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En tant que romancière réaliste,
Elisabeth Giordano compose cette biographie particulière qui mêle témoignages et réflexions personnelles sur le sens de la vie. Le lecteur découvre ainsi un personnage en quête permanente de bonheur et d’évolution. Construisant ses principes sur le chemin des penseurs tels que Edouard Schuré et Lao Tseu, elle aborde avec virtuosité des sujets existentiels ou anecdotiques qui invitent à vivre pleinement l’instant présent.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Toute petite,
Elisabeth Giordano questionne l’existence et pose un regard intimiste sur l’essence divine. Une fois adulte, elle se passionne pour les écrits et la musique de Richard Wagner. Ses nombreuses lectures la conduisent à écrire des textes tels que Sophia Galactica, le jeune dieu, publié en 2010 par Atramenta et Moi, Petit H, confidences et réflexions d’un atome d’hydrogène, édité par Noun Éditions en 2023.
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Elisabeth Giordano
La vie est multiple et infinie,
commence à vivre !
Roman
© Lys Bleu Éditions – Elisabeth Giordano
ISBN : 979-10-422-2404-2
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Remerciements à Patricia,
À toutes les âmes en recherche…
Lorsqu’un homme élevé entend la Voie,
Il l’embrasse avec zèle.
Lorsqu’un homme moyen entend la Voie,
Il l’écoute et l’oublie.
Lorsqu’un homme grossier entend la Voie,
Il éclate de rire.
La Voie, s’il ne riait, ne serait pas la Voie.
Lao-Tseu
Conscience : apprendre, savoir, connaître, être, vivre… le dire, l’écrire, le crier, le hurler, l’arracher de soi et puis se taire… Rien… Il n’y a rien… Rien que ce rayon de soleil qui m’enveloppe, me protège, me réchauffe, me pénètre, me réconcilie… Rien que le sol, souple et doux, ou dur et rugueux ; rien que le vent qui me souffle que mon corps est bien, ici et maintenant, et qu’il serait bien que j’y sois aussi ; rien que cette fleur et cette abeille pour me rappeler que la vie est douce, structurée, colorée, odorante, chantante, émouvante, dansante, laborieuse, émerveillante, cette émotion pour me dire que je l’aime… et reprendre mon souffle !
Non pas encore, être… être le soleil, le vent, la fleur et l’abeille. Si c’est facile ! Être doucement le vent chaud qui embaume mes ailes et mon petit corps fragile, être doucement affairée, enivrée de pollen, « pénétrer-être » la fleur offerte, brillante et tiède, m’abandonner dans l’air vibrant, ivre d’amour, recevoir et donner la précieuse semence avec délicatesse.
Oui, vivre ! En voilà une aventure ! Mais qui « vit » ? Je n’ai encore rencontré personne de vraiment vivant ! Et quand on a un petit bout de soi un peu différent, il faut bien le cacher pour ne pas le montrer aux autres, à ceux qui jouent avec application le rôle pour lequel ils ont été assignés. Un Être humain, un vrai, un authentique, un seul, juste pour le voir, pour l’entendre, peut-être, s’en faire un modèle, pour qu’elle/il donne un mode d’emploi de la vie, un véritable mode d’emploi, pas des faux comme ceux répandus par la société, les religions, les familles, les clans politiques, les banquiers… Non ! Juste comment faire pour être complètement en vie, et « rentrer chez soi ». Les vieux modèles, usés et éculés jusqu’à la corde sont toujours ceux qui font référence, ils sont devenus des « Dieux » complètement morts, dommage, je les aurais préférés vivants ! Un Être humain, un seul, vivant sur cette terre ! Pauvre fou, tu serais immédiatement réduit au silence, car il ne faut montrer que ce qui est mort ou source de mort, surtout ne pas faire apparaître la moindre once de vie.
