de notre époque, pour ne pas dire de notre quotidien.
Un recueil qui souhaiterait s’inscrire, toute référence et toute déférence gardées, dans la tradition, et si possible l’esprit, de Jacques Prévert et Boris Vian.
EXTRAIT DE
CHAQUE INSTANT
Chaque instant sublime
Le hasard d’être ici,
Chaque instant imprime
Une page de vie.
L’instant prime
Les méandres de la mémoire,
Il s’arrime
À une nouvelle histoire.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Natif de l’île voisine Sardaigne,
Aldo Siddi a toujours vécu en Corse depuis l’école primaire jusqu’à sa toute récente retraite, à l’exception d’une période d’études à Nice et d’un court passage professionnel en Normandie dont il garde un excellent souvenir.
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Au fil de l’eau, au gré du vent
Voix multiples
« Je ne serai jamais seul
Si nombreux étant ceux
Qui se mêlent à ce Moi qui est moi. »
–Rainer Maria RILKE
Chaque instant sublime
Le hasard d’être ici,
Chaque instant imprime
Une page de vie.
L’instant prime
Les méandres de la mémoire,
Il s’arrime
À une nouvelle histoire.
Le parti pris de l’instant
A le sourire du vivant,
L’audace de l’instinct,
L’inconnu du destin.
Chaque instant cueilli
Pour ce qu’il est
À l’instant dit
Est un pari, mais qui sait ?
Et l’instant passe,
Filant ou pesant,
Plaisir ou angoisse,
Ennui ou émerveillement.
L’instant a sa liberté
Il donne corps à l’éternité…
Au nord, la douceur blanche des falaises de calcaire,
Plongeait dans l’indigo tendre de la mer.
L’enfant, le regard ébloui par tant de lumière,
Croquait en riant les graines rouges d’une grenade,
En courant sur les quais sous un soleil d’hiver,
Il en oubliait même son verre de citronnade.
L’éternelle brise lourde d’embruns trop salés
Accompagnait au loin d’élégants voiliers.
Sur ce minéral chapelet d’îles,
Il y a à la fois des racines et l’exil.
Tant de chants se sont tus
Ou se taisent
Comme si l’on ne croyait plus,
Foutaises,
Fadaises,
À des idées devenues niaises.
À de nouvelles libertés,
À de nouveaux progrès,
À tout ce qui était
Une part d’humanité.
Aux utopies d’hier
Quotidien du lendemain,
À l’idée qu’on peut faire
Changer le cours d’un destin.
Entre toile et égoïsmes,
Les solidarités se délitent.
Et les élites
Vendent leur cynisme,
Le faux argent facile,
Consommateurs ruminants,
Les dimanches imbéciles
Dans des Super géants.
Tant de chants se sont tus
Ou se taisent
Comme si l’on ne croyait plus,
Foutaises,
Tabous,
Ces audaces qui nous tenaient debout.
Ni même à des formes douces
De révolution,
Combien encore poussent
À briser la ligne d’horizon ?
Et ces lâches petits conforts
Nous enferment dans nos propres corps.
Tant de chants se sont tus
Ou se taisent,
Mais c’est quand on n’y croit plus
Que sous la cendre la braise…
Et tous ces chants qui se sont tus
Qui se taisent
Retrouvent les vertus,
De la raison et du rêve…
Laisse le vent dénouer tes cheveux,
Laisse-les flotter comme des algues,
N’écoute pas ceux qui narguent
Tes rêves amoureux.
Laisse le vent dénouer tes cheveux,
Laisse les audacieux
Piquer des reflets au soleil
Et renvoyer vers le ciel,
Des éclats de lumière
Puisés dans ton cœur
Vibrants de ta chaleur
Et libres comme l’air…
Un air de liberté,
Un air d’humanité.
Femme d’aujourd’hui
Que les barbares guettent,
Enragés comme des bêtes
Sans souci pour ta vie…
Femme de la terre,
Femme de l’univers.
À nouveau t’asservir
Et voler jusqu’à ton âme,
Les prédications des martyrs
Ne sont qu’imprécations infâmes…
Laisse le vent dénouer tes cheveux,
Et sous la voûte d’un ciel bleu,
Laisse-les voler
Comme des fils d’or
Que tu pourras tresser,
Retrouvant le goût du jeu,
Libre de ton corps,
Libre de tes pensées…
Laisse-toi bercer par les danses,
Venues de ton enfance.
Ni esclave ni servante,
Ni butin de guerre,
Ni forcée d’être amante,
Ni reine ni mégère…
Laisse le vent dénouer tes cheveux,
Laisse-les flotter
Sur tes épaules tournées
Vers l’horizon de tes vœux.
Un horizon d’humanité,
Un horizon de liberté.
Laisse le vent dénouer tes cheveux,
Laisse le vent nous rendre heureux.
Sous les océans aussi
Des poissons s’écaillent
Par coquetterie
Et s’encanaillent,
Et se font tatouer sur les nageoires
Des enseignes de bar,
Des encres marines ivoire.
Ils se laissent glisser sur le dos
Et emporter parfois
Par des courants chauds,
Par des courants froids.
Et d’océan en océan
Des squales savants
Écument entre les dents
Des pépites d’or blanc.
Et ratissent les champs de posidonies,
Les massifs de corail,
Et quand vient la nuit
Au noir ils vendent leurs trouvailles.
