Portugal - Encyclopaedia Universalis - E-Book

Portugal E-Book

Encyclopaedia Universalis

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Beschreibung

Malgré l'absence de frontières naturelles nettement dessinées, le Portugal constitue une région dont la personnalité n'a cessé de s'affirmer au cours de l'histoire. Les limites politiques séparant le domaine linguistique du galégo-portugais de celui des dialectes espagnols ont fait preuve d'une remarquable stabilité. De par sa situation marginale,...

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Universalis, une gamme complète de resssources numériques pour la recherche documentaire et l’enseignement.

ISBN : 9782341001915

© Encyclopædia Universalis France, 2019. Tous droits réservés.

Photo de couverture : © Charcompix/Shutterstock

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Portugal

Introduction

Situé à l’extrémité occidentale de l’Europe, le Portugal est bordé à l’ouest et au sud par l’océan Atlantique, et au nord et à l’est par l’Espagne, pays avec lequel il partage 1 215 kilomètres de frontière terrestre. Sa localisation privilégiée le place au carrefour des routes maritimes qui relient l’Europe à l’Afrique et à l’Amérique. Outre le territoire continental, le pays comprend deux régions autonomes, l’archipel de Madère – au large des côtes africaines – et celui des Açores – dont les neuf îles se situent entre les continents européen et américain. D’une superficie de 92 074 kilomètres carrés, avec une population de 10,29 millions d’habitants en 2017, le Portugal est l’un des États-nations les plus anciens d’Europe. Il partage la péninsule Ibérique avec l’Espagne, dont les cordillères centrale et cantabrique se prolongent au Portugal, descendant en gradins jusqu’à l’océan Atlantique. Il forme un pays de contrastes entre un Nord de montagnes et de plateaux et un Sud de plaines, séparés par le fleuve Tage. Néanmoins, le Portugal présente une homogénéité linguistique aussi bien que culturelle, et possède une identité nationale bâtie sur l’histoire. La langue officielle est le portugais – depuis 1999, le mirandais a obtenu ce statut dans son aire d’influence (le plateau du haut Trás-os-Montes).

Portugal : drapeau. Portugal (1911). À la jonction des deux couleurs nationales, le vert et le rouge, est posée la sphère armillaire manuéline, jaune rehaussé de noir, qui représente la Terre et a été choisie par le roi Manuel Ier (1495-1521) comme symbole de l'épopée maritime des Portugais. Cette sphère est chargée des armoiries d'État, riches elles aussi de symboles historiques : au centre un écusson blanc, lui-même chargé de cinq écussons bleus portant chacun cinq points blancs (les plaies du Christ), le tout commémorant la victoire d'Afonso Henriques, premier roi du Portugal, sur cinq rois maures à Ourique en 1139. Le grand écusson blanc est cerné d'une bordure rouge émaillée de sept châteaux jaunes : ils figurent les sept places fortes reconquises sur les Maures et qui permirent à Alphonse III le Boulonnais (1248-1279) de fixer définitivement les limites du Portugal : Albufeira, Aljezur, Cacela, Faro, Loulé, Porches et Tavira.

Héritier du brassage entre des populations autochtones et des peuples venus d’ailleurs, aux matrices culturelles diverses qui, depuis la préhistoire, sont au contact de la péninsule Ibérique, l’espace qui deviendra le royaume du Portugal ne commence à se singulariser qu’à la fin du IXe siècle. En 868, la terre de Portucale est conquise et intégrée dans le royaume de León. Le roi en fait un comté. Confié à Henri de Bourgogne par Alphonse VI, en 1094 ou 1095, pour assurer la défense de la frontière sud, il sut renforcer l’esprit d’autonomie de la noblesse portucalense. Lorsque, après la mort d’Henri, les intérêts du groupe sont menacés, celui-ci déclenche le processus qui aboutira à la naissance du royaume du Portugal, dont la date se situe entre les années 1139 et 1143. La consolidation du royaume se forge au long des XIIe et XIIIe siècles, au fil des guerres menées d’une part contre les musulmans pour l’élargissement du territoire et, d’autre part, contre le royaume de Castille pour asseoir l’indépendance.

