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Écrite par plus de 7 400 auteurs spécialistes et riche de près de 30 000 médias (vidéos, photos, cartes, dessins…), l’Encyclopaedia Universalis est la plus fiable collection de référence disponible en français. Elle aborde tous les domaines du savoir...

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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782852298774

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Charcompix/Shutterstock

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Afghanistan

Introduction

Dépourvu d’accès à la mer, l’Afghanistan est entouré au nord par le Turkménistan, l’Ouzbékistan et le Tadjikistan ; à l’ouest par l’Iran ; au sud et à l’est par le Pakistan ; au nord-est, le corridor de Wakhan est limitrophe du Xinjiang chinois.

Afghanistan : drapeau. Afghanistan (2004). Ce pays détient le record du nombre de drapeaux nationaux successifs depuis son indépendance : plus d'une vingtaine ! Aux premiers drapeaux, noirs aux armes royales, à son retour d'Europe en juin 1928, le roi Amanoullah adopta un tricolore vert, noir et rouge (peut-être influencé par le modèle italien). Le centre porta en blanc diverses armes et fut, du début des années 1930 à 1974, associé au royaume. La république, puis les régimes communiste, anticommuniste et des talibans modifièrent profondément les couleurs et les armes du pays. En 2002, à la suite du renversement des talibans, le gouvernement du président Karzaï (qui est reconnu internationalement et contrôle la capitale et la plus grande partie du pays) reprit les couleurs tricolores et les armes de la monarchie, légèrement modifiées pour l'État transitoire.L'article 1erdu chapitre 19 de la Constitution de la nouvelle République islamique d'Afghanistan, adoptée le 4 janvier 2004, rapproche encore son drapeau de celui du royaume. Ses proportions reviennent à 2 : 3 et ses armes redeviennent blanches sur la bande rouge. L'emblème national représente un mihrab et un minbar dans une mosquée surmontée d'une coupole et encadrée de deux drapeaux. Au-dessous figure la date 1298 de l'Hégire (1919, indépendance reconnue par la Grande-Bretagne). Le ruban qui lie les deux gerbes de blé porte « Afghanistan ». La partie supérieure est constituée par le Takbir : « Allah est grand » surmonté par un soleil naissant et de la Shahada : « Il n'y a de Dieu qu'Allah et Mahomet est Son Prophète ».

L’Afghanistan est plus grand que la France (652 000 km2) mais sa population, estimée entre 25 et 30 millions d’habitants au milieu des années 2000, est très inégalement répartie sur un territoire occupé, pour plus de la moitié, par de hauts plateaux et d’imposantes montagnes où s’accumulent les neiges. Le reste du sol est partagé entre des plaines fertiles qu’arrosent les cours d’eau formant un certain nombre de bassins agricoles, des steppes, quelques forêts, des marécages et des déserts de sable.

L’histoire de l’Afghanistan, qui remonte à l’aube de la civilisation, a été influencée, dans une grande mesure, par sa situation géographique. Situé au centre du continent asiatique et à cheval sur l’imposante barrière de l’Hindou-Kouch, il a contrôlé depuis la préhistoire les voies de passage vers le sous-continent indien, qui fut toujours l’objet de convoitise des grands conquérants. Il fut envahi, dévasté et traversé, à tour de rôle, par les armées perses, grecques et arabes, mais plus fréquemment par les hordes nomades habitant les steppes et les forêts du Nord, telles que les Aryens, les Scythes, les Parthes, les Kushana, les Huns et, vagues après vagues, par des tribus turco-mongoles dirigées par des conquérants bien connus comme Gengis khan et Tamerlan.

