Le Graal en héritage - Chantal Poidevin - E-Book

Le Graal en héritage E-Book

Chantal Poidevin

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Beschreibung

Le Graal. Comment pourrait-on le considérer aujourd'hui ? À travers l'histoire d'une famille unie, imprégnée de musique, et au centre de laquelle se trouve Eva, une petite fille marquée par un talent créatif exceptionnel et des tourments personnels, ce roman dévoile une quête poignante où passion et mystère se mêlent. Émaillé de poésies, le récit révèle comment chaque épreuve souligne la force et la beauté de la création artistique, un don transmis et reçu comme un précieux héritage.

À PROPOS DE L'AUTRICE

Chantal Poidevin, artiste autodidacte aux talents multiples, excelle dans les arts du dessin, de la peinture, de la danse et de l'écriture. Elle a publié cinq recueils de poésie, tous illustrés par ses propres illustrations. Son parcours littéraire se distingue par un engagement profond au sein de la Société des Écrivains Normands, qu'elle a ensuite poursuivi en tant que membre actif du Cercle des Auteurs Normands.

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Chantal Poidevin

Le Graal en héritage

Roman

© Lys Bleu Éditions – Chantal Poidevin

ISBN : 979-10-422-4414-9

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À la famille

« Une clé de sol, un violon, un départ pour un amour de la musique et de l’art sans fin… »

Avant-propos

De l’ancien temps ou de nos temps modernes, les humains ont toujours cherché ce qu’était le Graal. Partant de la légende, on le représenta comme une coupe sacrée. Dieu aurait façonné Adam avec de la glaise du jardin d’Éden et lui aurait tiré une côte dont serait issue Eve. Adam se serait endormi. Sa plaie saignant toujours, Eve confectionna une coupe avec une poignée de glaise du jardin d’Éden et recueillit le sang d’Adam dans celle-ci. La glaise but le sang et la blessure d’Adam se referma… Eve l’utilisera tous les jours. Lorsqu’ils quittèrent le jardin d’Éden, elle l’emporta avec elle.

Cette coupe mythique est toujours associée au sang, à la plaie et à la douleur du monde dont elle en serait le remède. Elle réapparut au moment de la cène, Jésus ayant bu la coupe avec ses apôtres lors de son dernier repas avant sa crucifixion. Durant celle-ci, son sang aurait été recueilli par Joseph d’Arimathie dans cette coupe. Alors on en fit une légende en la dotant d’un fort pouvoir, prometteur d’une grande richesse et, qui sait, peut-être d’une jeunesse éternelle.

Beaucoup se mirent en quête de cette coupe richissime. Seulement voilà, certains ont démenti cette version en révélant que le Graal était le symbole d’une femme : Marie-Madeleine, compagne et épouse de Jésus avec laquelle il aurait eu une descendance. Une version parmi tellement d’autres ! Pour le Vatican, une hypothèse inimaginable ainsi que pour tous les croyants ! Mais quel pouvoir particulier aurait alors leur descendance ? Peut-être une extrême sensibilité que l’on attribue aux artistes ? Ou bien sont-ils de simples mortels descendant eux aussi d’aïeuls ordinaires ?

La création, la sensibilité artistique et le Graal sont indissociables. Car celui qui possède au plus profond de lui-même la fibre artistique possède une infime partie du Graal. Et cela depuis la nuit des temps.

Si l’on remonte au temps de la Grèce antique, ces artistes, poètes et chanteurs qui clamaient les louanges des héros, n’étaient-ils pas eux aussi dotés d’une extrême sensibilité ? N’étaient-ils pas considérés comme des artistes ? Ils avaient une place importante dans la société. Ne possédaient-ils pas en quelque sorte une petite partie de ce Graal ? Pourtant on ne parlait pas de Graal à cette époque !

Pour des reliques, vraies ou fausses, bien moindres que le Graal, une multitude de croyants ont bâti tellement de grandes et belles choses qui font partie sans aucun doute de notre patrimoine, de notre histoire.

