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Dans "Lénore et autres ballades", Gottfried August Bürger explore le genre de la ballade, mêlant folklore et éléments romantiques dans un style lyrique et accessible. Le recueil, publié à la fin du XVIIIe siècle, s'inscrit dans le mouvement Sturm und Drang, qui valorise l'expression des émotions individuelles et des passions tumultueuses. "Lénore", la pièce maîtresse du recueil, narre la tragique histoire d'amour entre une jeune fiancée et un revenant, oscillant entre la beauté poétique et l'horreur gothique, illustrant la lutte entre l'amour et la mort, tout en utilisant des images saisissantes et un langage évocateur. Gottfried August Bürger, un poète et un écrivain allemand, est né dans un milieu intellectuel qui a nourri sa sensibilité artistique. Influencé par le folklore allemand et les idées humanistes de son temps, il a également été marqué par des luttes personnelles, dont la perte de sa propre épouse, qui se reflètent dans l'intensité émotionnelle de ses écrits. Son intérêt pour le drame et les récits de sorcellerie témoigne d'une époque en mutation, cherchant à concilier les traditions nationales avec des idéaux modernes. Je recommande vivement "Lénore et autres ballades" à tous ceux qui s'intéressent à la poésie romantique, au folklore et aux récits captivants. Révélateur des sombres passions humaines, le recueil nous plonge dans des réflexions profondes sur la mortalité, l'amour et les mystères de l'existence, offrant une expérience littéraire aussi émotive qu'intellectuellement stimulante.
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Aux premières lueurs du matin, Lénore, fatiguée de rêves lugubres, s'élance de son lit. Es-tu infidèle, Wilhelm, ou es-tu mort? tarderas-tu longtemps encore?—Il avait suivi l'armée du roi Frédéric à la bataille de Prague, et n'avait rien écrit pour rassurer son amie.
Lassés de leurs longues querelles, le roi et l'impératrice revinrent de leurs prétentions et conclurent enfin la paix. Couronnée de verts feuillages, chaque armée retourna, en chantant, dans ses foyers, aux sons joyeux des fanfares et des cymbales.
De tous côtés, sur les chemins et sur les ponts, jeunes et vieux se portaient en foule à leur rencontre. Dieu soit loué! s'écriaient plus d'une épouse. Sois le bienvenu! disaient plus d'une fiancée. Lénore seule attendait le baiser du retour.
Elle parcourt les rangs: elle les monte; elle les redescend, elle interroge, hélas, en vain. Dans cette foule innombrable, personne ne peut lui donner de réponse certaine. Déjà tous sont éloignés. Alors elle arrache ses beaux cheveux, et se roule à terre dans le délire du désespoir.
Sa mère s'approche: Dieu ait pitié de toi, ma pauvre enfant! et la serrant dans ses bras, elle lui demandait la cause de sa douleur.
—Oh! ma mère! ma mère! il est mort! mort! Périsse le monde et tout ce qu'il renferme; Dieu est sans pitié. Malédiction sur moi, malheureuse que je suis!
—Que Dieu nous aide, ma fille, implore sa bonté[2] ce qu'il fait est bien fait, et jamais il ne nous abandonne.
—Oh! ma mère, c'est une vaine illusion, Dieu m'a abandonnée: mes prières sont restées inutiles; à quoi serviraient-elles maintenant?
—Que Dieu nous aide! Celui qui connaît sa puissance sait qu'il peut nous secourir jusque dans les enfers. Sa sainte parole calmera tes douleurs[3].
—Oh! ma mère, la douleur qui me tue, aucune parole ne pourra la calmer. Aucune parole ne peut rendre la vie aux morts!
—Écoute, mon enfant, peut-être le perfide a-t-il trahi sa foi pour une fille de la lointaine Hongrie. Efface-le de ton souvenir. Il ne sera jamais heureux, et, à l'heure de la mort, il sentira le châtiment de son parjure.
—Oh! ma mère! les morts sont morts, et ce qui est perdu est perdu. La mort, voilà mon lot. Oh! que je voudrais n'être pas née. Éteins-toi pour toujours, flambeau de ma vie! que je meure dans l'horreur et dans les ténèbres! Dieu est sans pitié! Malédiction sur moi, malheureuse que je suis!
