Birmanie - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Birmanie E-Book

Encyclopaedia Universalis

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Beschreibung

La Birmanie (renommée Myanmar en 1989) est l'un des grands carrefours de l'Asie. Aux confins de l'Inde et de la Chine, elle est le reflet des influences multiples qu'elle tire de sa position géographique....

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ISBN : 9782852298811

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

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Birmanie

Introduction

La Birmanie (renommée Myanmar en 1989) est l’un des grands carrefours de l’Asie. Aux confins de l’Inde et de la Chine, elle est le reflet des influences multiples qu’elle tire de sa position géographique.

Birmanie : drapeau. Birmanie ou Myanmar (2010). La promulgation d'une nouvelle Constitution, le 21 octobre 2010, s'accompagne d'un changement de drapeau. Ce dernier reprend les trois bandes jaune, verte et rouge choisies par le régime fantoche japonais en 1943, mais, au lieu de comporter en son centre un paon, symbole du soleil et du bouddhisme et signe de bonheur et d'unité, il présente une étoile blanche.

Majoritairement bouddhiste, le pays, dont la population est estimée à 60 millions d’habitants (2011), est une véritable mosaïque ethnoculturelle dominée par l’ethnie birmane (bamar) depuis la période glorieuse de Pagan (XIe-XIIIe siècles). Son histoire est ainsi l’illustration des interactions plus ou moins violentes entre les Birmans majoritaires, qui peuplent la plaine centrale et le delta de l’Irrawaddy et les différentes minorités en marge du territoire.

Depuis son indépendance acquise en 1948, la Birmanie est en proie à une profonde instabilité politique. La présence, de 1962 à 2011, de régimes militaires successifs particulièrement dirigistes et xénophobes s’est traduite au sein de la société birmane par de fortes tendances politiques, économiques mais aussi culturelles à un repli nationaliste autour de l’ethnie birmane.

Renaud EGRETEAU

1. Géographie

Avec ses quelque 678 500 kilomètres carrés qui s’étendent des sommets pré-himalayens au nord aux plaines côtières de l’isthme de Kra au sud, la Birmanie, dont la nouvelle capitale Naypyidaw a remplacé Rangoon en 2005, est le plus vaste pays d’Asie du Sud-Est continentale, et le deuxième de toute la région après l’Indonésie. Son territoire se situe presque entièrement sous des latitudes tropicales, à l’ouest de la péninsule indochinoise, au contact de deux grands foyers de civilisation qui l’ont influencée profondément, l’Inde (sur 1 463 kilomètres) au nord-ouest, et la Chine (sur 2 185 kilomètres), au nord-est. Elle partage aussi une frontière avec la Thaïlande (sur 1 800 kilomètres) au sud-est, et avec le Bangladesh (sur seulement 193 kilomètres) à l’ouest, et le Laos (sur 235 kilomètres) à l’est. Les frontières du pays ne correspondent pas seulement aux limites de l’espace politique birman, qui regroupe sept divisions majoritairement birmanes (Irrawaddy, Pegu, Magwe, Mandalay, Sagaing, Tenasserim et Rangoon) et sept États non majoritairement birmans (Chin, Kachin, Karen, Kayah, Môn, Arakan et Shan), mais aussi aux obstacles physiques que constituent les montagnes de la périphérie birmane. Celles-ci marquent la différence, et même l’opposition, entre les hautes terres périphériques des minorités ethniques et les vastes bassins fluviaux centraux, majoritairement peuplés de Birmans.

• Un pays de contrastes physiques

À divers égards, la Birmanie est à l’image de l’Asie du Sud-Est continentale : son relief est lui aussi marqué par des directions orographiques nettement méridiennes qui cloisonnent plaines et bassins alluviaux et ont influencé les migrations et les répartitions humaines au cours des siècles.

