Laos - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Beschreibung

Le Laos, ou « pays du Million d'éléphants », est situé au cœur de l'Asie du Sud-Est continentale. Nul territoire dans cette région n'a mieux mérité le nom d'Indochine puisqu'il est situé à la charnière géographique des deux plus vieilles cultures de l'Asie. Terre de carrefour et en même temps terre isolée, le Laos a toujours été une terre contestée...

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ISBN : 9782852297975

© Encyclopædia Universalis France, 2016. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Charcompix/Shutterstock

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Laos

Introduction

Le Laos, ou « pays du Million d’éléphants », est situé au cœur de l’Asie du Sud-Est continentale. Nul territoire dans cette région n’a mieux mérité le nom d’Indochine puisqu’il est situé à la charnière géographique des deux plus vieilles cultures de l’Asie. Terre de carrefour et en même temps terre isolée, le Laos a toujours été une terre contestée. De cette position, il a tiré sa grandeur au temps du royaume du Lan Xang (XVIe siècle) où il a su s’imposer parmi des voisins divisés. De là aussi sa faiblesse lorsque ceux-ci, ayant retrouvé leur puissance, ont fait de son territoire un terrain d’affrontement.

Laos : drapeau. Laos (1975). Ce dessin fort simple a été choisi par le Pathet Lao pour remplacer le drapeau royal aux trois éléphants. La symbolique officielle y exprime la force populaire (rouge sang), les ressources naturelles et la pureté de c.ur du peuple lao ; on peut y voir aussi le disque blanc de la lune et le bleu des eaux du Mékong.

Aujourd’hui, on le qualifie souvent d’État tampon ; mais le conflit d’hégémonie, dont il est l’enjeu, ne doit pas faire oublier la guerre civile qui a déchiré ce peuple réputé pour sa douceur.

La culture laotienne a pourtant survécu aux bouleversements historiques. Son essor date de la fondation du royaume de Lan Xang par le roi Fa Ngum, au milieu du XIVe siècle. Ce roi, élevé à la cour du Cambodge, avait réuni les principautés de Luang Prabang et de Vientiane après une expédition, de Bassak au Trân-ninh. Des campagnes victorieuses le conduisirent, au sud, jusqu’au plateau de Khorat et, au nord-ouest, jusqu’au royaume de Lan Na, dans l’actuelle Thaïlande. Ainsi, dès qu’il commença à s’épanouir, l’art lao fut en contact avec l’art khmer et les arts de Thaïlande, art de Sukhodaya et art du Lan Na. Toutefois, ce serait une vue bien superficielle que d’attribuer aux influences étrangères une trop grande importance. Apparenté aux autres arts de la péninsule indochinoise de culture bouddhique theravāda, l’art lao s’est cependant révélé d’une originalité et d’une vitalité incontestables.

Des monuments édifiés à l’époque de la constitution du Lan Xang, il ne reste pratiquement rien. Certes, bien des monastères remontent à une date ancienne : à Luang Prabang, Vat Vixun fut fondé en 1503 et Vat Xieng Thong en 1561 ; à Vientiane, le That Luang fut sans doute construit dans la seconde moitié du XVIe siècle. Ces fondations eurent à souffrir du temps et des événements qui affectèrent le Laos, événements dont l’un des plus tragiques fut l’invasion thaï qui, en 1827, traversa le pays et saccagea Vientiane ; mais les restaurations successives surent généralement conserver les caractères traditionnels de l’art lao.

Christian TAILLARD

Madeleine GITEAU

1. Géographie

Le Laos a connu, au cours du XXe siècle, trois transformations économiques et politiques majeures : partition de fait entre le gouvernement royal et le Pathet Lao de 1954 à 1975 lors de la seconde guerre du Vietnam ; puis collectivisation hâtive et de courte durée à l’avènement de la République démocratique populaire lao de 1976 à 1979, ce qui a provoqué le départ de 12 p. 100 de la population ; enfin, nouveaux mécanismes économiques replaçant l’économie de marché et les échanges internationaux au cœur de la stratégie de développement depuis le début des années 1980. On assiste aujourd’hui à la redéfinition de la place du Laos dans la péninsule indochinoise grâce à son intégration à la Région du Grand Mékong.