La Reconquête achevée en 1249 et les frontières fixées en 1297, le royaume du Portugal poursuit son épopée guerrière sur la rive sud de la Méditerranée avec la conquête de Ceuta en 1415. Les résultats, décevants, poussent les embarcations portugaises à contourner le blocus musulman pour commercer dans les contrées situées encore plus au sud. Ainsi débute l’aventure maritime qui offrira au Portugal un empire commercial puis colonial, à l’échelle mondiale, et ouvrira l’Europe à l’« économie-monde ». Cependant, l’intégration du royaume au sein de la monarchie des Habsbourg met en péril l’empire portugais, car celle-ci se révèle incapable de le protéger de la convoitise des puissances européennes. À la suite du déclin de cet empire colonial en Asie et de la montée sur le trône de la nouvelle dynastie des Bragance, en 1640, le Portugal crée un nouvel empire transatlantique, bâti sur la colonisation d’une terre nourricière et de ses richesses minières, le Brésil.

Le Portugal suit de loin les affaires européennes, gardant une neutralité profitable à son commerce. Cependant, en 1792, rattrapé par le tourbillon révolutionnaire français, le destin du Portugal s’annonce sombre. À la fin de la guerre péninsulaire, en 1814, après trois invasions, le pays est dévasté, l’économie exsangue, et le Brésil, joyau de la Couronne, perdu. Pendant deux siècles, le Portugal s’attelle à construire un « nouveau Brésil en Afrique » mais ce troisième empire colonial ne connaîtra pas la splendeur des précédents. Le rêve impérial enterré, le 25 avril 1974, à la suite de la « révolution des œillets », le Portugal cherche dès lors son salut dans l’Europe. La divergence entre les projets politiques entraîne une période de troubles et de violence politique (1974-1976). Néanmoins, la démocratie parvient à s’installer durablement : elle est définitivement scellée par l’adhésion à la Communauté économique européenne (CEE), en 1986. Depuis, le visage du Portugal a profondément changé. La société a subi une mutation rapide, les comportements et les modes de vie s’accordent désormais aux standards européens. Pourtant, des handicaps structurels persistent dans l’économie dont la croissance reste fragile, comme l’a montré la crise de 2010, que le Portugal peine à dépasser.

Cristina CLIMACO

Marqué à son origine par le courant roman français de Cluny, l’art portugais s’est développé sous des influences culturelles fort variées où la peinture flamande des XVe et XVIe siècles, l’architecture italienne de la Renaissance, du baroque et du néo-classicisme, l’exotisme oriental, la somptuosité du XVIIIe siècle français et le naturalisme de l’école de Barbizon ont joué des rôles importants. Le dialogue international, bien que souvent réduit à des formules provinciales, lui a jusqu’à présent toujours convenu. Il a néanmoins rendu possible la définition de trois moments capitaux de l’art portugais, au sein de conjonctures socioculturelles originales. Le Polyptyque de Saint-Vincent (troisième quart du XVe siècle, attribué à Nuno Gonçalves), peint au moment où le pays se lançait dans l’aventure des Découvertes, est un des chefs-d’œuvre de la peinture de l’époque, attachée au domaine septentrional. Si le style manuélin, à la charnière du gothique et de la Renaissance, style emblématique de l’expansion portugaise, vers le commencement du XVIe siècle, demeure limité au décor, la reconstruction de Lisbonne, ordonnée par le marquis de Pombal après le tremblement de terre de 1755, constitue l’exemple majeur de l’urbanisme des Lumières en Europe. Mais deux phénomènes sui generis caractérisent en priorité l’art du Portugal : l’azulejo (carreaux de faïence peints) et la talha (sculpture sur bois dorée) qui mirent avec éclat l’accent sur les valeurs décoratives aux XVIIe et XVIIIe siècles. Un sens tardif du processus de la modernité (malgré l’action d’Amadeo, artiste cubiste et abstrait qui travaille à Paris vers 1913) n’a pu être satisfait intégralement que par la génération définie après 1945.