—Mon Dieu! ayez pitié de nous; n'entrez pas en jugement avec ma pauvre enfant, ne comptez pas ses péchés! Elle ne sait pas quelles sont ses paroles. Oh! ma fille, oublie les souffrances de ce monde: pense à Dieu, à la félicité éternelle; au moins ton âme immortelle ne restera pas dans le veuvage[4].
—Oh! ma mère! qu'est-ce que la félicité, qu'est-ce que l'enfer? Avec Wilhelm est la félicité, sans Wilhelm est l'enfer. Éteins-toi pour toujours, flambeau de ma vie! que je meure dans l'horreur et dans les ténèbres! Dieu est sans pitié! Malédiction sur moi, malheureuse que je suis!
Ainsi la douleur ravage son coeur et son âme, et lui fait insulter[5] à la divine Providence. Elle se meurtrit le sein et se tord les bras. Cependant les astres de la nuit s'élevaient lentement sur la voûte du ciel.
Mais écoutez! Voilà qu'au-dehors retentit comme le galop d'un cheval. Il semble qu'un cavalier en descend avec bruit au bas de l'escalier. Écoutez! la sonnette a tinté doucement, et voilà qu'à travers la porte, une voix fait entendre les paroles suivantes:
—Ouvre, mon enfant. Dors-tu, mon amie, ou es-tu éveillée? Penses-tu encore à moi? Es-tu dans la joie ou dans les larmes?
—Ah! Wilhelm! est-ce toi? Si tard dans la nuit! Je veillais et je pleurais! Ah! j'ai bien souffert. D'où viens-tu donc sur ton cheval à cette heure?
—Nous ne montons nos coursiers qu'à minuit. J'arrive du fond de la Bohème: tard je me suis mis en route, et je viens te chercher pour te prendre avec moi.
—Oh! Wilhelm! entre d'abord que je te réchauffe dans mes bras. Entends-tu le bruit du vent dans la forêt?
—Laisse l'aquilon mugir dans la forêt, enfant, laisse-le mugir. Le coursier frappe la terre, les éperons résonnent; je ne puis demeurer ici. Viens, chausse-toi, saute en croupe derrière moi. Il me faut faire encore cent lieues aujourd'hui pour me précipiter avec toi au lit nuptial!
—Comment veux-tu que nous fassions aujourd'hui cent lieues pour aller au lit de noces! Écoute: la cloche qui a sonné onze heures vibre encore.
—Regarde! La lune est claire et brillante. Nous et les morts nous allons vite. Je te promets de te mener aujourd'hui même au lit nuptial.
—Dis-moi, où est ta demeure, et comment est ton lit de noces?
—Loin, bien loin d'ici; étroit, humide et silencieux: six planches et deux planchettes.
—Y a-t-il de la place pour toi et pour moi?
—Pour toi et pour moi. Viens, chausse-toi et monte en croupe: la chambre nuptiale est ouverte, les conviés nous attendent.
La jeune fille se chausse et saute avec agilité sur le cheval: elle enlace ses blanches mains autour de celui qu'elle aime, et ils s'élancent avec le bruit et la rapidité de la tempête. Le cheval et le cavalier respiraient à peine, les pierres étincelaient sous leurs pas.
Oh! comme à gauche et à droite disparurent à leurs yeux les prairies, les plaines et les campagnes! comme les ponts retentirent à leur passage!
—A-t-elle peur, mon amie?… La lune est brillante. Hurrah! les morts vont vite. A-t-elle peur des morts?
—Oh! non. Mais laisse les morts en repos.
Quelles sont ces voix lugubres! Où volent ces corbeaux? Écoutez: c'est le glas des cloches et l'hymne des funérailles. «Laissez-nous ensevelir ce corps[6].» Et de plus en plus approchait le convoi funèbre, déjà on distinguait la bière, et le chant semblait les accents sinistres des habitants des marais.
—Après minuit, vous ensevelirez ce corps avec vos chants et vos plaintes. Maintenant je conduis chez moi ma fiancée, venez assister au banquet: viens, chantre, viens avec le choeur, et entonne l'hymne du mariage! prêtre, viens aussi, tu prononceras la bénédiction quand nous entrerons au lit nuptial.