2,99 €
Le Prince, de Niccolo Machiavel, est un traité politique du XVIe siècle. Le Prince est parfois considéré comme l'un des premiers ouvrages de philosophie moderne, en particulier de philosophie politique moderne, dans lequel la vérité effective est considérée comme plus importante que tout idéal abstrait. Il était également en conflit direct avec les doctrines catholiques et scolastiques dominantes de l'époque concernant la politique et l'éthique. Le Prince a pour thème général l'acceptation du fait que les objectifs des princes - tels que la gloire et la survie - peuvent justifier l'utilisation de moyens immoraux pour atteindre ces objectifs. Bien qu'il soit relativement court, ce traité est l'œuvre la plus connue de Machiavel et celle qui est la plus responsable de l'utilisation du mot « machiavélique » comme péjoratif. Il a même contribué aux connotations négatives modernes des mots « politique » et « politicien » dans les pays occidentaux. En termes de sujet, il recoupe les Discours sur Tite-Live, beaucoup plus longs, qui ont été écrits quelques années plus tard. Machiavel insiste sur la nécessité du réalisme, par opposition à l'idéalisme. Il souligne également la différence entre les êtres humains et les animaux, car « il y a deux manières de lutter, l'une selon les lois, l'autre par la force ; la première est propre aux hommes, la seconde aux bêtes ». Dans Le Prince, il n'explique pas quels sont, selon lui, les meilleurs objectifs éthiques ou politiques, si ce n'est le contrôle de sa propre fortune, par opposition à l'attente de ce que le hasard apporte. Machiavel tient pour acquis que les dirigeants en puissance visent naturellement la gloire ou l'honneur. Il associe ces objectifs au besoin de « vertu » et de « prudence » chez un dirigeant, et considère ces vertus comme essentielles à une bonne politique, voire au bien commun. Le fait que les grands hommes doivent développer et utiliser leur vertu et leur prudence était un thème traditionnel des conseils donnés aux princes chrétiens.
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
LE PRINCE
NICCOLÒ MACHIAVELLI
Traduction et édition 2024 par David De Angelis
Tous les droits sont réservés
Contenu
INTRODUCTION
JEUNESSE - Æt. 1-25-1469-94
BUREAU - Æt. 25-43-1494-1512
LITTERATURE ET MORT - Æt. 43-58-1512-27
L'HOMME ET SON OEUVRE
DÉDICACEUR
CHAPITRE I. - COMBIEN DE SORTES DE PRINCIPAUTÉS IL Y A, ET PAR QUELS MOYENS ELLES SONT ACQUISES
CHAPITRE II. - CONCERNANT LES PRINCIPAUTÉS HÉRÉDITAIRES
CHAPITRE III. - CONCERNANT LES PRINCIPAUTÉS MIXTES
CHAPITRE IV. - POURQUOI LE ROYAUME DE DARIUS, CONQUIS PAR ALEXANDRE, NE S'EST PAS REBELLÉ CONTRE LES SUCCESSEURS D'ALEXANDRE À SA MORT
CHAPITRE V. - DE LA MANIERE DE GOUVERNER LES VILLES OU PRINCIPAUTES QUI VIVAIENT SOUS LEURS PROPRES LOIS AVANT D'ETRE ANNEXEES
CHAPITRE VI. - CONCERNANT LES NOUVELLES PRINCIPAUTÉS ACQUISES PAR LES ARMES ET L'HABILETÉ DE CHACUN
CHAPITRE VII. - CONCERNANT LES NOUVELLES PRINCIPAUTÉS ACQUISES SOIT PAR LES ARMES D'AUTRUI, SOIT PAR LA BONNE FORTUNE
CHAPITRE VIII. - DE CEUX QUI ONT OBTENU UNE PRINCIPAUTÉ PAR LA MÉCHANCETÉ
CHAPITRE IX. - CONCERNANT UNE PRINCIPAUTÉ CIVILE
CHAPITRE X. - SUR LA MANIÈRE DE MESURER LA FORCE DE TOUTES LES PRINCIPAUTÉS
CHAPITRE XI - CONCERNANT LES PRINCIPAUTÉS ECCLÉSIASTIQUES
CHAPITRE XII. - COMBIEN DE SORTES DE SOLDATS IL Y A, ET CONCERNANT LES MERCENAIRES
CHAPITRE XIII. - CONCERNANT LES AUXILIAIRES, LES TROUPES MIXTES ET LES PROPRES TROUPES
CHAPITRE XIV. - CE QUI CONCERNE UN PRINCE AU SUJET DE L'ART DE LA GUERRE
CHAPITRE XV. - DES CHOSES POUR LESQUELLES LES HOMMES, ET SURTOUT LES PRINCES, SONT LOUÉS OU BLÂMÉS
CHAPITRE XVI. - DE LA LIBERTE ET DE LA MESQUINERIE
CHAPITRE XVII. - DE LA CRUAUTÉ ET DE LA CLÉMENCE, ET DE LA QUESTION DE SAVOIR S'IL VAUT MIEUX ÊTRE AIMÉ QUE CRAINT
CHAPITRE XVIII. - DE LA MANIERE DONT LES PRINCES DOIVENT GARDER LA FOI
CHAPITRE XIX. - POUR ÉVITER D'ÊTRE MÉPRISÉ ET HAÏ
CHAPITRE XX. - LES FORTERESSES, ET BEAUCOUP D'AUTRES CHOSES AUXQUELLES LES PRINCES ONT SOUVENT RECOURS, SONT-ELLES AVANTAGEUSES OU NUISIBLES ?