J’étais une âme encore jeune qui s’imagine avoir besoin d’un modèle, un maître. Comme je n’en ai pas trouvé, c’est que je ne devais pas en avoir besoin…
Alors ? Alors, vivre, bien sûr, vivre en pointillés, entre les morts et les temps morts, le mors aux dents, en état de mort apparente. Et entre tout cela, exploser de vie… dans un angle mort !
Et j’écris comme je vis, un petit brouillon, très brouillon, quelques mots pour ne rien dire, un brin de rien, un zeste de nuage, une perle de lumière, un soupçon d’inconscience, un raz de marée d’émotion, de Compassion, d’Amour…
Et voilà un bon moment que je joue l’équilibriste sur le fil aiguisé de ma sensibilité, tendue comme une corde de violon prête à se rompre. Combien de gammes ai-je encore à parcourir ? Pourrai-je apprendre et transmettre quelque chose ? Ma pensée arrêtera-t-elle un jour de jouer les tornades autour de mon précaire équilibre ? Je rêve d’un ciel sans nuage, limpide, transparent, cristallin, brillant, et de moi devenu vacuité.
En attendant d’y être, je suis malheureusement quelque chose et le pire de tout, un quelque chose de « pensant ». La pensée, hélas ! Pourquoi ? L’homme « pense », on voit le résultat ! L’homme se souvient et comme l’a dit Prévert :
Tout ce qui est mort dans leurs têtes
Pour rien au monde ils ne voudraient l’enlever
Parce que
Dans leurs têtes
Pousse la fleur sacrée
La sale maigre petite fleur
La fleur malade
La fleur aigre
La fleur toujours fanée
La fleur personnelle
… La pensée…
Les Orientaux, ça les fait (ou plutôt les faisait) sourire, car ils ont perdu tout cela ! Pendant des siècles, ils ont cultivé l’art de « non penser ». C’est vrai ! Le fameux Penseur de Rodin, tendu, soucieux, n’inspire ni le calme ni la sérénité qu’aurait dû lui apporter notre super technologie alors naissante ! Mais finalement, existe-t-il une portion du monde en profonde harmonie ? Où trouver un semblant d’équilibre, équilibre, tout simplement, acrobatiquement indiscipliné et précairement fugitif, à n’en pas douter !
Et un jour je suis née… mais ce n’était pas le premier ! Pas le premier ? Certainement, oui, le premier jour de cette vie-ci, mais un jour comme un autre où une grande majorité, surtout en Occident, pense qu’il n’y a que le premier et le dernier. Est-ce pour autant un début et une fin définitive, ou simplement une longue continuité, un va-et-vient incessant entre naissance et mort ? Il y aurait, dit-on, un premier jour pour tout : la première bactérie, le premier et le dernier souffle, la première dent, les premiers pas, le premier homme, la Première Guerre, la première conscience… Les êtres humains n’en finissent pas de compter, classifier, déclarer, etc., et du coup ils en oublient de vivre, englués qu’ils sont dans leurs certitudes. J’ai tendance à penser que la vie n’est faite que de hasards, c’est simplement ce que nous en faisons ensuite qui peut nous faire croire qu’il n’existe pas ; la physique quantique ne dit pas autre chose !
Alors, un jour, j’ai décidé de chercher, parce que précisément, depuis ce que je pensais être le fameux « premier jour » pour moi, je me demandais ce que je faisais ici ! Oui, dans ce monde-là ! Que me souhaitait-on personnellement ce même jour qui revenait immanquablement avec un an de plus ?
C’est le récit de cette quête que j’invite le lecteur à partager, puisse-t-il en apprendre quelque chose pour sa propre évolution. Je reprends donc des textes écrits à cette époque, il y a plus de trente-cinq ans. Il s’agit du récit de mes expériences et « voyages » dans les zones les plus reculées de ma conscience, et ce récit, avec le recul, me fait parfois sourire.
