Nicomède - Pierre Corneille - E-Book

Nicomède E-Book

Pierre Corneille

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Beschreibung

 "Nicomède est une pièce de théâtre écrite par Pierre Corneille, l'un des plus grands dramaturges français du XVIIe siècle. Cette pièce, qui a été créée en 1651, est considérée comme l'une des plus importantes de l'auteur.

L'histoire de Nicomède se déroule dans l'Antiquité, à la cour du roi de Bithynie. Le personnage principal, Nicomède, est un jeune prince qui doit faire face à de nombreux défis pour protéger son royaume et sa famille. Il doit notamment faire face à la menace de l'Empire romain, qui cherche à étendre son influence sur la région.

La pièce est une tragédie, mais elle est également empreinte de romantisme et de lyrisme. Les personnages sont complexes et nuancés, et les dialogues sont riches en émotions et en réflexions philosophiques.

Nicomède est une pièce qui a marqué l'histoire du théâtre français. Elle a été jouée de nombreuses fois depuis sa création, et elle continue d'être étudiée et appréciée par les amateurs de théâtre du monde entier. Si vous êtes passionné de théâtre ou si vous souhaitez découvrir l'œuvre de Pierre Corneille, Nicomède est un livre incontournable.



Extrait : ""LAODICE - Après tant de hauts faits, il m'est bien doux, Seigneur, De voir encore mes yeux régner sur votre cœur ; De voir, sous les lauriers qui vous couvrent la tête, Un si grand conquérant être encore ma conquête, Et de toute la gloire acquise à ses travaux Faire un illustre hommage à ce peu que je vaux."""

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Seitenzahl: 87

Veröffentlichungsjahr: 2015

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Au lecteur

Voici une pièce d’une constitution assez extraordinaire, aussi est-ce la vingt et unième que j’ai fait voir sur le théâtre, et après y avoir fait réciter quarante mille vers, il est bien malaisé de trouver quelque chose de nouveau, sans s’écarter un peu du grand chemin, et se mettre au hasard de s’égarer. La tendresse et les passions qui doivent être l’âme des tragédies, n’ont aucune part en celle-ci ; la grandeur de courage y règne seule, et regarde son malheur d’un œil si dédaigneux, qu’ils ne sauraient arracher une plainte. Elle y est combattue par la politique, et n’oppose à ses artifices qu’une prudence généreuse, qui marche à visage découvert, qui prévoit le péril sans s’émouvoir, et ne veut point d’autre appui que celui de sa vertu, et de l’amour qu’elle imprime dans les cœurs de tous les peuples. L’histoire qui m’a prêté de quoi la faire paraître en ce haut degré, est tirée de Justin, et voici comme il la raconte à la fin de son quatrième livre :

« En même temps Prusias roi de Bithynie prit dessein de faire assassiner son fils Nicomède, pour avancer ses autres fils qu’il avait eu d’une autre femme, et qu’il faisait élever à Rome mais ce dessein fut découvert à ce jeune prince par ceux même qui l’avaient entrepris. Ils firent plus, ils l’exhortèrent à rendre la pareille à un père si cruel, et faire retomber sur sa tête les embûches qu’ils lui avait préparées et n’eurent pas grande peine à le persuader. Sitôt donc qu’il fut entré dans le royaume de son père qui l’avait appelé près de lui, il fut proclamé roi ; et Prusias, chassé du trône, et délaissé même de ses domestiques, quelque soin qu’il prit à se cacher, fut enfin tué par ce fils, et perdit la vie dans un crime aussi grand que celui qu’il avait commis, en donnant les ordres de l’assassiner. »

J’ai ôté de ma scène l’horreur d’une catastrophe si barbare, et n’ai donné, ni au père, ni au fils, aucun dessein de parricide. J’ai fait ce dernier amoureux de Laodice, afin que l’union d’une couronne voisine donnât plus d’ombrage aux Romains, et leur fit prendre plus de soin d’y mettre un obstacle de leur part. J’ai approché de cette histoire celle de la mort d’Annibal, qui arriva un peu auparavant chez ce même roi, et dont le nom n’est pas un petit ornement à mon usage : j’en ai fait Nicomède disciple, pour lui prêter plus de valeur et plus de fierté contre les Romains ; et prenant l’occasion de l’ambassade où Flaminius fut envoyé par eux vers ce roi leur allié, pour demander qu’on remît entre leurs mains ce vieil ennemi de leur grandeur, je l’ai chargé d’une commission secrète de traverser ce mariage, qui leur devait donner de la jalousie. J’ai fait que pour gagner l’esprit de la reine, qui suivant l’ordinaire des secondes femmes, avait tout pouvoir sur celui de son vieux mari, il lui ramène un de ses fils que mon auteur m’apprend avoir été nourri à Rome. Cela fait deux effets, car d’un côté il obtient la perte d’Annibal par le moyen de cette mère ambitieuse, et de l’autre, il oppose à Nicomède un rival appuyé de toute la faveur des Romains, jaloux de sa gloire et de sa grandeur naissante.

