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"La maison de Léa" est l’histoire de trois jeunes adultes confrontés à diverses tragédies. Léa se trouve au centre de l’intrigue, devant faire face aux drames de la vie de son père Julien. Accompagnée de ses amis, Ali et Maya, qui ont fui les guerres en Afrique pour s’installer au Pays basque, ils doivent tous affronter les crises écologiques, sanitaires et sociales de leur époque. S’en sortiront-ils ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Passionné de sculpture et d’arts plastiques,
Alain Nourisson doit brusquement cesser toute activité professionnelle et artistique à la suite d’un grave accident de santé. Pour faire face à sa nouvelle situation de handicap, il se réfugie dans l’écriture, appliquant ses techniques artistiques du modelage, couche par couche ou simplement phrase par phrase…
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Alain Nourisson
La maison de Léa
Roman
© Lys Bleu Éditions – Alain Nourisson
ISBN : 979-10-422-2138-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ce récit est une fiction, et toute ressemblance avec des évènements, des faits divers et des personnes ayant existé ne serait que pure coïncidence.
Géomètre topographe de formation, Alain Nourisson exerce son métier en aménagement du territoire en milieu rural puis en milieu urbain avant de reprendre des études d’ingénieur-conseil au service des organisations publiques et privées. Écologiste militant, passionné de sculpture et d’arts plastiques, il doit cesser toute activité professionnelle militante et artistique à la suite d’un grave accident de santé, un accident cardiovasculaire.
Pour faire face à sa nouvelle situation de handicap, résilient, il se réfugie dans l’écriture, comme écrivain autodidacte en appliquant ses techniques artistiques du modelage, couche par couche ou simplement du mot à mot, dans un travail long et difficile d’écrithérapie.
Comme chaque matin, tôt, Julien marchait tranquillement sur un chemin forestier longeant la rivière calme que seuls quelques sauts de poissons gobant un insecte venaient troubler en laissant apparaître des ronds troublant la surface lisse de l’eau, une feuille se décrochait parfois d’un arbre et venait leur faire concurrence en se transformant en objet flottant avant de disparaître dans les profondeurs sous le miroir sombre de la surface remplie de reflets inquiétants.
Ne regardant pas où il posait les pieds, Julien sentit un objet s’écraser sous sa chaussure, il continua néanmoins son chemin sans y prêter une attention particulière.
Julien remarqua cependant une jeune femme le dépasser d’un pas rapide. Elle opéra un demi-tour, elle sembla chercher quelque chose dans ses poches, en vain, elle reprit sa marche doucement vers Julien penchée vers le sol comme si elle y cherchait quelque chose. Il la salua et lui demanda ce qu’elle avait perdu.
Elle avait fait tomber sa paire de lunettes par maladresse en répondant à son téléphone portable sorti de sa poche.
Julien retourna sur ses pas, il découvrit l’objet qu’il venait d’écraser avec son pied. Il ramassa les débris d’une paire de lunettes. Il les présenta à la jeune femme qui se mit à pleurer en se demandant comment elle allait faire pour conduire sans ses lunettes. Julien s’étonna qu’elle n’ait pas une autre paire de lunettes avec elle dans sa voiture.
Il lui présenta ses excuses et son aide car il culpabilisait d’avoir marché sans regarder où il mettait les pieds. Pour s’excuser, il lui proposa de l’accompagner chez son opticien à la fin de sa balade.
La jeune femme un peu gênée se présenta. Noémie accepta la proposition car elle était en vacances pour quelques jours, elle se trouvait donc loin de son opticien habituel.
Elle accepta le bras que Julien lui proposa et ils continuèrent tranquillement leur promenade en continuant de se présenter afin de mieux se connaître.
Julien lui proposa de s’asseoir sur le banc de bois où il aimait se reposer lors de ses promenades.
Là, comme d’habitude, il se tut et il jeta un regard sur la rivière, à cet endroit, l’eau était verte et calme, stagnante, aucun courant ne venait troubler sa surface.
