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Homaphrodite, représentant d’une nouvelle espèce humaine dotée d’un pouvoir naturel d’autoguérison, Alix est un être différent qui souhaite connaître ses origines. Voulant l’aider dans cette tâche, Sophie, l’une des dernières survivantes du monde d’avant, lui raconte chaque évènement qui compose son histoire : une ville détruite par la folie des hommes, une humaine, un hermaphrodite, et la magie de la science. Alix pourra-t-il faire face à son extraordinaire destinée ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Passionné de sculpture et d’arts plastiques, Alain Nourisson doit brusquement cesser toute activité professionnelle et artistique à la suite d’un grave accident de santé. Pour faire face à sa nouvelle situation de handicap, il se réfugie dans l’écriture comme écrivain autodidacte, appliquant ses techniques artistiques du modelage, couche par couche ou simplement phrase par phrase…
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Alain Nourisson
Les homaphrodites
Tome I
La fabuleuse histoire d’Alix
Roman
© Lys Bleu Éditions – Alain Nourisson
ISBN : 979-10-377-7831-4
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Après le succès de ses deux premiers livres, Le chêne d’Ali et La carte postale oubliée, où l’auteur nous avait plongés dans l’histoire contemporaine de la fin du vingtième siècle, cette troisième fiction nous entraîne avec effroi dans les crises qui nous bouleversent en ce début de siècle… Mais toute ressemblance avec des évènements, des faits divers et des personnes ayant existé ne serait que pure coïncidence…
Géomètre Topographe de formation. Écologiste militant, passionné de nature et d’arts plastiques, Alain Nourisson doit cesser toute activité professionnelle et artistique à la suite d’un grave accident de santé, un accident cardiovasculaire… Pour faire face à sa nouvelle situation de handicap, résilient, il se réfugie dans l’écriture, comme écrivain-plasticien. Autodidacte en appliquant ses techniques artistiques à l’écriture, l’auteur a aussi mis au point une nouvelle technique d’écriture en miroir après un travail long et difficile d’écrithérapie…
Alix posa tendrement sa tête sur les genoux de sa grand-mère, Sophie, qui caressa doucement ses longs cheveux blonds. Au même moment, Marie ouvrit le premier cahier de la valise et entama son récit avec une émotion lisible sur son visage couvert de larmes :
Nous étions un soir de juin, il était tard, l’orage grondait, la pluie et la grêle frappaient les vitres de sa voiture.
Julien se concentrait sur sa conduite, il fixait la route, la chaussée trempée brillait sous les phares des voitures, les gouttes d’eau étaient si grosses qu’elles semblaient exploser au contact du sol.
Malgré son envie d’uriner, Julien n’osa pas s’arrêter, mais il se demandait s’il pourrait encore tenir longtemps. La banlieue de la ville de Tours, avec ses usines et ses enseignes commerciales, illuminait le lointain qui semblait plongé dans le noir de la nuit qui s’installait sous un orage violent.
Des éclairs zébraient le ciel. La chaussée ressemblait à un miroir où la moindre lueur se reflétait tel un diamant. Ce fut à cet instant qu’il aperçut, au bord de la route, une personne qui s’agitait en levant les bras au ciel.
Julien ralentit sa voiture et stationna à quelques mètres d’une femme trempée, en chemise de nuit, ruisselante de pluie, qui apparut dans les phares allumés de sa voiture. Elle se précipita vers le véhicule.
Ses vêtements déchirés laissaient entrevoir sa peau blanche tachée de sang. Julien ouvrit la portière arrière et invita la femme à s’abriter sur le siège arrière, le siège avant étant occupé par ses dossiers de travail. Il lui proposa une serviette qu’il sortit de son sac de voyage posé à l’arrière.
La femme s’essuya du mieux qu’elle put, Julien remarqua alors une trace de sang sur son visage, il s’inquiéta et lui proposa de l’emmener à l’hôpital, mais alors qu’il se dirigeait vers le siège du conducteur, il entendit des cris. Un homme courait sur le chemin qui aboutissait à l’endroit où il était stationné. Cet homme hurlait des injures en brandissant un fusil dans leur direction.
La femme demanda à Julien de partir au plus vite, car cet homme voulait la tuer, selon ce qu’elle criait à son tour, bien abritée dans la voiture.
Julien démarra rapidement et entendit un coup de feu, et une balle se logea dans la carrosserie de sa voiture.
Affolé et inquiet, Julien s’arrêta quelques centaines de mètres plus loin. Dans son rétroviseur, il aperçut l’homme qui courait sur la route mouillée, son fusil à la main.
Une voiture, arrivant à vive allure, ne put l’éviter, et l’homme fut projeté en l’air avant de retomber lourdement sur la chaussée, la voiture dévia de sa trajectoire et s’immobilisa sur l’accotement.
Julien saisit aussitôt son téléphone portable et appela les secours en urgence.
Les secours arrivèrent en quelques minutes, les policiers installèrent les barrières de sécurité habituelles sur la route et prirent en charge la circulation et les blessés.
Ils constatèrent le décès de l’homme, ramassèrent le fusil et Julien leur fit le récit de ce qu’il venait de vivre.
Une ambulance s’occupa de la femme et la conduisit aux urgences de l’hôpital le plus proche.
Julien voulut l’accompagner, mais elle s’y opposa, ainsi que la police qui avait encore besoin de lui. Il dut donc immédiatement les accompagner au commissariat pour y signer sa première déposition.
Les policiers voulaient recueillir son récit tant qu’il était encore sous le choc, car ils avaient été intrigués de trouver cette femme blessée dans sa voiture.
Les policiers voulaient tout comprendre. La jeune capitaine, Marie Dubois, écouta calmement et nota son récit.
Après avoir signé sa disposition, Julien rentra chez lui, encore sous le choc émotionnel de ce qu’il venait de vivre.
Julien retrouva sa femme. Inquiète de le voir rentrer si tard de son travail sans l’avoir prévenue, il lui expliqua ce qu’il venait de vivre, mais elle n’en crut pas un mot. Encore un mensonge, selon elle.
Julien se précipita dans la salle de bain et mit rapidement ses vêtements de la semaine dans la machine à laver.
Véronique pénétra dans la pièce au moment où Julien glissait une serviette tachée de sang dans la machine à laver, elle lui demanda des explications.
Julien lui réexpliqua en détail ce qu’il venait de vivre avant de s’effondrer en larmes sous la douche. Elle sortit de la salle de bains en claquant la porte sans avoir cru un seul mot de son récit, car elle n’avait plus confiance en lui depuis quelque temps. Pour elle, il mentait, elle en était convaincue.
Julien laissa l’eau tiède glisser sur sa peau, il se savonna de la tête au pied, sans oublier un bon shampoing. La chaleur de la douche finit par le détendre.
Une fois revêtu de linge propre, Julien alla rejoindre son épouse au salon et la contraignit à le suivre jusqu’au garage où il examina avec elle la voiture jusqu’à l’impact de balle qui avait traversé la carrosserie à l’arrière de la portière droite. Enfin, ils examinèrent le siège arrière couvert de sang.
C’est alors que Véronique se mit à nouveau en colère en lui demandant dans quelle histoire Julien s’était mis pour revenir avec une voiture pleine de sang et criblée de balles.
Dès le lendemain matin, Véronique appela la police et le policier lui demanda de venir immédiatement au commissariat avec Julien pour avoir des explications auprès de la capitaine Marie Dubois, en charge de l’enquête.
Arrivés au commissariat, ils furent reçus par la jeune capitaine, Marie Dubois, qui confirma le récit de Julien, mais cette dernière voulut examiner à son tour l’état de la voiture et, suivant le trajet de la balle dans l’armature du dossier du siège arrière, elle découvrit le projectile à quelques centimètres de l’endroit où la victime avait posé sa tête. Julien fut alors pris de stupeur en imaginant ce qui aurait pu se passer si la balle avait traversé le dossier.