La représentation n’en a point déplu, et comme ce ne sont pas les moindres vers qui soient partis de ma main, j’ai sujet d’espérer que la lecture n’ôtera rien à cet ouvrage de la réputation qu’il s’est acquise jusqu’ici, et ne le fera point juger indigne de suivre ceux qui l’ont précédé. Mon principal but a été de peindre la politique des Romains, au-dehors, et comme ils agissaient impérieusement avec les rois leurs alliés, leurs maximes pour les empêcher de s’accroître, et les soins qu’ils prenaient de traverser leur grandeur quand elle commençait à leur devenir suspecte à force de s’augmenter et de se rendre considérable par de nouvelles conquêtes. C’est le caractère que j’ai donné à leur République en la personne de son ambassadeur Flaminius, qui rencontre un prince intrépide, qui voit sa perte assurée sans s’ébranler, et brave l’orgueilleuse masse de leur puissance, lors même qu’il en est accablé. Ce héros de ma façon sort un peu des règles de la tragédie, en ce qu’il ne cherche point à faire pitié par l’excès de ses malheurs : mais le succès a montré que la fermeté des grands cœurs, qui n’excite que l’admiration dans l’âme du spectateur, est quelquefois aussi agréable, que la compassion que notre art nous commande de mendier pour leurs misères. Il est bon de hasarder un peu, et ne s’attacher pas toujours si servilement à ces préceptes, ne fût-ce que pour pratiquer celui de notre Horace :

Et mihi res, non me rebus, submittere conor.

Mais il faut que l’évènement justifie cette hardiesse, et dans une liberté de cette nature on demeure coupable à moins que d’être fort heureux.

Personnages

PRUSIAS, roi de Bithynie.

FLAMINIUS, ambassadeur de Rome.

ARSINOÉ, seconde femme de Prusias.

LAODICE, reine d’Arménie.

NICOMÈDE, fils aîné de Prusias, sorti du premier lit.

ATTALE, fils de Prusias et d’Arsinoé.

ARASPE, capitaine des gardes de Prusias.

CLÉONE, confidente d’Arsinoé.

La scène est à Nicomédie.

Acte I
Scène première

Nicomède, Laodice.