CHAPITRE XXI. - COMMENT UN PRINCE DOIT SE CONDUIRE POUR GAGNER EN RENOM
CHAPITRE XXII. - CONCERNANT LES SECRÉTAIRES DES PRINCES
CHAPITRE XXIII. - COMMENT ÉVITER LES FLATTEURS
CHAPITRE XXIV. - POURQUOI LES PRINCES D'ITALIE ONT PERDU LEURS ÉTATS
CHAPITRE XXV. - CE QUE LA FORTUNE PEUT FAIRE DANS LES AFFAIRES HUMAINES ET COMMENT LUI RÉSISTER
CHAPITRE XXVI - UNE EXHORTATION À LIBÉRER L'ITALIE DES BARBARES
DESCRIPTION DES MÉTHODES ADOPTÉES PAR LE DUC VALENTIN POUR ASSASSINER VITELLOZZO VITELLI, OLIVEROTTO DA FERMO, LE SIGNOR PAGOLO ET LE DUC DI GRAVINA ORSINI
Nicolo Machiavelli, né à Florence le 3 mai 1469. De 1494 à 1512, il occupe un poste officiel à Florence, qui comprend des missions diplomatiques auprès de diverses cours européennes. Emprisonné à Florence en 1512, il est ensuite exilé et retourne à San Casciano. Décédé à Florence le 22 juin 1527.
INTRODUCTION
Nicolo Machiavelli est né à Florence le 3 mai 1469. Il est le deuxième fils de Bernardo di Nicolo Machiavelli, avocat de renom, et de Bartolommea di Stefano Nelli, son épouse. Les deux parents appartenaient à l'ancienne noblesse florentine.
Sa vie se divise naturellement en trois périodes, dont chacune constitue une époque distincte et importante dans l'histoire de Florence. Sa jeunesse coïncide avec la grandeur de Florence en tant que puissance italienne sous la direction de Lorenzo de' Medici, Il Magnifico. La chute des Médicis à Florence a eu lieu en 1494, année au cours de laquelle Machiavel est entré dans la fonction publique. Au cours de sa carrière officielle, Florence a été libre sous le gouvernement d'une République, qui a duré jusqu'en 1512, lorsque les Médicis sont revenus au pouvoir et que Machiavel a perdu son poste. Les Médicis régnèrent à nouveau sur Florence de 1512 à 1527, date à laquelle ils furent à nouveau chassés. C'est à cette époque que Machiavel connaît une activité littéraire et une influence croissante, mais il meurt quelques semaines après l'expulsion des Médicis, le 22 juin 1527, dans sa cinquante-huitième année, sans avoir retrouvé son poste.
Bien qu'il y ait peu de traces de la jeunesse de Machiavel, la Florence de l'époque est si bien connue qu'il est facile d'imaginer l'environnement de ce citoyen représentatif. Florence a été décrite comme une ville traversée par deux courants de vie opposés, l'un dirigé par le fervent et austère Savonarole, l'autre par Lorenzo, amateur de splendeur. L'influence de Savonarole sur le jeune Machiavel a dû être faible, car bien qu'il ait exercé à un moment donné un pouvoir immense sur la fortune de Florence, il n'a fourni à Machiavel qu'un sujet de raillerie dans Le Prince, où il est cité comme exemple d'un prophète désarmé qui a connu une mauvaise fin. En revanche, la magnificence du pouvoir médicéen pendant la vie de Laurent semble avoir fortement impressionné Machiavel, car il y revient fréquemment dans ses écrits, et c'est au petit-fils de Laurent qu'il dédie Le Prince.