José-Augusto FRANÇA

L’histoire de la littérature portugaise est celle d’un effort constant pour se différencier de l’Espagne, pour réaliser une œuvre radicalement originale, irréductible aux stéréotypes du grand voisin. Le Portugal est sorti de l’Espagne. Si la littérature exprime l’âme d’une nation, celle du Portugal doit révéler l’impossible synthèse entre une hispanité qu’il lui faut assumer et l’hétérogénéité lusitanienne par laquelle elle s’affirme. Comme l’Espagne, le Portugal est un creuset où se fondent trois ethnies, trois religions, trois civilisations. Certes, la présence arabe s’effaça plus vite au Portugal ; cependant, l’empreinte civilisatrice de l’islam survit à sa domination ; on en trouve des traces durables dans les premiers textes littéraires portugais. De même, les juifs rencontrent dans les califes, nouveaux maîtres de la Péninsule, des protecteurs tolérants et éclairés. Les premiers ouvrages imprimés en Espagne et au Portugal le sont pour des juifs et par des juifs : traités de médecine ou de mathématiques, livres de prières, tous rédigés en langue et en caractères hébraïques. Le nombre impressionnant de nouveaux chrétiens (c’est-à-dire de juifs convertis, en apparence ou réellement), sous Manuel Ier et Jean III, donne la mesure de l’influence juive au Portugal. Il est même possible de hasarder l’hypothèse que l’un des traits les plus marquants de l’âme portugaise, la saudade (inapaisable mélancolie, pessimisme languide et nostalgique, déchirement entre l’appel de la mer, de l’aventure, et l’attachement au sol natal), est lié au judaïsme. Dominée par la poésie, la littérature portugaise épouse au fil des siècles la courbe des lettres européennes, sans jamais perdre pour cela sa spécificité, sans doute parce que les bouleversements sociaux n’ont pas affecté les structures séculaires d’un Portugal féodal et foncier.

Aujourd’hui, trois faits paraissent infléchir le devenir de cette littérature : la libéralisation, encore timide et fragile, des institutions politiques, qui accompagne l’entrée du Portugal dans l’ère industrielle et technologique ; la solidarité, à nouveau éprouvée, après une scission de plus d’un siècle, avec la civilisation brésilienne ; l’ouverture irréversible sur l’Europe et sur le monde d’un nombre sans cesse accru de jeunes Portugais, corollaires de l’intense alphabétisation des vingt dernières années et de la politique des échanges touristiques et culturels ; autant de circonstances capables d’intégrer davantage les lettres portugaises dans le contexte mondial. Mais une littérature n’a de chances de s’imposer que si elle puise aussi sa force dans sa terre et dans son ethnie. La continuité dans le renouveau, c’est là sans doute l’avenir d’une littérature dont le monde a pris conscience.

Roger BISMUT

1. Géographie

Le Portugal est un État de 91 600 kilomètres carrés qui comprend une population de 10,56 millions d’habitants (recensement de 2011). Situé sur la façade atlantique de la zone méditerranéenne, il en tire une forte originalité climatique et biologique. Ce finisterre situé à l’extrémité sud-ouest de l’Europe joua un rôle majeur dans les grandes découvertes maritimes de la fin du Moyen Âge et dans l’expansion européenne à travers le monde. La diffusion du portugais, langue officielle de huit États, utilisée par 150 millions de locuteurs, est un legs de ce passé.