J’ai donc appelé « Témoignages », des extraits relatant les voyages que j’ai pu effectuer dans ce que l’on appelle « les vies antérieures », et qui bien sûr ont eu un retentissement sur ce que je suis devenue ; il est vraisemblable que je ne serais pas tout à fait la même sans ces expériences ! Le chemin ne fut pas facile, je m’en rends compte en parcourant ces lignes ; je ne m’étendrai pas outre mesure sur mes états d’âme qui ne présentent aucun intérêt, parce que d’une affligeante banalité (c’est ce que j’appelle les « histoires humaines ordinaires », sujets pourtant favoris de beaucoup de gens).
L’instant présent est dans le défilement d’un temps qui peut, selon les circonstances, donner une impression de longueur ou de furtivité selon ce que l’on est en train de vivre. Une fois dans le passé et devenu souvenirs, il se passe une sorte de contraction, d’aplatissement du temps, et ce qui avait pu nous paraître une interminable attente s’aplatit comme une crêpe ! Et dans le cas contraire, si un moment d’extrême bonheur fut vraiment trop court à notre goût, notre souvenir va lui permettre de reprendre le volume, la dimension dans laquelle nous aurions voulu rester une éternité.
Mais le temps existe-t-il ? Oui, juste pour nous, et il commence à se dérouler à notre incarnation. C’est un peu comme si nous tombions à notre naissance dans de petites bulles qui déploient le temps devant nous pour le compacter derrière, bulles dans lesquelles nous tournons comme un poisson dans son bocal, pour ressortir exactement au même endroit par l’étroite encolure si nous n’avons rien appris durant notre vie, et revenir au même point, encore et encore… Et selon notre état d’âme : il vaut mieux ne pas se complaire (ça plaît au con ?) dans les lamentations, dépressions et autres burnout ! Si nous sommes déjà dans une certaine sagesse, chaque épreuve franchie devrait nous grandir en ouvrant considérablement notre champ de vision à la découverte d’autres paysages…
On parle beaucoup de NDE, ou EMI, Expérience de Mort Imminente. D’aucuns diront que les « expérienceurs » n’étaient pas vraiment morts, puisqu’ils sont revenus à la vie ! Soit, mais au cours des siècles, il est facile de retrouver de tels témoignages, tant dans la peinture que dans la littérature et même la musique. Les techniques de réanimation permettent maintenant à un nombre croissant de personnes de faire une telle expérience. Le premier à avoir vraiment étudié ce phénomène, et surtout à l’avoir diffusé au grand public, est le docteur Moody dans son livre « La vie après la vie » paru en anglais en 1975, et en français en 1977. Si les premières personnes à parler de ce vécu si particulier passaient pour des « allumées » ayant mal supporté leur réanimation, l’afflux des témoignages donne maintenant de plus en plus de crédit à ces expériences dont on peut facilement tracer un plan commun. Mon but n’est pas là, ne l’ayant pas moi-même vécu de cette manière, mais c’est très bien documenté et il est maintenant facile de les trouver sur Internet. Je voulais juste préciser certaines choses, pour les sceptiques qui pensent qu’il n’y a pas de preuves « scientifiques ». En effet :
que des centaines de milliers de rapports sur ce sujet de la part de personnes n’ayant aucun intérêt particulier (si ce n’est de passer pour « dérangées »), n’est pas une preuve scientifique,
que la mort, pour les « expérienceurs », n’est plus effrayante, que la peur disparaît et leur conception de la vie (et de la mort) change complètement, n’est pas une preuve scientifique,
que les quelques expérienceurs ayant une vie malfaisante qui trouvent une sorte « d’enfer » de l’autre côté, changent complètement leur façon de vivre, n’est pas une preuve scientifique,
que les expérienceurs, revenant avec ce genre de souvenir d’une tentative de suicide, ne réitèrent jamais leur geste, comprenant que ce qu’ils cherchent à fuir sur terre n’est pas pour autant réglé et s’est même plutôt aggravé de l’autre côté, n’est pas une preuve scientifique,
que les personnes, après une brève incursion de « l’autre côté », ne rencontrent que des personnes mortes (contrairement aux rêves ordinaires, où morts et vivants se mélangent allégrement), même si elles ne savent pas que celles-ci sont mortes. Dans un accident familial, certains meurent sur le coup et bien souvent, ceux qui sont sauvés ne sont pas au courant du décès de leurs proches et les rencontrent de « l’autre côté » au cours de leur brève incursion avant d’être réanimés n’est pas une preuve scientifique.