Machiavel, dans son "Histoire de Florence", nous donne une image des jeunes gens parmi lesquels il a passé sa jeunesse. Il écrit : "Ils étaient plus libres que leurs ancêtres en matière d'habillement et de mode de vie, et dépensaient davantage dans d'autres types d'excès, consumant leur temps et leur argent dans l'oisiveté, le jeu et les femmes ; leur principal objectif était de paraître bien habillés et de parler avec esprit et acuité, tandis que celui qui pouvait blesser les autres le plus habilement était considéré comme le plus sage". Dans une lettre adressée à son fils Guido, Machiavel montre pourquoi la jeunesse doit profiter des occasions d'étudier, et nous laisse supposer que sa propre jeunesse a été occupée de la sorte. Il écrit : "J'ai reçu ta lettre, qui m'a fait le plus grand plaisir, surtout parce que tu me dis que tu es tout à fait rétabli dans ta santé, ce dont je ne pourrais avoir de meilleures nouvelles ; car si Dieu t'accorde la vie, ainsi qu'à moi, j'espère faire de toi un homme bon, si tu es prêt à faire ta part". Puis, parlant d'un nouveau mécène, il poursuit : "Cela te réussira, mais il faut que tu étudies ; puisque tu n'as plus l'excuse de la maladie, applique-toi à étudier les lettres et la musique, car tu vois l'honneur qu'on me fait pour le peu d'habileté que j'ai. Ainsi, mon fils, si tu veux me plaire, et t'attirer le succès et l'honneur, fais le bien et étudie, car les autres t'aideront si tu t'aides toi-même."
La deuxième période de la vie de Machiavel s'est déroulée au service de la libre République de Florence, qui a prospéré, comme indiqué plus haut, depuis l'expulsion des Médicis en 1494 jusqu'à leur retour en 1512. Après avoir exercé pendant quatre ans l'une des fonctions publiques, il fut nommé chancelier et secrétaire de la seconde chancellerie, la dixième de la liberté et de la paix. Nous sommes ici sur un terrain solide pour aborder les événements de la vie de Machiavel, car pendant cette période il a joué un rôle de premier plan dans les affaires de la République, et nous avons ses décrets, ses registres et ses dépêches pour nous guider, ainsi que ses propres écrits. Une simple récapitulation de quelques-unes de ses transactions avec les hommes d'État et les soldats de son temps donne une bonne indication de ses activités et fournit les sources où il a puisé les expériences et les personnages qui illustrent Le Prince.
Sa première mission fut en 1499 auprès de Catherina Sforza, "ma dame de Forli" du Prince, dont il tira de la conduite et du destin la morale qu'il vaut bien mieux gagner la confiance du peuple que de s'appuyer sur des forteresses. Il s'agit là d'un principe très visible chez Machiavel, qui insiste à maintes reprises sur l'importance vitale de cette question pour les princes.
En 1500, il fut envoyé en France pour obtenir de Louis XII des conditions lui permettant de poursuivre la guerre contre Pise : c'est ce roi qui, dans sa conduite des affaires en Italie, commit les cinq erreurs capitales en matière d'administration résumées dans Le Prince, et qui fut par conséquent chassé. C'est également lui qui a fait de la dissolution de son mariage une condition de son soutien au pape Alexandre VI, ce qui amène Machiavel à renvoyer ceux qui insistent pour que de telles promesses soient tenues à ce qu'il a écrit sur la foi des princes.