• Le territoire

Le Portugal continental est une bande de terre de 561 kilomètres du nord au sud, large de 130 à 218 kilomètres, située sur la façade occidentale de la péninsule Ibérique, dont elle ne représente que 15 p. 100 de la superficie (88 500 km2). S’y ajoutent deux petits archipels atlantiques : celui de Madère et celui des Açores, situés respectivement à 910 et à 1 700 kilomètres de Lisbonne, qui portent la zone maritime économique exclusive du Portugal à 1 600 000 kilomètres carrés. La frontière méridienne qui sépare le Portugal de l’Espagne est la plus ancienne d’Europe. Ces deux États ont à la fois des histoires parallèles, et des ressemblances géographiques dans leurs composantes régionales – à l’exception du littoral méditerranéen propre à la seule Espagne. Toutefois, les agencements régionaux diffèrent. En effet, les régions littorales, qui sont généralement plus peuplées que les plateaux intérieurs, sont plus importantes au Portugal qu’en Espagne, ce qui explique une densité moyenne plus forte au Portugal (116 hab./km2 contre 87 en Espagne, en 2006).

Similitudes et divergences régionales avec l’Espagne

Le socle ancien de schistes et de granits, aplani par l’érosion, puis soulevé, fracturé et basculé vers l’ouest présent en Espagne, se retrouve dans une large partie du Portugal. Il forme, à l’est du pays, de vastes plateaux aux paysages ouverts et aux horizons immenses qui prolongent ceux de l’Espagne voisine, avec un encaissement plus marqué des cours d’eau du côté portugais, comme la vallée du Douro. Ce sont les hautes terres du Trás os Montes au nord-est, les plateaux moins élevés de Basse Beira au centre et ceux d’Alentejo au sud. On relève la position isolée de la Serra d’Estrela, élément des sierras centrales ibériques, que le poète Miguel Torga comparait à une ronde.

Le climat confère la plus forte originalité à la géographie portugaise. Le nord-ouest appartient à l’Ibérie humide, qui est le berceau historique de la nationalité portugaise et la partie la plus peuplée du pays. Cette région a alimenté un mouvement ancien et continu de peuplement du nord vers le sud, à l’origine d’un transfert de traits culturels plus nordiques que méditerranéens, qui se retrouvent jusque dans les archipels, à la fois dans les paysages de polyculture, les petites parcelles intensément cultivées, l’habitat dispersé, et les us et coutumes alimentaires. En revanche, au sud du Tage, les influences méditerranéennes deviennent prédominantes et, au-delà d’un ultime bourrelet montagneux, l’Algarve garde la marque d’une civilisation musulmane, à l’exemple de l’Andalousie. Dans cette région, la population nombreuse a depuis longtemps recours, comme en Kabylie, à une arboriculture sèche pour subsister.

Dans la péninsule Ibérique, les régions intérieures sont parmi les moins peuplées d’Europe et s’opposent, à cet égard, aux périphéries littorales. Au Portugal, elles constituent un arrière-pays, après avoir joué, durant plusieurs siècles, un rôle de marche frontière face au royaume de Castille puis d’Espagne. Alors qu’en Espagne l’énorme agglomération madrilène compense le vide relatif des régions centrales et assure l’équilibre dans la répartition des hommes sur l’ensemble du territoire, on chercherait en vain au Portugal le contrepoids d’une grande métropole, puisque la capitale se trouve en bordure de l’océan et que la macrocéphalie de Lisbonne, héritage historique, s’est amplifiée au point que l’agglomération rassemble désormais le tiers de la population du Portugal. Cet élément de déséquilibre pose un problème d’aménagement à l’échelle nationale.