Le célèbre témoignage de Pamela Reynolds, jeune Américaine opérée d’un grave anévrisme dont l’expérience de mort imminente s’est déroulée alors que son électroencéphalogramme était complètement plat et son corps à une température de 15° pendant plusieurs heures, n’est pas une preuve scientifique.
Qu’un nombre croissant de scientifiques, et surtout de médecins, prennent très au sérieux le phénomène, n’est pas une preuve scientifique, alors en effet, laissons les sceptiques à leur scepticisme un peu cynique, et tentons de voir comment il est possible d’apporter encore un peu plus d’eau au moulin qui commence vraiment à agiter ses pales.
Nous nous heurtons à une « science » dure qui a remplacé les évangiles (qui n’ont que le mérite de prendre en compte un certain irrationnel et de positionner l’être humain au cœur de la création), sans aucun horizon spirituel et totalement hermétique à toute expérience qui sort de sa « sainte » rationalité. Il faut « croire » en la science, sinon vous êtes, soit un allumé bon pour l’asile psychiatrique, soit un complotiste !
Ceci n’est encore qu’un témoignage, mais pour mon compte personnel, j’ai fait le voyage dans l’autre sens. Et il corrobore ce que vivent les expérienceurs ! Ce n’est donc pas après la vie que je suis allée dans cet « au-delà », mais avant, avant ma naissance, ma gestation, ma conception, et comme nous allons le voir, avec quelques passages entre deux vies…
Grandir physiquement, cela se fait tout seul, grandir en discernement, en conscience, en sagesse est une tout autre paire de manches. Alors, passons sur l’adolescence qui est rarement le meilleur, sauf exception, et arrivons au stade de la maturité, quand on a voulu ressembler aux autres, rentrer dans le cinéma de la vie sans vraiment y parvenir ; ce ne sont que de banales histoires humaines ordinaires, qui pour mon compte ne me passionnent guère…
Le déroulement du récit sera simplement ponctué de commentaires récents écrits de ce caractère-ci, ainsi que la fin et toujours précédés !
Ouverture
La vie ! Pourquoi, comment ? Interrogations qui semblent avoir taraudé nombre d’êtres humains depuis des temps immémoriaux. Que de tentatives de réponses n’ont-elles pas été proposées à une humanité en quête de vérité ? Et cette Vérité, véritable Graal, ne serait-elle pas la somme de toutes les propositions de cette liste antédiluvienne ? Tout, absolument tout, semblerait participer à enrichir ce vaste principe de Réalité. Nous verrons comment un chemin de vie peut amener à la conscience quelques embryons de réponse à ces grandes énigmes…
Pour mon compte, et cela depuis mon plus jeune âge, j’ai toujours porté un regard très désabusé sur ce monde qui me semblait bien bizarre ! Alors, même si ma naissance corporelle proprement dite fut sans problèmes, je n’avais aucune envie de venir sur terre, et depuis toute petite déjà, une drôle de sensation par rapport à mon incarnation me suivait. La grande question se résumait en ces quelques mots ; « qu’est-ce que je fais là ? ». Question récurrente dont la réponse était encore bien lointaine. Un jour vers quatre ans, et ceci est mon souvenir, personne ne me l’a raconté, j’ai quand même demandé à ma mère pourquoi m’avoir fait naître, car moi, je n’avais pas envie de venir ici ! La pauvre ! J’ai posé la question plusieurs fois, mais devant sa mine dépitée et son incapacité à me répondre, je n’ai plus jamais rien demandé. Oui, car en plus toute la famille attendait une fille avec amour, et voilà que justement j’en étais une ! et une belle petite fille, ça tombait plutôt bien ! Et moi, j’étais là, avec mes questions, toujours un peu triste… Zut ! Bon, j’ai quand même grandi, en pensant que j’allais bien finir par trouver un jour quelque chose qui puisse m’expliquer…
