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Gérard par sa faute vient de perdre Jenny, qu'il s'appelle désormais Aurélia. Il porte en lui une image qui, nuit et jour, le hante. Un soir il croit distinguer son fantôme puis pendant son sommeil aperçoit un être mystérieux qui voltige péniblement. Cette hallucination est l'un des signes précurseurs de sa crise qui éclate en 1841. Au cours de cette crise commence l'épanchement dans la vie réelle. Il se croit transporté dans une maison Rhénane, puis dans les rues d'une ville mystérieuse et enfin chez son oncle à Mortefontaine. Cela lui fait croire que rien ne s'achève dans ce monde et qu'il existe un refuge aux espérances déçues. Il apprend bientôt la mort d'Aurélia qu'il divinise en imagination. Puis en 1851 dans un nouveau rêve il voit surgir un esprit qui lui ressemble, un double et il croit qu'il vient lui enlever Aurélia. Il provoque un scandale à son réveil. Inquiétude entre le songe et la vie réelle. Et si ce double venait lui reprendre Aurélia pour le punir d'avoir idolâtréAurélia, définitivement perdue.Mais une nuit il a une nouvelle illumination : la déesse de ses rêves lui apparaît et lui dit "je suis la même que ta mère, la même que sous toutes les formes tu as toujours aimée". Puisque qu'Aurélia s'identifie avec sa mère et avec la vierge Chrétienne, il a pu l'aimer et le salut demeure possible. Ainsi rassuré, son zèle se transforme en pitié fraternelle. Dans un dernier rêve Aurélia enfin retrouvée brille pour lui au firmament.
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Gérard de Nerval est né le dimanche 22 mai 1808, au 168 rue Saint-Martin à Paris. Deux ans plus tard, sa mère meurt en Silésie alors qu’elle accompagnait son mari, médecin militaire de la Grande armée napoléonienne. Il est élevé par son grand-oncle maternel, Antoine Boucher, dans la campagne du Valois à Mortefontaine. Installé à Paris en 1814, lors du retour de son père, il reviendra régulièrement dans ces lieux évoqués dans nombre de ses nouvelles. Encore lycéen, il se signale par ses traductions de Faust (1828), puis d'Hoffmann et d'autres œuvres de Goethe, qui ont longtemps gardé la réputation de compter parmi les meilleures qui soient. La première de celles-ci, simplement signée « Gérard », paraît en novembre 1827 et ne porte que sur la première partie du chef-d’œuvre, la seule connue alors. Goethe apprécia grandement le travail, allant jusqu’à dire qu’il aurait écrit sa pièce ainsi s’il avait dû l’écrire en français. Le compositeur Hector Berlioz s’en inspirera pour son opéra la Damnation de Faust. Nerval se lie d’amitié avec Théophile Gautier, Victor Hugo et Alexandre Dumas. Avec Petrus Borel, il devient l'un des premiers membres des "Jeunes-France". Il soutient activement Hugo lors de la bataille d’Hernani déclenchée le 25 février 1830 au cours de sa première représentation. En 1835, il s’installe rue du Doyenné chez Camille Rougier où tout un groupe de romantiques s’y retrouve. En 1846, il s’installe au "Château des brouillards" de Montmartre. Il décrira cette époque dans un ouvrage sur le théâtre contemporain qui paraîtra en 1852. En 1836, il s'éprend de l’actrice Jenny Colon qui ne le lui rend pas. Il lui voue un culte idolâtre même après la mort de celle-ci : figure de la Mère perdue, mais aussi de la Femme idéale où se mêlent, dans un syncrétisme caractéristique de sa pensée, Marie, Isis, la reine de Saba… À partir de 1841, il connaît plusieurs crises de démence qui le conduisent à la maison de santé du docteur Blanche. Ses séjours dans cet établissement alternent avec des voyages en Allemagne et au Moyen-Orient. Son Voyage en Orient paraît en 1851. Il affirme dans une lettre au docteur Blanche datée du 22 octobre 1853, avoir été initié aux mystères druzes lors de son passage en Syrie, où il aurait atteint le grade de « refit », l’un des plus élevés de cette confrérie. Toute son œuvre est fortement teintée d’ésotérisme et de symbolisme, notamment alchimique. Entre 1844 et 1847, Nerval voyage en Belgique, en Hollande, à Londres… et rédige des reportages et impressions de voyages. En même temps, il travaille comme nouvelliste et auteur de livrets d’opéra ainsi que comme traducteur des poèmes de son ami Heinrich Heine (recueil imprimé en 1848). Nerval vit ses dernières années dans la détresse matérielle et morale. C'est à cette période qu'il écrira ses principaux chefs-d’œuvre, réalisés pour se purger de ses émotions sur les conseils du docteur Blanche : les Filles du feu, Aurélia ou le rêve et la vie (1853-1854). Le 26 janvier 1855, on le retrouva pendu aux barreaux d'une grille qui fermait un égout de la rue de la Vieille-Lanterne, dans le « coin le plus sordide qu’il ait pu trouver », selon la formule de Baudelaire. Ses amis émirent l'hypothèse d'un assassinat perpétré par des rôdeurs, au cours d'une de ses promenades habituelles dans des lieux mal famés, mais il s'est certainement suicidé. Toutefois le doute subsiste car il fut retrouvé avec son chapeau sur la tête alors qu'il aurait normalement du tombé du fait de l'agitation provoquée par la strangulation. On retrouva une lettre dans laquelle il demandait 300 Francs, somme qui, selon lui, aurait suffit pour survivre durant l'hiver. La cérémonie funéraire eût lieu à la cathédrale de Notre-Dame de Paris, cérémonie religieuse qui lui fut accordée malgrés son suicide présumé du fait de son état mental. Théophile Gautier et Arsène Houssaye payèrent pour lui une concession au cimetière du Père-Lachaise.