La policière le rassura et fit extraire la balle avant de lui remettre une copie du procès-verbal pour son assureur.
La capitaine lui donna le nom de la jeune femme qui était encore hospitalisée et qui voulait le remercier de lui avoir sauvé la vie.
Julien raccompagna sa femme avant de poursuivre ses démarches auprès de son assureur. Il se rendit ensuite à l’hôpital où il put rencontrer Stéphanie Rabier qui n’arrêtait plus de le remercier de lui avoir sauvé la vie.
Stéphanie lui demanda cependant s’il pouvait lui rendre un dernier service : aller jusqu’à sa maison pour lui rapporter quelques vêtements propres et nourrir son cheval qui était encore enfermé dans l’écurie. Elle lui indiqua une cachette où il pourrait trouver les clés de la maison.
Julien accepta finalement cette mission, mais par précaution, il préféra prévenir la capitaine de police pour qu’elle l’accompagne sur place. Cette dernière préféra déléguer une policière pour cette mission.
Julien retrouva la policière devant le portail grand ouvert de la propriété.
Ils se rendirent jusqu’à la porte d’entrée, Julien chercha les clés sous le pot de fleurs que lui avait indiqué Stéphanie, il les donna à la policière qui pénétra la première dans la maison et constata que tous les meubles avaient été renversés ou cassés.
La vaisselle brisée jonchait le sol et des bouteilles de vin avaient été projetées sur les murs.
Julien et la policière durent se déplacer avec précaution dans la pièce pour ne pas se blesser sur les morceaux de verre brisés.
La policière appela sa capitaine pour qu’elle vienne voir les dégâts et faire les constatations du drame indescriptible qui avait dû se jouer ici. Julien et la policière se dirigèrent jusqu’à la chambre où la même scène les attendait, les tiroirs et placards étaient ouverts et le linge avait été jeté au sol avec rage.
***
La policière rencontra des difficultés à rassembler des vêtements convenables pour Stéphanie. Dès qu’elle termina de constituer un semblant de tenue correcte, elle mit le tout dans un sac, avec une trousse de toilette féminine trouvée dans la salle de bains, et elle sortit de la chambre avec Julien.
La capitaine venait d’arriver et prenait déjà les photos et relevés d’empreintes avec son équipe de la police scientifique.
Marie était horrifiée devant un tel chaos.
Julien et la policière se dirigèrent vers l’écurie où se trouvait un beau cheval blanc qui trépignait dans son box.
Julien chercha une botte de foin, sous le hangar, qu’il apporta au cheval, puis il remplit son auge d’eau fraîche à l’aide du tuyau d’arrosage relié à un robinet dans la cour.
Le cheval put se rassasier et boire de bon cœur en jetant un regard apeuré sur ce qui l’entourait.
Avec la policière, Julien fit le tour de l’écurie et du hangar pour s’assurer que tout allait bien. À l’arrière de l’écurie, ils ouvrirent une porte qui permettrait au cheval d’aller se dégourdir les pattes dans le pré clôturé dès qu’il en aurait envie.
Après un rapide tour du pré où ils s’assurèrent que la clôture était en bon état ; ils retrouvèrent la capitaine, firent leur rapport et prirent le sac de vêtements pour l’apporter à Stéphanie, ce à quoi la capitaine s’opposa, car elle voulait le faire elle-même pour l’interroger afin d’essayer de comprendre ce qui s’était passé pour que l’intérieur de la maison soit ainsi massacré.
Julien insista pour accompagner la jeune capitaine à l’hôpital. Celle-ci accepta. Julien et Marie se retrouvèrent donc à l’entrée de l’hôpital où ils pénétrèrent ensemble dans la chambre de Stéphanie. Marie déposa le sac de vêtements dans le placard et Julien fit un rapide rapport sur la santé du cheval puis il laissa les deux femmes en tête-à-tête et rentra tranquillement chez lui.
***
Véronique l’attendait pour déjeuner et elle lui demanda ce qu’il avait encore fait de sa matinée, Julien lui raconta tout dans les moindres détails, mais dès qu’il lui parla du cheval, Véronique s’inquiéta pour l’animal et voulut le voir rapidement. Elle aimait beaucoup les chevaux et pratiquait l’équitation depuis de nombreuses années.
Julien et Véronique retournèrent donc en début d’après-midi jusqu’à la propriété de Stéphanie.
Ils constatèrent que les policiers avaient posé des scellés sur la porte de la maison, ils se dirigèrent donc jusqu’au cheval qui vint vers eux avec douceur, mais légèrement craintif.
Véronique rassura et examina le cheval en le brossant doucement, elle découvrit alors de multiples traces de blessures anciennes sur ses flancs, comme des coups de cravache ou de bâton selon elle…
Julien appela Marie pour l’informer de sa présence sur place et des constatations de Véronique sur le cheval.
La capitaine fut auprès d’eux en quelques minutes. Elle fit le tour du cheval qui se laissa examiner et caresser.
Ce qu’elle observa à son tour l’incita à appeler un vétérinaire immédiatement.
Le vétérinaire fut horrifié de ce qu’il diagnostiqua et il demanda que le cheval soit transporté dans un centre équestre où il pourrait mieux l’examiner car, selon lui, ce cheval avait été torturé et victime de plusieurs fractures sur les pattes.
Une échographie s’imposait pour évaluer les séquelles des blessures de cet animal si doux. Véronique proposa le centre équestre où elle avait l’habitude de s’entraîner.
Marie et le vétérinaire acceptèrent et ils prirent contact immédiatement avec le responsable du centre équestre qui s’engagea à venir chercher le cheval dans la soirée avec son van.
Roger aimait les chevaux et ne supportait jamais qu’on puisse les frapper.
Véronique et Roger étaient amis depuis de longues années déjà. Ils partaient souvent faire de longues randonnées équestres ensemble, en forêt, où ils s’organisaient de merveilleux pique-niques dans des clairières connues d’eux seuls.
Julien avait toujours un sentiment de jalousie qui le perturbait dès qu’il les savait ensemble. Il avait un doute sur leurs véritables relations depuis plusieurs mois.
L’attitude de Véronique, lorsqu’elle rentrait de ses randonnées équestres de plusieurs jours avec Roger, ne faisait qu’alimenter ses doutes sur leurs relations intimes.
Elle refusait alors que Julien la touche et passait des heures sous la douche ou à toute autre activité, toujours seule.
Véronique s’éloignait de plus en plus de Julien et inventait n’importe quel prétexte pour refuser la moindre caresse intime de sa part.
Leur couple commençait à se détruire progressivement. Ils n’arrivaient plus à se parler ni à se regarder en face.
Tout était prétexte à querelle entre eux, mais la principale raison restait l’absence d’enfant, sans qu’ils sachent lequel des deux était stérile. Ils n’osaient pas encore entamer une thérapie ensemble pour les aider, laissant le temps pourrir leur relation de couple en l’emplissant de non-dits impardonnables.
Julien voulut mettre fin à cette situation, mais la fuite lui sembla lâche et irresponsable. Il avait donc pris la décision de consulter seul Sophie, une psychothérapeute, pour l’accompagner dans cette crise de couple, mais aucune solution n’avait été trouvée.
Julien souffrait de plus en plus de cette situation et se noyer dans le travail ne l’aidait pas non plus. Il était alors devenu plus intime avec Sophie, son amante.
***
Cependant, Julien voulait redonner un sens à sa vie, faire quelque chose qui le motiverait, qui lui donnerait envie d’agir, qui réveillerait à nouveau en lui un désir profond de vivre et de se projeter vers le futur… Il se consacra donc de plus en plus à son travail et rentrait de plus en plus tard chez lui. Le travail était devenu pour lui un refuge ou une fuite en avant qui le poussait à oublier cette souffrance intérieure de ne pas être père à ce jour. Il culpabilisait, car il se pensait stérile. Rentrer tard ou partir une semaine en mission, loin de sa compagne, cela devenait une habitude qui contribua à l’enfermer chaque jour un peu plus dans sa fuite en avant, dans sa douleur.