La vie publique de Machiavel a été largement occupée par les événements découlant des ambitions du pape Alexandre VI et de son fils, Cesare Borgia, le duc Valentino, et ces personnages occupent une grande partie du Prince. Machiavel n'hésite jamais à citer les actions du duc à l'intention des usurpateurs qui souhaitent conserver les États dont ils se sont emparés ; il ne trouve en effet aucun précepte à offrir qui soit aussi bon que le modèle de conduite de Cesare Borgia, à tel point que Ceare est acclamé par certains critiques comme le "héros" du Prince. Pourtant, dans Le Prince, le duc est en fait cité comme le type de l'homme qui s'élève grâce à la fortune des autres et tombe avec eux ; qui prend toutes les mesures que l'on pourrait attendre d'un homme prudent, sauf celle qui le sauvera ; qui est préparé à toutes les éventualités, sauf à celle qui survient ; et qui, lorsque toutes ses capacités ne lui permettent pas de s'en sortir, s'exclame que ce n'est pas sa faute, mais une fatalité extraordinaire et imprévue.
À la mort de Pie III, en 1503, Machiavel est envoyé à Rome pour assister à l'élection de son successeur, et il y voit Cesare Borgia trompé en permettant que le choix du Collège se porte sur Giuliano delle Rovere (Jules II), qui était l'un des cardinaux qui avaient le plus de raisons de craindre le duc. Machiavel, commentant cette élection, dit que celui qui pense que de nouvelles faveurs feront oublier aux grands personnages d'anciennes blessures se trompe lui-même. Jules n'a pas eu de répit tant qu'il n'a pas ruiné Cesare.
C'est auprès de Jules II que Machiavel fut envoyé en 1506, alors que ce pontife commençait son entreprise contre Bologne, qu'il mena à bien, comme il le fit pour beaucoup de ses autres aventures, grâce principalement à son caractère impétueux. C'est à propos du pape Jules que Machiavel fait la morale sur la ressemblance entre la Fortune et les femmes, et conclut que c'est l'homme audacieux plutôt que l'homme prudent qui les gagnera et les conservera toutes les deux.
Il est impossible de suivre ici les fortunes diverses des États italiens qui, en 1507, étaient contrôlés par la France, l'Espagne et l'Allemagne, avec des résultats qui ont duré jusqu'à nos jours ; nous nous intéressons à ces événements et à leurs trois principaux acteurs, dans la mesure seulement où ils touchent à la personnalité de Machiavel. Il a rencontré à plusieurs reprises Louis XII de France, et nous avons déjà fait allusion à son estimation du caractère de ce monarque. Machiavel a dépeint Ferdinand d'Aragon comme l'homme qui a accompli de grandes choses sous le couvert de la religion, mais qui en réalité n'avait ni pitié, ni foi, ni humanité, ni intégrité ; et qui, s'il s'était laissé influencer par de tels motifs, aurait été ruiné. L'empereur Maximilien était l'un des hommes les plus intéressants de l'époque, et son caractère a été dessiné par de nombreuses mains ; mais Machiavel, qui était un envoyé à sa cour en 1507-1508, révèle le secret de ses nombreux échecs lorsqu'il le décrit comme un homme secret, sans force de caractère, ignorant les agences humaines nécessaires à la réalisation de ses projets, et n'insistant jamais pour que ses souhaits soient exaucés.
Les dernières années de la carrière officielle de Machiavel sont occupées par les événements découlant de la Ligue de Cambrai, conclue en 1508 entre les trois grandes puissances européennes déjà mentionnées et le pape, dans le but d'écraser la République de Venise. Ce résultat fut atteint lors de la bataille de Vaila, où Venise perdit en un jour tout ce qu'elle avait gagné en huit cents ans. Florence eut un rôle difficile à jouer au cours de ces événements, compliqués par la querelle qui éclata entre le pape et les Français, car l'amitié avec la France avait dicté toute la politique de la République. Lorsqu'en 1511, Jules II forma finalement la Sainte Ligue contre la France et, avec l'aide des Suisses, chassa les Français d'Italie, Florence se trouva à la merci du pape et dut se soumettre à ses conditions, dont l'une était que les Médicis soient restaurés. Le retour des Médicis à Florence le 1er septembre 1512 et la chute de la République qui s'ensuivit furent le signal de la destitution de Machiavel et de ses amis, mettant ainsi fin à sa carrière publique, car, comme nous l'avons vu, il mourut sans avoir repris ses fonctions.