Le Rêve est une seconde vie. Je n'ai pu percer sans frémir ces portes d'ivoire ou de corne qui nous séparent du monde invisible. Les premiers instants du sommeil sont l'image de la mort; un engourdissement nébuleux saisit notre pensée, et nous ne pouvons déterminer l'instant précis où le moi, sous une autre forme continue l'oeuvre de l'existence. C'est un souterrain vague qui s'éclaire peu à peu et où se dégagent de l'ombre et de la nuit les pâles figures gravement immobiles qui habitent le séjour des limbes. Puis le tableau se forme, une clarté nouvelle illumine et fait jouer ces apparitions bizarres; - le monde des Esprits s'ouvre pour nous.
Swedenborg appelait ces visions Memorabilia; il les devait à la rêverie plus souvent qu'au sommeil. L'Ane d'or d'Apulée, la Divine Comédie du Dante, sont les modèles poétiques de ces études de l'âme humaine. Je vais essayer, à leur exemple, de transcrire les impressions d'une longue maladie qui s'est passée tout entière dans les mystères de mon esprit; - et je ne sais pourquoi je me sers de ce terme maladie, car jamais, quant à ce qui est de moi-même, je ne me suis senti mieux portant. Parfois, je croyais ma force et mon activité doublées; il me semblait tout savoir, tout comprendre; l'imagination m'apportait des délices infinies. En recouvrant ce que les hommes appellent la raison, faudra-t-il regretter de les avoir perdues?…
Cette Vita nuova a eu pour moi deux phases. Voici les notes qui se rapportent à la première. - Une dame que j'avais aimée longtemps et que j'appellerai du nom d'Aurélia, était perdue pour moi. Peu importe les circonstances de cet événement qui devait avoir une si grande influence sur ma vie. Chacun peut chercher dans ses souvenirs l'émotion la plus navrante, le coup le plus terrible frappé sur l'âme par le destin; il faut alors se résoudre à mourir ou à vivre: - je dirai plus tard pourquoi je n'ai pas choisi la mort. Condamné par celle que j'aimais, coupable d'une faute dont je n'espérais plus le pardon, il ne me restait qu'à me jeter dans les enivrements vulgaires; j'affectai la joie et l'insouciance, je courus le monde, follement épris de la variété et du caprice; j'aimais surtout les costumes et les moeurs bizarres des populations lointaines, il me semblait que je déplaçais ainsi les conditions du bien et du mal; les termes, pour ainsi dire, de ce qui est sentiment pour nous autres Français. - Quelle folie, me disais-je, d'aimer ainsi d'un amour platonique une femme qui ne vous aime plus. Ceci est la faute de mes lectures; j'ai pris au sérieux les inventions des poètes, et je me suis fait une Laure ou une Béatrix d'une personne ordinaire de notre siècle… Passons à d'autres intrigues, et celle-là sera vite oubliée. - L'étourdissement d'un joyeux carnaval dans une ville d'Italie chassa toutes mes idées mélancoliques. J'étais si heureux du soulagement que j'éprouvais, que je faisais part de ma joie à tous mes amis, et dans mes lettres, je leur donnais pour l'état constant de mon esprit, ce qui n'était que surexcitation fiévreuse.