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Trois adolescents se retrouvent dans un monde inconnu malgré eux, équipés de bagues aux pouvoirs intriguants...
Ce livre raconte l’histoire de trois adolescents qui doivent faire face à des évènements inattendus. Après avoir fait la bêtise de leur vie, ils se retrouvent projetés dans un autre monde dont ils ignorent tout. Armés d’étranges bagues qui semblent cacher quelque chose, ils devront trouver un moyen de rentrer chez eux mais cela ne sera pas chose aisée.
Sur leur route se dresseront en effet de nombreuses épreuves dont ils devront triompher. Heureusement, ils seront aidés à plusieurs reprises par des alliés plus surprenants les uns que les autres. Ils devront traverser une forêt pleine de brigands, escalader une montagne où règne le blizzard, passer par une ville prise en otage pour enfin arriver au mythique Palais Blanc, seul lieu qui pourrait leur permettre de renter chez eux… Mais seront-ils suffisamment forts pour y parvenir ?
Arriveront-ils, malgré les nombreux obstacles, à rentrer dans leur monde ? Découvrez, avec ce roman fantastique, un univers parsemé de dangers et peuplé de personnages tous plus étranges les uns que les autres !
EXTRAIT
Cette fois, il se tourna vers moi, et je vis qu’il avait du mal à contenir sa colère. Il se tut quelques instants avant de répondre :
— Tu sais que ton pouvoir est TRÈS agaçant.
— Mon pouvoir ? Mais, je ne l’ai pas encore découvert..., dis-je en regardant la bague que je portais d’un air interdit.
— Arrête de me parler veux-tu ?
Dorian fronça les sourcils et marcha rapidement vers Kyrian. Il lui répondit d’une voix énervée.
— Hey ! Je vous rappelle que, certes vous nous rendez un service mais nous aussi, pas besoin d’être agressif !
— Bien entendu… Pardonnez-moi c’est juste que je n’aime pas trop la magie…, dit-il d’un air ennuyé.
— Pourquoi vous nous avez suivis alors ? demandais-je, méfiante depuis sa remarque.
— Parce que votre magie est différente et je me demandais en quoi, répondit-il d’un ton plus calme.
— On n’en sait rien, on ne connaît pas les autres formes de magie.
— Rien de bon croyez-moi. Les sages gardent toute la magie puissante pour eux et n’en laissent que peu aux autres. Ce pouvoir est injustement réparti.
— Vous êtes la première personne qu’on croise qui critique le système, fis-je remarquer.
— Je pense que la plupart des gens sont heureux ainsi, ils ne trouvent pas matière à se plaindre.
— Mais vous, si, répliqua Dorian.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Née en Belgique en 1996
Ludmila Kowalski y réside toujours. Elle poursuit des études dans le domaine des images de synthèse et du multimédia. Depuis l’âge de treize ans, elle est fascinée par la création artistique. Elle écrit des poèmes, des essais, des nouvelles et a participé à plusieurs concours d’écriture et a été lauréate de deux concours de poésie. Son deuxième domaine artistique de prédilection est celui de la musique. L’expression artistique est une composante essentielle de son existence ; l’écriture et la musique ne sont pas seulement des loisirs, ils font partie intégrante de son quotidien.
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Seitenzahl: 410
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Ludmila Kowalski
Les chroniques d’Arkadio
Tome 1 : Le roi sans âge
Roman
© Lys Bleu Éditions – Ludmila Kowalski
ISBN : 978-2-85113-635-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayant cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivant du Code de la propriété intellectuelle.
Nous marchions depuis plusieurs minutes dans la forêt sombre. Nous ne nous éclairions pas, nous guidant seulement grâce aux derniers rayons du soleil couchant. Je suivais mon ami. Il avançait d’une démarche assurée, semblant parfaitement en accord avec ce qu’il s’apprêtait à faire. Tout l’inverse, en somme, de celui qui marchait derrière nous. Chacune de ses foulées semblait être la pire des tortures pour lui. Dorian, qui marchait en tête, finit par se retourner vers lui, lui lançant un regard noir.
— Je veux pas que tu sois un poids, compris ?!
Aaron, le bon dernier, le regarda quelques instants avant d’enfin acquiescer. Nous pouvions continuer notre route. Un lourd silence s’était abattu depuis que nous avions quitté la voiture que Dorian avait « empruntée ». Je voyais qu’Aaron était au plus mal. Mais pourquoi donc nous avait-il suivis ? Je me posais encore et toujours la question… Je vis Dorian s’arrêter. Il s’accroupit et attendit que nous l’imitions pour parler.
— Bon, tout le monde se rappelle bien le plan ?
— Oui, ça me paraît simple, dis-je en haussant les épaules.
Dorian tourna ses yeux charbon vers l’autre garçon qui était avec nous, l’interrogeant du regard. Bien que n’ayant qu’un an de différence, Aaron était bien plus petit et maigrichon que Dorian. Aaron, mon meilleur ami, commença à parler très vite, comme toujours quand il était inquiet ou alors impatient de raconter quelque chose :
— Tu te rends compte de ce qu’on risque ?! D’abord un vol de voiture, et puis ça ! On va aller en taule !
— Et, calme toi l’intello. Pour commencer, personne t’a forcé à venir, surtout pas moi. Et la voiture je l’ai pas volée, je l’ai empruntée, je vais la rendre après, nuance. Ensuite, il n’y a pas de risque, il y a plus personne là-bas. Maintenant, tu te calmes et tu fais exactement ce que je dis d’accord ? Si on se fait chopper à cause de toi, là tu pourras flipper.
— Du calme Dorian ! dis-je
Je l’appréciais beaucoup mais je n’avais jamais aimé la façon dont il s’adressait à mon meilleur ami. Aussi, je le lui faisais souvent remarquer, espérant qu’il finisse par comprendre.
— Je veux bien Aveline, mais il a quand même raison sur un point le binoclard. Si on se fait chopper, on est vraiment dans la merde. Alors il a intérêt à assurer !
En voyant la mine d’Aaron face à ces dernières paroles, je ne pus que douter une nouvelle fois du bien fait de le prendre avec nous. Certes, il avait d’abord insisté pour que nous laissions tomber ce projet, mais ensuite, quand il avait vu à quel point nous étions décidés, il avait demandé à nous accompagner.
— Écoute Aaron, je t’en voudrais pas si tu rentrais chez toi, t’as encore rien fait du tout, si tu rentres maintenant… commençais-je.
— Non ! Ou on repart tous les trois, ou je repars pas !
— Et ça recommence… dit Dorian en levant les yeux au ciel.
— Tu ne fais que créer des problèmes toi, alors tu n’as rien à dire ! S’énerva Aaron.