Au retour des Médicis, Machiavel, qui pendant quelques semaines avait vainement espéré conserver son poste sous les nouveaux maîtres de Florence, est démis de ses fonctions par un décret daté du 7 novembre 1512. Peu après, il est accusé de complicité dans une conspiration avortée contre les Médicis, emprisonné et interrogé sous la torture. Le nouveau pape médicéen, Léon X, obtient sa libération et il se retire dans sa petite propriété de San Casciano, près de Florence, où il se consacre à la littérature. Dans une lettre à Francesco Vettori, datée du 13 décembre 1513, il a laissé une description très intéressante de sa vie à cette époque, qui élucide ses méthodes et ses motivations pour écrire Le Prince. Après avoir décrit ses occupations quotidiennes avec sa famille et ses voisins, il écrit : "Le soir venu, je rentre chez moi et je me rends dans mon cabinet de travail ; à l'entrée, j'enlève mes vêtements de paysan, couverts de poussière et de saleté, et je mets mon noble habit de cour ; ainsi vêtu, je pénètre dans les anciennes cours des hommes d'autrefois, où, reçu avec amour par eux, je me nourris de cette nourriture qui n'appartient qu'à moi ; Je n'hésite pas à leur parler et à leur demander la raison de leurs actions, et ils me répondent dans leur bienveillance ; et pendant quatre heures, je ne ressens aucune lassitude, j'oublie tout problème, la pauvreté ne m'effraie pas, la mort ne me terrifie pas ; je suis entièrement possédé par ces grands hommes. Et parce que Dante dit :
La connaissance vient de l'apprentissage bien retenu,
Autre chose d'infructueux,
J'ai noté ce que j'ai retiré de leur conversation, et j'ai composé un petit ouvrage sur les Principautés, où je m'épanche autant que je peux dans la méditation sur le sujet, discutant de ce qu'est une principauté, de quelles sortes il y en a, comment elles peuvent être acquises, comment elles peuvent être conservées, pourquoi elles sont perdues : et si l'une de mes fantaisies vous a déjà plu, ceci ne devrait pas vous déplaire : et pour un prince, surtout pour un nouveau, cela devrait être le bienvenu : c'est pourquoi je le dédie à sa Magnificence Giuliano. Filippo Casavecchio l'a vu ; il pourra vous dire ce qu'il contient et les discours que j'ai eus avec lui ; cependant, je suis encore en train de l'enrichir et de le polir."
Le "petit livre" a subi de nombreuses vicissitudes avant d'atteindre la forme sous laquelle il nous est parvenu. Diverses influences mentales sont intervenues au cours de sa composition ; son titre et son commanditaire ont été modifiés ; et pour une raison inconnue, il a finalement été dédié à Laurent de Médicis. Bien que Machiavel ait discuté avec Casavecchio de l'opportunité de l'envoyer ou de le présenter en personne au mécène, il n'y a aucune preuve que Laurent l'ait jamais reçu ou même lu : il n'a certainement jamais donné d'emploi à Machiavel. Bien qu'il ait été plagié du vivant de Machiavel, Le Prince n'a jamais été publié par lui, et son texte est toujours contesté.
Machiavel conclut sa lettre à Vettori comme suit : "Et quant à cette petite chose [son livre], quand on l'aura lue, on verra que pendant les quinze années que j'ai consacrées à l'étude de l'art de gouverner, je n'ai ni dormi ni farnienté ; et les hommes devraient toujours désirer être servis par quelqu'un qui a acquis de l'expérience aux dépens d'autrui. Et personne ne peut douter de ma loyauté, parce que, ayant toujours gardé la foi, je n'ai pas pu apprendre à la rompre ; car celui qui a été fidèle et honnête, comme je l'ai été, ne peut pas changer de nature ; et ma pauvreté est le témoin de mon honnêteté.
Avant que Machiavel n'ait pu se débarrasser du Prince, il commença son "Discours sur la première décennie de Tite-Live", qui devrait être lu en même temps que le Prince. Ces travaux et d'autres moins importants l'occupèrent jusqu'en 1518, date à laquelle il accepta une petite commission pour s'occuper des affaires de quelques marchands florentins à Gênes. En 1519, les dirigeants médicéens de Florence accordèrent quelques concessions politiques à ses citoyens, et Machiavel fut consulté, avec d'autres, sur une nouvelle constitution en vertu de laquelle le Grand Conseil devait être restauré ; mais sous un prétexte ou un autre, elle ne fut pas promulguée.