Jusqu’au XVIe siècle de l’ère chrétienne, les événements se déroulaient selon le schéma suivant : une population pressée par des motifs économiques aussi bien que politiques et climatiques quittait son habitat traditionnel et, traversant l’Oxus, occupait l’Afghanistan du Nord. Après une pause plus ou moins longue, elle réussissait soit à vaincre la barrière de l’Hindou-Kouch, soit à la contourner à son extrémité ouest, dans la vallée du Hari-Rud, et s’établissait dans les bassins de Kaboul et de Kandahar. Après une nouvelle pause, elle se frayait un chemin vers le bassin de l’Indus et déferlait dans la plaine indo-gangétique, où elle ne tardait pas à être absorbée dans la masse de la population indienne. Entre-temps, la frontière de l’Indus, négligée et restée sans défense, était attaquée par une nouvelle vague de peuples nomades, qui, après avoir suivi à peu près le même itinéraire, subissait un sort semblable.

Cela explique en partie la richesse archéologique du pays dont le sol, malgré les travaux accomplis par les différentes équipes de recherche, surtout celle de la France (D.A.F.A.), a été à peine égratigné et peut révéler bien des faits historiques encore inconnus. Cela explique aussi la grande diversité ethnique et linguistique de la population de l’Afghanistan.

Par ailleurs, les caravanes ayant toujours suivi les armées, après chaque invasion, l’Afghanistan reprenait son rôle de zone de transit et servait d’entrepôt aux marchandises échangées par les pays qui faisaient du commerce. Mais les échanges eux-mêmes étaient de nature diverse. Outre les marchandises, ils concernaient la transmission des idées et des cultures. C’est en effet par l’Afghanistan que le bouddhisme, chassé de l’Inde, passa en Chine et dans les autres pays de l’Extrême-Orient, que l’hellénisme pénétra en Inde et que l’islam se répandit dans le sous-continent et en Transoxiane.

Mais, à partir du XVIe siècle, l’ouverture de la voie maritime entre l’Europe et l’Asie, en privant l’Afghanistan de son rôle de pays de transit, contribua considérablement à sa décadence économique et culturelle. Malgré l’établissement de l’empire des Durani par Ahmad shah, au XVIIIe siècle, l’isolement du pays continua, favorisé par l’obscurantisme et la suspicion excessive de la monarchie. Même au XIXe siècle, quand la plupart des pays d’Asie et d’Afrique faisaient l’expérience directe de la pensée et de la technique modernes apportées par les pays colonisateurs, l’impérialisme britannique préféra maintenir l’Afghanistan dans un état d’isolement complet sur le plan politique et culturel.

Durant cette période, la monarchie afghane chercha à consolider sa position face à des tribus et à des groupements ethno-linguistiques puissants qui tâchaient, par tous les moyens, de préserver leur autonomie locale. Quoiqu’elle eût réussi à rétablir l’unité politique et administrative du pays, elle échoua dans la tâche, plus importante, de l’intégration économique, sociale et culturelle de sa population, surtout à cause de sa propre dépendance à l’égard de certains groupements qui l’obligeaient, en échange de leur appui, à préserver la structure tribale et féodale du pays.

L’État afghan, indépendant depuis sa création (1747), devient une république en 1973. Théâtre d’incessants conflits ethnico-religieux, le pays subit l’occupation soviétique (1979-1988), destinée à soutenir le pouvoir en place, en butte à la résistance islamiste, armée par les États-Unis. Le retrait soviétique en 1992 est suivi de l’affrontement pour le pouvoir entre les deux principales ethnies, les Pachtouns et les Tadjiks. En 1996, un groupe radical, les talibans, s’empare du pouvoir et instaure un régime islamique strict. Après les attentats du 11 septembre 2001, Washington, dans sa lutte contre le terrorisme, attaque l’Afghanistan, dont le régime protège Oussama ben Laden, et obtient le départ des talibans. La mise en place de nouvelles institutions redonne espoir à la population.

Mir Mohammad Sediq FARHANG

Sayed Qassem RESHTIA

E.U.

1. Géographie

État enclavé au cœur du continent asiatique, l’Afghanistan couvre 652 000 km2. Sa situation au carrefour de l’Asie centrale, du sous-continent indien et du Moyen-Orient, trois ensembles géographiques auxquels on peut légitimement le rattacher, en a fait au cours de l’histoire le point de passage obligé de nombreuses invasions et un foyer de rivalités internationales qui n’ont jamais cessé jusqu’à aujourd’hui. Ses frontières, totalement arbitraires, ont d’ailleurs été fixées à la fin du XIXe siècle par ses deux puissants voisins d’alors, l’empire des Indes et l’empire tsariste, soucieux de ménager entre eux un espace-tampon après y avoir entretenu des visions de conquête.

