Paméla Giraud - Honoré de Balzac - E-Book

Paméla Giraud E-Book

Honore de Balzac

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Beschreibung

Extrait : "PAMELA. Monsieur Joseph Binet. JOSEPH. Mademoiselle Paméla Giraud. PAMELA. Vous voulez donc que je vous haïsse ? JOSEPH. Dame ! si c'est le commencement de l'amour.... haïssez-moi ! PAMELA. Ah ça, parlons raison. JOSEPH. Vous ne voulez donc pas que je vous dise combien je vous aime ?"

À PROPOS DES ÉDITIONS LIGARAN :

Les éditions LIGARAN proposent des versions numériques de grands classiques de la littérature ainsi que des livres rares, dans les domaines suivants :

● Fiction : roman, poésie, théâtre, jeunesse, policier, libertin.
● Non fiction : histoire, essais, biographies, pratiques.

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Personnages

LE GÉNÉRAL DE VERBY.

DUPRÉ : avocat.

M. ROUSSEAU.

JULES ROUSSEAU : son fils.

JOSEPH BINET.

LE PÉRE GIRAUD.

UN AGENT SUPÉRIEUR.

ANTOINE : domestique de Rousseau.

PAMÉLA GIRAUD.

MADAME veuve DU BROCARD.

MADAME ROUSSEAU.

MADAME GIRAUD.

JUSTINE : femme de chambre de madame Rousseau.

UN COMMISSAIRE DE POLICE.

UN JUGE D’INSTRUCTION.

AGENTS DE POLICE.

GENDARMES.

Acte premier

Le théâtre représente une mansarde et l’atelier d’une fleuriste. Au lever du rideau Paméla travaille, et Joseph Binet est assis. La mansarde va vers le fond du théâtre : la porte est à droite ; à gauche une cheminée. La mansarde est coupée de manière à ce qu’en se baissant, un homme puisse tenir sous le toit au fond de la toile, à côté de la croisée.

PROLOGUE

Scène première

Paméla, Joseph Binet, Jules Rousseau.

PAMÉLA

Monsieur Joseph Binet.

JOSEPH

Mademoiselle Paméla Giraud.

PAMÉLA

Vous voulez donc que je vous baisse ?

JOSEPH

Dame ! si c’est le commencement de l’amour… haïssez-moi !

PAMÉLA

Ah ça, parlons raison.

JOSEPH

Vous ne voulez donc pas que je vous dise combien je vous aime ?

PAMÉLA

Ah ! je vous dis tout net, puisque vous m’y forcez, que je ne veux pas être la femme d’un garçon tapissier.

JOSEPH

Est-il nécessaire de devenir empereur, ou quelque chose comme ça, pour épouser une fleuriste ?

PAMÉLA

Non… Il faut être aimé, et je ne vous aime d’aucune manière.

JOSEPH

D’aucune manière ! Je croyais qu’il n’y avait qu’une manière d’aimer.

PAMÉLA

Oui… mais il y a plusieurs manières de ne pas aimer. Vous pouvez être mon ami, sans que je vous aime.

JOSEPH

Oh !

PAMÉLA

Vous pouvez m’être indifférent…

JOSEPH

Ah !

PAMÉLA

Vous pouvez m’être odieux !… Et dans ce moment, vous m’ennuyez, ce qui est pis !

JOSEPH

Je l’ennuie ! moi qui me mets en cinq pour faire tout ce qu’elle veut.

PAMÉLA

Si vous faisiez ce que je veux, vous ne resteriez pas ici.

JOSEPH

Si je m’en vais… m’aimeriez-vous un peu ?

PAMÉLA

Mais puisque je ne vous aime que quand vous n’y êtes pas !

JOSEPH

Si je ne venais jamais ?

PAMÉLA

Vous me feriez plaisir.

Mais où allez-vous donc… vous n’êtes ici ni dans la rue, ni chez vous.
JOSEPH

Mon Dieu ! pourquoi, moi, premier garçon tapissier de M. Morel en place de devenir mon propre bourgeois, suis-je devenu amoureux de mademoiselle ? Non… Je suis arrêté dans ma carrière je rêve d’elle… j’en deviens bête. Si mon oncle savait !… Mais il y a d’autres femmes dans Paris, et… après tout, mademoiselle Paméla Giraud, qui êtes-vous, pour être ainsi dédaigneuse ?

