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" Une dame que j'avais aimée longtemps et que j'appellerai du nom d'Aurélia, était perdue pour moi. Peu importent les circonstances de cet événement qui devait avoir une si grande influence sur ma vie. Chacun peut chercher dans ses souvenirs l'émotion la plus navrante, le coup le plus terrible frappé sur l'âme par le destin ; il faut alors se résoudre à mourir ou à vivre : - je dirai plus tard pourquoi je n'ai pas choisi la mort. " A la différence du narrateur, Nerval choisit la mort un jour de janvier 1855, laissant Aurélia inachevé. Le récit, qui ne dissocie pas le rêve et la vie mais au contraire les réunit - c'est son sous-titre -, affirme la quête de l'unité perdue par un Je qui raconte et commente tour à tour l'expérience qu'il entend dépasser dans une harmonie retrouvée.
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Gérard de Nerval est né le dimanche 22 mai 1808, au 168 rue Saint-Martin à Paris. Deux ans plus tard, sa mère meurt en Silésie alors qu’elle accompagnait son mari, médecin militaire de la Grande armée napoléonienne. Il est élevé par son grand-oncle maternel, Antoine Boucher, dans la campagne du Valois à Mortefontaine. Installé à Paris en 1814, lors du retour de son père, il reviendra régulièrement dans ces lieux évoqués dans nombre de ses nouvelles. Encore lycéen, il se signale par ses traductions de Faust (1828), puis d'Hoffmann et d'autres œuvres de Goethe, qui ont longtemps gardé la réputation de compter parmi les meilleures qui soient. La première de celles-ci, simplement signée « Gérard », paraît en novembre 1827 et ne porte que sur la première partie du chef-d’œuvre, la seule connue alors. Goethe apprécia grandement le travail, allant jusqu’à dire qu’il aurait écrit sa pièce ainsi s’il avait dû l’écrire en français. Le compositeur Hector Berlioz s’en inspirera pour son opéra la Damnation de Faust. Nerval se lie d’amitié avec Théophile Gautier, Victor Hugo et Alexandre Dumas. Avec Petrus Borel, il devient l'un des premiers membres des "Jeunes-France". Il soutient activement Hugo lors de la bataille d’Hernani déclenchée le 25 février 1830 au cours de sa première représentation. En 1835, il s’installe rue du Doyenné chez Camille Rougier où tout un groupe de romantiques s’y retrouve. En 1846, il s’installe au "Château des brouillards" de Montmartre. Il décrira cette époque dans un ouvrage sur le théâtre contemporain qui paraîtra en 1852. En 1836, il s'éprend de l’actrice Jenny Colon qui ne le lui rend pas. Il lui voue un culte idolâtre même après la mort de celle-ci : figure de la Mère perdue, mais aussi de la Femme idéale où se mêlent, dans un syncrétisme caractéristique de sa pensée, Marie, Isis, la reine de Saba… À partir de 1841, il connaît plusieurs crises de démence qui le conduisent à la maison de santé du docteur Blanche. Ses séjours dans cet établissement alternent avec des voyages en Allemagne et au Moyen-Orient. Son Voyage en Orient paraît en 1851. Il affirme dans une lettre au docteur Blanche datée du 22 octobre 1853, avoir été initié aux mystères druzes lors de son passage en Syrie, où il aurait atteint le grade de « refit », l’un des plus élevés de cette confrérie. Toute son œuvre est fortement teintée d’ésotérisme et de symbolisme, notamment alchimique. Entre 1844 et 1847, Nerval voyage en Belgique, en Hollande, à Londres… et rédige des reportages et impressions de voyages. En même temps, il travaille comme nouvelliste et auteur de livrets d’opéra ainsi que comme traducteur des poèmes de son ami Heinrich Heine (recueil imprimé en 1848). Nerval vit ses dernières années dans la détresse matérielle et morale. C'est à cette période qu'il écrira ses principaux chefs-d’œuvre, réalisés pour se purger de ses émotions sur les conseils du docteur Blanche : les Filles du feu, Aurélia ou le rêve et la vie (1853-1854). Le 26 janvier 1855, on le retrouva pendu aux barreaux d'une grille qui fermait un égout de la rue de la Vieille-Lanterne, dans le « coin le plus sordide qu’il ait pu trouver », selon la formule de Baudelaire. Ses amis émirent l'hypothèse d'un assassinat perpétré par des rôdeurs, au cours d'une de ses promenades habituelles dans des lieux mal famés, mais il s'est certainement suicidé. Toutefois le doute subsiste car il fut retrouvé avec son chapeau sur la tête alors qu'il aurait normalement du tombé du fait de l'agitation provoquée par la strangulation. On retrouva une lettre dans laquelle il demandait 300 Francs, somme qui, selon lui, aurait suffit pour survivre durant l'hiver. La cérémonie funéraire eût lieu à la cathédrale de Notre-Dame de Paris, cérémonie religieuse qui lui fut accordée malgrés son suicide présumé du fait de son état mental. Théophile Gautier et Arsène Houssaye payèrent pour lui une concession au cimetière du Père-Lachaise.
Le Rêve est une seconde vie. Je n'ai pu percer sans frémir ces portes d'ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible. Les premiers instants du sommeil sont l'image de la mort; un engourdissement nébuleux saisit notre pensée, et nous ne pouvons déterminer l'instant précis où le , sous une autre forme continue l'oeuvre de l'existence. C'est un souterrain vague qui s'éclaire peu à peu et où se dégagent de l'ombre et de la nuit les pâles figures gravement immobiles qui habitent le séjour des limbes. Puis le tableau se forme, une clarté nouvelle illumine et fait jouer ces apparitions bizarres; - le monde des Esprits s'ouvre pour nous.
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