— Mais ferme-la un peu. Je ne comprends déjà pas comment Ava peut traîner avec un mec comme toi…
— Quoi ?! Et toi tu peux parler, t’as tellement rien foutu l’an passé que t’as redoublé une classe et maintenant tu te retrouves tout seul, du coup tu cherches d’autres personnes à emmener dans tes plans foireux ! Moi, j’ai toujours eu des amis et eux, ne me faisaient pas de sales coups !
— Je fais aucun sale coup, idiot, je vais juste nous rendre riches, dit-il avec un sourire. Bon bref, comme prévu, Ava tu ouvres la porte, Aaron tu restes près de l’entrée à surveiller, pendant ce temps-là nous on prend tout ce qui nous semble avoir de la valeur. Compris ?
— Oui, allons-y, il fait de plus en plus sombre, dis-je en voyant que le soleil était bientôt couché.
— Je sais, le but c’est qu’il fasse nuit quand on sera sur place… répondit Dorian.
— C’était vraiment intelligent de mettre la voiture si loin ? demandais-je. Si le propriétaire de la maison nous court après…
— On sera plus rapide que lui et il vaut mieux pas qu’il voit la plaque. On en a déjà discuté. En plus, il n’y a personne. Aucune raison de paniquer, répondit l’aîné de notre groupe.
Nous reprenions donc notre marche dans la configuration précédente. Je regardais Dorian avancer devant moi. Il était grand et assez musclé, ses cheveux blonds en bataille faisaient toujours un effet bizarre avec ces yeux noirs. Il portait comme toujours une veste en cuir et un t-shirt arborant le logo d’un groupe de rock, un jean abîmé et de vieilles baskets en cuir. Je me retournais vers Aaron. Lui en revanche, était beaucoup plus petit et frêle. Il portait de fines lunettes sur le nez, juste devant ses yeux émeraude. Ses cheveux étaient bruns et coupés courts et bien coiffés. Il portait une chemise verte à carreaux parfaitement boutonnée et repassée ainsi qu’un jean en bon état et une paire de baskets en toile de couleur verte. Je lui souris en le voyant. Il esquissa un mince sourire, qui ressemblait plutôt à un rictus ennuyé.
Je ne pensais pas que ce que nous étions sur le point de faire représentait un vrai danger. Néanmoins, je pouvais tout à fait comprendre l’anxiété d’Aaron. Il était vrai que, deux ados de quinze ans et un ado de seize ans qui font un cambriolage… En fait, quel que soit l’âge, cela représentait un risque. Enfin, comme dit Dorian, plus on est jeune, moins on a de chance d’aller en prison… J’espérais que ça serait vrai. Le fait de marcher ainsi était pire que tout, car nous avions bien le temps de réfléchir dans quoi nous nous embarquions…
Nous ne tardions pas à voir une haute bâtisse se découper dans le ciel du soir. Elle se mêlait aux arbres, si bien que nous ne l’aperçûmes qu’une fois a une vingtaine de mètres à peine.
— On a trop avancé ! Stop ! Nous dit Dorian à voix basse.
Je le voyais scruter l’horizon, mais je savais que, comme nous, il était également très attentif aux sons. Il n’y avait pas un bruit. Juste le vent dans les arbres et de moins en moins de chants d’oiseaux. Il était bientôt l’heure pour eux d’aller dormir. À part ça, tout était calme et silencieux, et même si nous étions dans les bois à la tombée de la nuit, devant une grande et étrange maison, je ne pouvais m’empêcher de me sentir assez calme. Ce lieu semblait paisible et ne prêtait pas à une quelconque angoisse. S’était du moins le cas pour moi. En voyant Aaron serrer le poing pour éviter de trembler et Dorian qui vérifiait tout de a à z, je me rendis compte qu’ils ne pensaient pas tout à fait comme moi. Dorian remit ses cheveux en arrière pour mieux dégager sa vue avant de se tourner lentement et en silence vers nous.
— C’est le moment les gars. Ce fameux moment pour lequel on se prépare depuis des semaines. Après ça, on aura bien assez d’argent pendant un bon moment dit-il en souriant.
— C’est pas comme si on en manquait d’argent… on aurait largement pu se passer de tout ça… dit Aaron.
— Parle pour toi. Mais t’as qu’à rentrer chez toi si ça te plaît pas ! Rétorqua Dorian énervé. Bon, vous avez rien remarqué d’étrange ?
— Non, rien, dis-je
— Moi non plus…, dit Aaron d’un air absent.
— Concentre-toi, on n’a pas le droit à l’erreur ! Si vous n’avez rien remarqué, allons-y. Plus vite nous serons rentrés, plus vite nous serons ressortis.
Dorian marchait à pas de loup vers la maison. Je le suivais de près, Aaron à mes côtés, celui-ci me lançant un regard inquiet, un de plus… Je ne tardais pas à atteindre la porte. Je sortis quelques crochets de ma poche et m’en servis pour forcer la serrure. C’était Dorian qui m’avait appris à forcer des portes. Bien sûr, on ne s’entraînait que sur de vieilles portes en principe. Les seules fois ou l’ont avait mis en application ce talent, c’était pour faire des blagues à des gens de notre école. On ouvrait leur casier et ont cachait leurs affaires partout dans l’école. Mais on ne s’en prenait pas à n’importe qui. Justicier dans l’âme, c’était ceux qui passaient leur temps à mépriser et harceler les autres qui étaient nos cibles de choix. Même Aaron avait décrété que c’était « plutôt cool ». Mais cette fois-ci, c’était du sérieux. On entrait chez quelqu’un par effraction… J’entendis un léger « clic » et je poussais la porte qui pivota, dévoilant un hall d’entrée plongé dans les ténèbres. Nous entrions tous les trois. Aaron resta là, à guetter l’éventuelle arrivée d’une voiture. Je lui fis un signe de tête et lui souris avant de suivre Dorian pour visiter le rez-de-chaussée. Je vis un reflet triste dans ses yeux émeraude et je ne pus m’empêcher de me sentir coupable.
Dans le couloir, je passais devant un miroir. J’y vis une jeune fille d’un mètre soixante-huit avec des cheveux mi-longs sombres et des yeux bleus. J’étais habillée comme à peu près tous les jours. Une chemise froissée rouge et noir à carreaux, un t-shirt noir simple, un jean noir également et une paire de chaussures en toile comme Aaron. Je soupirais en détachant mon regard du reflet, je devais continuer mon chemin.
Dorian et moi arrivions dans une pièce dont je ne parvenais pas à déterminer l’utilité. S’était la première porte à notre gauche quand on entrait dans la maison. L’escalier se situant à l’extrême droite de la bâtisse, toutes les pièces étaient à gauche. En observant plus attentivement, j’en conclus que cette pièce servait à accueillir les gens, porte-manteau et porte-parapluie côtoyant quelque chaise. Je n’avais encore jamais vu ça, en principe, un hall d’entrée suffisait amplement…
— Il n’y aura sûrement rien ici…, dis-je à voix basse
Mais Dorian ne me répondit pas, mes yeux s’étant maintenant habitués à la pénombre, je pus voir sur son visage qu’il était anxieux.