Seule une tourterelle troubla le silence de l’instant de son roucoulement grave et doux. Des libellules aux ailes bleues et cristallines virevoltaient dans un ballet aléatoire au-dessus de l’eau comme suspendues par un fil invisible les retenant de leur chute.
Soudain, le soleil disparut derrière un nuage gris, tous les oiseaux se turent. Une lumière grise enveloppa le paysage. Un souffle de vent irisa la surface de l’eau et les fit frissonner. Les premières gouttes d’une pluie fine et fraîche frappèrent bientôt leurs visages. Ils se levèrent à la recherche d’un abri proche car aucun n’avait prévu de parapluie. Une grotte était visible dans la falaise derrière eux mais elle leur sembla inaccessible sans équipement d’escalade.
Julien sortit alors de son sac à dos son poncho de randonneur qu’il avait toujours la précaution de prendre avec lui. Ils eurent tout juste le temps de le déplier et de l’installer sur leurs épaules avant d’être trempés.
L’orage gronda, un rouge-gorge poussa un cri strident et saccadé suivi de celui plus puissant d’un merle éloigné. Le cri d’un geai leur contesta le silence qui revenait en laissant seulement entendre les gouttes de pluie qui éclataient sur les feuilles et le sol. Elles provoquèrent des ronds éclatés sur la surface de la rivière. Un environnement humide s’installa autour d’eux.
Julien s’approcha de la rivière, les libellules prudentes avaient replié leurs ailes cristallines en se réfugiant sur les feuilles des nénuphars qui se pâmaient à la surface de l’eau qu’un souffle de vent irisait. Poussées par ce dernier, des feuilles des peupliers vinrent se poser doucement en se balançant, sur l’herbe humide et verte pour la maculer de taches jaunes et ocre en forme de cœur. Une odeur de sol humide pénétra leurs narines.
Le vent se fit plus fort, les nuages s’écartèrent dans le ciel pour laisser apparaître une trouée remplie de ciel bleu où un nuage cotonneux et blanc se déchira avant de disparaître sous les nouveaux rayons d’un soleil brûlant pour ce début d’automne.
Julien se redressa et il abandonna son regard des plantes aquatiques qui remuaient au rythme du courant de la rivière. Il secoua son poncho avant de le replier avec l’aide de Noémie. Le soleil voulut enfin les réchauffer un peu.
Les branches se mirent à frémir et à s’égoutter sur le sol. Ils reprirent leur marche sur un chemin trempé et boueux en se soutenant par le bras pour éviter toute glissade possible.
Noémie voulut retrouver son camping-car afin d’y changer ses vêtements et ses chaussures humides. Julien l’accompagna, il lui proposa de le conduire car sans lunettes, elle était dans l’incapacité de se diriger, elle voyait à peine ses pieds.
Julien conduisit jusqu’au centre commercial où il avait l’habitude de prendre ses lunettes personnelles. Arrivés sur place, Julien négocia avec son opticien habituel pour qu’il accepte de prendre en charge le remplacement des lunettes de Noémie qu’il avait écrasées en marchant.
Connaissant Julien depuis longtemps, l’opticien accepta d’utiliser l’assurance bris de verres qu’il avait vendue à son client pour ses lunettes personnelles quelques années plus tôt.
L’opticien demanda à Noémie de l’accompagner dans son atelier pour qu’il reprenne les corrections nécessaires à sa vue même si elle avait retrouvé ces informations sur une carte dans son portefeuille retrouvé dans la boîte à gants de son camping-car.
Pendant ce temps, Julien examina les présentoirs du magasin afin de choisir une nouvelle monture pour Noémie si elle acceptait son choix. Il sélectionna quatre modèles qui lui semblèrent adaptés au visage rond et doux de la jeune femme. Le choix final de la jeune femme se fit sur l’une des montures choisies par Julien. Ils durent reprendre un rendez-vous pour la fin de la semaine suivante afin que l’opticien puisse disposer des verres correspondants à la vue de Noémie qui se lamenta encore de devoir attendre si longtemps.