En 1520, les marchands florentins eurent à nouveau recours à Machiavel pour régler leurs difficultés avec Lucques, mais cette année fut surtout remarquable pour son retour dans la société littéraire florentine, où il était très recherché, et aussi pour la production de son "Art de la guerre". C'est la même année qu'il reçut, à l'initiative du cardinal de Médicis, la commande d'écrire l'"Histoire de Florence", tâche qui l'occupa jusqu'en 1525. Son retour à la faveur populaire a peut-être incité les Médicis à lui confier cet emploi, car un vieil auteur fait remarquer qu'"un homme d'État compétent sans travail, comme une énorme baleine, s'efforcera de renverser le navire s'il n'a pas un tonneau vide avec lequel jouer".
Lorsque l'"Histoire de Florence" fut terminée, Machiavel l'emporta à Rome pour la présenter à son protecteur, Giuliano de' Medici, qui était entre-temps devenu pape sous le titre de Clément VII. Il est assez remarquable que, de même qu'en 1513 Machiavel avait écrit Le Prince pour l'instruction des Médicis alors qu'ils venaient de reprendre le pouvoir à Florence, de même, en 1525, il dédie l'"Histoire de Florence" au chef de la famille alors que sa ruine était imminente. Cette année-là, la bataille de Pavie détruisit la domination française en Italie et laissa François Ier prisonnier entre les mains de son grand rival, Charles Quint. Elle fut suivie par le sac de Rome, à la nouvelle duquel le parti populaire de Florence secoua le joug des Médicis, qui furent à nouveau bannis.
Machiavel était absent de Florence à cette époque, mais il s'empressa de revenir, espérant retrouver son ancien poste de secrétaire des "Dix de la liberté et de la paix". Malheureusement, il tombe malade peu après son arrivée à Florence, où il meurt le 22 juin 1527.
Personne ne peut dire où reposent les ossements de Machiavel, mais la Florence moderne lui a décrété un cénotaphe majestueux à Santa Croce, aux côtés de ses fils les plus célèbres, reconnaissant que, quoi que d'autres nations aient pu trouver dans ses œuvres, l'Italie y a trouvé l'idée de son unité et les germes de sa renaissance parmi les nations d'Europe. S'il est vain de protester contre la signification mondiale et néfaste de son nom, il convient de souligner que l'interprétation sévère de sa doctrine qu'implique cette sinistre réputation était inconnue de son temps, et que les recherches récentes nous ont permis de l'interpréter plus raisonnablement. C'est grâce à ces recherches que l'image d'un "nécromancien impie", qui a si longtemps hanté la vision des hommes, a commencé à s'estomper.
Machiavel était sans aucun doute un homme d'une grande observation, d'une grande acuité et d'une grande industrie ; il notait d'un œil attentif tout ce qui se passait devant lui et, grâce à son don littéraire suprême, il en tirait parti dans son retrait forcé des affaires. Il ne se présente pas, et ses contemporains ne le dépeignent pas non plus, comme le type de cette rare combinaison, l'homme d'État et l'auteur à succès, car il semble n'avoir été que modérément prospère au cours de ses différentes ambassades et de ses emplois politiques. Il fut trompé par Catherina Sforza, ignoré par Louis XII, impressionné par Cesare Borgia ; plusieurs de ses ambassades ne donnèrent aucun résultat ; ses tentatives pour fortifier Florence échouèrent, et les soldats qu'il leva étonnèrent tout le monde par leur lâcheté. Dans la conduite de ses propres affaires, il était timide et attentiste ; il n'osait pas apparaître aux côtés de Soderini, à qui il devait tant, de peur de se compromettre ; ses liens avec les Médicis étaient suspects, et Giuliano semble avoir reconnu sa véritable force lorsqu'il l'a chargé d'écrire l'"Histoire de Florence" plutôt que de l'employer dans l'État. Et c'est sur le plan littéraire de son caractère, et là seulement, que nous ne trouvons ni faiblesse ni échec.
Bien que la lumière de près de quatre siècles ait été braquée sur Le Prince, ses problèmes restent discutables et intéressants, car ce sont les éternels problèmes entre les gouvernés et leurs gouvernants. Telle qu'elle est, son éthique est celle des contemporains de Machiavel, mais on ne peut pas dire qu'elle soit dépassée tant que les gouvernements européens s'appuieront sur des forces matérielles plutôt que sur des forces morales. Les incidents et les personnages historiques deviennent intéressants en raison de l'usage que Machiavel en fait pour illustrer ses théories de gouvernement et de conduite.