En plus de sa crise de couple, Julien cherchait aussi à donner un nouveau sens à sa vie, car ses actes quotidiens et son travail ne lui apportaient plus ce qu’il cherchait.
Mais ce qu’il avait vécu depuis ces derniers jours avait réveillé en lui un sentiment bizarre de satisfaction, il s’était senti bien.
Julien avait eu la sensation d’avoir été utile, et ce sentiment d’utilité le réjouissait au fond de lui, sans savoir pourquoi.
Comme nous étions dimanche, il décida de rendre visite à Stéphanie à l’hôpital. Il passa chez un fleuriste avant de se rendre auprès de sa rescapée. Lorsqu’il pénétra dans la chambre, il la trouva entourée de quatre personnes avec lesquelles elle discutait en souriant.
Elle l’aperçut et l’invita à s’approcher en le présentant comme son sauveur.
Julien lui tendit son bouquet de fleurs, ce qui déclencha immédiatement les cris hystériques d’une de ses amies écologistes qui lui demanda d’éloigner ces horreurs pleines de pesticides hors de sa vue.
Stéphanie excusa son amie, mais Julien sortit de la pièce et offrit ses fleurs à une infirmière qui se trouvait dans le couloir.
Cette dernière prit délicatement le bouquet en le remerciant et lui proposant un café en échange.
L’infirmière portait un badge avec son prénom sur sa blouse. « Nelly » lui demanda quel lien il avait avec cette jeune femme.
Mais le visage de Nelly lui était familier, sans qu’il puisse se souvenir qui elle lui rappelait, tant son esprit était confus.
Julien lui raconta son aventure de ces derniers jours et les raisons de sa présence dans cet hôpital. Ils discutèrent du cas de Stéphanie qui pouvait déjà sortir.
Nelly fut rassurée et lui confia que Stéphanie était sûrement une femme battue, compte tenu des nombreuses blessures qu’elle avait constatées sur son corps avec le médecin interne qui l’avait auscultée et soignée. Nelly fut heureuse d’apprendre que l’homme violent qui poursuivait Stéphanie avait été tué lors de l’accident qui avait mis fin à sa crise de folie meurtrière.
Julien proposa à Nelly de venir chercher Stéphanie pour la raccompagner chez elle dans l’après-midi.
***
Après avoir déjeuné et pris un café, Julien se précipita à l’hôpital pour retrouver Stéphanie et l’aider à remplir ses formalités de sortie.
Il rassembla le peu d’affaires que sa protégée avait dans la chambre sans oublier les ordonnances que le médecin interne avait déposées sur la table de chevet. Julien récupéra aussi le sac à main que la capitaine Marie Dubois avait eu la gentillesse de rapporter à Stéphanie pour qu’elle puisse être prise en charge à l’hôpital grâce à ses papiers.
Ce geste de la capitaine avait réjoui Julien qui constata que Stéphanie avait été prise en charge avec beaucoup de bienveillance.
Il y avait donc encore quelque chose de bon en l’être humain, même si souvent il pouvait se comporter en monstre irresponsable.
Au moment de quitter l’hôpital, il passa saluer Nelly dont le visage lui rappela à nouveau un visage connu et perdu de vue depuis plusieurs années maintenant.
Nelly aussi l’avait encore regardé curieusement, de la tête aux pieds. Peut-être, l’avait-elle reconnu ? Bien que troublée, elle n’en dit rien.
Julien téléphona à la capitaine pour la prévenir du retour de Stéphanie chez elle afin qu’elle lui rapportât les clés de sa maison et procédât à l’enlèvement des scellés.
Ils se donnèrent rendez-vous sur place dans l’heure qui suivit. Marie accueillit Stéphanie et pénétra avec elle dans la maison qui était restée dans l’état où Julien l’avait découverte avec la police deux jours plus tôt.
Stéphanie poussa un cri d’horreur en découvrant le massacre qu’avait fait Josué, l’homme qu’elle avait gentiment accueilli chez elle, alors qu’il était SDF et à la recherche d’un emploi.
Elle avait confié à ce Josué quelques travaux d’entretien en échange du gîte et du couvert.
Comme Stéphanie disposait d’un logement de gardien disponible, jouxtant sa grande maison. Elle l’avait prêté gracieusement à Josué.
Marie libéra deux chaises où elles purent s’asseoir pour discuter tranquillement.
Julien fit le tour de la propriété et remarqua sous le hangar une niche où un chien aurait dû être présent. Il revint à la maison et interrogea Stéphanie qui s’étonna de l’absence de Pêcheur, son labrador, son ami fidèle, toujours dans ses jambes. Elle l’appela en vain. Ils se mirent tous les trois à sa recherche avant d’admettre que le chien avait dû s’enfuir de peur, et qu’il avait sûrement trouvé un refuge quelque part dans les environs. Stéphanie craignit cependant le pire, car elle pensa que Josué avait pu tuer son chien avant de le jeter dans la rivière.
Julien aida les deux femmes à mettre un peu d’ordre dans la maison afin que Stéphanie puisse retrouver un peu de confort pour se réinstaller chez elle.
Marie continua son enquête en interrogeant Stéphanie sur ce qu’elle avait vécu et sur ce Josué. Il s’agissait d’un homme qu’elle avait hébergé, qui s’était épris d’elle et qui était devenu possessif avant de devenir violent avec elle et ses animaux. Il s’était aussi mis à boire plus que de raison, il la volait pour acheter son alcool au supermarché le plus proche.
Julien s’engagea à rechercher le chien et, pour cela, il longea la rivière.
Ce fut ainsi que Julien découvrit que la propriété de Stéphanie était un ancien moulin abandonné qui possédait encore sa roue à aubes. Celle-ci plongeait à moitié dans le canal qui aurait dû la faire tourner.
Des branches étaient bloquées dans la roue à aubes du moulin qui risquait de pourrir si personne n’intervenait pour la libérer et la remettre en mouvement. Julien, curieux, pénétra dans le bâtiment ouvert du moulin abandonné où il découvrit un ensemble de poulies reliées à différents engrenages encore recouverts de graisse.
Julien fut émerveillé par sa découverte et se demanda à quoi pouvait servir toute cette mécanique lorsqu’elle était en fonctionnement.
En continuant sa promenade le long de la rivière, il tomba sur un pêcheur, habitué des lieux, qui lui raconta toute l’histoire du site.
Julien était tombé sur Charles, un pêcheur passionné et érudit des moulins à eau.
Ce passionné des moulins lui en donna même leur origine :
« L’invention du moulin à eau, tel qu’on le connaît aujourd’hui, pourrait remonter au IIIᵉ siècle av. J.-C.
Le moulin à eau avait été adopté dans l’est du bassin méditerranéen, au moins dans la première moitié du 1er siècle av. J.-C., et à Rome dans la deuxième moitié du 1ᵉʳ siècle av. J.-C. au plus tard.
La technique des moulins a connu une large diffusion dans le monde romain dès le 1ᵉʳ siècle, et les premières installations industrielles se développèrent dès le début du IIᵉ siècle de notre ère. Mais ce fut au moyen âge que l’usage du moulin se développa largement en France, apportant avec lui une nouvelle révolution industrielle pour les meuniers, les tanneurs, les ferronniers, etc. ».
Pour Charles, ce pêcheur érudit de moulins, les Romains auraient copié et perfectionné les moulins découverts à Byzance ou au Moyen-Orient où les norias servaient à puiser l’eau nécessaire aux cultures agricoles et aux populations…
Julien pensa qu’il avait là un nouveau sujet de curiosité à creuser, voire un voyage culturel à faire au Moyen-Orient. Une région du monde qu’il n’avait pas encore visitée.
