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Une mort énigmatique au sommet du Tretorre captive l'imagination des petits villages corses voisins. L'enquête patine tandis que des événements inexpliqués se multiplient, laissant penser que la montagne défend farouchement son précieux secret millénaire. Naturellement mystérieuse, la Corse pourrait-elle détenir la réponse tant attendue ? Une réponse venue des étoiles qui remettrait en question notre solitude dans l'univers…
À PROPOS DE L'AUTEUR
Patrick Saintegen commence à composer dès l’âge de dix-sept ans. Après une carrière professionnelle en agence de publicité, il se dédie entièrement à l’écriture. Sa passion pour l’histoire et la science-fiction l’inspire à créer les aventures qu’il aurait souhaité lire, fusionnant ainsi ses deux centres d’intérêt avec un humour truculent.
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Patrick Saintegen
Tretorre
Le sanctuaire des étoiles
Roman
© Lys Bleu Éditions – Patrick Saintegen
ISBN : 979-10-422-1648-1
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À Charles,
Et à ma grand-mère qui a été la première à me soutenir, et qui malicieusement m’a donné le meilleur conseil que j’ai reçu, tandis qu’elle cuisinait des beignets de courgettes : « Patrick, attends d’avoir mon âge avant de penser que tu ne seras jamais édité ! »
De ce qu’un fait vous semble étrange, vous concluez qu’il n’est pas. Ce qui est puéril, c’est de se figurer qu’en se bandant les yeux devant l’inconnu, on supprime cet inconnu.
Victor Hugo
Derrière la grande baie vitrée, Serge Maestracci faisait de grands signes en direction des passagers qui commençaient à fouler le tarmac brûlant de l’aéroport d’Ajaccio.
Il n’était que neuf heures, mais la température en ce début juin était déjà étouffante. Malgré la proximité de la mer, l’air était sec, et aucune brise ne venait rafraîchir les passagers qui avançaient précipitamment pour échapper à une cuisson rapide qui semblait inéluctable.
Avec sa chevelure et ses yeux d’un noir d’encre, Serge renvoyait une image austère qui ne correspondait pas du tout à sa personnalité. Sa quarantaine à peine entamée laissait apparaître un embonpoint naissant, cadrant beaucoup mieux avec la bonhomie du personnage, et le bon vivant qu’il était.
Lorsque Ange Balboni fit son entrée dans la salle des bagages, les deux amis se congratulèrent énergiquement.
« Bienvenue au bercail ! s’exclama Serge. Et félicitations pour ta nomination. Je peux te dire que ça a fait du bruit au village. Nous y avons maintenant un physicien de génie.
Ainsi qu’un archéologue de renom, riposta Ange, en posant le doigt sur la poitrine de Serge. »
Ange Balboni, malgré son jeune âge, à peine trente-cinq ans, avait raté d’un cheveu le prix Nobel pour ses travaux de physique quantique. Ce petit blond trapu aux cheveux taillés en brosse et au regard d’un bleu pénétrant méritait bien le surnom de « clown génial » que lui avait donné son ami Pierre Vigreux.
Ce dernier se tenait un peu en retrait, amusé par ces retrouvailles bruyantes, qui passaient d’ailleurs complètement inaperçues parmi le brouhaha tout méditerranéen de l’aéroport.
« Serge, je te présente mon grand ami Pierre Vigreux. Tu sais, l’écrivain dont je t’ai parlé, avec qui j’ai vécu une aventure incroyable en Grèce1.
Désolé, je n’ai pas beaucoup le temps de lire, répliqua Serge, souriant. Mais bienvenue en Corse ! »
Les deux hommes se jaugèrent du regard en échangeant une solide et franche poignée de main.
« Je vous remercie, Serge, de nous avoir invités à suivre vos fouilles, Ange et moi.
On va peut-être pouvoir adopter le tutoiement, tu ne crois pas ? décréta l’archéologue, en posant amicalement la main sur l’épaule de Pierre. Ici, on n’est pas des bobos parisiens. On préfère la simplicité.
Ça me convient tout à fait, répondit ce dernier avec empressement. »
Les présentations, félicitations et autres remerciements effectués, ils purent récupérer les bagages avant de se diriger vers le parking où les attendait la Land Rover de Serge. Ange prit place à l’avant tandis que Pierre s’installait confortablement sur la banquette arrière.