Laos : corridors de développement. La place centrale du Laos dans la péninsule indochinoise.

• Un pays montagneux et sous-peuplé

Pays montagneux situé au cœur de la péninsule indochinoise où les zones d’altitude inférieure à 200 mètres ne représentent que 16 p. 100 du territoire, le Laos s’étire depuis les confins de la Birmanie et de la Chine, au nord, jusqu’au Cambodge, au sud ; il s’insère entre la Thaïlande et le Vietnam. La chaîne Annamitique en constitue l’échine, massive au nord, très allongée au centre avant de se raccorder aux plateaux du vieux massif central indochinois. À ces hautes terres, il faut ajouter le couloir du Mékong, très rétréci dans le nord, où le fleuve se fraye un difficile passage à travers des montagnes couvertes de vastes forêts. À partir de Vientiane, le couloir s’élargit en une série de plaines qui atteignent une extension maximale dans la région de Savannakhet, où domine la forêt claire (savane arborée).

Le Laos est soumis à un régime de mousson, qui oppose cinq mois de saison des pluies, de mai à septembre, où tombent 88 p. 100 des précipitations, à sept mois de saison sèche, d’octobre à avril. La pluviométrie varie de 1 300 à plus de 3 000 millimètres selon l’exposition à la mousson du Sud-Ouest et l’altitude. À ces variations interrégionales s’ajoutent de fortes irrégularités, tant entre les années (amplitude de 1,7 dans la plaine de Vientiane) qu’entre les dates de début et de fin de la saison des pluies. De plus il faut prendre en compte une petite rémission au cours de la saison des pluies, dont la durée et la date varient en juillet-août, au moment où le riz vient d’être repiqué. L’irrégularité de la pluviométrie nécessite un apport complémentaire d’eau pour la récolte principale en saison des pluies, lequel n’est réalisé, grâce à l’irrigation traditionnelle, que dans le nord du Laos. Une irrigation est donc nécessaire pour la culture de saison sèche, mais elle ne concerne que le quart de la superficie irrigable. L’irrégularité des précipitations explique aussi la fréquence des inondations qui, pour le Mékong, prennent un caractère catastrophique tous les six ans en moyenne.

Le Mékong, axe historique de peuplement pour les populations lao qui se répartissent sur les deux rives du fleuve, au Laos comme en Thaïlande, constitue une frontière artificielle, issue de la colonisation. Aussi le fleuve apparaît-il beaucoup plus comme un trait d’union entre ces populations que comme un axe de circulation. Les fortes variations de son régime tropical et l’existence de nombreux rapides et chutes qui entravent son cours rendent la navigation difficile et multiplient les ruptures de charge.

La vallée du Mékong et les terres basses en général concentrent près des deux tiers de la population sur un tiers de la superficie. Les densités y sont comprises entre 20 et 90 habitants par kilomètre carré, bien inférieures à celles du Nord-Est thaïlandais, sur l’autre rive du Mékong (de 100 à 300 habitants par kilomètre carré). Les terres hautes du Laos, occupées par des minorités ethniques, connaissent des densités inférieures à 20 habitants par kilomètre carré, alors qu’au Vietnam limitrophe elles sont comprises entre 50 et 100 habitants par kilomètre carré. À l’échelle péninsulaire, le Laos apparaît donc comme une dépression démographique encadrée par les fortes densités des basses terres du Vietnam et de Thaïlande, dépassant 500 habitants par kilomètre carré. Ce sous-peuplement explique en partie les difficultés que connaît le gouvernement lao pour établir une infrastructure socioculturelle solide, ainsi que son coût relativement élevé.