De nos jours, différentes formes de religions se sont emparées, voire, ont détourné à quelconque profit cette légende du Graal. Malheureusement, cela a conduit à des guerres sanguinaires pour le pouvoir et l’argent. Alors, pour en venir à l’art et à l’artiste des temps modernes, reconnu ou pas, il a en lui ce pouvoir de créer et de révolutionner le monde s’il sait découvrir ce qui est bien caché au fond de lui-même et l’utiliser à bon escient. Posséder ce pouvoir de création, cette fibre artistique que l’on accorde d’une manière particulière au Graal, ne se transmettent-ils pas de génération en génération ?

***

Chapitre 1

Pendant la guerre de 39-45, tout ne fut que destruction et désolation, comme pour tout conflit armé. Une petite fille, âgée de six ans à l’époque, sera, elle aussi, traumatisée par toutes les privations en découlant. Cependant, même finie, cette guerre ne cessera pas de marquer l’esprit de tous ces gens qui ont perdu des êtres chers. Il y eut tant de victimes et d’innocents massacrés.

Dans cette petite ville de Normandie, plus exactement du sud Manche, rien n’avait été épargné. Les bombes semblaient encore retentir au loin. Tout n’était que maisons éventrées et tas de gravats au milieu desquels il était difficile de se frayer un chemin. Pourtant une femme, tenant fermement la main de la petite fille, marchait d’un pas rapide. Toutes les deux parcoururent deux à trois kilomètres parmi ce champ de ruines et parvinrent devant le porche d’une grande bâtisse qui avait échappé aux bombes. La femme frappa cinq coups à la porte comme cela semblait avoir été convenu. Une vieille femme, à l’air très distingué, ouvrit la porte et les fit hâtivement entrer. Elles traversèrent un long et somptueux corridor et arrivèrent dans une très grande salle de séjour ornée de magnifiques tableaux et de bas-reliefs avec de majestueuses sculptures et un énorme lustre de toute beauté. Mais cela n’était pas le principal !

Un superbe piano à queue, blanc laqué, avait été placé au beau milieu de la pièce : un Steinway. Sur le dessus était posé un métronome. Des partitions de musique se trouvaient un peu éparpillées partout. Sur un divan, un violon Stradivarius, son archet en crin de cheval et un petit pot de colophane attirèrent le regard de la petite fille. Alors la vieille femme se dirigea vers elle et lui demanda :

— Comment t’appelles-tu ?

— Lucette, répondit timidement la fillette.

— Droitière ou gauchère ?

— Gauchère, s’empressa de répondre la mère.

— Ah ! Ce ne sera pas facile, ajouta la dame distinguée. Qu’à cela ne tienne ! Il faudra qu’elle apprenne comme les droitiers, surtout pour plus tard. Apprendre à jouer du violon à un gaucher n’est pas une mince affaire ! Mais je suis sûre qu’elle s’adaptera. Il faut avouer que dans le monde de la musique, le fait d’être gaucher n’est pas souvent pris en compte.

La vieille femme regarda les bras et les mains de la petite fille, et elle précisa :

— Il lui faut un trois-quarts pour commencer.

Elle sortit de la pièce et revint avec un violon et son archet. À leur vue, la petite Lucette, ébahie, n’osa rien dire. La femme s’approcha d’elle, plaça le violon sur son épaule gauche puis, délicatement, lui posa le menton sur la mentonnière prévue à cet effet, enfin elle positionna les doigts de la main gauche de l’enfant sur les cordes tout en tenant le manche de l’instrument. Elle lui indiqua ensuite comment tenir correctement l’archet de sa main droite en lui montrant les différents mouvements du bras.

Au même moment, elles entendirent cinq coups à la porte. La vieille dame alla ouvrir. Une autre femme était accompagnée d’une petite fille à peu près du même âge que la petite Lucette. Elles entrèrent dans la grande pièce. La fillette tenait un étui à violon à la main.

— Vous apprendrez ensemble toutes les deux. Un cours de violon par semaine et quatre heures de solfège avec moi, et beaucoup d’exercices à faire tous les jours chez vous, proposa la professeure de musique.

Ces deux petites filles apprendront à se connaître et resteront amies toute leur vie !