— Que se passe-t-il ?
— Il fait chaud
— Quoi ?
— Ava, pourquoi chauffer une maison où personne ne vit ?
J’écarquillais les yeux. Dorian avait beau être considéré comme un des pires élèves de l’école, ce n’était pas la première fois que sa capacité à analyser son environnement m’impressionnait. Cependant, je cessais de penser à cela, il y avait plus urgent. Dorian avait malheureusement raison. Je posais ma main sur un des vieux radiateurs usés par le temps, mais il était froid. Mon ami blond me fit signe qu’il avait compris ce que je venais de faire. Il avança discrètement vers la pièce suivante, pesant chacun de ses pas. J’aurais voulu lui crier de faire demi-tour, nous devions partir ! Il devait s’être trompé, la maison devait être occupée ! Mais je ne pouvais pas, je devais rester discrète. Je le suivais donc en silence moi aussi, mon cœur battant la chamade, terrifiée à l’idée d’entendre quoi que ce soit. Nous vîmes alors, sous la fente de la porte de la pièce suivante, un mince filet de lumière passait. Dorian regarda par le trou de la serrure. Il se redressa ensuite et tourna la poignée méticuleusement. Nous entrions dans la pièce, vide. Évidemment, je m’en doutais. Mon ami ne serait pas entré autrement. Nous étions dans une sorte de salon qui sentait la poussière et le vieux livre. La pièce comportait plusieurs meubles en bois, principalement des bibliothèques et plusieurs vieux fauteuils. Un feu brûlait dans l’âtre. Cela qui donnait une impression de chaleur. Voyant qu’il n’y avait personne, je dis rapidement à voix basse.
— On doit partir !
— Il n’y a personne…
— Dorian tu sais aussi bien que moi ce que ça signifie ! dis-je en pointant le feu du doigt.
Il tourna lentement les yeux vers les flammes, elles produisaient une multitude d’ombres qui dansaient sur les tapisseries datant d’une autre époque.
— On n’allume pas un feu pour partir ensuite, dit-il en tournant la tête vers moi. Mais si nous restons silencieux, nous ne risquons rien.
— C’est beaucoup trop dangereux ! Il suffit de revenir une autre fois !
— On ne pourra pas, je ne peux pas emprunter cette voiture une autre fois, et c’est bien mieux d’être trois. Tu sais très bien que ton pote ne voudra pas revenir. On doit continuer.
— Dorian on SAIT qu’il y a quelqu’un, c’est ridicule de rester dis-je, nerveuse.
— Non il n’est pas là.
— Mais qu’est-ce que tu en sais ?!
— Je l’ai observé ! Tu te doutes bien que je n’ai pas seulement travaillé avec toi et Aaron avant de venir ici ! J’ai aussi travaillé seul. J’ai analysé les lieux et j’ai appris par cœur l’horaire du propriétaire afin de déterminer le meilleur moment pour venir. Et je sais qu’il n’est pas là ! dit-il, déterminé.
— Dorian, les gens ne sont pas des robots, leurs horaires peuvent changer ! On doit partir. Plus on reste, plus c’est dangereux.
— Je suis sûr qu’il n’y a personne, et je vais te le prouver.
— Quoi ? Attend, tu…
Il se mit alors à crier. Il demandait si quelqu’un était là. J’étais paralysée. Qu’avait-il fait ?! Aaron arriva, paniqué, et nous demanda ce qui se passait. Je lui expliquais que Dorian voulait démontrer qu’il n’y avait bien personne.
— Mais t’es complètement cinglé !
— Mais vous voyez bien qu’il n’y a personne ! Le type s’est barré en voiture il y a une heure ! Je le sais bien ! On continue, dit Dorian.
Je levais les yeux au ciel tandis qu’Aaron retournait à l’entrée en disant tout un tas d’injures à l’encontre de notre ami. Dorian et moi entreprîmes donc de fouiller le salon, ouvrant tous les tiroirs à la recherche d’objets de valeurs. À notre grand désespoir, cette pièce ne contenait presque que des livres.
— Sans vouloir jouer les rabat-joie, il n’y a rien d’intéressant ici…, dis-je après avoir ouvert un énième tiroir ne contenant que de vieilles babioles.
— Passons à la pièce suivante alors…, dit Dorian en ouvrant la porte à la volée.
Ce fut une cuisine sombre qui nous accueillit. Mon ami actionna un vieil interrupteur, une ampoule grésillant inonda la pièce de sa lumière blafarde. Une odeur de nourriture arriva à nos narines. Je lançais un regard au blond aux yeux charbon et dis :
— Qu’est-ce que tu veux voler dans une cuisine ? C’est pas encore aujourd’hui qu’on fera fortune…
J’essayais directement la porte à notre droite. Je tombais alors sur une chambre, j’étais étonné, décidément, la disposition des pièces était plus que surprenante… Après avoir mis la lumière, je regardais rapidement le contenu des armoires. Tout était vide… Cette chambre n’était de toute évidence pas utilisée. Aucun drap sur le lit et des armoires ne contenant rien… Je regardais une fois de plus Dorian.
— Si tu nous as fait prendre tous ces risques pour rien…
— Non ! On a encore tout l’étage à visiter, ne t’inquiète pas…
Il tourna les talons, nous éteignions au fur et à mesure des pièces que nous quittons. Nous revenions ensuite à l’entrée, croisant un Aaron plus que nerveux, appuyé contre l’un des murs du hall.
— Alors, on s’en va ? demanda-t-il.
— Désolé gringalet, mais on n’a pas fini la visite. Ça serait dommage d’avoir payé l’entrée pour rien, dit Dorian.
Celui-ci entama la montée de l’escalier antique et grinçant. Je lançais un regard d’excuse à Aaron et suivis Dorian. Nous fûmes rapidement à l’étage. Je constatais qu’ici, le plafond était moins haut, je fis part de mes observations à Dorian.
— Je suppose qu’il y a un deuxième étage…, dit-il. J’ai étudié la maison, mais n’y suis jamais entré, avant aujourd’hui bien sûr…
— Si tu le dis… On a combien de temps avant que le proprio ne revienne ?
— Au moins une heure.
— On n’aura pas le temps de tout fouiller…
— On fera ce qu’on peut Ava, dit-il en entrant dans une pièce.
Nous étions dans un couloir qui proposait trois portes et un escalier au bout. Dorian venait d’entrer dans la première pièce à gauche. Je le suivais, nous découvrions une nouvelle chambre, encore inhabitée, et encore vide. Cette fois, mon ami shoota dans le pied du lit en jurant.