***
Voilà ce que j’ai écrit il y a une trentaine d’années ! C’était l’âge d’or du « nouvel âge », et c’est drôle, ce texte me paraît un peu « démodé » ! Surtout dans les temps que nous vivons, temps de grands changements. Une bonne partie d’entre nous a fait du chemin depuis, et je constate avec joie que nous sommes très nombreux avec ces préoccupations « métaphysiques ». Il arrive une période (dans laquelle je suis maintenant) où je vois la fin (de ma vie) approcher avec un certain soulagement. Et les différences de ressenti à cette approche sont parfois bien opposées ! Combien de personnes regrettent leur jeunesse, et rêveraient d’avoir de nouveau vingt ans ! Sur un monde pareil, merci bien, sauf si ces grands changements arrivent enfin ! Même si je n’ai pas épanoui ma vie comme je l’aurais voulu, je suis néanmoins très contente de voir que j’ai parcouru le plus long… Beaucoup de gens, ne pouvant nier le fait de mourir, car personne n’y échappe (c’est même, ici-bas, la seule certitude que nous pouvons avoir), veulent surtout que ce soit « le plus tard possible » ! Il ne faut surtout pas y penser, ne pas en parler et ne jamais évoquer la qualité de la vie en attendant l’issue inéluctable. L’unique but étant de rester en vie – même dans un piteux état – « le plus longtemps possible », en ayant l’impression de faire ainsi un pied de nez à la mort qui fait si peur ! Et on a bien conditionné la population à croire que la mort, dont la majorité ne sait rien, est la fin de la Vie. Et comme l’inconnu fait presque toujours peur, personne ne se prépare, comme quelqu’un qui partirait pour un très long voyage dans un lieu inconnu sans avoir rien préparé. C’est sûr, à l’approche du départ, la personne manifesterait une grande angoisse !
Nous sommes dans une vaste pièce de théâtre, et existons simplement comme des acteurs qui penseraient vraiment être les personnages de cette pièce sortie de l’imagination d’un auteur quelconque et sans comprendre que c’est nous-mêmes qui écrivons le scénario. Alors c’est souvent la course à celui qui aura, croit-il, le plus beau rôle qui est souvent, à notre époque, celui du malfrat, et quand le rideau tombe, tout le monde courre le plus vite possible à la recherche d’un nouveau contrat pour revenir jouer ! Pris dans cette recherche et dans la peur d’être au chômage, nous oublions complètement que nous avons le libre arbitre et pouvons simplement sortir du théâtre !
Alors je vous le demande ; que représentent quelques années, souvent d’extrême vieillesse ou d’agonie prolongée, par rapport à l’éternité ? Pour mon compte personnel, je crois que j’ai toujours eu vis-à-vis de la mort une vision particulière, et c’est un souvenir qui m’y fait penser ; j’avais dix ans, et mes parents, apprenant la mort d’une relation dans son sommeil, se sont exclamés à l’unisson : « C’est comme cela qu’il est bien de mourir ! ». Alors moi, du haut de mes dix ans, j’ai réfléchi un peu et j’ai dit : « Ah non ! Moi quand je mourrai, je veux être bien consciente ». Mes parents m’ont regardé comme une petite fille qui ne savait pas de quoi elle parlait, mais après toutes ces années, je pense toujours la même chose ! Mais continuons notre investigation.