La petite Lucette avait un grand frère qui lui aussi jouait déjà du violon qu’il apprenait à l’école municipale de musique, ainsi que le solfège. À cette époque, les filles n’y étaient pas admises. C’est ainsi que la fillette suivit des cours particuliers et que, chez cette petite fille, une grande histoire d’amour de la musique et du violon allait naître…

***

Chapitre 2

Les parents de la petite Lucette, Erneste et Maria s’étaient mariés en janvier 1931, avant la guerre. Le mari possédait une coutellerie qu’il reçut en héritage de sa mère. De cette union, vint au monde un premier enfant Honoré puis naquit une petite fille, cette petite Lucette. Ils habitaient les deux étages au-dessus de la coutellerie dont Erneste avait hérité de sa famille maternelle. Ils possédaient aussi une villa à une quinzaine de kilomètres, au bord de la mer. La fillette aimait beaucoup cette maison où elle y trouva un peu de bonheur durant son enfance et son adolescence. Malheureusement, Erneste décéda brutalement d’un accident vasculaire cérébral lorsque sa fille ne fut âgée que de dix-huit ans. Sa veuve n’était pas assez armée pour se défendre dans la vie, seule avec deux enfants.

À cette époque, le deuil s’imposait, très difficile et très long à porter : tenue noire et privation de toute activité ! Ce fut vraiment éprouvant pour Lucette, pas encore une adulte et aussi un petit peu « garçon manqué ». Alors Maria décida de vendre l’entreprise pour acheter une mercerie, quelques maisons plus loin, dans la même rue du centre-ville que la coutellerie. Cela lui apporta bien des déboires financiers et elle fut victime de malhonnêteté en matière de transactions immobilières.

Le frère de Lucette, Honoré, un peu plus âgé, avait été recruté dans la Marine et il était parti bien loin. Maria et sa fille se retrouvèrent toutes les deux avec très peu de ressources pour vivre. Quelque temps après le décès d’Erneste, puisque la coutellerie et le logement allaient être vendus, Maria et Lucette partirent vivre dans un autre quartier du centre-ville et habitèrent un logement situé au rez-de-chaussée d’un immeuble.

Le bâtiment n’avait pas été modernisé et les appartements manquaient de commodités. Les toilettes étaient situées sur le palier commun aux autres logements de l’immeuble, et Lucette avait pour mission de vider chaque matin le pot de chambre dans la cuvette des WC. La petite pièce de vie était chauffée par un vieux poêle sur lequel une bouilloire fournissait l’eau chaude. Bien sûr pas de douche non plus ! Une cuvette dans la petite cuisine équipée seulement d’un évier faisait l’affaire pour se laver. Pas de place dans la pièce pour un réfrigérateur, les aliments étant conservés dans une sorte de placard aux portes grillagées. La chambre de Maria était très petite, juste la place d’un lit avec des draps blancs épais et amidonnés, et de gros oreillers en plume d’oie. Un épais édredon recouvrait le lit. Cela étant, Maria s’était réservé un espace pour y installer son petit établi sur lequel elle fabriquait des boutons. Elle en confectionnait à la demande et sur mesure à partir de morceaux de tissus, soit apportés par la clientèle, soit choisis dans son tas personnel qu’elle conservait précieusement, avec des boîtes entières de boutons soigneusement triés par taille, par couleur, par forme, etc. Elle utilisait une machine très archaïque, et pour Maria, c’était tout un art et un jeu de patience de s’en servir, car elle avait de surcroît une mauvaise vue, qu’elle finira par perdre complètement. Elle réalisa ses boutons jusqu’au bout, car elle savait que cela pouvait dépanner. Même quand elle arrêta la mercerie, elle continua à fabriquer des boutons pour sa fidèle clientèle.

En revanche, la salle à manger était toujours bien cirée et il fallait utiliser à chaque passage des patins pour la traverser. La pièce sentait bon la cire fraîche, mais ne servait pas souvent et n’était pas chauffée. La cuisine se trouvait en contrebas avec une porte donnant sur un grand terrain divisé en parcelles, chacune par locataire voisin. Dans ce jardin, la présence d’une fontaine rappelait le temps où il n’y avait pas l’eau courante dans les différents appartements. Maria aimait cultiver son potager ainsi que des fleurs, notamment des œillets de toutes les couleurs, si odorants. Dans le fond, on distinguait un poulailler de fortune avec quelques poules pour obtenir des œufs frais. Ce jardin était envahi par le lierre, marquant ainsi le temps qui passait.