Alors que le crépuscule s’installait doucement sur leur environnement, Julien invita gentiment Noémie à l’accompagner pour un dîner au bord de la rivière dans une guinguette nouvellement aménagée pour la période estivale.
Comme l’air était doux et légèrement humide en ce début d’automne, nous aurions pu croire à un soir d’été. Seule la lumière du jour laissa rapidement la place à celle des candélabres qui éclairèrent les dernières flaques d’eau stagnant sur le sol. Des éclats lumineux se reflétaient encore dans celles-ci. Ils signalaient ainsi leurs présences à éviter en marchant.
Après un dîner où ils purent faire plus ample connaissance, Julien proposa à Noémie de l’héberger dans l’une de ses chambres désormais abandonnées par ses deux enfants partis vivre au Canada auprès de leur mère pour leurs études supérieures.
Il eut un pincement au cœur en pensant à eux à cet instant. Il souffrait de les savoir si loin de lui et de les voir si rarement. Ils venaient passer quelques jours à ses côtés chaque été. Mais ces instants étaient toujours insuffisants à ses yeux. Une grande tristesse le troubla tout à coup.
Julien vivait désormais seul dans une immense demeure héritée de ses parents décédés deux ans plus tôt.
Un immense parc garni de merveilleux arbres centenaires complétait cette demeure de pierres dont chaque ouverture était encadrée de briques rouges alternant avec des pierres de taille blanches qui donnaient à chaque façade un aspect cossu de maison bourgeoise qui plaisait assez à Julien.
Cette propriété lui apportait un statut de notable qu’il se refusait cependant d’endosser auprès des habitants du village avec lesquels Julien aimait partager un verre ou un café au bar. Mais cela leur semblait normal qu’il paie à chaque fois l’addition. Julien avait d’ailleurs fini par ouvrir un compte auprès de son cafetier qu’il soldait chaque mois en acceptant de régler parfois quelques tournées de quelques profiteurs abusant de sa bienveillance.
Un jour qu’il s’étonnait du montant de sa facture mensuelle, le cafetier lui avait révélé les noms des consommateurs indélicats avec lesquels Julien eut une explication amicale, ils changèrent leurs mauvaises habitudes immédiatement après de plates excuses acceptées autour d’un verre d’excuse enfin offert par ces derniers. Julien s’était ainsi fait de nouvelles relations amicales qui gonflèrent à nouveau ses notes mensuelles chez le cafetier.
Julien aimait cependant retrouver ses amis fidèles dans ce bar pour des parties de tarot ou de fléchettes interminables jusqu’au moment où l’un d’eux s’effondrait de sommeil ou d’abus d’alcool. Julien rentrait alors tranquillement en compagnie de Romain, son voisin et ami fidèle depuis plus de dix ans maintenant.
Romain était médecin, il avait accompagné la deuxième épouse de Julien jusqu’à son décès prématuré à la suite d’un cancer. Cet évènement tragique avait tissé des liens amicaux solides entre les deux hommes. Ils savaient pouvoir compter l’un sur l’autre dès que l’un avait un souci ou un bricolage à faire à quatre mains.
Ce soir-là, Julien lui confia sa rencontre avec Noémie. Prudent, Romain lui demanda de se méfier. Il connaissait la générosité aveugle de son ami dont certains abusaient parfois.
En arrivant chez lui, Julien fut étonné de découvrir le camping-car de Noémie sans éclairage alors qu’il l’avait relié à une prise électrique. Finalement, en rentrant chez lui, il découvrit un petit mot sur sa table où Noémie l’informait avoir accepté son offre, et prit possession de la chambre qu’il lui avait proposée.
Cette sage décision le réjouit mais il se rappela la mise en garde de son ami et il fit le tour de chaque pièce pour constater qu’aucune n’avait été fouillée, il se doucha et alla se coucher serein et rassuré.