Charles, le nouvel ami pêcheur de Julien, accompagna ce dernier jusqu’au moulin pour lui en expliquer le fonctionnement.
Le père de Charles y avait travaillé jusqu’à sa fermeture et il y venait souvent avec son fils qui avait ainsi pu se familiariser avec l’usage de chaque manivelle, engrenage et poulie, avant d’y être embauché à son tour.
Lorsque Charles découvrit les branches bloquant le fonctionnement de la roue à aubes, il fut furieux et il s’en prit à Josué, l’incapable qui vivait chez Stéphanie en profitant de sa bienveillance. Ce fainéant aurait même frappé le cheval à coups de barre de fer jusqu’à lui casser les deux pattes avant.
Ce furent les cris de l’animal qui alertèrent Charles, en train de pêcher, et qui était intervenu pour mettre fin à ce drame avec un autre pêcheur présent au bord de la rivière. Ils avaient dû faire deux atèles avec des planches et des lanières de cuir pour maintenir les pattes du cheval avant d’appeler un vétérinaire, car ils ne voulaient pas que l’animal se relève et s’appuie sur ses deux pattes cassées, ce qui aurait pu aggraver ses blessures.
Depuis ce jour, le cheval venait trouver Charles au bord de la rivière pour qu’il le caresse, c’était devenu son ami. Il n’avait cependant jamais eu le courage de le monter malgré les propositions de Stéphanie qu’il connaissait depuis son enfance.
Julien interrogea son nouvel ami sur la disparition du chien. Charles lui confia que le chien se portait très bien et qu’il dormait actuellement sur le tapis de son salon, auprès de sa femme Simone. Julien fut rassuré et heureux d’avoir fait la connaissance d’un homme aussi prévenant.
Ils se dirigèrent enfin tous les deux vers la maison de Stéphanie où cette dernière continuait à ranger ce qui pouvait encore être en bon état. Au moins, elle avait Marie qui lui avait gentiment proposé de l’aider. Lorsque Stéphanie aperçut Charles de loin, elle se précipita vers lui et elle l’embrassa chaleureusement.
Marie profita de ce moment pour se retirer sur la pointe des pieds en découvrant que Stéphanie, sa nouvelle amie, était désormais en bonne compagnie.
Les deux hommes accompagnèrent Stéphanie jusque dans sa maison, mais lorsque Charles découvrit l’état de l’intérieur, elle dut lui expliquer ce qui s’était passé deux jours plus tôt.
Charles ne cacha pas sa colère contre Josué, dont la mort le réconforta, et rassura alors Stéphanie sur le sort de son labrador. Les deux hommes se mirent aussitôt à réparer les meubles du mieux qu’ils pouvaient.
Les contenus du réfrigérateur et du congélateur ayant été jetés par terre, Stéphanie n’avait plus rien à manger pour son dîner.
Julien n’eut pas le temps de réagir pour l’inviter à dîner, car Charles fut plus rapide et n’hésita pas une seconde à inviter Stéphanie à venir dîner chez lui.
Charles demanda aussi à Julien, son sauveur, de se joindre à eux. Face à cette bienveillance spontanée, Julien éprouva un sentiment de bonheur qui l’envahit tout à coup.
Julien était heureux d’avoir croisé la route de cet homme si bon, au bord de la rivière. Charles avait l’âge d’être son père, celui qu’il avait si peu connu dans son enfance malheureuse.
Julien aurait aimé que Charles soit son père, car ce dernier lui avait tant manqué dans son enfance, après que ce dernier l’eut abandonné dans une rue du vieux Tours.
Aujourd’hui, Julien aimerait pouvoir échanger avec son père sur tout ce qui le tracassait dans sa vie, sur ses soucis.
Ce fut donc avec un sentiment de joie que Julien accompagna son nouvel ami et Stéphanie jusqu’à la demeure de Charles, à moins d’un kilomètre du moulin.
Simone les accueillit avec un sourire qui accrochait les étoiles et, après avoir serré Stéphanie tendrement dans ses bras, elle les invita à s’asseoir dans le salon pendant qu’elle s’occupait de préparer un dîner frugal avec Charles.
Elle leur prépara une omelette originale, à la farine de châtaignes broyées grossièrement, avec l’oseille que Charles avait cueillie dans son potager en rentrant.
Charles proposa un apéritif fait maison à base d’aubépine dont il leur donna la recette secrète héritée de sa grand-mère.
Simone apporta sur la table quelques tranches de saucisson sec pour accompagner la boisson. Simone se posa enfin sur une chaise en attendant le récit de toute l’histoire que venait de vivre sa chère Stéphanie qu’elle connaissait depuis sa petite enfance.
Le labrador avait posé son museau sur la cuisse de sa jeune maîtresse et guettait chacun de ses gestes, les tranches de saucisson finissaient le plus souvent dans sa gueule que dans la bouche de Stéphanie.
Charles semblait beaucoup aimer ce chien, son copain de pêche comme il l’appelait.
Les deux semblaient d’ailleurs s’apprécier mutuellement, c’était certainement la raison pour laquelle ce chien se nommait Pêcheur.
Julien assistait avec tendresse à ce spectacle et regretta de n’avoir jamais osé adopter un chien contre l’avis de Véronique qui ne voyait que des contraintes dans la présence d’un animal auprès d’eux.
Julien fit sa part du récit en expliquant les raisons de sa présence sur cette route au moment de sa rencontre avec Stéphanie.
Julien parla de son travail et de ses obligations actuelles, et lorsque Simone lui demanda s’il avait des enfants, il craqua et fondit en larmes. Charles s’approcha de lui et lui prit les mains en réprimandant sa femme. Julien se ressaisit et s’excusa pour ce moment de faiblesse, et Charles reprit la discussion autour de l’histoire du moulin.
Le dîner fut simple, mais délicieux, Charles avait sorti une bonne bouteille de Chinon de sa cave.
Les deux femmes furent légèrement grisées par l’alcool et, comme deux amies complices, elles rirent beaucoup toutes les deux en racontant leurs souvenirs communs. Ce moment de détente et de convivialité avait permis à Stéphanie d’oublier ses soucis immédiats.
Avant de se séparer, Simone et Charles proposèrent leur aide à Stéphanie pour remettre sa maison en ordre et pour tout nettoyer si nécessaire. Cette dernière accepta avec joie.
Julien était admiratif de la bonté naturelle de ces gens humbles et généreux. Finalement, il dut conclure qu’il avait lui aussi vécu un merveilleux moment.
Julien raccompagna Stéphanie chez elle et lui proposa de rester un moment pour la rassurer, mais elle déclina l’offre, elle rentra dans sa maison en désordre, avec son chien fidèle et protecteur.
Julien rentra tranquillement chez lui à la nuit tombée où il trouva sa maison vide… Véronique avait disparu, il l’appela en vain et interrogea ses voisins qui l’avaient vue partir en début d’après-midi, mais aucun ne l’avait vue revenir.
Julien appela la police pour signaler sa disparition et ce fut la capitaine Marie Dubois qui vint sur place avec deux policiers.
Marie interrogea Julien sur son emploi du temps, elle lui demanda comment se passait leur vie de couple. Il lui fit part de ses doutes sur ses relations avec Roger.
Pendant que les deux policiers passaient la maison de Julien au crible, Marie appela Roger qui lui confirma la présence de Véronique à ses côtés, cette dernière ne voulait pas rentrer pour l’instant.
Julien était abattu, mais presque soulagé en même temps, et il se confia à Marie sur sa vie de couple désastreuse. Marie lui conseilla d’entamer une procédure de divorce au plus vite.
Marie envoya ses deux collègues chez Roger où ils constatèrent bien la présence de Véronique chez lui.
Julien offrit un thé à Marie et il but un verre d’alcool fort pour se calmer, puis il raccompagna et remercia Marie pour sa bienveillance et sa gentillesse.