PAMÉLA

Je suis la fille d’un pauvre tailleur ruiné, devenu portier. Je gagne de quoi vivre… si ça peut s’appeler vivre, en travaillant nuit et jour… à peine puis-je aller faire une pauvre petite partie aux Prés-Saint-Gervais, cueillir des lilas ; et certes, je reconnais que le premier garçon de M. Morel est tout à fait au-dessus de moi… je ne veux pas entrer dans une famille qui croirait se mésallier… les Binet !

JOSEPH

Mais qu’avez-vous depuis huit ou dix jours, là, ma chère petite gentille mignonne de Paméla ? il y a dix jours je venais tous les soirs vous tailler vos feuilles, je faisais les queues aux roses, les cœurs aux marguerites, nous causions, nous allions quelquefois au mélodrame nous régaler de pleurer… et j’étais le bon Joseph, mon petit Joseph… enfin un Joseph dans lequel vous trouviez l’étoffe d’un mari… Tout à coup… zeste ! plus rien.

PAMÉLA

Mais allez-vous-en donc… vous n’êtes là ni dans la rue, ni chez vous.

JOSEPH

Eh bien ! je m’en vais, Mademoiselle… on s’en va ! je causerai dans la loge avec maman Giraud ; elle ne demande pas mieux que de me voir entrer dans sa famille, elle ; elle ne change pas d’idée !

PAMÉLA

Eh bien ! au lieu d’entrer dans sa famille, entrez dans sa loge, monsieur Joseph ! allez causer avec ma mère, allez !… Il sort. Il les occupera peut-être assez pour que M. Adolphe puisse monter sans être vu. Adolphe Durand ! le joli nom ! c’est la moitié d’un roman ! et le joli jeune homme ! Enfin, depuis quinze jours, c’est une persécution… Je me savais bien un peu jolie ; mais je ne me croyais pas si bien qu’il le dit. Ce doit être un artiste, un employé ! Quel qu’il soit, il me plaît ; il est si comme il faut ! Pourtant si sa mine était trompeuse, si c’était quelqu’un de mal… car enfin cette lettre qu’il vient de me faire envoyer si mystérieusement… Elle ta tire de son corset, et lisant : « Attendez-moi ce soir, soyez seule, et que personne ne me voie entrer si c’est possible ; il s’agit de ma vie, et si vous saviez quel affreux malheur me poursuit !… » « Adolphe Durand. » Écrit au crayon. Il s’agit de sa vie… je suis dans une anxiété…

JOSEPH, revenant.

Tout en descendant l’escalier, je me suis dit : Pourquoi Paméla… Jules paraît.

PAMÉLA

Ah !

JOSEPH

Quoi ? Jules disparaît

PAMÉLA

Il m’a semblé voir… J’ai cru entendre un bruit là-haut ! Allez donc visiter le grenier au-dessus, là peut-être quelqu’un s’est-il caché ! Avez-vous peur, vous ?

JOSEPH

Non.

PAMÉLA

Eh bien ! montez, fouillez ! sans quoi je serai effrayée pendant toute la nuit.

JOSEPH

J’y vais… je monterai sur le toit si vous voulez.

Il entre à gauche par une petite porte qui conduit au grenier.

PAMÉLA, l’accompagnant.

Allez. Jules entre. Ah ! Monsieur, quel rôle vous me faites jouer !

JULES

Vous me sauvez la vie, et peut-être ne le regretterez-vous pas ! vous savez combien je vous aime ! Il lui baise les mains.

PAMÉLA

Je sais que vous me l’avez dit ; mais vous agissez…

JULES

Comme avec une libératrice.

PAMÉLA

Vous m’avez écrit… et cette lettre m’a ôté toute ma sécurité… Je ne sais plus ni qui vous êtes, ni ce qui vous amène.

JOSEPH, en dehors.

Mademoiselle, je suis dans le grenier… J’ai vu sur le toit.

JULES

Il va revenir… où me cacher ?

PAMÉLA

Mais vous ne pouvez rester ici !

JULES

Vous voulez me perdre, Paméla !

PAMÉLA

Le voici ! Tenez… là !… Elle le cache sous la mansarde.

JOSEPH, revenant.

Vous n’êtes pas seule, Mademoiselle ?

PAMÉLA

Non… puisque vous voilà.

JOSEPH

J’ai entendu quelque chose comme une voix d’homme… La voix monte !