Ainsi, la Birmanie centrale est un bassin d’effondrement qui s’étire sur 1 000 kilomètres du nord au sud, des monts Kachin au delta de l’Irrawaddy, qui débouche dans le golfe de Martaban. Les monts Kachin, qui vont de l’Arunachal Pradesh indien à l’ouest aux contreforts chinois du plateau tibétain au nord, et au plateau du Yunnan à l’est, ferment le bassin de la zone sèche de haute Birmanie. Ils alimentent les deux rivières dont la confluence, quelque 50 kilomètres au nord de Myitkyina, donne naissance à l’Irrawaddy, le principal fleuve du pays, qui s’écoule longitudinalement sur près de 2 170 kilomètres et draine pas moins de 60 p. 100 des terres du pays (411 000 kilomètres carrés). Principale voie navigable, et longtemps premier axe de communication du pays, ce fleuve était, pour les Britanniques, la Road to Mandalay, ancienne capitale et deuxième ville du pays après Rangoon. L’une des deux sources du fleuve se situe au pied du sommet le plus élevé de l’Asie du Sud-Est, le mont Hkakabo Razi (5 881 mètres). Au sud, le massif du Pegu Yoma sépare la vallée de l’Irrawaddy, à l’ouest et jusqu’à la naissance du delta, de la vallée du Sittang (420 kilomètres), à l’est.

À l’ouest, le pays est bordé d’une succession de reliefs d’altitude issus de plis tertiaires : les chaînes plissées des monts Kumon, Paktaï, Naga et Chin, le long de la frontière indienne, et la chaîne côtière de l’Arakan Yoma qui prolonge les premières jusqu’au delta de l’Irrawaddy, en basse Birmanie. L’ouest de la Birmanie est drainé par la Chindwin (840 kilomètres) qui, après avoir quitté la vallée de Hukawng, où a été créée, en 2001, la plus grande réserve mondiale de tigres, devient le principal affluent de l’Irrawaddy.

À l’est, le long des frontières chinoise, laotienne et thaïlandaise, une zone géologique plus ancienne est constituée par l’immense plateau Shan, extension du grand plateau du Yunnan, qui domine la dépression centrale birmane par un escarpement de faille de plus de 1 000 mètres de dénivellation. Le fleuve Salouen (2 400 kilomètres) prend sa source au Tibet avant de drainer le plateau Shan en le scindant en deux et en creusant le plus long canyon du monde : la circulation y est d’autant plus difficile que le plateau est divisé par les nombreux chaînons longitudinaux qui en émergent. À l’est, la frontière laotienne se confond avec le fleuve Mékong, le plus long fleuve d’Asie du Sud-Est (4 350 kilomètres).

Au sud-est, le plateau Shan est prolongé par la chaîne profondément disséquée du Tenasserim qui forme une partie de l’isthme de Kra, bande de terre constituée d’une cordillère centrale, qui sépare la mer d’Andaman du golfe de Thaïlande et joint le continent asiatique à la péninsule malaise.

La Birmanie est également un pays côtier : ses 1 930 kilomètres de côtes longent le golfe du Bengale, au nord-ouest, et la mer d’Andaman, au sud-est. Le littoral birman est formé de plaines côtières adossées aux reliefs de l’Arakan Yoma et de la chaîne du Tenasserim. Le delta de l’Irrawaddy, qui prend naissance à quelque 300 kilomètres du front de mer, large d’environ 250 kilomètres, est structuré par l’estuaire du fleuve et huit bras, dont la rivière Bassein, à l’ouest. Colonisé à partir du milieu du XVIIIe siècle par les Birmans, le delta devint la principale région rizicole du pays sous l’occupation anglaise (1885-1948).

Le climat tropical et le régime des vents et des pluies de mousson qui caractérisent la Birmanie favorisent, en effet, le développement d’une riziculture intensive dans les régions les plus largement et les plus régulièrement arrosées : le delta de l’Irrawaddy (entre 2 et 3 mètres de précipitations annuelles), que le fleuve permet déjà d’irriguer, mais surtout les plaines côtières qui bordent l’Arakan Yoma et la chaîne du Tenasserim, qui sont les régions d’Asie du Sud-Est continentale les plus arrosées (plus de 3 mètres/an).

Mais, là encore, la Birmanie apparaît comme une terre de contrastes puisque son imposante ceinture montagneuse, elle aussi copieusement arrosée (entre 1,5 et 3 mètres) durant la saison des pluies (d’avril à octobre), sert d’abri au bassin de haute Birmanie et fait de celui-ci une région relativement sèche qui, si elle reçoit tout de même entre 500 millimètres et 1 mètre de précipitations annuelles, connaît des sécheresses en raison des importantes variations annuelles du régime pluviométrique.