Julien venait de vivre un week-end très mouvementé et souhaitait maintenant se reposer. Il prit une bonne douche et prépara son sac de voyage pour le lendemain, puis il alla se coucher dans un lit glacé en se remémorant tous les évènements des deux derniers jours.
Il pensa alors à sa rencontre avec Charles et Simone qui lui réchauffèrent le cœur, et il s’endormit avec le souvenir de leurs sourires bienveillants. Julien regretta un instant de ne pas avoir demandé leur numéro de téléphone pour les appeler.
Le lendemain matin, Julien se réveilla dans une maison vide, il se hâta pour sa première réunion de travail. La journée passa rapidement et il rentra plus tôt que d’habitude chez lui. Véronique n’était toujours pas rentrée depuis deux jours.
Le mardi matin, après un petit déjeuner improvisé et rapide, il se rendit chez Stéphanie pour voir si tout allait bien, elle lui offrit un café et il lui raconta sa fin de soirée du dimanche, elle fut sincèrement désolée pour lui.
Elle en saura plus dans la matinée de ce mardi, car Roger devait lui ramener son cheval avant midi. Alors, elle ne manquera pas de l’interroger sur sa relation avec Véronique pour avoir de ses nouvelles.
Elle n’eut pas à le faire, car lorsque Roger vint lui rendre son cheval, il était accompagné de Véronique et leur complicité n’échappa pas à Stéphanie qui les remercia de l’aide précieuse qu’ils lui avaient apportée.
Roger lui laissa néanmoins une facture pour son travail, l’hébergement et pour les soins apportés au cheval. La bonté a parfois des limites qui se paient au cul du camion.
Stéphanie lui régla ses frais immédiatement, car elle voulait maintenant passer à autre chose et oublier le drame qu’elle avait vécu ces derniers jours. Elle partit faire une promenade d’une heure avec son cheval.
Marie vint lui rendre une visite amicale au cours de l’après-midi et lui fit signer quelques documents nécessaires à l’enquête.
Marie voulait en savoir plus sur ce Josué dont elle retrouva les empreintes sur plusieurs enquêtes en cours, pour des vols dans des commerces du centre-ville.
Stéphanie se rappela alors que Josué avait déposé un sac à dos dans son cellier, elle invita donc Marie à la suivre et retrouva le sac qu’elles ouvrirent ensemble. Il y avait à l’intérieur quelques vêtements, une boîte de médicaments vide, un couteau et un passeport.
Stéphanie ne reconnut pas l’homme de la photo du passeport, mais ce dernier appartenait bien à un Josué Boadescu, un Roumain, a priori. Un migrant, selon Marie, mais le visage du passeport leur fit penser à quelqu’un qu’elles avaient déjà rencontré toutes les deux sans pouvoir encore le nommer.
Mais alors, qui était donc l’individu que Stéphanie avait hébergé et qui avait voulu la tuer après s’en être pris à son cheval et à son chien.
Marie recueillit le contenu du sac pour une analyse plus approfondie et une recherche d’ADN, éventuellement, si cela restait possible afin de pouvoir identifier le cadavre inconnu qui se trouvait à la morgue de l’institut médicolégal.
Stéphanie offrit un thé à Marie avant que cette dernière ne la quittât en lui promettant de l’informer de ce qu’elle allait découvrir.
***
Julien termina sa journée plus tôt que prévu, son dernier rendez-vous avait été expéditif et il décida de faire un saut jusqu’au Moulin du Gué pour voir si Stéphanie avait besoin d’aide ou d’autre chose.
Julien arriva au moment où Marie repartait et ils purent se saluer rapidement, mais cette dernière le dévisagea attentivement et de manière interrogative en pensant à la photo du passeport.
Stéphanie lui offrit le reste du thé et ils se mirent à discuter de leurs journées respectives. Stéphanie s’intéressa beaucoup aux activités de Julien dont elle voulut tout savoir. Julien lui parla longuement de son métier de chargé de développement économique et conseiller en communication auprès des entreprises qui voulaient se développer sur les marchés nationaux ou internationaux.
Julien était polyglotte, il parlait donc plusieurs langues, dont l’anglais, l’espagnol et le russe, ce qui lui facilitait son travail au quotidien.
Julien prit comme exemple le moulin de Stéphanie en lui expliquant que si elle voulait se relancer dans une activité de niche originale comme faire de la farine de sésame biologique, il pouvait l’accompagner dans ce type de projet, car c’était cela son métier. Julien était passionné par ce qu’il faisait. Pourtant, il était de plus en plus fatigué et seuls l’argent qu’il gagnait et les retours positifs de ses clients le motivaient encore un peu. Aujourd’hui, il aimerait donner un autre sens à son travail et faire quelque chose d’utile plus en lien avec ses valeurs.
Ils réfléchirent tous les deux à un projet de changement de vie, mais Stéphanie ne lui fut d’aucun secours. Toutefois, elle l’écouta sans pouvoir lui donner de nouvelles bonnes idées pouvant l’aider.
Agacé, Julien se décida donc à la quitter et rejoignit sa voiture, mais il ne put avancer d’un mètre, car il constata que deux pneus de sa voiture étaient crevés.
Julien appela une dépanneuse, mais celle-ci ne pouvait intervenir que le lendemain matin. Julien retourna voir Stéphanie et il lui demanda, si cela lui était possible, de le raccompagner chez lui.
Stéphanie lui proposa plutôt de rester dîner et de rester dormir dans sa chambre d’amis afin qu’il puisse attendre la dépanneuse le lendemain matin sans souci. Julien accepta cette proposition, car après avoir vainement appelé Véronique, il tombait sur son répondeur, ce qui avait fini par l’agacer une fois de plus. Il se demanda donc où elle se trouvait et ce qu’elle pouvait faire de ses journées depuis deux jours.
Mais la proposition de Stéphanie le réjouissait et il put se détendre pour le reste de la soirée. Ils passèrent la soirée à discuter et à boire plus que de raison, après plusieurs apéritifs, ils dînèrent rapidement et partirent se promener le long de la rivière où ils trouvèrent une souche d’arbre suffisamment confortable pour s’y asseoir en se serrant l’un contre l’autre.
Julien posa sa main sur la hanche de Stéphanie qui tourna son regard vers lui, sa douceur fit le reste, ils se rapprochèrent l’un de l’autre et la chaleur de leurs corps se confondit bientôt en une seule, ils se serrèrent encore plus, Julien glissa sa main plus haut pour envelopper tendrement un sein, leurs lèvres humides se joignirent enfin.
Ils se levèrent et s’embrassèrent au bord de la rivière, sous l’ombre bienveillante d’un saule couvert de bourgeons qui éclataient sous le soleil estival en laissant s’épanouir de jeunes feuilles tendres.
Un rayon de soleil se posa sur la joue de Stéphanie pour venir y sécher une larme brillante. Julien l’essuya du bout des doigts et renouvela ses baisers et ses caresses, de plus en plus intimes et osées. Stéphanie le tira doucement par la main pour le ramener jusqu’à sa maison au plus vite, car elle sentait monter le désir de se donner à lui.
Une pulsion irrésistible les conduisit jusqu’à la chambre de Stéphanie où elle enleva tous ses vêtements avant de pousser violemment Julien sur son lit. Il ne résista pas, se laissa faire et sentit bientôt les mains de Stéphanie lui caresser le dos avant qu’elle ne poussât un gémissement de plaisir assouvi en même temps que lui.
Ils avaient trouvé l’harmonie parfaite en se laissant prendre par cette pulsion soudaine et incontrôlable. Maintenant, Julien interrogea Stéphanie sur la meilleure conduite à tenir désormais.
Il se sentait incapable de la quitter après ce moment de partage amoureux si intense, mais il se demandait quel sentiment l’agitait pour l’avoir poussée à agir avec une telle pulsion. Stéphanie lui promit d’y réfléchir sérieusement et le regarda intensément au fond des yeux avec un sourire admiratif et enjôleur. Julien se demanda ce qu’il ressentait sous ce regard brûlant et apaisant à la fois.