L’évolution démographique

Le nord-ouest du Portugal semble avoir toujours été très peuplé. Il a fourni des émigrants aux terres méridionales, jusqu’au milieu du XXe siècle, et a alimenté l’émigration outre-mer lors des grandes découvertes aux XVIe et XVIIe siècles. Dans la seconde moitié du XXe siècle, l’émigration s’est ensuite orientée vers les pays européens, notamment vers la France, la Suisse et le Luxembourg. Il subsiste de ce passé une véritable diaspora portugaise, en particulier en France et sur le continent américain. Les effectifs globaux de la première ou de la seconde génération, bien que difficiles à chiffrer, seraient de plusieurs millions de personnes, voire du même ordre que la population du Portugal. Toutefois, à l’exemple de l’Espagne, l’émigration s’est progressivement tarie jusqu’à faire place à un mouvement de retour au pays qui, entre 1975 et 1980, a pris de l’ampleur avec l’afflux de personnes en provenance des anciennes colonies africaines devenues indépendantes (Angola, Mozambique, Cap-Vert). Le Portugal est alors devenu, à son tour, un pays d’immigration. Ainsi, entre 1990 et 2003, les étrangers, qui représentaient 1 p. 100 de la population totale, sont passés à 2,3 p. 100 (de l à 6,6 p. 100, dans le même temps, en Espagne). Ce flux est donc relativement modeste et il est par ailleurs composé, pour plus de la moitié, de lusophones facilement assimilés, en provenance du Brésil et des anciennes colonies, en particulier du Cap-Vert. Parmi les autres immigrants se trouvent des retraités européens, notamment Britanniques, qui représentaient 6,7 p. 100 des immigrants en 2003. L’immigration ne soulève donc pas autant de problèmes qu’en Espagne et, compte tenu de l’infime excédent des naissances sur les décès (0,8 p. 100 en 2005), elle permet de maintenir une très modeste croissance de la population (0,1 p. 100 en 2006).

• Identités et régionalisation

Le Portugal est le seul État européen qui ne compte aucune minorité linguistique. Les appartenances identitaires, fortes aux échelles locale et nationale, le sont beaucoup moins à l’échelle régionale, à l’exception des archipels atlantiques et, dans une moindre mesure, de l’Algarve.

Unité culturelle et linguistique et identités territoriales

Au début du XIIe siècle, avant même qu’il ne devienne un royaume, le comté de Portugal était une puissance politique quasi autonome dans la mouvance du royaume de León. Établi à Guimarães (nord-ouest), le comte avait un prestige et une puissance militaire de premier plan, tandis que l’évêque de Braga avait une autorité religieuse indiscutable, et que les négociants de Porto, port situé à l’embouchure du Douro et sur sa rive droite, imposaient leur influence commerciale. À la fin du Ve siècle, le nom de Portus était associé à celui de Calem, une forteresse qui dominait le site. Le nom de Portus Cale, légèrement déformé, s’étendit d’abord à la région environnante puis désigna l’ensemble du royaume du Portugal. C’est la Reconquête sur les terres de l’islam, dès la fin du XIIIe siècle, qui assura, comme en Espagne mais deux siècles avant elle, le contrôle de tout le territoire actuel. Dès lors, le Portugal, devenu un royaume indépendant avec Lisbonne pour capitale, était défini dans ses frontières actuelles (traité d’Alcañices en 1297) : il est le plus ancien État d’Europe. Toutefois, le comté de Galice, berceau linguistique de la langue portugaise, était resté au sein du royaume de León. Cette région appartient actuellement à l’Espagne, bien que sa langue et sa culture soient très proches de celles du Portugal. L’Espagne n’est pas parvenue à incorporer le Portugal dans un ensemble ibérique. L’autoritarisme de Philippe II (1527-1598), roi d’Espagne et du Portugal, finit même par accentuer la divergence entre les deux États jusque-là très proches. La frontière méridienne devint alors une ligne de partage : la raya, entre deux nations sœurs qui se tournaient le dos. Lors des réformes administratives portugaises des années 1830, le nombre des conseils municipaux hérités du Moyen Âge fut réduit, permettant ainsi la constitution de véritables « pays » à l’origine de sentiments forts d’identité territoriale. En revanche, les districts, créés à l’exemple des provinces espagnoles dans un souci de contrôle du territoire par l’État, n’eurent pas le même poids et contribuèrent seulement au développement de bourgades, choisies pour être les chefs-lieux, ce qui explique l’existence d’un semis de petites villes plutôt qu’un véritable réseau urbain.