La sortie d’Ajaccio fut assez pénible, car toute une série de travaux avait été décidée avant l’arrivée des touristes. Mais rapidement, le maquis reprit ses droits des deux côtés de la petite départementale, délivrant ainsi son flot de senteurs parfumées d’immortelles, de thym et de bruyères.
« J’espère que tu n’es pas malade en voiture, Pierre ? s’inquiéta Serge.
Parce que nous avons plus d’une heure de trajet pour arriver au village.
Pas de soucis pour moi, assura ce dernier. Mais je crois que ce n’est pas le cas de l’autochtone assis à ta droite.
C’est vrai ! reprit l’archéologue, hilare. J’avais oublié qu’Ange était toujours malade comme un chien, essentiellement ici d’ailleurs.
Oui, malade comme un chien, avoua l’intéressé qui commençait à ronchonner ferme. Peut-être même comme deux ! »
Toutes fenêtres ouvertes, ils entamèrent l’ascension du col de San Bastiano sur la route du littoral entre Ajaccio et Cargèse, et dominant le magnifique Golfe de Sagone.
« Ce ne sont pas les virages qui me rendent malade, poursuivit le physicien. Ce sont surtout les odeurs du maquis. Elles me rappellent les tisanes que me faisait ma grand-mère. Pour me faire vomir.
Dans un moment, c’est moi qui vais vomir si tu continues, prévint Pierre. »
Le sommet du col leur offrit une vue magnifique, où la mer s’étendait à perte de vue entre les montagnes ensoleillées. Pierre, admiratif, baissa également les yeux pour contempler les précipices.
« Bouh ! Il n’y a pas intérêt à rater un virage dans votre campagne. C’est un coup à entamer les tonneaux le premier janvier pour les finir à Noël. Maintenant que je connais vos routes de montagne, je comprends pourquoi vous klaxonnez à tout bout de champ.
C’est essentiel, approuva Serge en conduisant un bras dehors, un bras dedans, ce qui ne lassait pas d’inquiéter son passager. Le klaxon a été inventé pour prévenir d’un danger. La preuve, poursuivit-il en riant. Quand un couple se marie, tout le monde klaxonne ! À ce sujet, je m’attendais à vous voir accompagnés. Où sont ces dames ?
Quand elles ont su que nous n’allions pas au bord de la mer, elles ont préféré rester devant
Plus belle la vie
», plaisanta Ange. Nous ne les avons pas découragées d’ailleurs.
Per mumentu, simu tra amicu (pour le moment, nous sommes entre copains)
Les deux amis corses éclatèrent de rire en cœur, tandis que Pierre, qui n’avait rien compris, se demanda un instant si on ne se payait pas sa tête.
Serge Maestracci, lui, en véritable célibataire endurci, collectionnait bien quelques aventures par-ci, par-là, mais sa véritable passion, l’archéologie, dévorait quatre-vingt-dix pour cent de son temps. Les dix pour cent restants se résumant en un cocktail composé de copains, de maquis, de fusils et de sangliers.
Au bout d’une heure de virages démoniaques, Pierre, qui commençait à en avoir gros sur le cœur, vit apparaître les premières maisons du village tant espéré. Ce dernier, avec son église solidement perchée sur les contreforts de la montagne, semblait tenir lieu de bastion surveillant la vallée.
« Il était temps. Je commençais à avoir de la marmelade à la place de l’estomac !
À qui le dis-tu ! approuva Ange. »
Leur installation à l’hôtel « U Paese » fut rapide et facilitée par l’exquise courtoisie des propriétaires qui avaient été prévenus de leur arrivée par Serge. Après avoir pris possession de leurs chambres, Ange et Pierre rejoignirent ce dernier pour une visite traditionnelle qui débuta tout naturellement par le bistrot du village.
Lorsqu’ils y pénétrèrent, Charles, le patron, était de très mauvaise humeur. Il se trouvait donc dans un bon jour puisque d’ordinaire, il affichait une humeur massacrante. Une demi-douzaine de gamins venait d’ailleurs de détaler de l’établissement à toutes jambes.
« Ils ont bousillé mes machines à sous, les sales mômes ! Je ne sais pas comment ils se sont démerdés, parce qu’en principe, ces machines sont à l’épreuve de toutes les conneries ! Bon, qu’est-ce que je vous sers ? demanda-t-il, en servant un pastis à Serge.
La même chose pour tout le monde, répondit ce dernier, hilare. »
Ils trinquèrent avec entrain, tandis que Pierre se penchait discrètement vers son ami Ange.
« Il n’y aurait pas une carafe d’eau, juste par hasard ?