Témoignage, présentation
… Adolescente, et comme beaucoup à cet âge très justement surnommé ingrat, j’étais mal dans ma peau. À tout propos, je continuais à me demander « qu’est-ce que je fais là ? ». Et j’en arrivais même à considérer ma présence sur cette terre comme une incongruité. Je pensais que de toute évidence, quelque chose clochait avec notre situation sur cette planète, et je n’entrevoyais que trois embryons de réponses, aussi peu réjouissants les uns que les autres. Vers treize ou quatorze ans, je confiais à ma mère poule éberluée, qui avait tendance à me considérer comme un peu comme le vilain petit canard de la couvée :
Soit l’homme est beaucoup trop intelligent, car il raisonne sur ses conditions d’existence et comprend la vanité de la vie : vide-néant-rien ; naître, apprendre, travailler, se reproduire, penser, avoir peur de mourir, mourir ; vide-rien-néant. Dans ces conditions, l’animal paraît favorisé, car il vit dans l’instant présent sans se poser de question et sans la perspective angoissante de la mort (encore que !).
Soit son enfermement dans la matière le contraint à une sorte d’aveuglement qui le rend débile, et lui interdit toute compréhension sur les tenants et aboutissants de la vie.
Soit, le seul espoir qui reste étant qu’en mourant, peut-être, la Connaissance, mais la Connaissance avec un grand C, nous était donnée !
Ma pauvre mère restait muette devant des interrogations qu’elle-même n’avait jamais eues ! Alors le seul effort à faire était de satisfaire à la réalité biologique comme une sacrée corvée et puisque rien ne m’était proposé, j’ai donc mis tout cela dans ma poche avec mon mouchoir par-dessus. Et je ne savais pas, à ce moment-là, que je devrais encore attendre de nombreuses années avant de me « mettre en chemin » dans un certain brouillard, sans rien connaître sur la nature de la destination, si je serai susceptible d’y arriver, et comme presque nous tous, sans savoir même d’où je partais !
Si nous identifions l’entrebâillement de cette « fenêtre » à une sorte « d’état de grâce », dans lequel le merveilleux se lie au surnaturel, nous accédons au domaine du sacré, qui implique le respect.
Maurice Martenot
Heureusement, l’adolescente atteinte du syndrome du « d’où-pourquoi-comment-vers où » a une réalité biologique et une « fragrance vitale » bien réelles, soigneusement cachées. Bien sûr, se dire qu’en mourant on accédera peut-être à la Connaissance totale est peut-être enfantin, mais qui sait ! Alors en attendant, il faut bien se débrouiller pour vivre comme on peut. Parfois, oui je me souviens, je me disais qu’il était peut-être possible d’entrer dans le Tout en restant vivante. Je me revois, encore petite fille, vers 10-11 ans, en allant au jardin qui se trouvait à 1 km de l’école où nous habitions encore, par une petite route, m’arrêter avec l’impression d’avoir derrière moi un gouffre insondable où tout me serait révélé ! Peut-être allais-je tomber dedans ! Je me sentais au bord de la Vérité infinie, je m’étais arrêtée, j’attendais, immobile… Et rien ne se passa, zut ! Encore raté ! Et puis, il y avait aussi des moments extatiques, si je puis dire. Je me souviens parfaitement la première fois que cela m’est arrivé.
J’avais neuf ans. Nous étions en vacances en Suisse avec toute la famille dans une vallée encore très isolée à cette l’époque, et qui avait la réputation d’être le plus beau paysage du monde. Ce n’était certainement pas « le plus » – ce genre de superlatif pour exprimer la beauté d’un lieu ne voulant pas dire grand-chose –, mais incontestablement, la beauté se trouvait là, majestueuse. L’été rayonnait de tous ses feux dans ce confortable cocon ; l’hiver isolait même la vallée du reste du pays. Je n’étais encore jamais allé à la montagne, et la route qui y menait n’était encore qu’un chemin taillé sur la paroi abrupte de l’impétueuse Lanza que l’on apercevait tout en bas. Accroché aux flancs de la montagne, il la surplombait, parfois d’au moins 30 ou 40 mètres. Comme je me trouvais du côté droit, je voyais le ravin à pic sous moi. Quelquefois, je n’apercevais même plus le bas-côté ! Et c’était bien la première fois que je ressentais la peur, celle qui prend vraiment au ventre. Je revois le visage tendu de mon père, les mains crispées sur le volant. Mais à force de monter, nous avons fini par rejoindre le niveau du torrent alimenté par les neiges éternelles, et la haute vallée apparut enfin !