• La Birmanie, entre centre et périphérie

La Birmanie est un pays de contrastes, mais pas seulement physiques. Les oppositions entre les plaines, les vallées, les plateaux et les montagnes sont largement renforcées par la distribution ethnique et démographique de la population, ainsi que par la diversité des mises en valeur et des modes d’exploitation de l’espace.

De fait, la confrontation de la carte ethnolinguistique avec celle du relief révèle une dimension majeure du peuplement birman, la dichotomie entre le centre et la périphérie. Des oppositions peuvent être établies entre les basses terres, domaine des fortes densités où la déforestation et les marécages ont voué l’espace à la fois à la riziculture inondée des populations bouddhistes sédentaires, et à l’urbanisation ; et les hautes terres, domaine multiethnique des faibles densités où les cultures pluviales de riz gluant, de maïs et de pavot sont le fait de populations tribales, en majorité animistes et parfois bouddhistes ou chrétiennes, et dont certaines ont perpétué une forme d’agriculture sur brûlis, itinérante ou non.

Ainsi, et malgré les liens historiques et culturels qui sont établis entre les populations des plaines et celles des montagnes, les différences identitaires et référentielles qui existent entre elles sont aujourd’hui encore très fortes. Elle le sont d’autant plus que le système politico-territorial actuel est hérité de la formation des grands royaumes agraires (notamment Pagan, de 1044 à 1287, et Ava, de 1364 à 1527), dont les contours ont été dessinés en fonction de la cosmologie hindouiste qui voulait que les rites de fondation situent un temple-montagne au centre de la ville royale, autour de laquelle s’étendaient concentriquement les auréoles successives du royaume (le niveau d’intégration des groupes ethniques et des villages décroissait : du centre, la capitale, aux périphéries qui jouissaient d’une autonomie politique plus ou moins grande voire d’une indépendance).

La périphérie de la Birmanie s’est ainsi, d’un point de vue politique, territorial et économique, caractérisée par une très nette marginalisation, notamment au niveau du développement limité des infrastructures de communication modernes. Elle est, en effet, autant le territoire des minorités ethniques dont certaines mènent, depuis l’indépendance (1948), une lutte armée contre le centre de pouvoir birman, que la zone de production illicite d’opium, ou encore le lieu de refuge de mouvements révolutionnaires, autonomistes, indépendantistes, ou contestataires (membres du Parti communiste birman, partis politiques à bases ethniques, étudiants, démocrates). L’instauration concomitante par Ne Win, en 1962, d’une dictature et de la Voie birmane vers le socialisme – mélange de socialisme et de bouddhisme, de modernisme totalitariste et d’isolationnisme traditionnel – a encore augmenté l’écart qui séparait les Birmans et le centre politique du pays des minorités occupant les périphéries.

La tradition d’isolationnisme politique suivie par Ne Win dura près de trente ans, jusqu’à ce que le rapprochement sino-birman en 1988-1989 (la Chine ne condamne ni le coup d’État ni les massacres de 1988, et la Birmanie ne condamne pas la répression sanglante de Tiananmen de 1989) ouvre la voie à l’établissement d’autres relations régionales, avec l’Inde notamment. Celle-ci, après avoir longtemps soutenu les forces démocratiques birmanes, opte pour une look east policy (1992) visant à contrebalancer la grandissante influence chinoise en Asie du Sud-Est continentale. C’est en partie cet isolationnisme qui, en plus d’avoir permis la conservation de la plus longue dictature militaire dans la région, a plongé le pays dans une crise économique catastrophique et l’a fourvoyé dans une impasse politique aux niveaux intérieur et extérieur. Enfin, d’un point de vue économique et politico-territorial, l’isolationnisme birman a permis, de façon paradoxale, que les minorités ethniques indépendantistes et/ou autonomistes fassent preuve d’une plus grande ouverture que la junte – alors que c’était ce qu’elle voulait éviter – et développent plus de liens avec les pays limitrophes. Le rôle crucial des zones frontières indienne, chinoise et thaïlandaise dans le développement et la pérennisation des mouvements de guérillas autonomistes (notamment chin, karen, lahu, nãga, shan) témoigne de l’impact et des conséquences de la politique de la junte sur l’ensemble du territoire birman et ses périphéries proches.