• Le milieu naturel

Le cœur de l’Afghanistan correspond au massif de l’Hindou-Kouch et à ses annexes, prolongement occidental de l’Himalaya, dont l’étymologie populaire (« tueur des Hindous ») dit assez l’obstacle topographique formidable qu’il a représenté dans l’imaginaire collectif. C’est aussi une limite biogéographique et culturelle majeure séparant, sur un millier de kilomètres, le Turkestan, au nord, du monde irano-indien au sud. Très large mais pas très haut à l’ouest (4 182 m au Koh-e Malmond), il se rétrécit en même temps que son altitude croît en direction de l’est, où il finit par se fondre avec les autres chaînes centrasiatiques dans l’imposant nœud orographique du Pamir, aux confins de la Chine, du Tadjikistan et du Pakistan. C’est là que se localise le point culminant du pays (Nowshak, 7 492 m). Des cols très élevés, le plus souvent impraticables en hiver, assurent des relations difficiles entre les deux versants ; seul le doublement de l’un d’entre eux, le col du Salang (3 360 m), par un tunnel routier en 1964 a rendu moins aléatoires les liaisons entre Kaboul, sur le versant sud, et les villes du piémont turkestanais au nord.

C’est aussi un formidable château d’eau, d’où descendent des cours d’eau pérennes dont les apports sont vitaux pour l’économie afghane. Seuls ceux du versant sud-est, appartenant au bassin-versant de l’Indus, parviennent à la mer. Tous les autres, sans exception, sont endoréiques. Leurs eaux se perdent dans d’immenses cuvettes lacustres comme celle du Sistan, partagée entre l’Afghanistan et l’Iran, pour le bassin du Helmand, ou celle de l’Aral, pour l’Amou-Darya et ses affluents ; parfois elles se perdent dans les sables en de vastes deltas intérieurs qui ont précocement localisé de vastes oasis dont les plus notables sont celles de la Margiane (deltas du Hari Roud et du Mourghab, sur le territoire actuel du Turkménistan) et de la Bactriane (delta du Balkhab, entièrement en territoire afghan).

L’Afghanistan appartient en effet dans sa quasi-totalité à la diagonale aride de l’Ancien Monde. Les précipitations y sont rares (310 mm/an à Kaboul, tombant en 69 jours) et aléatoires, concentrées sur la saison froide pendant laquelle elles tombent partiellement sous forme neigeuse en raison de la continentalité du pays (vingt jours de neige à Kaboul). Les confins afghano-pakistanais, de part et d’autre de la passe de Khyber, constituent toutefois une exception. S’y fait en effet encore sentir l’influence, très irrégulière, de la mousson d’été indienne. Cet « Afghanistan des moussons » est en réalité une antichambre de la péninsule indienne. On y trouve les seules véritables forêts du pays, étagement de chênes sur les basses pentes et de conifères plus haut en altitude, dont le très beau cèdre de l’Himalaya (Cedrus deodara), qui atteignait ici ses avant-postes les plus occidentaux avant qu’un déboisement incontrôlé dans la seconde moitié du XXe siècle n’en limite les peuplements aux régions les plus reculées. Partout ailleurs, ce qu’on baptise forêts ne sont en réalité que des peuplements très clairsemés de pistachiers ou de genévriers. La formation végétale dominante est la steppe à armoises, enrichie au printemps d’éphémérophytes qui peuvent brièvement constituer des pâturages opulents, particulièrement sur les collines lœssiques du piémont bactrien.

