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Extrait : "Mon ami, tu m'as demandé de t'envoyer mes impressions, mes aventures, et surtout mes histoires d'amour sur cette terre d'Afrique qui m'attirait depuis si longtemps. Tu riais beaucoup, d'avance, de mes tendresses noires, comme tu disais, et tu me voyais déjà revenir suivi d'une grande ferme en ébène, coiffée d'un foulard jaune, et ballottante en des vêtements éclatants. Le tour des Mauricaudes viendra sans doute, car j'en ai vu déjà plusieurs qui m'ont donné..."
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Seitenzahl: 17
Mon ami, tu m’as demandé de t’envoyer mes impressions, mes aventures, et surtout mes histoires d’amour sur cette terre d’Afrique qui m’attirait depuis si longtemps. Tu riais beaucoup, d’avance, de mes tendresses noires, comme tu disais, et tu me voyais déjà revenir suivi d’une grande femme en ébène, coiffée d’un foulard jaune, et ballottante en des vêtements éclatants.
Le tour des Mauricaudes viendra sans doute, car j’en ai vu déjà plusieurs qui m’ont donné quelque envie de me tremper en cette encre ; mais je suis tombé pour mon début sur quelque chose de mieux et de singulièrement original.
Tu m’as écrit, dans ta dernière lettre : « Quand je sais comment on aime dans un pays, je connais ce pays à le décrire, bien que ne Payant jamais vu. » Sache qu’ici on aime furieusement. On sent, dès les premiers jours, une sorte d’ardeur frémissante, un soulèvement, une brusque tension des désirs, un énervement courant au bout des doigts, qui surexcitent à les exaspérer nos puissances amoureuses et toutes nos facultés de sensation physique, depuis le simple contact des mains jusqu’à cet innommable besoin qui nous fait commettre tant de sottises.
Entendons-nous bien. Je ne sais si ce que vous appelez l’amour du cœur, l’amour des âmes, si l’idéalisme sentimental, le platonisme enfin, peut exister sous ce ciel ; j’en doute même. Mais l’autre amour, celui des sens, qui a du bon, et beaucoup de bon, est véritablement terrible en ce climat. La chaleur, cette constante brûlure de l’air qui vous enfièvre, ces souffles suffocants du Sud, ces marées de feu venues du grand désert si proche, ce lourd siroco, plus ravageant, plus desséchant que la flamme, ce perpétuel incendie d’un continent tout entier brûlé jusqu’aux pierres par un énorme et dévorant soleil, embrasent le sang, affolent la chair, embestialisent.