— C’est pas possible enfin ! Aucun objet de valeur, pas d’argent ! Comment ça se fait ?!
— Ne perdons pas plus de temps et fouillions le reste, j’aimerais vraiment pas me faire avoir pour rien, dis-je en sortant de la pièce.
La porte suivante à droite nous laissa découvrir une salle de bain. Celle-ci semblait utilisée mais ne contenait aucun objet de valeur. En face, une autre chambre inutilisée. Dorian commençait à être de plus en plus énervé, et je le comprenais. Je lui en voulais aussi. Nous avions pris tous ces risques, nous l’avions cru lorsqu’il nous faisait miroiter des richesses et tout ça pour rien ! Je lui en voulais et je n’étais pas prête à lui faire confiance à nouveau. Pour des histoires pareilles, il faut être sûr de soi.
— Viens, on se casse, ça sert à rien.
— Non, tant qu’à être ici autant tout fouiller !
Je serrais la mâchoire, énervée, mais le suivais tout de même au dernier étage. Il avait raison, et il nous restait du temps avant le retour du propriétaire… Si nous pouvions au moins trouver un peu d’argent ou quelque chose à revendre… Même une bête télévision. Nous n’en avions pas encore trouvé… Nous atteignions le deuxième étage. Ici, il n’y avait que deux pièces. Une porte à droite et une à gauche. Je fis quelque pas en avant et ouvris la porte de droite, c’était une quatrième chambre, mais, enfin elle contenait des affaires !
— C’est déjà mieux ! dit Dorian en entrant
J’esquissais un sourire nous avions un peu d’espoir… J’ouvris les commodes et les armoires. Je trouvais surtout des vêtements mais aussi quelques bijoux ainsi que de vieilles pièces que j’emportais. Peut-être pourrions-nous les revendre. Je me tournais ensuite vers Dorian. Je l’observais retourner méticuleusement les lieux. Il ne semblait pas éprouver le moindre remords. Je me demandais bien comment il faisait… Moi je ne pouvais m’empêcher de me sentir coupable. Et à raison, je l’étais. Mon cœur battait la chamade depuis notre départ de la voiture et ça serait sans doute le cas pendant plusieurs jours encore, j’aurais peur que l’on nous découvre…
— Bon, la dernière pièce ? fit Dorian en pivotant vers moi tout sourire.
Je levais le pouce et me forçais à sourire moi aussi. Nous allions donc vers l’autre porte, mais celle-ci était verrouillée… Ce fut pile à l’instant où je parvenais à forcer la serrure que le pire se produisit. Aaron surgit de l’escalier avec une mine paniquée. Nous avions compris. Le propriétaire était rentré plus tôt que prévu… Dorian nous pressa à l’intérieur de la pièce qui se révéla être un bureau.
— Mais qu’est-ce qu’on va faire ?! demanda Aaron, au bord de l’évanouissement.
— Déjà, on essaye de rester calme et silencieux…, dit Dorian d’un air sombre
— Calme et silencieux ?! Je vais aller en prison à cause de toi, espèce de con…
— Arrêtez de vous disputer et cherchez plutôt une solution !
Je regardais par la fenêtre. Bien sûr, nous étions bien trop haut pour descendre sans risquer de tomber et de sérieusement nous blesser, voire pire… J’ouvris alors les tiroirs du bureau et dégotais un trousseau de clefs. Je le lançais à Dorian qui verrouilla la porte.
— C’est pas la solution ça ! ça se voit bien que vous avez fouillé en bas. Il va appeler la police, faut sortir d’ici ! dit Aaron.
— Je sais ! Mais ça nous fait gagner un peu de temps !
Nous ne tardions pas à entendre des bruits de pas et une voix qui appelait. Nous nous regardions tous, paralysés par la peur. Mais qu’avions-nous fait comme idiotie ?
— Il y a quelqu’un ? Répondez ! disait une voix grave qui se rapprochait dangereusement.
Dorian lança
— Faut l’assommer puis se barrer.
— Sûrement pas ! Ça ne ferait qu’aggraver notre cas ! Répliqua mon meilleur ami.
— Non. On a encore une chance de pouvoir s’enfuir. On ne va certainement pas se rendre !
Tandis que les deux garçons se disputaient et que la voix se rapprochait, je continuais à fouiller le bureau. Je découvris alors une boîte de forme étrange. Sa structure était celle d’un pentagone, elle était couverte de dorures. Quand je l’ouvris, elle contenait, posées sur un écrin rouge, quatre bagues serties de pierres. J’en pris une en main et l’essayais, elles étaient belles ces bagues, si on pouvait les voler et assommer le type…
— Eh ! Regardez ça, dis-je en leur montrant les bagues.
Dorian barricada sommairement la porte puis lui et Aaron me rejoignirent, Dorian essaya une autre bague.
— Oui, c’est pas mal. On devrait pouvoir les revendre à un certain prix…
Mais un coup à la porte nous interrompit, nous faisant tous sursauter et nous ramenant à nos problèmes. Aaron me lança un regard noir et dit :
— C’est pas le moment, repose ça qu’on aille se rendre.
— Sûrement pas. Il est tout seul, on va pas le laisser nous arrêter répliqua Dorian.
— Je sais que vous êtes là. Laissez-moi entrez dit la voix de l’autre côté de la porte.
Aaron était désespéré, mais il jeta un œil aux bagues. Il prit la boîte et en attrapa une, dont la pierre avait la même couleur que ses yeux et soudain, il se passa quelque chose d’étrange, quelque chose qui allait tout changer, quelque chose qui allait nous changer à jamais. Devant Aaron, un nuage vert se créa, et à travers celui-ci, nous pouvions apercevoir un tout autre décor…
— Je reconnais ce bruit. Vous avez touché aux bagues ! Qui que vous soyez éloignez-vous-en. Vous n’avez pas idée de ce que vous avez entre les mains !
La porte commençait à craquer de plus en plus. Elle cédait ! Le bois se tordait dangereusement et, bientôt, le propriétaire serait face à nous.
— J’irai pas en prison ! cria alors Dorian.
Celui-ci courut vers les étranges volutes de fumées, et plongea dedans ! Je le vis disparaître, ce qui causa en moi une grande panique. Ne voyant d’autre issue à notre cause désespérée, j’y plongeai à mon tour.