Le lendemain matin, comme à son habitude, Julien s’installa sur sa terrasse pour y boire tranquillement un premier café en posant son regard sur les prairies verdoyantes qui s’étalaient sur le versant opposé à sa propriété de l’autre côté de la rivière qui délimitait son parc.
Au loin, là-bas sur la colline, quelques moutons égarés accompagnaient un cheval en broutant une herbe verte encore recouverte de la rosée du matin que la lumière des premiers rayons du soleil embrasait de mille éclats brillants tels des diamants dont la pureté lumineuse réveilla en Julien ses instincts de bijoutier avec une envie soudaine de dévaliser une vitrine garnie de bijoux, parures et bagues en or serties de diamants. Son père avait été un diamantaire réputé, il l’avait initié à ce métier étrange mais tellement gratifiant pour Julien.
Mais le chant d’un coq lointain le sortit de sa rêverie avant qu’un chien mécontent ne lui conteste ce privilège de réveille-matin. Un vent frais le fit frissonner alors que le soleil réchauffait déjà ses bras nus posés sur la table où il avait installé son petit-déjeuner qui attendait d’être dégusté. Un fruit, un yaourt et une baguette de pain croustillante recouverte de beurre et de confiture de prunes complétèrent le café déjà bu. Ce matin-là était particulier car il n’était plus seul dans sa grande maison. Une invitée y dormait encore.
Tout à coup, le bruit d’une chute attira son attention. Un objet venait de se briser sur le carrelage du couloir après avoir été poussé par la main maladroite de la jeune femme endormie qui cherchait l’accès aux toilettes dans une maison inconnue où elle n’avait pas ses repères habituels. Elle cria en chutant lourdement sur le sol.
Alerté par ces cris, Julien se précipita dans le couloir où il découvrit Noémie essayant maladroitement de se relever avant de se retrouver à nouveau allongée sur le sol. Il lui proposa son aide car il remarqua qu’elle s’était blessée dans sa chute. Son front saignait abondamment. Il l’aida à se relever et l’accompagna jusqu’à la salle de bains où il épongea délicatement sa blessure avec une serviette propre, il appela immédiatement Romain son ami médecin et voisin qui vint en urgence examiner la blessée. Ce dernier encercla sa tête d’une bande, il appela les urgences pour un examen plus approfondi.
Romain regarda aussi les yeux de Noémie et il lui demanda de se faire examiner rapidement par un ophtalmologiste car il crut observer un début de cataracte dans chaque œil. Il affirma que sa vue trouble n’avait cependant rien à voir avec sa chute. Cela les avait rassurés tous les trois.
Finalement, Romain proposa d’accompagner lui-même la jeune femme aux urgences où il avait ses entrées en tant que médecin interne à l’hôpital. Il put ainsi demander les examens nécessaires ainsi que la prise en charge de Noémie dans un service d’ophtalmologie spécialisé pour ses yeux.
Après que Noémie eut subi tous les examens nécessaires, Romain appela Julien pour le rassurer, il lui demanda de rapporter les papiers de sa patiente qui se trouvaient dans la boîte à gants de son camping-car.
Après avoir rempli sa mission, Julien visita Noémie qui lui confia avoir utilisé son téléphone fixe pour appeler sa mère afin qu’elle lui envoie sa deuxième paire de lunettes qu’elle pensait avoir laissée chez elle.
Mais après de vaines recherches, pensant bien faire, sa mère avait appelé Victor, l’ex-compagnon de Virginie, pour qu’il lui envoie cette fameuse paire de lunettes à l’adresse de Julien. Sa mère était loin de se douter de ce qu’il allait faire.
Lorsque Julien rentra chez lui, il découvrit un homme en train de déposer des sacs et des cartons devant son portail d’entrée. Julien lui demanda ce qu’il faisait en se présentant, ce dernier lui répondit qu’il déchargeait tout ce qui appartenait à Noémie.