Tant de sentiments passaient par leurs yeux qu’il lui fut difficile de résister à ce regard. Julien, gêné par son aplomb, baissa les yeux et changea de discussion, il voulut en savoir plus sur ses relations avec Charles et Simone.
Stéphanie lui confia alors que ces deux personnes comptaient beaucoup pour elle, car elle les connaissait depuis son enfance, Charles travaillait au moulin de son père alors que Simone était employée par ses parents pour s’occuper de la maison et de son éducation.
C’était d’ailleurs au moulin que Simone et Charles s’étaient rencontrés, d’où leur attachement à ce lieu et à Stéphanie.
Stéphanie leur gardait donc une profonde affection, car ils étaient toujours très présents depuis le décès de ses parents.
Ils la considéraient d’ailleurs un peu comme leur fille, car ils n’avaient jamais eu d’enfant, et elle les aimait profondément, et cela était réciproque, a priori.
Depuis qu’ils étaient à la retraite, ils étaient toujours présents au moulin et Simone continuait à lui faire son ménage une fois par semaine. Cela leur permettait de se retrouver toutes les deux autour d’un thé ou d’un café.
Charles passait alors son temps à pêcher et à entretenir le moulin ou à bricoler dans l’atelier, sous le hangar ou dans le jardin où il cultivait des légumes pour tout le monde.
Charles était toujours fier de ses salades, de ses carottes, de ses tomates et courgettes dont Stéphanie se régalait chaque été.
Tout à coup, Julien fut attiré par le bruit d’une tronçonneuse, il quitta donc Stéphanie quelques minutes pour aller retrouver Charles qui était en train de dégager les branches qui bloquaient la roue du moulin.
Pour effectuer ce chantier, en toute sécurité, Charles avait fermé les vannes d’alimentation en eau du canal au niveau de la rivière.
Julien fut admiratif du savoir-faire de cet homme âgé de plus de soixante-dix ans qui semblait jouer avec ses outils dans son bleu de travail, les bottes aux pieds. Par sécurité, il demanda à Julien de s’éloigner.
Finalement, pour la nuit, Julien n’occupa pas la chambre d’ami, mais il resta tendrement collé à Stéphanie qui s’était plainte d’avoir froid, seule dans son lit. Stéphanie avait donc prié Julien de la réchauffer toute la nuit, en échange du gîte et du couvert, ce qu’il n’avait pu refuser après leurs premiers moments d’intimité qu’ils avaient déjà partagés dans ce même lit.
Julien eut une sensation de bien-être et de joie, ils s’endormirent, sereins, jusqu’à l’aube.
La dépanneuse vint chercher le véhicule de Julien à neuf heures du matin précises et Julien put ainsi l’accompagner jusqu’au garage où il put récupérer sa voiture après quelques heures avant de retourner à son travail avec un peu de retard excusable pour son premier rendez-vous.
Cependant, une grande confusion s’était emparée de son esprit. Julien se demanda quelle attitude adopter vis-à-vis de Stéphanie, car il se sentait déjà bien avec elle, en confiance et en harmonie.
Julien devait dans un premier temps revoir Véronique pour envisager ensemble la meilleure solution de leur séparation désormais effective, après dix ans de vie commune.
Julien prit un rendez-vous avec son avocat pour qu’il l’accompagne dans cette épreuve, car il voulait que cela se passe au mieux pour tous les deux.
Enfin, dans la journée, Véronique daigna le rappeler pour lui annoncer qu’elle souhaitait divorcer et qu’elle avait déjà pris un avocat qui devait lui envoyer une invitation à un rendez-vous de conciliation dans les prochains jours. Julien demanda alors à Véronique de bien vouloir le retrouver dans leur maison commune le soir même, pour discuter de leur séparation.
Finalement, Julien fut rassuré que Véronique ait pris l’initiative du divorce, il avait hâte de la retrouver le soir même pour en discuter.
Ce soir-là, il rentra plus tôt de son travail et il retrouva Véronique qui l’attendait déjà dans leur maison commune. Elle avait préparé un apéritif dînatoire d’adieu, tint-elle à préciser.
La discussion s’engagea donc très vite et ils étalèrent leurs différends, sans retenue.
Julien remarqua que sa femme enregistrait leur discussion sur un dictaphone.
Julien se limita donc aux faits sans oublier ses frustrations ni ses doutes sur la relation de Véronique avec Roger.
Véronique lui confirma qu’elle était amoureuse de Roger depuis plus de deux ans maintenant. Pour Véronique, cela lui semblait réciproque et elle souhaitait refaire sa vie avec lui d’autant plus que Roger venait de lui confier la gestion et l’animation de son centre équestre.
Ce fut ainsi que Julien apprit que sa femme lui était infidèle depuis plus de deux ans et qu’elle lui avait menti tout ce temps en le faisant culpabiliser sur ses retards récurrents, mais bien réels le soir.
Là encore, honnête, il demanda à Véronique si ce n’était pas cela la cause de son éloignement. Il avait quelque peu négligé sa vie de couple ces derniers mois, mais elle avait pu trouver un réconfort auprès de Roger qui avait su l’écouter et la comprendre, car il était présent.
Véronique regarda Julien, rouge de colère, prête à lui crier dessus et à le contredire à chacun de ses propos. Elle lui rappela son désir d’enfant et surtout son absence après sa fausse couche, une épreuve qu’elle avait dû affronter seule, et elle avait raison. Honteux, Julien choisit alors de se taire et il lui donna le nom de son avocat ; Julien lui précisa qu’elle pourrait garder la maison en usufruit et que lui continuerait de payer le crédit en cours auprès de la banque jusqu’à son terme.
Mais il précisa que ce serait la seule concession qu’il accepterait compte tenu de la situation et de la responsabilité de leur rupture qui incombait à Véronique étant donné qu’elle avait déserté le foyer conjugal depuis plusieurs jours sans le prévenir.
Julien choisit alors de se réfugier dans la cuisine où il prépara un dîner frugal de pattes à la sauce tomate pour deux et que Véronique accepta finalement de partager avec lui. Le repas se passa dans un silence pesant, chacun gardant les yeux fixés dans son assiette ou sur son téléphone portable.
Véronique, mal à l’aise par ce silence, le rompit et interpella Julien sur ce qui l’avait poussé à engager cette procédure de divorce de son côté…
Julien lui expliqua ce qu’il avait vécu et découvert ces derniers jours. Il ne cacha pas sa grande tristesse face à cet échec de sa vie, il s’excusa de ses absences ; cela émut profondément Véronique qui lui demanda de lui pardonner.
Véronique vint se positionner derrière lui et posa ses mains sur ses épaules tendrement, Julien resta insensible à sa démarche et se leva sans un mot pour aller faire une promenade en ville.
Discrètement, il subtilisa la cassette du dictaphone qu’il remplaça par une autre cassette vierge afin que Véronique pense que son dictaphone n’avait pas fonctionné.
Puis Julien sortit en claquant la porte de colère.
En ville, il s’arrêta dans plusieurs bars où il but de nombreux cognacs qui finirent par le saouler totalement. Ce fut au moment où Julien était ivre que quelques jeunes s’en prirent à lui en réclamant son portefeuille.
Julien s’énerva et frappa violemment un jeune un peu trop agressif à son goût. Le jeune s’effondra inanimé au sol ; la police fut avertie.
***
Julien se retrouva à nouveau face à la jeune capitaine Marie Dubois à laquelle il dut justifier son comportement stupide. Julien la trouva moins sympathique tout à coup, mais il reconnut les faits et il assuma sa bêtise.
Le jeune homme fut hospitalisé sans conséquence pour sa santé, juste un beau coquart impardonnable selon lui. Il porta donc plainte contre Julien.