J’entendis Aaron crier lui aussi, tandis que je me sentais tomber, tomber dans un puits sans fond. Je perdais tous mes points de repère, et je finis par perdre connaissance…
Lorsque j’ouvris les yeux, j’avais affreusement mal à la tête. Une fine pluie tombait sur le sol, trempant mes vêtements. Je sentais autour de moi un parfum de forêt, et sous mes mains de l’herbe piquante. Je réussis finalement à trouver la force de me relever. Mes bras tremblaient sous mon poids, ce qui n’était, selon moi, pas de très bon augure. Je me tenais debout, chancelante. Je redressais la tête et regardais autour de moi. J’étais entourée d’arbres, mon odorat ne m’avait pas trompée en effet. Je vis alors Dorian évanoui sur le sol, du sang coulant depuis sa tête… Du sang ! Je tombais à genoux près de lui et le retournait pour le coucher sur le dos. Il était inconscient, mais heureusement, il respirait encore.
— Ne t’inquiète pas, il a juste reçu un léger coup à la tête…, dit une voix derrière moi
Je fis volte-face et soupirais de soulagement en voyant que c’était la voix d’Aaron, qui se tenait à quelques pas de moi.
— C’est toi qui l’as frappé ?!
— J’aurai bien voulu, mais non. Regarde près de sa tête.
Je m’exécutais alors et découvris une pierre qui ressortait du sol herbeux à cet endroit. Elle était maculée de sang. Je me tournais vers Aaron et dis :
— On doit le ramener chez lui ! Ou chez moi. N’importe, il a besoin de soins !
— Ah bon ? dit Aaron avec une drôle d’expression. J’ai quand même une question pour toi, comment sommes-nous arrivés ici ?
— On… on était dans le bureau et…
— Oui Ava, on était dans le bureau, et ? Je te le dis tout de suite. Ça, ce n’est pas notre forêt, c’est pas du tout les mêmes espèces d’arbres. Quand bien même, comment serions-nous retournés dans la forêt ? Nous étions bloqués dans cette maison.
— Mais…
Je me relevais alors et regardais autour de moi, nous étions en plein jour, il faisait pourtant nuit quand nous étions… partis…
— Le jour s’est déjà levé ? Comment est-on arrivé ici et… combien de temps sommes-nous restés inconscients ?
— Je n’en ai pas la moindre idée Aveline. Mais je crois que ça y est pour quelque chose, dit Aaron en montrant la bague.
— C’est cette bague qui a créé la fumée…
— Oui, regarde.
Il tendit la bague devant lui et une nouvelle volute verdâtre apparue, Aaron la traversa se retrouva comme téléporté quelques mètres plus loin.
— Mais… mais c’est incroyable ! Et, ça ne fonctionne pas pour rentrer à la maison ? Il faudrait que Dorian puisse être soigné…
Aaron affichait une mine dépitée.
— Non. J’ai déjà essayé, hélas, ça ne marche pas.
— Ce n’est pas vrai… Il va falloir qu’on le porte jusqu’à la voiture…
— Mais je dois te le dire combien de fois, on n’est PAS dans la forêt d’où on est partis !
— Mais où sommes-nous ?! dis-je, énervée.
— J’en sais rien. Mais ce qui est sûr c’est que tu ne trouveras pas la voiture parquée plus loin. On a été téléporté ailleurs, mais je n’ai pas la moindre idée du lieu où nous nous trouvons.
J’entrepris de soulever Dorian.
— C’est pas possible… Bon, aide-moi.
Aaron fit la moue mais franchit tout de même les quelques mètres qui nous séparaient afin de venir m’aider à porter notre ami inconscient. J’étais paniquée et dis :
— Il faut trouver du secours !
— Super, trois cambrioleurs en cavale qui cherchent de l’aide…
— Ils n’ont pas vu nos visages Aaron ! Ils n’ont aucune preuve et de toute façon, on doit aider Dorian, c’est tout !
Nous nous redressions et essayions de répartir au mieux le poids du blond qui n’était, à notre plus grand dam, décidément pas léger. Je regardais autour de moi, et je finis par tourner les yeux vers Aaron.
— Vers où va-t-on ?
— Je ne sais pas… Allons par là…
Nous suivions donc le chemin qu’il avait indiqué, n’ayant aucune idée de l’endroit où nous pouvions nous trouver. Suivre cette direction ou une autre revenait au même. L’odeur de rosée fraîche m’indiquait que nous étions le matin, le soleil était toujours caché par d’épais nuages. La pluie avait néanmoins cessé, ce qui n’était pas plus mal. Nous marchions en silence dans cette forêt qui s’éveillait, nos pieds faisant craquer des branches au passage. J’osais un regard vers Aaron, son expression décidée ne lui ressemblait pas, mais c’était surtout la colère au fond de ses yeux qui était le plus étrange… Quant à moi, je gardais le silence. Que dire de toute façon ?
Après plus d’une heure de marche, et ce n’était pas chose aisée en portant Dorian, nous arrivions en vue d’un village. Nous avions dû faire de nombreux arrêts pour reposer nos bras et reprendre notre souffle. C’était la fumée sortant des cheminées que nous avions aperçue en premier, je fronçais les sourcils.
— Je n’ai jamais vu ce village de ma vie… Tu reconnais quelque chose dans le paysage ?
— Non, je suis aussi perdu que toi.
— Aaron je…
— Laisse, on devrait y aller avant que l’autre crétin ne perde trop de sang…, dit-il sèchement, sans me laisser le temps de terminer ma phrase.
Nous marchions donc vers le petit village. Il se trouvait à l’orée de la forêt et faisait le lien entre celle-ci et de larges champs. Je vis des villageois marcher vers les champs, ils semblaient porter des outils. Je ne m’y connaissais pas plus que ça en agriculture, mais aux dernières nouvelles, il me semblait que peu de gens travaillaient encore avec de tels outils… Mais ça allait bientôt être le cadet de mes soucis. En effet, ce ne fut pas le seul élément étrange que j’aperçus dans le décor…
— Aaron, tu ne trouves pas que les gens sont habillés bizarrement ?
— Oui, je trouve aussi, dit-il tandis que nous approchons. Mais tu devrais éviter de leur dire ça.
— Évidement…
Nous venions d’entrer dans le village, tandis que les habitants nous aperçurent enfin. Ils accourraient vers nous pour nous aider à soutenir Dorian. J’étais impressionnée par tant de gentillesse, mais je devais bien avouer que cela m’arrangeait bien, j’étais à bout de force, j’étais loin d’imaginer à quel point porter ainsi quelqu’un tout en marchant pouvait être épuisant…
— Bonjour, étrangers ! Suivez-nous, votre ami est blessé, nous allons le soigner ! Nous dit un homme en nous amenant près d’une maison.
Nous entrions à l’intérieur de la maison, suivis de plusieurs villageois. L’intérieur du bâtiment ressemblait à une auberge. Une forte odeur de feu de bois parvint à mes narines, je sentis de la nourriture aussi. Mon estomac se rappela soudain à moi. Toute cette marche m’avait affamée et je n’avais pas mangé depuis… Depuis un certain temps… Nous posions Dorian dans une sorte de fauteuil près de l’âtre. Une femme vint examiner sa tête. Pendant ce temps, les autres personnes nous proposaient de nous asseoir non loin de lui, et à ma grande joie, nous proposaient à manger.