Lucette s’occupait des tâches ménagères ou aidait sa mère à tenir la mercerie. La vie de cette jeune femme n’aura pas été toujours facile. Mais, ne voulant pas délaisser Maria, elle s’en occupera jusqu’à la fin de sa vie. Toutefois, elle n’avait jamais abandonné la musique. Alors, lorsqu’elle jouait du violon pour s’évader de la dureté de la vie, elle interprétait un morceau le temps d’une osmose avec chaque note d’une partition. Elle était toujours à la recherche de la justesse du son. Celui-ci se faisait entendre par le positionnement si délicat, si parfait de ses doigts sur les cordes de son violon et le frottement de son archet sur chacune d’entre elles. Pour l’accompagner, les mouvements de va-et-vient de l’archet, telle la houle des vagues sur la mer, berçaient tendrement le violon au fur et à mesure que la mélodie défilait et se faisait entendre. Jouer de son violon lui apportait tant de ressourcement, par la dextérité et la patience dont elle faisait preuve. Alors elle jouait inlassablement dans une recherche de perfection…

***

Chapitre 3

Après les années qui suivirent l’horreur de la guerre, ce fut le temps des fêtes et de la reconstruction, période que l’on baptisa : « Les Trente Glorieuses ».

Lucette resta vivre auprès de sa mère et l’aida à tenir la mercerie. Malgré ses occupations, elle ne cessa jamais d’étudier la musique et s’entraîna sans relâche à jouer du violon. Sa passion devint une grande histoire d’amour entre elle et la musique, et elle gagna en virtuosité et en une extrême justesse. La petite Lucette possédait ce que beaucoup de musiciens recherchent : « l’oreille absolue ». Elle passa plusieurs auditions avec succès et participa à de prestigieux concours qui la firent voyager dans plusieurs pays. Tout n’était que grâce chez elle, une sensualité à fleur de peau, si bien que de nombreux hommes la convoitèrent, sans résultat. En effet, pour la jeune fille, l’amour de la musique était plus fort que tout, et elle refusait systématiquement les avances de tous ces hommes happés par le désir sexuel et la domination. Elle faisait preuve d’une extrême pudeur en masquant ses formes par des vêtements amples ne laissant rien paraître de la beauté de son corps, comme beaucoup de femmes à cette époque. Ses prunelles étaient d’une couleur bleu-vert lagune si transparent, si transperçant, que les regards qui la croisaient les rendaient inoubliables. Ses yeux laissaient entrevoir imperceptiblement comme une pointe de nostalgie voire de tristesse, toutefois sans rien enlever à la beauté du regard, au contraire, en l’embellissant par sa douceur. Elle portait des lunettes pour corriger une mauvaise myopie qui la handicapera toute sa vie, ayant hérité de la mauvaise vue de sa mère.

Lorsqu’elle interprétait avec son violon les airs très connus de grandes références de la musique classique, tout émanait de son corps. Lucette et son violon ne faisaient qu’un en une parfaite harmonie. Elle jouait passionnément. Toutes les personnes qui l’entendaient jouer étaient subjuguées par tant de sensibilité, tant de beauté et de minutie dans ses gestes. En jouant, elle touchait au plus profond chaque être qui admirait une telle communion entre la jeune musicienne et son violon. Mais pour qui jouait-elle ainsi ?

Déjà, à cette époque, elle s’équipa des meilleurs appareils du dernier cri pour écouter ce qu’elle aura toujours aimé : la grande musique classique. Ce fut sa passion et elle le resta toujours au détriment de beaucoup d’autres choses dont Lucette préféra se priver.

Outre la musique, elle aimait beaucoup les fleurs et les plantes. On peut dire qu’elle aura toujours eu « la main verte ». Elle affectionnait également les animaux. Comme sa mère Maria, Lucette donnait des miettes de pain aux oiseaux sans oublier de soigner les poules dans le fond du jardin. Elle était d’une extrême sensibilité.

Elle gardera avec nostalgie le souvenir de la villa du bord de mer qui lui rappelait tant une période heureuse de sa vie. Cette maison représentait toutes les joies de son enfance et de son adolescence empreintes d’insouciance après toutes les horreurs et les privations que la guerre avait entraînées. Sportive, elle roulait à bicyclette, un brin intrépide, rien ne lui faisant peur. À cette époque, Lucette s’était déjà fait beaucoup d’amies.

***