Au cours des années 1990, la signature de nombreux cessez-le-feu avec des mouvements ethniques armés ont atténué les tensions entre le centre et la périphérie. Il existe désormais des régions aux statuts spéciaux, quasi autonomes, notamment à la frontière chinoise de l’État shan : la Myanmar National Democratic Alliance Army, la United Wa State Army et la Eastern Shan State Army. Toutefois, le déplacement de la capitale, Rangoon, vers la ville nouvelle de Naypyidaw, à 13 kilomètres au nord-ouest de Pyinmana (division de Mandalay, berceau de la Burma National Army – ex-Burma Independence Army – qui a contribué à la libération de la Birmanie), en novembre 2005, traduit à la fois le sentiment d’insécurité de la junte au pouvoir face à des ennemis surtout intérieurs (celle-ci redoute un soulèvement populaire à Rangoon et même une invasion militaire par les États-Unis), et son isolationnisme persistant (le site de Naypyidaw est plus central et moins vulnérable que celui de Rangoon).

• L’unité dans la diversité

La population birmane est largement rurale (population urbaine de 28 p. 100 en 2004 contre 19 p. 100 en 1960). Située sur la rive gauche de la rivière du même nom, à quelque 30 kilomètres du golfe de Martaban, Rangoon est la principale ville, le premier port maritime, et la capitale du pays jusqu’en 2005. Elle comptait environ 4 millions d’habitants en 2002 et était quatre fois plus peuplée que la deuxième ville du pays, Mandalay (1,1 million d’hab.).

Avec une densité moyenne d’environ 73 hab./km2 en 2005 (61 en 1991), le pays est l’un des moins densément peuplés d’Asie du Sud-Est continentale et dispose de l’un des taux d’accroissement naturel les plus bas (1 p. 100 en 2005). La population birmane est relativement jeune, les moins de 14 ans représentent environ 30 p. 100 du total, les plus de 65 ans sont un peu plus de 4 p. 100. Tant le taux d’accroissement que le profil démographique de la population doivent être considérés au regard d’une mortalité infantile très importante (75 p. 1 000 pour les moins de 1 an, et 106 p. 1 000 pour les moins de 5 ans), d’une espérance de vie à la naissance de 61 ans, d’un solde migratoire négatif (— 1,85 p. 100), et d’un taux de prévalence du VIH-sida parmi les plus élevés d’Asie (1,3 p. 100 en 2005).

La population est diverse, le gouvernement distinguant 135 groupes ethniques en 2005. Les Birmans, dont la langue du même nom est la langue officielle du pays, forment 68 p. 100 de la population totale, les Shan 9 p. 100, les Karen 7 p. 100, les Arakanais 4 p. 100, les Chinois 3 p. 100, les Indiens 2 p. 100, les Môn 2 p. 100. Les nombreux autres groupes ethnolinguistiques qui peuplent la Birmanie comptent pour 5 p. 100 (Akha, Chin, Hmong, Kachin, Karenni, Lahu, Lisu, Naga, Palaung, Rohingya, Wa...). Un peu plus d’une centaine de langues sont parlées en Birmanie, mais près de 80 p. 100 de la population parle une langue tibéto-birmane. Suivant les directions méridiennes des reliefs, les vagues migratoires successives ont mené à l’occupation des différents étages altitudinaux et ont formé une véritable mosaïque ethnolinguistique. La diversité religieuse est également importante : si près de 90 p. 100 de la population est bouddhiste (Theravãda), les chrétiens et les musulmans comptent tout de même chacun pour 4 p. 100, et les animistes pour 1 p. 100. D’autres religions (hindouisme, confucianisme, etc.) sont pratiquées par 2 p. 100 de la population.

La grande diversité de la population birmane est d’autant plus complexe que les différents groupes ethnolinguistiques ont adopté et développé des formes distinctes de mise en valeur de l’espace (riziculture inondée, irriguée, pluviale, agriculture sur brûlis, itinérante ou non), notamment en fonction de leurs localisations respectives, au centre ou en périphérie, en plaine, en vallée, dans les collines ou les montagnes. De fait, la complexité cartographique du peuplement est également liée à la répartition en altitude de groupes ethniques différents mais aussi de groupes identiques.

• L’économie, entre héritages et potentiels