Une légère brume résistait encore sous le soleil d’été et aux pieds des sommets enneigés, une vaste étendue verte irradiait une lumière irisée. Jamais encore, je n’avais vu une telle beauté. Je sentais des vagues se soulever dans ma poitrine et envahir tout mon corps. Une telle splendeur, dans ce calme, cette sérénité empreinte d’harmonie, se ressent, se vit, et il me semblait ne pouvoir s’exprimer que par la musique, les mots étant impuissants à la traduire. J’aurais aimé entendre, à cet instant, l’adagio de la neuvième symphonie de Beethoven qui me mettait dans un état semblable.
Nous partions en camping, à cette époque ce n’était pas courant, et nous visitions ainsi pas mal de pays. La nuit dans cette haute vallée tout près du torrent, même en été, la température approche 0° et notre équipement n’est pas prévu pour ces températures, si bien que le matin, mon petit duvet fabriqué maison, pourtant très bien l’année passée, se trouve un peu juste ; j’ai dû grandir ! Et je me réveille tout ankylosée d’avoir dormi recroquevillée !
Mais qu’importe, à cet âge ce n’est pas grand-chose, et comme nous devons faire une grande promenade, j’aurai de quoi me dégourdir les jambes et le corps.
Je redécouvre le paysage, cette fois sous le soleil levant. C’est différent, toujours aussi beau. Les vagues de bien-être commencent doucement à se lever en moi et m’envahir.
Nous progressons sur le chemin et le soleil nous réchauffe délicieusement. La beauté des lieux, si pure, si sauvage, me galvanise. On entend encore monter le tintement de cloches des troupeaux qui paissent sur les pentes avoisinantes, mais bientôt, le silence, le vrai… que seuls troublent nos pas sur le chemin. Chacun est absorbé à recevoir le merveilleux message de la nature. La montée devenant rude, il est décidé que mon père et les garçons continuent à monter, tandis que l’autre groupe, dont je fais partie – j’ai encore de petites jambes – peut se reposer en les attendant. Une délicieuse envie d’être seule m’envahit pour laisser monter en moi l’émotion qui m’étreint, et promettant de ne pas trop m’éloigner, je pars explorer les environs. Je cherche un endroit à l’abri des regards, pour pouvoir contempler sous le meilleur angle, le plus haut des sommets entouré de sa cour. Voilà enfin, entre deux rochers, un coussin d’herbe propice à recevoir mon petit postérieur. Je m’assieds, les genoux sous le menton, les bras autour de mes jambes. Subtilement, je commence à me diluer, me fondre dans le paysage, dans ce silence grandiose empreint d’une solennelle quiétude ou l’air est doux et chaud. Doucement, les vagues qui naissent en moi augmentent leur mouvement, se propagent à tout ce qui m’entoure… Dans le même temps, je ressens d’autres ondes qui se mettent en phase avec les miennes… Une légèreté, une sérénité, une harmonie incorporelle, intemporelle en phase avec la montagne, si belle, si vraie, si sauvage m’envahissent… Se laisser bercer… Se laisser aller vers une mort fabuleusement vivante… Fuir la corporalité pour aller vers l’absolu total… Pouvoir rester l’éternité dans cet instant unique d’émerveillement… Je n’existe plus, moi… Il n’y a que le paysage et la nature entière dont la fragrance vitale et la mienne ne sont plus différenciées… Rien d’autre… Étrangement, ma minuscule personne s’est diluée dans l’Univers entier… Pendant quelques instants, j’ai intégré le Tout… Combien de temps s’est-il passé ? Quelques secondes ou mille ans ?