Julien reconnut ses torts et il s’engagea à verser des dommages et intérêts à ce jeune homme sans ressource et à l’aider à trouver un boulot pour le sortir du chômage et de sa situation de SDF ; Julien accompagna donc le jeune dans la rédaction de son CV lors d’un rendez-vous dans un café du centre-ville, puis il contacta plusieurs entreprises parmi ses clients ; Julien trouva ainsi un emploi à sa victime en quelques jours, Le jeune homme satisfait remercia Julien et il renonça à ses dommages et intérêts devant Marie qui put classer sa plainte sans suite et les remercia tous les deux.
Julien offrit alors un déjeuner au restaurant à Marie en compagnie de Stéphanie, leur nouvelle amie. Elles ne se quittaient plus depuis leur rencontre dix jours plus tôt.
Julien leur fit remarquer que leur amitié récente s’était construite bizarrement. Ils passèrent une grande partie du repas à discuter autour des évènements qui les avaient amenés à se rencontrer et à s’apprécier mutuellement.
Une amitié naissante empreinte parfois des chemins tortueux pour s’installer entre les personnes ; mais ces trois-là avaient environ le même âge, la trentaine, ce qui facilita leurs échanges.
Comme tous les trois semblaient s’apprécier et qu’ils aimaient se retrouver ensemble, ils acceptèrent de se revoir chez Stéphanie dans les jours suivants pour un déjeuner auquel elle les invita.
***
Le dimanche suivant fut la date retenue par tous et chacun s’engagea à apporter sa contribution culinaire pour un repas en plein air au bord de la rivière, car la météo prévue était estivale ; le cadre du moulin avait tout pour les séduire pour un pique-nique lors de ce dimanche ensoleillé de fin juin.
Depuis que Charles était intervenu, la roue du moulin tournait à nouveau et on pouvait entendre le bruit de l’eau qui s’écoulait sur les pales avant de retomber bruyamment dans le canal. Ces sons d’eau avaient quelque chose de calmant pour le trio qui passa un long moment à regarder la roue tourner, un verre de vin à la main.
Devant le moulin, le chemin s’enfonçait dans la rivière où il rejoignait un ancien gué empierré. Ce fut là que Stéphanie entraîna ses deux amis jusqu’à ce que l’eau leur arrive à la taille.
***
Stéphanie plongea alors tout habillée dans la rivière avant de ressortir de l’eau en les éclaboussant. Ils étaient désormais trempés tous les trois et comme l’eau était tiède, ils profitèrent de ce moment en riant aux éclats avant de se libérer de leurs vêtements trempés et de terminer leur baignade en sous-vêtements, car personne n’avait prévu la tenue adéquate pour se baigner.
Stéphanie autorisa ensuite ses nouveaux amis à se doucher et elle prêta à chacun un peignoir et une serviette, elle mit leurs vêtements dans le sèche-linge et ils purent terminer leur soirée de rigolade dans une tenue sèche, mais très chiffonnée.
Marie ayant la même taille que Stéphanie, cette dernière put lui prêter une tenue correcte pour le cas où Marie serait appelée pour une intervention de police urgente. Julien dut se satisfaire de ses vêtements non repassés, mais ce détail ne le gêna pas pour le reste de la soirée.
Cette petite baignade improvisée avait fini par sceller leur amitié, ils avaient désormais un souvenir commun qui n’appartenait qu’à eux et cela fut le baptême de leur amitié naissante. Marie dut les quitter pour une urgence sur l’autoroute, un carambolage avec un camion.
Stéphanie et Julien se retrouvèrent donc seuls en tête-à-tête, ce qui illuminât tout à coup leurs visages réciproques, maintenant qu’ils étaient seuls en tête-à-tête. Ils se sourirent en se regardant comme s’ils se rencontraient pour la première fois.
Dès que leurs regards s’accrochaient, quelque chose d’électrique se passait en eux, qu’ils ne pouvaient expliquer.
Ils s’attiraient tels des aimants et immédiatement ils se rapprochaient l’un de l’autre. Aucun d’eux ne voulut rompre cet instant de séduction réciproque. Le charme semblait les remplir d’un doux moment de bonheur.
Une joie immense inonda leur cœur, un sentiment nouveau et profond s’empara de chacun d’eux.
Ils se saisirent les mains et se dirigèrent ensemble vers un banc de pierre qui chauffait au soleil devant la maison depuis le matin ; là, ils se posèrent sur la pierre chaude et se blottirent l’un contre l’autre en silence. Les rayons et la chaleur du soleil les enveloppèrent,
Ils se laissèrent aller à de tendres caresses que seuls leurs baisers interrompaient. Ils se sentaient bien ainsi et aucun d’eux n’osait parler. Seuls les chants des oiseaux rompaient le silence.
Le cliquetis du moulin les ramena doucement à la réalité du soir, une légère bise les poussa à se réfugier à l’intérieur de la maison où ils purent à nouveau se poser sur un canapé qui les attendait.
***
Julien choisit d’allumer un feu dans la cheminée, alors que Stéphanie sortit deux verres qu’elle remplit de l’apéritif à l’épine noire fabriqué par les bons soins de Charles et Simone. Après une première gorgée, Stéphanie fut la première à parler avec douceur en offrant le gîte et le couvert à Julien pour la soirée s’il le souhaitait.
Julien accepta, il se mit à lui parler des raisons de sa séparation avec Véronique. Stéphanie l’écouta sans l’interrompre ni lui donner son avis. Elle était simplement présente et ravie qu’il se confie à elle avec confiance. Julien était heureux d’être enfin écouté sans jugement. Il avait d’ailleurs le sentiment de se confier à une véritable amie à qui il ne craignait pas d’ouvrir son cœur ni ses états d’âme. Il lui parla de son enfance puis de ses amours de jeunesse sans pudeur ni flagornerie. Stéphanie le poussait à être vrai, à ne rien lui cacher, cependant Julien garda quelques secrets intimes qu’il lui confierait peut-être une autre fois.
Stéphanie, devant tant de sincérité, se sentit dans l’obligation de lui parler, elle aussi, de son enfance puis de son amour de jeunesse perdu à tout jamais.
Son amoureux de l’époque avait choisi de s’engager dans l’armée comme pilote d’avion et il participa à des missions de guerre en Afrique, cela était contraire aux valeurs de Stéphanie qui militait régulièrement pour la paix dans le monde ;
Devant tant d’incompréhension, ils avaient choisi de mettre fin à leur relation, mais elle regrettait simplement de n’avoir pas su le convaincre de renoncer à faire la guerre.
Ce fut lors de cet échange que Julien découvrit que Stéphanie partageait les mêmes valeurs de justice et paix que lui.
Julien lui confia aussi qu’actuellement son travail le mettait de plus en plus mal à l’aise, car il était contraint de se soumettre aux contraintes et règles de cette société libérale consumériste pour gagner un salaire confortable.
Julien souhaitait trouver une idée ou un travail plus en phase avec ses valeurs, mais il doutait de ses capacités à trouver la solution actuellement étant donné la confusion de son esprit.
Julien appela Véronique pour l’avertir qu’il ne rentrait pas, mais encore une fois le téléphone sonna dans le vide. Et il laissa un message sur le répondeur que personne n’écouterait sans doute.
Julien parla de Véronique, de leur rencontre et des bons moments qu’ils avaient partagés ensemble avant que quelque chose se casse entre eux. Il essaya de se souvenir de l’évènement qui avait provoqué cette rupture. Pour lui, il situait ce moment à la fausse couche de Véronique, qu’ils avaient vécu comme un drame tous les deux.
La fin d’une histoire amoureuse reste toujours difficile à anticiper. Cela arrive sans prévenir, un accident de la vie et tout était rompu malgré tous les engagements que l’on avait pu prendre avant.
Un vide profond s’installe alors au fond de chaque cœur, le silence devient le seul échange que l’on ait, l’incompréhension l’emporte sur toute forme de raisonnement juste.
