La voix de Lucien - François Mercier - E-Book

La voix de Lucien E-Book

François Mercier

0,0

Beschreibung

Mikael et Ariane sont deux jeunes chercheurs guidés par un grand-père qui, depuis l’au-delà, a du mal à communiquer avec les vivants. Intéressés par l’ésotérisme et avides d’expériences magiques, ces deux apprentis seront pris en charge par un mystérieux alchimiste qui les initiera à l’art de la transmutation. Conscients de l’aventure périlleuse qui les attend, ils s’armeront de courage et de hardiesse afin d’arriver au bout de leur quête.


À PROPOS DE L'AUTEUR


François Mercier réunit voyage, connaissance, magie et alchimie autour de récits surprenants axés sur le mystère de la vie. Il est le président de l’association de la route des mines Dômes Combrailles en Auvergne et auteur de deux ouvrages publiés : Voyages d’un chien amoureux et Voyages d’un antiquaire amoureux.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 154

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



François Mercier

La voix de Lucien

Roman

© Lys Bleu Éditions – François Mercier

ISBN : 979-10-377-7845-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Avertissement

Les personnages et les situations de ce récit peuvent sembler purement fictifs, mais toute ressemblance avec des personnes ou des situations existantes, ayant existé ou qui existeront dans le futur ne saurait être fortuite mais le résultat probable d’une certaine synchronicité.

En apparence, la vie n’a aucun sens et pourtant, il est impossible qu’il n’y en ait pas un.

Albert Einstein

Cérémonie funèbre

La salle du crématorium était bondée. Beaucoup plus de monde qu’il ne l’aurait imaginé s’était déplacé pour lui dire adieu. La famille, bien sûr, enfants, petits-enfants et arrière-petits-enfants. Quelques cousins curieux, désireux de connaître ces jeunes descendants qu’ils n’avaient aperçus qu’en photo ; mais aussi une ex-épouse et une importante délégation de son club philosophique. Il y avait encore une poignée de vieux confrères journalistes, comme autant d’anciens combattants des années soixante-dix. Son éditeur était là, un commissaire-priseur, un marchand de peinture, et ces commerçants auxquels il était resté fidèle, boulanger, pâtissier, boucher, épicier, caviste, libraire. Un psychiatre aussi. La présence d’un curé, qui avait surpris l’assistance, lui avait décroché un sourire malicieux. Pour autant qu’on puisse appeler sourire un rictus discret apparu sur un ectoplasme dépourvu de cette enveloppe terrestre qu’on appelle « corps ». Pas d’oraison, comme il l’avait souhaité, mais quelques citations philosophiques en guise de viatique. On le croyait agnostique, animiste peut-être. Lui-même n’avait jamais vraiment su dans quelle case se ranger sur le plan spirituel. Il tenait en grippe cette église hypocrite, devenue politique, qui avait récupéré les folklores païens pour mieux affirmer son pouvoir et asservir le peuple. Et toute une partie de sa vie avait été consacrée à rechercher sous l’écorce chrétienne les messages des cultes antiques. Bon, assez de divagations, il lui fallait revenir à ce qui se passait là, dans ce crématorium, avec son nouveau regard d’être invisible. Car ce qu’il avait découvert, après l’abandon de son corps physique, c’est la survivance de sa conscience. Et, pour le moment, il en savourait les effets…

Pas de célébration religieuse donc, mais une chaîne d’union fraternelle. Quelques paroles d’adieu, un peu trop larmoyantes, un peu trop élogieuses à son goût, et quelques morceaux de musique avaient conclu la cérémonie. Certains avaient reconnu du Monk ou peut-être du Coltrane et quand même pour conclure, un joyeux « Here comes the Sun » des Beatles :