Même les poissons-perroquets
En restent muets.
Les poissons clowns pleurent
Leur bonheur,
Ils changent de sexe et de rôle,
Ils s’aiment et s’épaulent.
Et c’est un monde mutant
Qui ressemble étrangement
Aux remous de la terre
Aux vagues d’une nouvelle ère…
Tant d’hommes dorment… en chien de fusil
Prêts à plomber leurs rêves
Pour voler un bout de nuit
Oublié sur une grève.
Tant d’hommes dorment… en chien de fusil
Leurs désirs en bandoulière,
Une pleine cartouchière
Trop souvent sans merci.
Et les trophées de chasse
Les poursuivent dans leur sommeil,
Sans chasser les angoisses
Qu’ils masquent sous le soleil.
Tant d’hommes veillent… en sentinelle
Toujours au front, sur le qui-vive,
Prêts à couper les ailes
De ceux venus d’autres rives.
Et puis toujours le jour se lève
Sur le brouillard et la nuit,
Et une nouvelle relève
Promet pour toujours la vie !
Et malgré ces promesses,
Les centenaires et l’oubli,
Ils cultivent leur détresse,
Tant d’hommes dorment… en chien de fusil.
Tant d’hommes continuent de dormir
En petits soldats de l’avenir.
La violence des sens
Fait battre le cœur des nuits,
Onirique errance.
Le silence des sens
Réveille les insomnies
Et leurs souffrances.
Le sommeil des sens
Frissonne à fleur de peau,
Sans conscience.
Le réveil des sens
Change le monde autour,
Éternelle partance.
Le saule pleureur penche
Son ombre sur la terrasse,
Il n’est pas soif qui ne s’étanche
Ou bien qui ne s’efface.
Un café noir fume sur la table basse.
Des échos lointains apportent
Une musique chargée d’audaces,
Au-dessus claque une porte
Sur le silence du temps qui passe.
Un café noir fume sur la table basse.
Les vagues se noient dans leur ressac,
Un voilier file à la surface,
Un voyageur oublie son sac,
Une mouette fait du surplace.
Un café noir fume sur la table basse.
Et des mains tremblantes
Échangent une caresse lasse,
Aux yeux perlent des larmes souriantes,
C’est enfin un instant de grâce.
Un café noir fume sur la table basse.
Il était un nomade,
Lequel était en fuite…
Lequel était en balade…
Était-ce la même solitude,
Était-ce la même quête,
Pour qui les frimas étaient rudes
Et qui espérait la tempête ?
Qui regardait loin,
Qui fermait les yeux,
Qui espérait le bien,
Qui doutait des cieux.
Quelles étaient leurs prières ?
D’où venaient leurs croyances ?
Qui craignait l’Enfer ?
Qui cherchait la providence ?
C’était un ermite,
C’était un nomade,
Pour qui le temps passait vite,
Et qui était en rade.
C’était un ermite,
C’est un nomade…
C’était un nomade,
C’est un ermite…
Quels désirs les portent ?
Quelles colères les emportent ?
Quels secrets les minent ?
Quelles joies les illuminent ?
Qui voyage à l’intérieur,
Qui roule à ciel ouvert,
Qui retient ses pleurs,
Qui cherche la lumière.
Qui connaît mieux le paysage !
Qui a fait le plus long voyage !
Juste un peu plus d’humanité,
Est-ce trop rêver ?
Est-ce trop demander ?
Est-ce trop oser ?
Juste un peu plus d’humanité.
La barbarie est de retour,
Les prédateurs sont partout,
Milliardaires d’un jour,
Prédicateurs fous.
Est-ce une utopie ?
Est-ce une lubie ?
Est-ce une folie ?
Juste un peu plus d’humanité.
Des enfants embrigadés
Programmés pour tuer,
Des enfants martyrs
Programmés pour mourir.
Est-ce maudire ?
Est-ce trop dire ?
Est-ce un délire ?
Juste un peu plus d’humanité.
Des migrants à la dérive,
Sur des radeaux pour navires,
Coincés entre deux rives,
Sans retour et si peu d’avenir.
Est-ce un leurre ?
Est-ce une gageure ?
Est-ce l’horreur ?
Juste un peu plus d’humanité.
Se redonner pour simple horizon,
Ce qui est encore une révolution.
Juste un peu plus d’humanité,
Juste un peu plus d’humanité.
Ses cheveux couleur des blés,
Sa peau hâlée au grand air,
Ses éternels étés,
Son courage et ses colères.
Et sa longue toge blanche
Dans les champs de coquelicot,
Où frissonnantes les tiges se penchent,
Sous le souffle chaud du sirocco.
La saison des semailles,
Le temps des moissons,
Le temps des retrouvailles,
Et des célébrations.
Il n’y a pas de récoltes,
Il n’y a pas de liberté,
Sans le courage de la révolte,
Sans la force de s’indigner.
Et le goût du pain partagé,
Et des amours aussi,
Déesse de la fécondité
Et du droit de vivre sa vie.
Respirer le temps qui s’éternise
Dans l’humidité d’une journée grise.
Attendre un rayon de soleil
Au même guichet que l’abeille.
L’eau est musique,
La pierre est chaleur,
La terre a ses humeurs,
L’air est un souffle magique.
Compter le nombre de pas