• La population

La population de l’Afghanistan reste une des plus mal connues du monde. Un seul recensement, très imparfait, y a été réalisé (1979). Les chiffres disponibles sont donc des estimations, à commencer par celui de la population totale, qui oscille, selon les sources, entre 25 et 30 millions d’habitants en 2005, soit une incertitude de l’ordre de 20 p. 100 qui s’explique en partie par l’inégale prise en compte des émigrés. Ce qui est incontestable, en revanche, c’est le retard de la transition démographique : l’indice de fécondité culmine à 6,8 enfants par femme, un taux qui n’est dépassé que par quelques États africains ; la mortalité générale est de l’ordre de 22 p. 1 000 et la natalité de 48 p. 1 000, des chiffres qui, s’ils devaient se maintenir, conduiraient à une population d’une cinquantaine de millions d’habitants dès 2025 ; l’espérance de vie à la naissance est de 41 ans pour les hommes, 42 ans pour les femmes, l’une des plus basses du monde. Rien d’étonnant à cela au demeurant, dans un pays où 87 p. 100 de la population n’a pas accès à l’eau potable et où l’infrastructure sanitaire et médicale, en légers progrès dans les années 1970, s’est considérablement dégradée au cours des vingt-cinq années de guerre qui ont suivi. Le nombre de dispensaires a récemment été estimé à 800, alors que les besoins seraient de l’ordre de 6 000. Des maladies d’ordinaire bien contrôlées, telles que le choléra, la poliomyélite ou le tétanos (10 000 décès par an), ont ainsi acquis un statut endémique. Le paludisme est fréquent dans les régions basses. Seule la rougeole, responsable de plus de 30 000 décès en 2000, est désormais sous meilleur contrôle (559 décès enregistrés en 2004) grâce à des campagnes régulières de vaccination dont l’efficacité demeure toutefois insuffisante par suite de l’inaccessibilité physique des régions les plus reculées et de l’insécurité ou de l’absence de contrôle gouvernemental sur une partie du pays. La mortalité infantile (172 p. 1 000, record mondial) et maternelle soustraierait quotidiennement la vie à six cents enfants (un décès toutes les deux minutes et demie) et à cinquante femmes (un décès toutes les trente minutes).

Une population déracinée

Depuis le recensement de 1979, la répartition de la population a connu de tels bouleversements que les résultats en sont aujourd’hui totalement caducs. Vingt-cinq années de guerre et d’insécurité chronique ont en effet jeté sur les routes de l’émigration vers l’étranger ou de l’exode intérieur, parfois les deux successivement, un tiers au moins de la population totale, avec des phases de rémission marquées par des retours partiels mais pas toujours définitifs. Le déracinement est ainsi devenu une des spécificités les plus significatives de la population afghane. S’il existe désormais une véritable diaspora afghane à horizon mondial (Europe occidentale, Amérique du Nord, Australie), le gros de l’émigration s’est toutefois dirigé préférentiellement vers les pays bordiers à forte affinité culturelle : l’Iran a accueilli jusqu’à trois millions de réfugiés, et le Pakistan cinq autres millions ; de 2002 à 2006, un ambitieux programme de rapatriement et d’aide à la réinsertion a été mis en œuvre sous l’égide du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (H.C.R.), aboutissant au retour de plus de 4 millions de personnes (2,8 du Pakistan et 1,4 d’Iran). Il resterait toutefois encore plus d’un million de réfugiés en Iran et 2,5 au Pakistan, prémices d’une implantation durable à moyen ou à plus long terme. Cette population, souvent bien intégrée aux marchés du travail locaux, a maintenu cependant des liens étroits avec les localités d’origine : retours périodiques, alliances matrimoniales et transferts massifs d’argent (sans doute entre 1 et 2 milliards de dollars par an) contribuent de manière décisive à la survie et à l’ouverture sur le monde extérieur de maintes communautés rurales qui vivaient naguère repliées sur elles-mêmes. La multiplication des bazars ruraux permanents dans les années 1990 illustre de manière spectaculaire cette monétarisation exogène croissante de l’économie villageoise, jusque dans des localités d’accès difficile : on en compterait aujourd’hui près de trois mille, répartis dans tout le pays, auxquels s’ajoutent un nombre indéterminé de bazars temporaires, hebdomadaires ou saisonniers.