À la fin de son travail, il posa, bien en évidence, un étui à lunettes au sommet du dernier paquet avant de repartir avec sa camionnette sans un mot d’explication acceptable.
Julien n’eut pas le réflexe de réagir, tellement cet acte l’avait surpris. Il appela la police pour qu’elle vienne constater ce dépôt qui encombrait le trottoir devant sa porte.
Julien dut s’expliquer et il donna le nom de Victor dont il avait trouvé l’adresse sur un carton. Les policiers prirent de multiples photos avant d’ouvrir les paquets contenant des vêtements féminins, des livres et des bibelots.
Avec l’aide des policiers, Julien stocka l’ensemble des paquets et sacs dans le local disponible dans son jardin avant de se rendre au commissariat pour signer son dépôt de plainte contre Victor.
Julien retourna ensuite à l’hôpital pour remettre la paire de lunettes à Noémie à qui il raconta le dernier acte de Victor qu’elle ne put expliquer.
Selon Noémie, Victor ne pouvait pas savoir où elle se trouvait depuis son départ pour donner suite à une violente dispute entre eux. Elle ne lui donnait aucune nouvelle.
Noémie réalisa cependant qu’elle avait donné l’adresse de Julien à sa mère. En pensant bien faire, cette dernière avait pu la donner à Victor pour l’envoi de ses lunettes.
Elle promit d’avoir une explication avec sa mère dès sa sortie de l’hôpital prévue dès le jour même. Julien se proposa de venir la chercher si elle l’acceptait. Julien passa ensuite voir Romain, son ami médecin interne aux urgences de l’hôpital.
Puis Julien rentra chez lui où il retrouva sa femme de ménage avec laquelle il fit un grand ménage tout en lui expliquant les évènements de la veille et de la matinée. Elle prit le temps de ranger soigneusement les vêtements et tous les objets de Noémie dans les placards de la chambre que Julien lui avait prêtée.
Puis ils prirent le temps de prendre un café tous les deux comme à leur habitude. Plus tard, Julien se réfugia dans son bureau pour y commencer sa journée de travail.
Julien travaillait à domicile depuis plusieurs années pour le compte d’un cimentier international qui le rémunérait pour effectuer des recherches sur de nouveaux matériaux et concepts innovants répondant aux nouvelles exigences des marchés de construction pour un habitat plus écologique.
Il s’agissait en réalité d’un travail d’ingénierie pointue qui devait prendre en compte les exigences des entreprises de construction clientes du cimentier.
Julien mettait à profit toutes ses connaissances d’architecte et d’ingénieur chimiste pour se livrer à ses différentes expériences depuis son domicile actuel. Celui-ci était ainsi devenu son lieu de travail validé par son entreprise qui lui faisait confiance en le rémunérant correctement pour ses travaux dont il devait cependant rendre compte chaque mois.
Sur sa planche à dessin, Julien retrouva les croquis de son dernier projet de construction.
Ses nouveaux modules avaient été mis au point avec l’aide de Raymond, un ami agriculteur. Il collaborait avec lui pour réaliser des parpaings de paille compressée destinés à remplacer les anciens en ciment ou les briques pour la construction de bâtiments à ossature bois. Ils travaillaient avec un charpentier dans la cour de la ferme de Raymond pour mettre au point leur nouveau projet collaboratif.
Julien était enthousiaste car ils venaient de tester avec succès leur nouvelle presse qui leur permettait de réaliser des cubes solides de la taille d’un double parpaing classique. Ce volume réduit facilitera l’assemblage des modules sur la structure en bois que terminait le charpentier.
Il leur restait à tester les enduits intérieurs et extérieurs à base d’argile extraite d’un champ situé à proximité de la ferme de Raymond. Ce dernier avait déjà rempli une benne de cette précieuse terre.