L’écoute attentive de l’autre s’estompe et se cantonne au juste nécessaire à la survie et chacun essaie de sauver les meubles de ce qu’ils ont construit ensemble, mais plus aucun projet commun ne motive le couple en ruine.
On ne se pardonne plus rien et toute excuse est vaine. Plus rien ne surprend l’autre et on finit par accepter la fin d’une histoire de vie que l’on croyait indestructible.
Pour Julien, cela devenait insupportable malgré l’aide de sa psychothérapeute. Il avait du mal à prendre en compte et à accepter la fin de son histoire avec Véronique, il souffrait au plus profond de son âme et il culpabilisait d’en être arrivé là sans pouvoir y remédier.
Julien ne se sentait pas encore prêt pour passer à autre chose, surtout il s’interrogeait sur l’utilité de commencer une nouvelle histoire, il avait plutôt envie de fuir.
Partir loin d’ici pour oublier sa tristesse et sa douleur ; il en parla sans détour avec Stéphanie qui lui proposa de partir un week-end tous les deux dans un gîte quelque part où il pourrait voir autre chose et elle lui fit l’éloge de la fuite, ce qui finit par le rassurer un peu.
Julien accepta la proposition de Stéphanie avec enthousiasme en lui demandant simplement de s’occuper de tout, car son divorce lui accaparait trop le cerveau pour le moment en dehors de son boulot. La nuit aux côtés de Stéphanie fut douce et tendre et le matin arriva encore trop tôt.
Après le petit déjeuner, Julien partit à son rendez-vous avec son avocat à qui il remit la cassette de l’enregistrement de sa dernière discussion avec Véronique.
Julien lui expliqua avoir remplacé la cassette du dictaphone de Véronique par une cassette vierge qu’elle avait oubliée sur la table. L’avocat s’engagea à se rapprocher au plus vite de son confrère pour lui faire part de la proposition de Julien concernant la maison.
Julien honora ses autres rendez-vous avant de rentrer chez lui où il trouva à nouveau les pièces vides.
Julien erra seul dans l’ensemble de la maison et effaça son dernier message sur le répondeur. Il regarda chaque meuble qu’ils avaient choisi ensemble et chaque décoration qu’ils avaient rapportée d’un voyage. Une grande nostalgie le saisit tout à coup.
Julien se laissa choir sur le canapé avant de se verser un verre de bière qu’il but en grignotant des gâteaux à apéritif sans aucun plaisir, il était triste et il pleura doucement.
Un sentiment de solitude et de tristesse s’empara de lui. Julien saisit son téléphone portable et il appela Stéphanie dont la seule voix lui réchauffa le cœur. Il lui fit part de sa détresse du moment, elle l’écouta et elle l’invita à venir partager son dîner qu’elle ne voulait pas prendre seule ce soir-là en sachant son ami triste et seul.
Julien se précipita dans sa cave où il choisit une bonne bouteille de vin rouge du sud de la France puis il acheta un dessert dans une pâtisserie avant de rejoindre Stéphanie pour une nouvelle soirée qu’il espérait douce, chaleureuse et pleine de vie sincère.
Le dîner fut simple, mais le vin de l’Hérault était chargé en alcool et les langues se délièrent et Julien fut bientôt plus détendu, Julien laissa son amertume dans sa poche et il se réjouit d’être là auprès de Stéphanie dont la seule présence lui apportait un réconfort doux et chaleureux. Auprès d’elle, Julien avait le sentiment de toucher une part de joie et de bonheur, il lui fit part de son sentiment et il fut étonné qu’elle partage la même joie que lui d’être ensemble.
Ils cherchèrent à définir ensemble ce qu’ils ressentaient l’un pour l’autre, en s’interrogeant sur la différence entre l’amour et l’amitié.
Ils en conclurent qu’ils aimaient bien être ensemble, c’était ce qui comptait pour le moment présent, partager et vivre un bon moment ; se parler en respectant la parole de l’autre sans jugement péremptoire.
Pour le moment, il leur était encore difficile de définir le sentiment qui les rapprochait, mais le plus important était qu’ils soient présents l’un pour l’autre et qu’ils se sentent bien ensemble.
Julien pensa que partir tous les deux un week-end leur permettra peut-être d’y voir plus clair sur leurs sentiments. Ce dont Julien était certain, c’était que la présence de Stéphanie à ses côtés lui faisait du bien, cela lui redonnait le goût à la vie et l’envie d’avancer avec elle et de faire des projets.
Pour sa psychothérapeute, c’était cela l’amour, alors qu’elle-même s’interrogeait sur ses sentiments pour Julien.
Dès qu’il se réfugiait auprès de Stéphanie au Moulin du Gué, un sentiment de paix l’envahissait. Le lieu se prêtait à la méditation et à la contemplation grâce à un environnement naturel respecté et vivant, on respirait une grande douceur dès que l’on arrivait ici.
Marie reprit contact avec Stéphanie pour lui apprendre qu’elle avait retrouvé la trace du vrai Josué. Ce dernier était toujours vivant et il était actuellement salarié d’une association d’insertion à Tours.
Cette information interpella Stéphanie qui connaissait bien ce milieu grâce à son travail d’assistante sociale dans une structure sociale de la ville de Tours. Stéphanie décida donc de mener sa propre enquête grâce à son réseau professionnel.
Stéphanie fixa un rendez-vous avec le directeur de la structure Emmaüs afin de rencontrer le vrai Josué en compagnie de Marie à la demande de celle-ci.
Le directeur les reçut quelques jours plus tard en compagnie de Josué qui se demanda bien ce que la police lui voulait, lui qui essayait de se faire le plus discret possible depuis plus de trente ans maintenant craignant toujours d’être expulsé malgré son emploi stable et ses bonnes fréquentations actuelles.
Josué voulut bien répondre aux questions de Marie ; elle était venue avec son ancien sac de voyage et le passeport qu’avait perdu Josué ou qu’on lui avait volé alors qu’il était hébergé dans un autre centre d’accueil pour migrants de la ville de Tours.
Josué leur parla en pleurant de son fils de six ans qu’il avait abandonné dans une rue de la vieille ville de Tours, un soir de détresse, car il ne pouvait plus le nourrir ni s’occuper de lui. Son enfant était venu avec lui lorsqu’il avait quitté la Roumanie après la mort de sa femme. Elle était malade et elle n’avait pas reçu de soin, car ils étaient trop pauvres pour payer un médecin de la ville.
Josué avait alors abandonné sa petite-fille de trois ans à sa sœur Albertina et il était parti avec son fils pour survivre avec lui.
Dans son pays, à cette époque, il n’y avait plus de travail et beaucoup de gens mouraient de faim, c’était pour cette raison, qu’il avait décidé de venir en France où il espérait trouver du travail pour nourrir son fils. Son enfant avait alors six ans lorsqu’ils étaient venus, en passant par le nord de l’Italie, ils avaient trouvé un camion, car le chauffeur avait eu pitié de son petit garçon.
L’enfant l’avait ainsi bien aidé à voyager jusqu’au sud de la France où il avait travaillé à la cueillette des melons et des fruits, il avait aussi fait les vendanges dans un beau domaine viticole, celui de monsieur André.
Puis un ami vendangeur les avait ramenés jusqu’à Paris puis à Tours où ils avaient cherché un travail et un logement, mais ils avaient surtout fait la manche dans la rue jusqu’au jour où il décida d’abandonner son enfant en espérant que quelqu’un s’occupe bien de lui et lui offre un toit et à manger.
Josué avait volontairement abandonné son fils devant le cabinet du docteur Morin qui les avait soignés et nourris gratuitement quelques jours plus tôt, un brave homme selon Josué.
Depuis ce jour, il n’avait plus aucune nouvelle de son fils et cela faisait maintenant plus de trente ans qu’il le recherchait sans cesse. Son fils s’appelait Adam et il devait bien avoir trente-six ans maintenant s’il était toujours en vie.