• Un État pluriethnique au territoire décentré par rapport au Mékong

La République démocratique populaire lao (R.D.P.L.) est le plus petit État de la péninsule indochinoise. Sa population atteignait 5,6 millions d’habitants au recensement de 2005 (population estimée à 6,3 millions en 2011), ce qui ne représente qu’un peu moins de la moitié de celle du Cambodge, et entre 6 et 10 p. 100 des populations du Myanmar (Birmanie), de Thaïlande et du Vietnam. Son territoire de 236 800 kilomètres carrés la place en avant-dernière position, entre le Vietnam (330 400 km2) et le Cambodge (181 000 km2), loin derrière la Thaïlande (513 100 km2) et le Myanmar (676 600 km2). À la différence de ses voisins occidentaux, le Laos ne contrôle que 25 p. 100 du bassin du Mékong, qui est partagé entre six pays.

Le poids de l’ethnie dominante est bien plus faible au Laos que chez ses voisins. Les Lao ne représentaient que 54,6 p. 100 de la population au recensement de 2005, qui a procédé par auto-déclaration. Avec les autres ethnies constituant la famille ethnolinguistique tai-kadai, ils atteignent 64,9 p. 100 de la population, soit légèrement moins que les 68 p 100 généralement accordés aux Birmans du Myanmar. On est loin cependant de la domination de la famille tai-kadai en Thaïlande (estimée à 83 p. 100), môn-khmer au Cambodge (85 p. 100) ou viet-muong au Vietnam (87 p. 100). Chacune des ethnies dominantes a, au terme d’une « marche vers le sud », créé son État. Les Lao, suivant le Mékong, se sont installés dans la vallée du fleuve et de ses affluents où ils pratiquent la riziculture humide, d’où leur appellation Lao loum (du bas). Ils ont repoussé sur les versants les peuples autochtones austro-asiatiques, qualifiés de Lao theung (des pentes), qui représentent 24 p. 100 de la population. Enfin, les familles ethnolinguistiques miao-yao (8,5 p. 100) et tibéto-birmane (2,6 p. 100), arrivées au XIXe siècle, ont dû s’installer sur les sommets, d’où le qualificatif Lao soung (des cimes) qui leur est attribué. Contrairement à toutes les autres ethnies du Laos, les Miao-Yao n’habitent pas des maisons sur pilotis, mais construites à terre, comme les Vietnamiens et les Chinois.

Ce bassin fluvial fractionné entre plusieurs pays et cette structure fortement pluriethnique s’expliquent par le retard de la « marche vers le sud » des Lao. Le déplacement de la capitale du royaume du Lane Xang de Luang Prabang à Vientiane s’est opéré en 1563, et la « descente » s’est arrêtée là. Les Thaïs, quant à eux, ont continué à déplacer leur capitale de Chiangmai à Sukhothai, puis à Ayuthaya en 1350, à la tête du delta de la Chao Phraya. Ils ont ainsi pris, en 1431, le contrôle de l’Empire khmer déclinant et fermé aux Lao l’accès au delta du Mékong. Privés de la base matérielle rizicole et des échanges maritimes indispensables pour développer une construction étatique d’envergure, les Lao ne se sont plus trouvés en mesure de rivaliser avec leurs voisins.

Le rapport de forces inégal avec le royaume de Siam s’est traduit au XIXe siècle par la perte des territoires de la rive droite du Mékong, lesquels constituent aujourd’hui le Nord-Est thaïlandais et rassemblent les plaines les plus étendues du bassin moyen du fleuve. De plus, par deux fois en un demi-siècle, en 1778 puis 1827-1828, les populations lao de la rive gauche ont été déportées sur la rive siamoise. Aussi les Lao de l’ancien royaume du nord de la Thaïlande et de l’Isan au nord-est, qu’on estime à respectivement 30 et 20 p. 100 de la population tai-kadai du pays, sont-ils neuf fois plus nombreux que les 3 millions de la R.D.P.L. en 2005.