Un ami maçon se joignit bientôt à leur équipe, il proposa de réaliser les premiers essais d’enduits. Une façade exposée au soleil fut bientôt terminée et après plusieurs jours de séchage, chacun testa la solidité du nouveau mur.
Le mortier de chaux mélangé à l’argile avait pénétré la paille sur quelques centimètres. Cela rendait l’ensemble solidaire et étanche aux assauts de la pluie et du vent. Seul un jet d’eau sous haute pression parvint à faire une entaille facile à réparer.
Différents autres assemblages furent testés en mélangeant l’argile au plâtre, au ciment et à la chaux. Raymond leur proposa même de construire un mur dans une étable pour le mettre à l’épreuve de ses vaches.
Comme chaque soir après sa journée de travail, Julien se rendait sur la place du centre-ville. Là, il avait l’habitude de prendre un verre au bar en observant les artistes peintres qui s’y installaient pour y vendre leurs toiles exposées aux badauds qui défilaient devant leurs tableaux sans y jeter le moindre coup d’œil même indiscret.
Cette exposition en plein air attirait chaque soir le regard de Julien, curieux de découvrir chaque nouvelle création exposée. Il passait alors de longs moments à discuter avec les artistes de leurs œuvres.
D’où il était installé, Julien fut attiré par un tableau qui représentait un ciel d’orage s’effondrant sur une plage de sable doré éclairé par une lumière blanc et jaune cachée derrière un nuage en forme d’enclume noire. Elle semblait exploser dans un ciel vivant, sombre, brutal et inquiétant.
Julien fut séduit par cet instant artistique et mystique saisi par le regard et le travail du peintre. Il acheta le tableau, puis il rentra tranquillement chez lui, son acquisition sous le bras.
Il choisit de l’installer dans le coin du salon de sa bibliothèque à côté de la porte-fenêtre située du côté est de sa maison.
Julien ouvrait chaque matin toutes les fenêtres pour aérer sa demeure et admirer les couleurs chaudes du matin qui s’éveillaient sous yeux à l’Est.
Il aimait particulièrement cet instant fugace où les premières lueurs du jour traçaient de bleu et d’orange les filets de brumes ou les nuages surplombant l’horizon avant qu’une lumière plus blanche et plus pure ne vienne tout effacer.
Julien buvait alors tranquillement son premier café en posant son regard sur les prairies verdoyantes situées de l’autre côté de la rivière bordant et limitant sa propriété. Mais ce matin avait quelque chose d’angoissant qu’il ne pouvait pas expliquer, une peur envahissait son corps.
Julien choisit de mettre un disque de musique dans son lecteur de CD, il choisit celui du concerto n° 2 pour piano et orchestre de Rachmaninov. La musique l’emporta loin de ses soucis du moment.
Il se prit à rêver du dernier voyage effectué en Afrique quelques années plus tôt avec son épouse décédée depuis deux ans.
Ce matin-là, il s’inquiétait pour une autre personne qu’il connaissait à peine mais qu’il hébergeait sous son toit. Dès que Noémie sera levée, comme c’était le week-end, il avait l’intention de lui faire découvrir un lieu qu’il aimait particulièrement depuis son enfance.
Il voulait l’inviter sur les bords de La Loire entre Montsoreau et Saumur. C’était le lieu qu’il avait choisi pour jeter au milieu du fleuve les cendres de ses deux parents qui lui avaient fait découvrir ces paysages de bord de la Loire où ils aimaient se ressourcer le dimanche.
Après un petit-déjeuner copieux, ils partirent ensemble vers la destination choisie. Ils firent une première halte à l’abbaye de Fontevrault avant de découvrir le magnifique village de Candé Saint-Martin à la confluence de la Vienne avec la Loire.
Ils purent le découvrir en se laissant guider sur une gabare touristique, puis ils visitèrent les caves troglodytes de la grande Vignoble où ils dégustèrent des vins biologiques de Saumur-Champigny.