T’occupes ! L’eau ici, c’est les glaçons !
Parce qu’on ne peut pas dire qu’on m’ait servi une dose de nourrisson, quand même, poursuivit Pierre ».
Ancienhaltérophile reconverti dans les boissons alcoolisées, essentiellement anisées, Charles avait banni de son univers les pastis clairets. La moustache frémissante, il se servit également comme de coutume, afin d’accompagner les clients. Au bout d’une vingtaine d’années, cette technique avait fini par transformer son corps d’athlète en quelque chose de rondouillard que le côté grincheux rendait encore plus attachant. À soixante-dix ans, il était considéré comme une des vedettes du village.
À cette heure stratégique de l’apéritif, une autre vedette se profilait d’ailleurs à l’horizon, curé du village depuis plus de dix ans, le père Raspail était un solide gaillard des Pyrénées qui s’était plus que bien acclimaté à la région. Abonné à « Midi Olympique », il ne semblait voir que par Dieu et le rugby. Enfin, quand il était encore en état de voir quelque chose. Son temps libre de la semaine étant réservé à la visite quotidienne des fidèles, afin de leur rappeler l’heure de la messe dominicale, en buvant un petit pastis à l’occasion. Et les brebis égarées étaient nombreuses.
Il semblait donc ce midi avoir terminé sa tournée du village, et avançait aussi vite qu’un mulet traité au valium, ne sachant pas très bien s’il devait aller à droite ou à gauche.
« Avec tout ce qu’il s’enfile comme pastis, je m’étonne qu’il ne soit pas encore confit, lança un client, tandis que le prêtre prenait possession de sa place attitrée en terrasse.
Faite attention à vous, monsieur le curé, enchaîna Charles, rigolard. Un jour, vous allez oublier votre cervelle dans un verre ballon, et les paroles de la messe avec !
Mon cher, répondit l’intéressé, je fais tous les jours à pied un trajet que vous auriez la flemme de faire en voiture. La vie m’a appris qu’un corps sain était nécessaire si on voulait continuer à vivre dedans. La cervelle, ça reste ou ça s’en va tout seul après, on n’y peut rien. Servez-moi donc un petit remontant ! »
Le reste de la journée fut une présentation d’amis ininterrompue qui présentèrent à leur tour les leurs. Et tout ce beau monde s’en alla dîner dans une pizzeria improbable, perchée au sommet de la montagne qui surplombait le village.
« Finfin », le patron, les accueillit fort aimablement avant de leur servir ses succulentes pizzas d’une saveur inégalée, sous un incomparable ciel étoilé.
« C’est magnifique ! s’extasia Pierre, admiratif. On se croirait sous la Géode. En beaucoup mieux bien sûr.
Tout à fait d’accord, acquiesça Serge, en se servant un verre de “Patrimonio”. Mais en ce qui me concerne, je suis impatient de vous faire visiter mes fouilles. J’ai bon espoir de faire d’importantes découvertes sur ce site. »
Les évènements à venir allaient les occuper bien autrement !
****
Le lendemain midi, chez Charles, à l’heure du pastis, une certaine effervescence régnait parmi les clients. Comme souvent, des touristes s’étaient perdus en montagne et les conversations allaient bon train. Certains se plaignaient que tout cela allait encore coûter de l’agent à la collectivité, tandis que d’autres proposaient qu’on laisse les imprudents se faire dévorer par les cochons dans le maquis, ce qui réglerait le problème.
Les tournées de pastis s’accéléraient, suivant ainsi le rythme du débat qui montait en puissance. C’est ce moment que choisirent un adjudant de gendarmerie et son brigadier pour faire leur entrée dans le bistrot.
Charles, la moustache frémissante, les fixa comme s’il s’agissait de grosses mouches à merde tombées dans son bol de café au lait.
« Qu’est-ce que vous venez foutre encore ici ? demanda-t-il avec énervement. Vous avez décidé de faire une apparition toutes les semaines pour couler mon établissement ? Vous pouvez y aller. Contrôlez les vignettes de mes bouteilles jusqu’à plus soif, si vous le désirez. Je m’en fous. Je suis en règle !
Désolé de vous décevoir, mais nous ne sommes pas là pour ça, Charles. Nous savons très bien, d’ailleurs, que nous ne trouverions rien. De ce point de vue, votre dossier est formel. Vous êtes une foutue fripouille rompue à toutes les pirouettes administratives.