J’aurais sans doute dû me montrer plus méfiante, mais j’avais faim. J’étais fatiguée et j’étais inquiète pour mon ami. Je n’avais pas toutes mes idées en place et ces villageois, bien que vêtus étrangement, me semblaient fort sympathiques.
— Merci beaucoup dis-je en prenant l’assiette que l’on me tendait. Pour ça, et pour notre ami.
— Il n’y a pas de quoi, jeune fille. D’où venez-vous ? Vous ne semblez pas d’ici, me répondit gentiment l’homme qui nous avait donné à manger.
— Visiblement, on ne vient pas d’ici…, lui répondis-je en regardant la maison autour de moi. Tout était fait de bois et de pierre, mais où étions-nous tombés ? Quel est le nom de ce village ?
— Vilamar. Bienvenue chez nous !
— Bien… Joli… Joli nom mais, euh… Je ne sais pas du tout où nous sommes. Quelle est la grande ville la plus proche ?
— Et bien, il y a Reldarn qui se situe à trente kilomètres vers le nord et Quillterns à une quarantaine à l’est.
Je lançais un regard inquiet à Aaron. Je n’avais jamais entendu aucun de ces noms. On devait être très loin de chez nous. Cette maudite bague nous avait bel et bien téléportés. Ce qui me rassurait c’était que les gens parlaient notre langue. Nous étions donc dans le même pays. J’avais un peu d’argent sur moi et les deux autres devaient en avoir aussi. Il suffirait de prendre un quelconque bus et nous serions vite chez nous.
Une femme s’occupait de vérifier l’état de Dorian. Elle devait avoir une cinquantaine d’années et portait une longue robe verte. Ses cheveux étaient grisonnants. Elle releva alors la tête vers nous, elle affichait un sourire confiant.
— Votre ami n’a rien de grave. Il s’est cogné la tête, mais la blessure est légère. Il ne devrait pas tarder à se réveiller et à aller mieux.
— Merci pour votre diagnostic. Nous nous en irons tout de suite après son réveil. Nous ne voulons pas vous déranger plus longtemps que nécessaire dit Aaron poliment.
— C’est très gentil, à vous mais vous pouvez rester aussi longtemps qu’il vous plaira. La récolte a été bonne cette année. Nous n’aurons aucun mal à vous donner de quoi manger. Nous dit l’homme qui nous avait servis à manger.
J’écoutais attentivement ce que l’homme nous expliquait et acquiesçais avant de répondre poliment.
— S’est gentil, mais on doit rentrer chez nous sinon nos familles vont s’inquiéter.
— Oui, évidemment. Où vivez-vous ?
— Je ne saurais pas dire à partir d’ici. D’ailleurs, où est l’arrêt de bus le plus proche ? demandais-je tout en mangeant avec joie le contenu de mon assiette.
— De bus ?
— Euh oui, un autobus si vous préférez. Ou bien une gare, rentrer en train est possible aussi.
— Excusez-moi jeune fille, mais nous ne connaissons pas ces mots. De quoi parlez-vous ?
Je fronçais les sourcils et sortis alors du bâtiment. Je cherchais désespérément du regard une voiture, un lampadaire, un câble électrique. Mais rien, rien de tout cela dans le décor. Je regardais le village, on aurait dit un petit village médiéval. Rien ne venait entacher cette conclusion, aucun anachronisme. À part nous… Je n’y croyais pas. Je retournais dans ce qui semblait en fait être une auberge et dis :
— Je sais que c’est une question stupide, mais en quelle année sommes-nous ?
— Et bien, cela dépend des points de vue et des façons de compter, mais le calendrier le plus utilisé vous répondrait que nous sommes en quatre mille deux cent septante-trois.
— Ah… parce que moi, de là d’où je viens, on a des bus, de l’électricité et on est dans les années deux mille…
— Vous devez venir d’un autre monde alors, répondit d’un air bienveillant une femme plus âgée.
Si elle semblait trouver que cette réponse n’était rien de plus qu’une banalité, ce n’était pas mon cas. Je lançais un regard perdu et effrayé à Aaron mais celui-ci semblait toujours aussi fâché contre moi.
— Euh… Qu’est-ce que vous voulez dire exactement par « un autre monde » ?
— Vous expliquer tout ça serait trop long et fastidieux, mademoiselle. Mais si vous voulez trouver des réponses, et une solution pour rentrer chez vous, je ne peux vous conseiller avec certitude qu’un seul endroit, dit l’homme à qui appartenaient visiblement les lieux.
— Ah ? Et, où ça ?
— Au palais blanc. Mais c’est très loin d’ici. Hélas si vous venez d’un autre monde, je ne peux que vous recommander cet endroit. C’est le plus haut lieu de la magie. Là-bas, quel que soit votre problème, il y aura une solution.
— De la… de la magie ?!
— Ça n’existe pas, dit une voix grave.
Je me tournais rapidement et vis le visage sombre d’Aaron. Il avait parlé d’une voix grave et assurée que je ne lui connaissais pas, mais je pouvais comprendre que dans de telles circonstances il soit un peu chamboulé.
— Que dis-tu jeune homme, qu’est-ce qui n’existe pas ?
— Les autres mondes passent encore. Les théories sur les multivers et autres mondes parallèles, j’en ai lu des dizaines. C’est certes très difficile à imaginer, mais c’est plausible. MAIS la magie, ça, non, ça n’existe pas.
— Si, mais la magie pure est rare et s’utilise avec sagesse, dit la femme plus âgée. Nous nous servons tous les jours de forme diluée de magie. Nous l’usons dans notre vie quotidienne. Ce qui vous a amené ici, c’est bien plus puissant qu’une magie pour purifier l’eau ou guérir de petites plaies. Une magie qui vous fait changer de monde, c’est l’une des formes de magie les plus puissantes, utilisée seulement au palais blanc ou peut-être à la capitale, mais j’en doute...
Aaron grimaça et sera les poings. Il semblait fulminer dans son coin, sans que je ne comprenne trop pourquoi.
— Mais s’est impossible, ça n’existe pas ! Ce que vous appelez magie, ça doit être un phénomène que vous ne comprenez pas et que…
— Tais-toi, laisse-les appeler ça comme ils veulent. Mais moi, je veux en savoir plus ! l’interrompais-je.
Nous voyant nous chamailler ainsi, le propriétaire de l’auberge intervint, parlant d’une voix calme.
— Ne vous disputez pas pour si peu, s’est normal que vous soyez interloquée à la découverte d’un Nouveau Monde.
— Oui. À ce qu’on raconte sur les étrangers. C’est toujours le cas dit un autre homme.
— Quoi, il y a eu d’autres étrangers avant nous ?!