Il y avait dans ce paysage solennel et majestueux qui paraissait éternel, comme les prémisses sous-jacentes à chaque instant, d’un enseignement immanent et immuable ; la révélation de la symbiose de l’être avec la Nature, la Beauté, amenant à la prise de conscience d’une appartenance à un tout infini, insaisissable intellectuellement, et rendant futile, insignifiant et vain, toute autre démarche.
Évidemment, cela ne pouvait durer toujours, je dois revenir vers ma famille, revenir vers la vallée, retourner à l’école et me bourrer de choses qui ne m’intéressent pas !
Cette expérience (suivie d’autres du même genre) est encore si vivante à ma mémoire après tant d’années ! Chacun a les siennes, mais on nous apprend à ne pas exprimer nos émotions et notre sensibilité. Hélas ! La vie courante, quotidienne, le travail, l’obligation de se conformer au chemin du matérialisme édicté sont peu propices à ce genre d’expériences que l’on ne peut ni apprendre ni transmettre, et n’est pas censé avoir une existence « légale ». C’est pourtant la porte ouverte sur une autre dimension, celle de l’Être véritable, de l’être profond, au centre de l’intimité de chacun, et celui ou celle qui sait cultiver son jardin secret supportera mieux ainsi les aléas de la vie. Il aura la certitude pourtant incommunicable que cette expérience constitue l’authenticité véritable de l’être humain, et lui dévoile l’entrée du chemin qui pourra le mener à sa destinée. Nous serons de même bien en peine de décrire l’indicible ; le sentiment de la beauté quand il nous envahit. Nous sommes tous dissemblables, à des niveaux d’évolution différents et pourtant tous embarqués pour la même destination : la Conscience.
Encore enfant, je n’avais pas encore saisi qu’il y avait des gens qui pouvaient faire le mal volontairement. Il m’avait été expliqué que pour les empêcher de nuire davantage, on les enfermait dans des prisons ; c’est donc qu’ils étaient vraiment inconscients ! Remuée de fond en comble par la musique, et surtout par ce fameux adagio de la neuvième symphonie de Beethoven, je sentais à cette écoute tout l’amour du monde m’investir ! La solution, dans ma naïveté enfantine, m’apparaissait claire et simple ; il suffisait de le leur faire écouter pour qu’ils deviennent tous bons ! Et je me représentais les malfaiteurs, touchés par la révélation du bien, se repentir, quand la divine musique que l’on aurait pris soin de diffuser dans les prisons, parviendrait à leurs oreilles ! Je me suis rendu compte un peu plus tard que tout le monde n’avait pas la même perception des choses le jour où une amie qui prétendait ne pas aimer « la grande musique » est venue à la maison. Je pensais qu’elle disait cela parce qu’elle n’avait jamais entendu ce fameux adagio ! Je la guettais, et j’ai posé l’aiguille sur le disque au moment où elle entrait. Mais rien de particulier ne se passa ! Je lui ai demandé si elle ne trouvait pas cela beau, non ! en plus, elle n’aimait pas ! Alors là ! J’étais quand même un peu désemparée ! Pas la moindre réaction ! De toute évidence, nous n’entendions pas la même chose ! Puissent peut-être un jour tous les hommes de la planète s’unir dans une même émotion devant la Beauté, la vraie Beauté, celle que l’on ressent avec son cœur…
Mon voyage à travers la conscience fut long et éprouvant. Je ne sais pas trop bien comment j’ai survécu, mais une chose est certaine, l’amour donné par mes parents, mon frère, ma famille m’a beaucoup aidée à survivre. Mais voir les choses d’une façon si différente de son entourage et des schémas officiels n’est pas facile à vivre !
Et nous pouvons constater, dans l’époque actuelle, que tout est fait pour éloigner l’humain ordinaire de toute velléité de vivre ce genre d’expérience de conscience. Entre les tablettes, portables et autres gadgets voués aux divertissements à outrance, le football, les films, les « informations » distribuées par des merdias corrompus. Oui ! Il faut maintenir le troupeau dans les limites imposées et l’empêcher d’aller voir ailleurs…