Mais absolument pas ! s’indigna le limonadier, l’air outré et merveilleusement innocent. J’ai toujours suivi la loi à la lettre. Cette vacherie de loi qui change tous les trente-six du mois pour prendre en défaut les honnêtes commerçants comme moi.
N’en faites pas trop, poursuivit le militaire. Servez-nous donc deux
Orezza
2
bien fraîches. Nous avons eu une matinée difficile. »
Par l’entremise des gendarmes, le jour se fit sur les derniers évènements. Selon eux, trois randonneurs arrivaient au sommet du « Tretorre » lorsque l’un d’eux se prit la jambe dans un trou extrêmement étroit de la roche. Après plusieurs essais infructueux pour dégager leur ami, et ce dernier semblant souffrir énormément, ils se décidèrent à trouver de l’aide. L’un d’eux redescendit vers le village de Guagno, où il tomba par hasard sur les deux gendarmes qui effectuaient leur ronde dans le canton. Ces derniers organisèrent les secours avec l’aide de quelques villageois, et tout ce beau monde entama la remontée vers le lieu de l’accident.
Ils n’eurent d’ailleurs aucun mal à le trouver, tant le malheureux hurlait à fendre l’âme, criant que sa jambe était en train de brûler.
« Nous l’avons transporté chez le docteur Franceschetti qui est en vacances dans sa maison de Guagno-les-Bains, poursuivit l’adjudant de gendarmerie. Ce dernier l’a descendu immédiatement à l’hôpital d’Ajaccio, bien qu’il ne lui ait rien trouvé. Le malheureux hurlait comme s’il avait le corps en feu !
Toussaint Franceschetti est un ami d’enfance, dit Serge en s’adressant à Pierre. Avec Ange, nous étions tous les trois internes au lycée Fesch d’Ajaccio. Nous apprendrons sûrement le fin mot de cette histoire de sa propre bouche. »
Les trois amis s’étaient installés dans un coin de la salle, face au bar. Pierre, quant à lui, écarquillait les yeux devant la scène surréaliste qui se déroulait devant lui.
Le vieux Mathieu, qui ronchonnait depuis un moment dans son coin, et ne comptait plus les pastis de la matinée, s’en prit soudainement aux gendarmes.
« Regardez-moi ça ! Pour une fois qu’ils servent à quelque chose, les voilà qui vont raconter leurs exploits dans tout le canton !
Pardon ? sursauta l’adjudant, piqué au vif, et qui en avait avalé son eau pétillante de travers. Si j’étais vous, je me ferais discret, père Mathieu. Après vos frasques de la semaine dernière.
Si je veux, reprit l’autre, un tantinet embrumé. Là, je suis tranquillement assis, vous ne pouvez rien me faire. Il ne manquerait plus que ça ! Savez-vous comment ils opèrent, les gendarmes, maintenant ? poursuivit-il, s’adressant à qui voulait l’entendre. Ils ont de nouveaux sifflets qui ne sifflent pas. C’est un nouveau modèle. Ils soufflent dedans. Toi, tu n’entends pas et hop ! Contravention ! »
« Dites donc, s’énerva le gendarme, vous savez pourquoi je vous ai verbalisé ?
Il ne manquait plus que ça, un flic amnésique !
Vous avez dépassé les cinquante en plein centre de Vico…
Dépassé les cinquante, elle est bien bonne celle-là ! j’en ai plus de quatre-vingts. Vous n’avez rien d’autre à foutre que de vous occuper de mon âge ?
Vous étiez sous l’emprise de la boisson. Vous n’avez eu que ce que vous méritiez. Et heureusement pour vous que vous n’êtes pas au volant à cet instant, car votre compte serait enfin réglé. »
Le vieux Mathieu, qui ne s’en laissait pas compter, se leva alors pour trinquer en s’adressant à tous les clients du bar.
« Mes amis… à partir de ce jour, sachez que vous avez tous le droit de refuser un contrôle d’alcoolémie pratiqué par la police ou la gendarmerie ! Décret numéro 2020-7 paru au journal officiel du 2 janvier 2020 : En effet, il y a risque de contamination de l’embout par la grippe aviaire, car ces contrôles sont effectués par des poulets en plein air dont les heures de sortie ne sont pas maîtrisées ! »
Les deux gendarmes finirent leurs verres d’un trait et sortirent en maugréant quelques onomatopées où il était question d’alcool et de vieux grigous alcooliques.
Sur cette entrefaite, le docteur Franceschetti apparut dans le bar, et après un rapide coup d’œil, fit signe à Serge et ses amis de le rejoindre en terrasse.