— Oui, mais, je ne sais pas où ils sont maintenant, et depuis combien de temps ils sont arrivés, dit l’aubergiste.
— Et nous ne savons pas non plus s’ils viennent du même endroit que vous dit la femme qui s’était occupée de Dorian.
— Ah… mais tant que j’y suis, c’est à cause d’une bague comme ça que nous sommes, arrivés ici, dis-je en montrant ma bague. Ce n’est pas la mienne, mais celle de mon ami qui a créé une sorte de… de portail et on s’est retrouvés chez vous.
Aaron cria alors tout en jetant sa propre bague au sol, celle-ci émit un petit son métallique en touchant le sol en pierre de l’établissement.
— Assez de toutes ces idioties !
Il sortit ensuite, j’allais le suivre mais je vis qu’il restait dehors juste devant l’auberge. Il aurait en effet été stupide de partir se perdre maintenant. La femme qui avait soigné mon ami ramassa la bague d’Aaron et la regarda sous différents angles.
— C’est tout à fait fascinant. Ces pierres semblent chargées d’une puissante énergie… En principe, on ne peut utiliser qu’une ou deux fois une pierre magique, mais celle-ci…
— Apparemment oui, on peut les utiliser plusieurs fois, mais on n’arrive pas à rentrer chez nous. Aaron a essayé, ça ne fonctionne pas avouais-je d’un air triste.
À son tour, l’aubergiste prit la bague sertie d’une pierre verte. Il la regarda sous toutes ses facettes. Après quelques instants d’observation, il décréta d’un ton calme mais grave :
— Ces bagues sont très puissantes. Nous sommes dans un monde où règnent globalement la paix et la compréhension, mais comme partout, ce monde est gangréné par quelques âmes sombres. Si jamais, quelqu’un pourvu de mauvaises intentions tombait sur l’un de ces anneaux, cela pourrait devenir très dangereux. Vous devez être très prudents durant votre voyage.
— Notre voyage ?
— Il est possible de recharger une pierre magique au palais blanc. Elle contient encore une grande puissance, mais visiblement pas assez pour vous faire changer de monde. Pour rentrer chez vous, vous devrez recharger cette pierre au maximum dit l’aubergiste.
— Mais… il n’y a pas d’autres endroits où je pourrai recharger ça ? Vous n’arrêtez pas de répéter que ce palais est loin alors…
— Oui en effet, nous en sommes très loin mais c’est le seul endroit. Seules les pierres de haute puissance peuvent être rechargées. Aussi, un sage veille sur ceux qui possèdent de tels artefacts. Et pour cela, il n’existe qu’un seul lieu pour restituer la puissance aux minéraux magiques.
— C’est pas vrai… Mais il n’y a pas de moyen de transport pour aller là-bas ?
— Vous pourriez faire le trajet à cheval. Cela vous ferait gagner du temps répondit un adolescent qui devait avoir mon âge.
— Oui…
— Nous pourrions sûrement vous donner trois chevaux, dit la femme qui avait guéri Dorian.
Je gardais le silence, j’étais réellement ennuyé, je n’aimais pas ainsi profiter de la générosité des gens.
— Je viens d’arriver mais, je suis presque certaine que ça doit être très cher un cheval, cela vous coûterait beaucoup de devoir nous en donner trois.
— Oui certainement, mais nous vous aurions aidés dit l’aubergiste en souriant.
— Je… je ne sais pas quoi dire… merci… C’est vraiment très gentil.
— C’est normal, nous n’allons pas vous laisser ainsi.
J’esquissais un sourire tandis que la foule se dispersait peu à peu. Les gens retournaient à leur travail ou à une autre activité. Moi je restais là à regarder le feu. On avait volé ces bagues… on avait fait un cambriolage... Je sentais une lourde culpabilité s’installer en moi. On ne méritait pas toute cette aide, les gens d’ici étaient si bienveillants… Je m’en voulais d’avoir eu ce genre de comportement là-bas...
En effet, ces dernières semaines, je m’étais montrée agressive avec tout le monde. Ce n’était pas sans raison… J’étais certes nerveuse à cause du cambriolage qui allait arriver mais il n’y avait pas que ça. Il y avait aussi ce que j’avais appris il y a quelque temps… Je n’en avais parlé à personne, pas même à mes deux amis… Je ne voulais pas y penser. C’était peut-être le seul côté positif à être ici, mes problèmes ne m’avaient pas suivi, je POUVAIS ne pas y penser.
Je sortis un peu de mes pensées pour regarder les villageois restants. Ici, les gens étaient tellement gentils. Je n’étais pas habituée à cela… J’aurais voulu que ça soit le cas. Je ne pouvais pas m’empêcher de penser, quand nous allions rentrer, serions-nous traqués par la police ? Je voulais plus que tout rentrer chez moi, mais d’un côté j’avais peur de ce à quoi je serais confrontée. Et ce type à qui on a volé les bagues, où les avait-il eues ? Venait-il d’ici lui aussi ? Une foule de questions se bousculaient dans ma tête, mais une se fit plus insistante, au point que je décidais de l’énoncer tout haut.
— à environs combien de kilomètres est ce palais ?
— Je ne saurais pas vous dire… peut-être mille kilomètres… voir plus, dit l’aubergiste tout en nettoyant des verres.
— Et… avec les moyens de transport locaux, ça nous mettre environ combien de temps ?
— Je ne suis pas un expert en estimations mais, à mon avis entre deux et trois mois, en fonction de la météo et du chemin choisi.
La nouvelle me fit l’effet d’un coup de poing. Trois mois… ça pourrait potentiellement nous prendre trois mois… J’avais les larmes aux yeux, trois mois loin de chez nous, perdus dans un monde que nous ne connaissions pas. Je ravalais mes larmes, c’était peut-être stupide mais j’étais trop fière pour pleurer. J’entendis alors des pas feutrés à ma gauche, je tournais la tête et vis Aaron. Il avait les yeux rougis et avait troqué son air distant contre une vraiment mauvaise mine. Il parla d’une voix grave.
— J’ai entendu.
Je voulais répondre quelque chose mais je n’y arrivais pas. Ma gorge était nouée, j’avais peur. Peur que l’on ne s’en sorte pas, peur de vivre trois mois dans un autre monde, peur de devoir me débrouiller seule, enfin il y avait les deux garçons mais… que pourrions-nous faire une fois en route ? Aaron lançait un regard meurtrier à Dorian, il dit alors d’une voix remplie de colère :
— C’est sa faute tout ça, c’est à cause de lui qu’on en est là…
— Il ne pouvait pas savoir…, dis-je d’une voix pâle.
— C’est lui qui nous a poussé à faire ce cambriolage et s’est lui qui à sauter dans ce maudit portail ! On devrait partir sans lui et le laisser à son sort ! Il voulait être ici et échapper à la police ? Bien, qu’il y reste, et seul !