PAMÉLA

Dame ! elle descend peut-être aussi… Voyez dans l’escalier…

JOSEPH

Oh ! je suis sûr…

PAMÉLA

De rien. Laissez-moi, Monsieur ; je veux être seule.

JOSEPH

Avec une voix d’homme ?

PAMÉLA

Vous ne me croyez donc pas ?

JOSEPH

Mais j’ai parfaitement entendu.

PAMÉLA

Rien.

JOSEPH

Ah ! Mademoiselle !

PAMÉLA

Et si vous aimiez mieux croire les bruits qui vous passent par les oreilles que ce que je vous dis, vous ferez un fort mauvais mari… J’en sais maintenant assez sur votre compte…

JOSEPH

Ça n’empêche pas que ce que j’ai cru entendre…

PAMÉLA

Puisque vous vous obstinez, vous pouvez le croire… Oui, vous avez entendu la voix d’un jeune homme qui m’aime et qui fait tout ce que je veux… il disparaît quand il le faut, et il vient à volonté. Eh bien ! qu’attendez-vous ? croyez-vous que, s’il est ici, votre présence nous soit agréable ? Allez demander à mon père et à ma mère quel est son nom… il a dû le leur dire en montant, lui et sa voix.

JOSEPH

Mademoiselle Paméla, pardonnez à un pauvre garçon qui est fou d’amour… Ce n’est pas le cœur que je perds, mais la tête, aussitôt qu’il s’agit de vous. Ne sais-je pas que vous êtes aussi sage que belle ? que vous avez dans l’âme encore plus de trésors que vous n’en portez ? Aussi… tenez, vous avez raison, j’entendrais dix voix, je verrais dix hommes là, que ça ne me ferait rien… mais un…

PAMÉLA

Eh bien ?

JOSEPH

Un… ça me gênerait davantage. Mais je m’en vais ; c’est pour rire que je vous dis tout ça… je sais bien que vous allez être seule. À revoir, mademoiselle Paméla ; je m’en vais… j’ai confiance.

PAMÉLA, à part.

Il se doute de quelque chose.

JOSEPH, à part.

Il y a quelqu’un ici… je cours tout dire au père et à la mère Giraud. Haut. À revoir, mademoiselle Paméla. Il sort.

Scène II

Paméla, Jules.

PAMÉLA

Monsieur Adolphe, vous voyez à quoi vous m’exposez… Le pauvre garçon est un ouvrier plein de cœur ; il a un oncle assez riche pour l’établir ; il veut m’épouser, et en un moment j’ai perdu mon avenir… et pour qui ? je ne vous connais pas, et à la manière dont vous jouez l’existence d’une jeune fille qui n’a pour elle que sa bonne conduite, je devine que vous vous en croyez le droit… Vous êtes riche, et vous vous moquez des gens pauvres !

JULES

Non, ma chère Paméla… je sais qui vous êtes, et je vous ai appréciée… Je vous aime, je suis riche, et nous ne nous quitterons jamais. Ma voiture de voyage est chez un ami, à la porte Saint-Denis ; nous irons la prendre à pied ; je vais m’embarquer pour l’Angleterre. Venez, je vous expliquerai mes intentions, car le moindre retard pourrait m’être fatal.

PAMÉLA

Quoi ?

JULES

Et vous verrez…

PAMÉLA

Êtes-vous dans votre bon sens, monsieur Adolphe ? Après m’avoir suivie depuis un mois, m’avoir vue deux fois au bal, et m’avoir écrit des déclarations comme les jeunes gens de votre sorte en font à toutes les femmes, vous venez me proposer de but en blanc un enlèvement ?

JULES

Ah ! mon Dieu ! pas un instant de retard ! vous vous repentiriez de ceci toute votre vie, et vous vous apercevrez trop tard de la perte que vous aurez faite.

PAMÉLA

Mais, Monsieur, tout peut se dire en deux mots.

JULES

Non… quand il s’agit d’un secret d’où dépend la vie de plusieurs hommes.

PAMÉLA

Mais, Monsieur, s’il s’agit de vous sauver la vie, quoique je n’y comprenne rien, et qui que vous soyez, je ferai bien des choses ; mais de quelle utilité puis-je vous être dans votre fuite ? pourquoi m’emmener en Angleterre ?

JULES

Mais, enfant !… l’on ne se défie pas de deux amants qui s’enfuient !… et enfin, je vous aime assez pour oublier tout, et encourir la colère de mes parents… une fois mariés à Gretna-Green…

PAMÉLA