Ensuite, ils s’accordèrent une pause déjeuner dans un restaurant gastronomique installé dans une cave troglodyte à Turquant où ils apprécièrent un menu à base des produits locaux et des poissons de la Loire fraîchement pêchés. Le dessert à base de poires tapées baignant dans un coulis au vin rouge entourant une tarte Tatin sur laquelle était posée une glace à la vanille conclut agréablement leurs repas de gourmets.
Après ce délicieux repas, ils marchèrent un long moment le long du coteau calcaire surplombant la vallée de la Loire sous un chaud soleil d’automne.
Bien qu’ayant retrouvé ses lunettes, Noémie avait repris le bras de Julien. Elle se laissa guider en buvant les paroles de son guide qui lui vantait les charmes des paysages et des bâtiments qu’ils découvraient en marchant.
Ils s’arrêtèrent en curieux devant chaque habitat troglodyte creusé dans la falaise. Ils imaginèrent alors ensemble la vie des habitants qui avaient vécu et travaillé en ces lieux. Ils visitèrent celles où quelques artisans continuaient d’y exercer leurs talents artistiques pour les touristes de passage.
Alors que le soleil déclinait vers l’ouest, ils trouvèrent un muret de pierres qui leur permit de s’asseoir pour admirer un coucher de soleil sur le fleuve avant de reprendre la route du retour en se promettant de revenir en ce lieu chaque saison.
Celle-ci lui avoua avoir téléphoné à sa mère afin qu’elle lui envoie sa deuxième paire de lunettes chez Julien. Mais ne la trouvant pas, cette dernière avait pris l’initiative d’appeler Victor, son ex-compagnon afin qu’il envoie les lunettes à l’adresse que lui avait donné Noémie sans imaginer que ce dernier viendrait déposer toutes les affaires de son ex- compagne chez Julien.
Noémie et Victor étaient officiellement séparés même si leur divorce n’était toujours pas prononcé. Que cet homme ait son adresse inquiétait beaucoup Julien. Il avait eu peur de lui en le voyant faire son dépôt devant son portail.
Cet individu lui était apparu avec une telle colère lisible sur un visage crispé que Julien s’inquiétait de le retrouver à nouveau devant chez lui.
Mais il n’en fut rien et ils purent rentrer chez lui sans souci. Ils dînèrent sobrement en dégustant une bouteille de Champigny rapportée de leur périple en bord de Loire.
Dans la nuit qui suivit vers minuit, une odeur de fumée inhabituelle et des craquements secs réveillèrent Julien. En ouvrant les yeux, il aperçut une lueur orangée à travers les volets de sa chambre.
Intrigué, il ouvrit la fenêtre pour découvrir son cèdre géant en flammes, une branche enflammée se décrocha et vint heurter la façade de sa maison juste sous sa fenêtre ouverte.
Le feu s’engouffra aussitôt à l’intérieur de la pièce par l’ouverture, les rideaux s’embrasèrent avant de chuter sur le lit et le parquet.
Julien sortit immédiatement de la chambre en criant au feu, il ferma la porte derrière lui. Un geste de sécurité qu’il avait appris auprès d’un ami pompier.
Julien réveilla Noémie qui se leva précipitamment. Ils descendirent tous les deux au rez-de-chaussée où la bibliothèque en vieux bois de merisier était déjà en flammes.
Julien entraîna alors Virginie dans sa cave où il avait fait construire un abri de survie à une époque où il craignait une guerre nucléaire. Arrivé sur place, Julien appela les secours et son ami Romain en leur précisant où ils s’étaient réfugiés.
Les pompiers ne purent rien faire et toute la maison brûla avec tout ce qu’elle contenait comme souvenirs et objets de valeurs. Romain put indiquer aux pompiers où Julien et Noémie s’étaient réfugiés.
Mais ils durent attendre que le feu soit maîtrisé pour intervenir depuis l’extérieur par une trappe fermant l’escalier de secours de la cave que Romain connaissait pour y avoir descendu des cartons de vin avec son ami.