— Ne dis pas ça Aaron, on peut pas l’abandonner…
— On devrait... dit-il d’un air blasé.
— Même s’il y est pour beaucoup dans le fait qu’on soit ici, on ne peut pas le laisser.
— Mais tu te rends compte ?! À cause de lui, on va perdre trois mois de notre vie à crapahuter dans un monde où les gens croient à la magie et aux mondes parallèles !
— On SAIT que les mondes parallèles sont vrais vu qu’on est justement dans l’un d’eux !
— Essayez de vous calmer. Vous disputer ne vous aidera en rien à vous ramener chez vous, dit l’aubergiste d’une voix impérieuse.
— Je sais, mais la situation est VRAIMENT grave et on a aucun plan pour rentrer chez nous rapidement ! dis-je énervée.
— Certes, mais vous avez tout de même un plan pour rentrer.
L’aubergiste me tendit alors la bague sertie d’une pierre verte. Je soupirais et allais la rendre à Aaron, il regarda l’objet avec colère mais remis tout de même l’anneau à son doigt. Je ne trouvais rien à ajouter, mon regard plongé dans le feu, j’essayais de chasser toute cette peur qui m’animait. Un drôle de sentiment s’instilla néanmoins à la place. Comme un sentiment de… curiosité ? Une part de moi se demandait, en effet, ce que pouvait bien receler ce monde magique, et je devais bien avouer que, j’avais assez envie de pouvoir répondre à cette question.
*
Nous avions fini par passer la nuit ici même. Dorian ne s’était éveillé que le lendemain. Il nous avait tous les deux regardés, s’était levé et avait inspecté tout autour de lui, en silence. Il était enfin revenu vers nous et avait plongé ses yeux charbon dans les miens tout en disant d’une voix grave :
— Explique-moi.
Je soupirais, puis me lançais dans une explication que j’espérais être claire. J’essayais de lui expliquer pourquoi nous étions là, et ce que nous devons faire pour rentrer chez nous. Il était concentré durant toute la durée de mes explications. À la fin, il esquissa un sourire et dit :
— C’est parfait !
— Comment ?! Qu’est-ce qui est parfait ? S’offusquait Aaron dont les yeux couleur feuille semblaient lancer des éclairs.
— D’être ici, vous vous rendez compte ? Un autre monde, on est dans un autre monde ! C’est génial ! Lança le blond avec un sourire immense.
— Comment peux-tu dire ça ?! C’est à cause de toi tout ça ! Vociféra Aaron mon meilleur ami.
— Et alors ? En quoi est-ce un mal ? J’ai juste envie de voyager et de voir tout ce que ce monde a à nous montrer.
— J’ai toujours dit que t’étais un crétin ! J’en reviens pas…
— Apprends un peu à rêver Aaron, ce monde recèle plein de choses que personne de chez nous n’a encore découvertes !
Si je ne connaissais pas aussi bien Aaron, j’aurais pensé qu’il s’apprêtait à massacrer Dorian. Je pouvais le comprendre, certes moi aussi j’étais curieuse de découvrir ce Nouveau Monde, mais je voulais surtout rentrer chez moi, ce qui ne semblait pas être le cas de notre ami blond. Avant que la situation ne dégénère vraiment, je décidais d’intervenir :
— Il faudrait qu’on se mette en route si on veut être de retour chez nous un jour.
— Oui, allons-y, dit Aaron en sortant.
Dorian haussa les épaules et regarda la petite bague qu’il avait au doigt. Une bague à l’anneau noir sertie d’une pierre rouge. Il souriait en la voyant.
— Je me demande ce qu’elle fait. Tu as déjà pu tester la bague que tu avais prise ? me demanda-t-il en marchant vers moi.
— Non, j’ai peur de ce que ça pourrait donner… On n’a pas la moindre idée du pouvoir qu’elle a…
— Je sais… Bon, suivons ton nigaud d’ami et…
Mais je le retiens par le bras alors qu’il allait poursuivre sa route. Je le regardais quelques instants dans les yeux avant de dire :
— Arrête de l’appeler comme ça, il a raison. C’est toi qui nous as mis dans cette situation, tu ne devrais certainement pas en être fier !
Je sortais alors, en quelques secondes il avait perdu son sourire. Une fois dehors, je vis que les habitants nous avaient non seulement apporté trois chevaux, mais en plus, des vêtements de rechange, des provisions et plusieurs cartes pour nous aider à nous repérer. Décidément, nous étions dans un autre monde mais nous étions tombés sur les gens les plus gentils que j’eus jamais rencontrés.
— Merci beaucoup pour tout ce que vous avez fait pour nous.
— De rien, c’est normal. Nous espérons que vous pourrez rentrer chez vous au plus vite. Nous dit la femme qui avait soigné Dorian.
Les mains dans les poches et affichant un air détaché, Dorian demanda alors à la cantonade :
— Nous verrons mais, savez-vous qui a créé ces bagues et comment elles sont arrivées dans notre monde ?
— Je ne sais pas jeune homme, c’est bien étrange en effet mais visiblement, la personne qui a créé ces bagues utilisait le pouvoir de l’une d’entre elles pour passer de notre monde au votre, répondit l’aubergiste qui tenait les rênes des trois chevaux.
— Oui en effet… D’autres bagues comme celle que nous avons existent-elles ?
Cette fois-ci, ce fut au tour de la guérisseuse de nous répondre. Elle parlait d’une voix calme et douce.
— Sûrement, ce monde contient de nombreux objets magiques, mais vos bagues sont particulièrement puissantes. Nous n’en avons jamais vu de telles avant…
— Eh bien… dit Dorian en regardant le joyau qu’il avait au doigt. Mais tout de même, les voyages entre mondes sont-ils si fréquents que ça ?
— Nous sommes des paysans et nous n’avons guère connaissance de tous les grands secrets magiques. Néanmoins, je pense ne pas me tromper en disant que c’est extrêmement rare, dit l’aubergiste.
La guérisseuse se rapprocha de nous tous afin de nous avertir, elle semblait bien s’y connaître en magie.
— Raison de plus pour être très prudents. Vous transportez avec vous trois objets d’une puissance immense. En temps normal, seuls de grands sages sont autorisés à porter de tels artefacts.
— Risque-t-on d’avoir des ennuis si jamais quelqu’un découvre qu’on possède ces bagues ? demandais-je, les sourcils froncés.
— Je ne pense pas, mais des personnes mal intentionnées pourraient vouloir s’en prendre à vous pour vous les dérober. N’utilisez pas trop ces pouvoirs en public, ou alors uniquement en cas d’extrême nécessité, répondit l’aubergiste.
— Bien, et quelle route nous conseillez-vous de prendre pour le début de notre voyage ?