LAODICE
Après tant de hauts faits, il m’est bien doux, Seigneur,
De voir encore mes yeux régner sur votre cœur ;
De voir, sous les lauriers qui vous couvrent la tête,
Un si grand conquérant être encore ma conquête,
Et de toute la gloire acquise à ses travaux
Faire un illustre hommage à ce peu que je vaux.
Quelques biens toutefois que le ciel me renvoie,
Mon cœur épouvanté se refuse à la joie :
Je vous vois à regret, tant mon cœur amoureux
Trouve la cour pour vous un séjour dangereux.
Votre marâtre y règne, et le roi votre père
Ne voit que par ses yeux, seule la considère,
Pour souveraine loi n’a que sa volonté :
Jugez après cela de votre sûreté.
La haine que pour vous elle a si naturelle
À mon occasion encore se renouvelle.
Votre frère son fils, depuis peu de retour…
NICOMÈDE
Je le sais, ma princesse, et qu’il vous fait la cour ;
Je sais que les Romains, qui l’avaient en otage,
L’ont enfin renvoyé pour un plus digne ouvrage ;
Que ce don à sa mère était le prix fatal
Dont leur Flaminius marchandait Annibal ;
Que le roi par son ordre eût livré ce grand homme,
S’il n’eût par le poison lui-même évité Rome,
Et rompu par sa mort les spectacles pompeux
Où l’effroi de son nom le destinait chez eux.
Par mon dernier combat je voyais réunie
La Cappadoce entière avec la Bithynie,
Lorsqu’à cette nouvelle, enflammé de courroux
D’avoir perdu mon maître et de craindre pour vous,
J’ai laissé mon armée aux mains de Théagène,
Pour voler en ces lieux au secours de ma reine.
Vous en aviez besoin, madame, et je le vois,
Puisque Flaminius obsède encor le roi.
Si de son arrivée Annibal fut la cause,
Lui mort, ce long séjour prétend quelque autre chose ;
Et je ne vois que vous qui le puisse arrêter,
Pour aider à mon frère à vous persécuter.
LAODICE
Je ne veux point douter que sa vertu romaine
N’embrasse avec chaleur l’intérêt de la reine :
Annibal, qu’elle vient de lui sacrifier,
L’engage en sa querelle, et m’en fait défier.
Mais, Seigneur, jusqu’ici j’aurais tort de m’en plaindre ;
Et quoi qu’il entreprenne, avez-vous lieu de craindre ?
Ma gloire et mon amour peuvent bien peu sur moi,
S’il faut votre présence à soutenir ma foi,
Et si je puis tomber en cette frénésie
De préférer Attale au vainqueur de l’Asie ;
Attale, qu’en otage ont nourri les Romains,
Ou plutôt qu’en esclave ont façonné leurs mains,
Sans lui rien mettre au cœur qu’une crainte servile
Qui tremble à voir un aigle, et respecte un édile !
NICOMÈDE
Plutôt, plutôt la mort, que mon esprit jaloux
Forme des sentiments si peu dignes de vous.
Je crains la violence, et non votre faiblesse ;
Et si Rome une fois contre nous s’intéresse…
LAODICE
Je suis reine, Seigneur ; et Rome a beau tonner,
Elle ni votre roi n’ont rien à m’ordonner :
Si de mes jeunes ans il est dépositaire,
C’est pour exécuter les ordres de mon père :
Il m’a donnée à vous, et nul autre que moi
N’a droit de l’en dédire, et me choisir un roi.
Par son ordre et le mien, la reine d’Arménie
Est due à l’héritier du roi de Bithynie,
Et ne prendra jamais un cœur assez abject
Pour se laisser réduire à l’hymen d’un sujet.
Mettez-vous en repos.
NICOMÈDE
Et le puis-je, madame,
Vous voyant exposée aux fureurs d’une femme,
Qui pouvant tout ici, se croira tout permis
Pour se mettre en état de voir régner son fils ?
Il n’est rien de si saint qu’elle ne fasse enfreindre.
Qui livrait Annibal pourra bien vous contraindre,
Et saura vous garder même fidélité
Qu’elle a gardée aux droits de l’hospitalité.
LAODICE
Mais ceux de la nature ont-ils un privilège
Qui vous assure d’elle après ce sacrilège ?
Seigneur, votre retour, loin de rompre ses coups,
Vous expose vous-même, et m’expose après vous.
Comme il est fait sans ordre, il passera pour crime ;
Et vous serez bientôt la première victime
Que la mère et le fils, ne pouvant m’ébranler,
Pour m’ôter mon appui se voudront immoler.
Si j’ai besoin de vous de peur qu’on me contraigne,
J’ai besoin que le roi, qu’elle-même vous craigne.
Retournez à l’armée, et pour me protéger
Montrez cent mille bras tous prêts à me venger.
Parlez la force en main, et hors de leur atteinte :
S’ils vous tiennent ici, tout est pour eux sans crainte ;
Et ne vous flattez point ni sur votre grand cœur,
Ni sur l’éclat d’un nom cent et cent fois vainqueur ;
Quelque haute valeur que puisse être la vôtre,
Vous n’avez en ces lieux que deux bras comme un autre ;
Et fussiez-vous du monde et l’amour et l’effroi,
Quiconque entre au palais porte sa tête au roi.
Je vous le dis encor retournez à l’armée ;
Ne montrez à la cour que votre renommée ;
Assurez votre sort pour assurer le mien ;
Faites que l’on vous craigne, et je ne craindrai rien.
NICOMÈDE
Retourner à l’armée ! Ah ! Sachez que la reine
La sème d’assassins achetés par sa haine.
Deux s’y sont découverts, que j’amène avec moi
Afin de la convaincre et détromper le roi.
Quoiqu’il soit son époux, il est encore mon père ;
Et quand il forcera la nature à se taire,