Quant à l’exode intérieur, il a principalement contribué à accélérer une urbanisation jusqu’alors bien modeste. Certes, avec moins de 30 p. 100 de population urbaine, l’Afghanistan reste l’un des États les moins urbanisés du monde. L’insécurité, jointe à l’hésitation ou à l’impossibilité, pour de nombreux réfugiés, de se réinstaller dans leur région d’origine, notamment lorsque les infrastructures d’irrigation vitales étaient devenues inutilisables ont toutefois changé les choses. Kaboul, capitale excentrée, est ainsi devenue une ville de quelque trois millions d’habitants, alors qu’elle en comptait six fois moins en 2001. La crise du logement et le sous-emploi y atteignent une ampleur sans précédent, encore aggravée par les traces toujours béantes des combats fratricides à l’arme lourde qui ont opposé entre eux les divers clans de maquisards anticommunistes après leur entrée dans la ville en 1992. Les autres villes importantes se répartissent de manière régulière sur les piémonts des montagnes centrales, le long d’une rocade routière restée inachevée dans le nord-ouest : Kandahar, métropole du Sud, vieille capitale impériale un temps ressuscitée dans ce rôle par le régime des talibans ; Herat, métropole de l’Ouest afghan, déjà très iranienne par bien des aspects ; Mazar-i-Sharif, métropole du Nord, la seule de ces villes sans passé prestigieux, aujourd’hui la plus dynamique économiquement. Entre elles, un semis de villes moyennes assurent les activités de services requises par la population : chefs-lieux de province, petits centres industriels (surtout dans le nord-est), gros marchés de collecte de produits agricoles et de distribution de biens de consommation. Les montagnes, elles, restent sous-urbanisées, les difficultés de circulation entraînant le maintien d’une vie encore largement autarcique dans nombre de hautes vallées. L’émigration de survie qui y prévaut a toutefois fait apparaître de nouveaux modes de consommation, annonciateurs de changements profonds.

La mosaïque ethnique

Si l’Afghanistan est étymologiquement le « pays des Afghans », c’est-à-dire des Pashtouns, il est en réalité une mosaïque de peuples divers dont l’unification politique n’a jamais été vraiment réalisée et qui occupent presque tous des aires géographiques chevauchant les frontières du pays, ce qui a toujours compliqué les relations de celui-ci avec ses voisins. Les ethnies parlant l’une des langues iraniennes sont de très loin les plus nombreuses, contribuant à faire de l’Afghanistan un prolongement culturel de l’Iran auquel son destin historique a d’ailleurs été longtemps lié. Les Pashtouns, tribalisés au sein d’une mégastructure généalogique patrilinéaire qui les fait mythiquement descendre d’un ancêtre commun, et par ailleurs fondateurs de l’État afghan moderne (1747) au sein duquel ils sont toujours restés politiquement dominants, représentent sans doute près de 40 p. 100 de la population, surtout concentrés dans le sud du pays ; les Tadjiks, parlant le dari, variante orientale du persan et lingua franca du pays, en constituent autour de 25 p. 100, principalement dans l’Ouest et le Nord-Est ; les Baloutches, disséminés dans les déserts bordiers de la frontière méridionale, sont moins de 2 p. 100 ; beaucoup plus nombreux (environ 15 p. 100), les Hazaras du centre de l’Hindou-Kouch représentent le cas particulier d’une population d’origine turco-mongole linguistiquement iranisée. Les turcophones, implantés exclusivement dans le nord du pays et dont les effectifs ont été renforcés au cours du second quart du XXe siècle par un afflux de réfugiés en provenance de l’Asie centrale soviétique, sont représentés par des Ouzbeks (6 p. 100) et des Turkmènes (moins de 2 p. 100), ainsi que par quelques milliers de Kirghiz dans le Wakhan, ou Pamir afghan. Enfin, l’Hindou-Kouch oriental abrite des isolats linguistiques originaux, Pashaïs et Nouristanis du versant sud, tardivement islamisés au XVIe et à la fin du XIXe siècle respectivement, Wakhis, Ishkashmis ou Monjanis du versant nord, parfois collectivement désignés sous le nom de Tadjiks du Pamir.