La difficile régionalisation

Le seul nom des anciennes provinces qui existaient au XVIe siècle (Minho et Douro, Trás-os-Montes, les Beiras, Estremadure, Alentejo, Algarve) reflète l’étonnante variété des paysages, des parlers et des coutumes. Pour autant, ce n’est pas à l’échelle régionale que les sentiments d’appartenance territoriale sont les plus vifs. À l’exception des archipels, que l’éloignement et l’insularité contribuent à individualiser, la nécessité pour l’État de créer des régions afin d’assurer une gestion moderne des territoires n’a pas débouché, comme en Espagne, sur la constitution de régimes d’autonomie. La mise en place, en 1979, de cinq « régions de coordination » reprenait un projet de décentralisation antérieur à la « révolution des œillets » du 25 avril 1974. Le découpage des régions de coordination pouvait avoir pour base les aires d’influence des villes les plus importantes. Mais elles étaient toutes situées sur le littoral et, mis à part les deux métropoles de Porto et de Lisbonne, il ne s’agissait que de villes moyennes. Fallait-il associer littoral et arrière-pays ou bien, compte tenu des problèmes spécifiques qui les distinguent, en séparer les gestions territoriales ? La première solution fut retenue pour les régions Nord et Centre. En revanche, la région de Lisbonne ne fut pas associée à l’Alentejo, la région la plus dynamique fut ainsi séparée de la plus pauvre et de la moins peuplée. Seule l’Algarve, ancien royaume autonome, ne contesta ni sa légitimité ni ses limites territoriales, et constitua, en dépit de ses dimensions réduites (4 989 km2), une région à part entière.

• Les espaces régionaux

La distinction s’impose entre les terres péninsulaires et les archipels atlantiques, en raison des profondes différences de leurs géographies et de leurs histoires. Cette différence fut consacrée, en 1976, par l’institution de statuts d’autonomie conférés à chacun des deux archipels qui demeurent, toutefois, partie intégrante du territoire national.

Le Portugal péninsulaire

À l’exception de l’Algarve, qui ne représente que 5,6 p. 100 du Portugal péninsulaire et seulement 3,3 p. 100 de sa population (2001), la constitution des quatre autres régions demeure discutée, compromettant ainsi l’efficacité de toute politique d’aménagement du territoire.

La région Nord

Elle rassemble actuellement, sur 21 278 kilomètres carrés, soit un peu moins du quart de la superficie du Portugal continental, environ le tiers de la population, soit autant que la région de Lisbonne, et dispose de la seule grande ville du pays en dehors de la capitale. L’agriculture intensive dans la partie nord-ouest, qui reposait sur l’exploitation de la chataigneraie et sur l’élevage bovin alimenté par des prairies irriguées, se transforma à partir du XVIIIe siècle avec l’introduction de la culture du maïs irrigué. Cette évolution permit à une population nombreuse de survivre. Jusqu’au recensement de 1960, cette région fut le principal foyer d’émigration vers l’outre-mer puis vers l’Europe. Sa capitale, Porto, dont l’aire métropolitaine dépassa le million d’habitants dès 1990, représente le seul autre pôle politique et culturel du pays après Lisbonne. Enfin, la région Nord est le berceau de la nationalité portugaise et c’est le comte Alphonse Henriques (ou Afonso Henriques) qui se proclama roi de Portugal en 1139. Ces atouts ne furent sans doute pas sans influence sur l’efficacité de la gestion territoriale. Le fleuve Douro constitue un élément d’unité avec les vignobles cultivés en terrasses sur les pentes schisteuses de la vallée moyenne et les chais d’élaboration dans la ville de Vila Nova de Gaia, face à Porto. L’aménagement du fleuve jusqu’à la frontière espagnole permet aussi le développement d’un tourisme fluvial.

Toutefois, cette région n’a guère d’unité d’ensemble et les zones intérieures du