Here comes the sun do, do, do

Here comes the sun

And I say it's all right

It’s all right… c’était tout à fait exact pour lui. Le passage dans cet autre monde dont il commençait à découvrir les dimensions s’était déroulé pour le mieux. L’opération s’était effectuée pendant son sommeil terrestre et donc, doucement, sans violence, sans souffrance, comme un glissement, comme un changement de vêtement. Et il allait devoir s’habituer à ses nouveaux habits tissés dans une matière inconnue. Non, ce n’était pas du « made in China », mais du « made in Caelum »… peut-être ? En tout cas, il en avait immédiatement perçu tous les avantages. Plus aucune douleur. Disparue cette ankylose du matin, disparue cette migraine persistante, disparue ces vertiges… Cette nouvelle enveloppe était formidable. La capacité de déplacement de ce corps parfait était phénoménale. Voler ! Il en avait souvent appréhendé la sensation en rêve. Et, aujourd’hui, il suffisait d’une légère impulsion, d’un désir, d’une simple intention, comme un coup de talon au fond d’une piscine, pour s’élever dans les airs, sans effort aucun et flotter, et planer comme une plume au vent à l’identique des personnages de Folon qui annonçaient la fin des émissions d’Antenne 2 dans les années quatre-vingt. Ce qui l’avait interrogé, pendant ce temps que les humains appellent la vie, était la question de savoir s’il existait, là, encore de la souffrance et du stress, mais non, ni douleur, ni plus ces appels incessants du banquier, ni plus ces factures d’eau, d’électricité, de téléphone et autres, ni plus toutes ces tracasseries matérielles en tout genre. Il aurait trouvé très dommage de ne pas pouvoir en profiter pleinement. C’est sur ce simple constat qu’il en avait conclu qu’il était indispensable, nécessaire, obligatoire, évident, qu’il y avait « quelque chose » après la mort. Et aujourd’hui, il en avait la preuve, la certitude. Quel bonheur ! Bon ! Cela venait juste de se produire il y a quelques jours seulement. Et il n’en avait pas encore exploré toutes les potentialités… la première découverte, extraordinaire, fantastique, magique, était cette réponse tant attendue de son vivant, de sa part, comme de tous les êtres terrestres qu’il avait côtoyés et comme tous ceux qui l’avaient précédé, que la conscience continuait à fonctionner et que la notion d’individu était intacte.

Finalement, il avait constaté avec une grande satisfaction que la mort n’était pas si différente de la vie et que la distinction entre le mort et le vivant n’était pas si claire. Il imaginait qu’il aurait un peu de temps pour découvrir ce nouvel espace à conquérir. D’abord, il n’était pas, pour le moment, séparé, éloigné de ces vivants qui faisaient partie de son environnement immédiat… et il n’était pas encore si pressé de s’en détacher. On verrait plus tard. Plus tard ? Ça ne voulait peut-être plus rien dire à présent. À présent ? Non plus ? Il se surprenait à penser « comme avant ». Avant ? Après ? Aujourd’hui, hier, demain tous termes obsolètes.

Allons. Il fallait cesser de se torturer encore l’esprit avec des questions idiotes…

Et dommage qu’il ne puisse pas en faire profiter ses frères et sœurs humains encore vivants… cette histoire de tunnel de lumière ? Foutaise ! Pas de lumière et personne pour l’accueillir… Dans un premier temps, dont il avait du mal à mesurer la durée, tout était noir ! Il avait conscience de s’être réveillé… d’un long, très long songe et petit à petit, il avait eu l’impression de nager, de nager dans un liquide vaseux et vaguement lumineux puis, après avoir émergé de cet espace inconsistant et chaotique, il avait reconnu la chambre, le lit dans lequel il aperçut cet autre lui, couché, là au-dessous… Et il avait accompagné tous les instants de son passage vers cet autre univers qu’il commençait à percevoir.

D’abord, vers neuf heures précises, comme il l’avait constaté sur la pendule du salon, son « auxiliaire de vie » du réseau Petit Fils était arrivée, comme à son habitude, pour l’aider à se lever. Après le décès de son épouse, ses enfants avaient tenu à le faire assister dans les tâches de la vie quotidienne. Mais il avait résisté longtemps, peu enclin à laisser s’introduire une « étrangère » dans son intimité. D’autant plus que les échanges étaient plus que limités. Non pas que cette personne fut désagréable, bien au contraire, mais elle ne parlait pas français et il regrettait qu’il fût un peu tard pour apprendre le portugais !

Ne le voyant pas attablé à son petit déjeuner, elle avait frappé à sa chambre, puis en l’absence de réponse, elle avait discrètement entrouvert la porte et en s’approchant du lit, elle avait rapidement constaté une absence de respiration. Un médecin, appelé en urgence, avait pu confirmer un arrêt cardiaque. Ses enfants étaient arrivés rapidement. Toutes ces visites, il avait pu les observer depuis le plafond de l’appartement qu’il semblait occuper depuis quelques heures, à la manière d’une grosse mouche. Cette idée l’amusait et il ne put empêcher un fou rire nerveux qu’il tenta bêtement de dissimuler… même s’il n’y avait personne pour y prêter attention. Il allait devoir abandonner ces réflexes de vivant. Assis à côté du chauffeur, il avait accompagné le véhicule qui emportait sa carcasse au centre funéraire pour la mise en bière… Il n’avait jamais réfléchi à ce terme qui ne manqua pas de l’amuser. Mise en bière ? La bière conservait elle les corps ? Plus sympathique que le formol assurément !

Puis un commissaire vint apposer les scellées sur le cercueil. Et là… il n’en crut pas ses yeux… ses yeux, façon de parler ! Il n’était pas encore trop habitué à cet état. Le commissaire portait un tee-shirt sur le dos duquel était inscrit en lettres géantes « GAME OVER ». La partie était-elle vraiment terminée ? S’agissait-il d’un avertissement ? Une nouvelle vie lui était-elle donnée ? Décidément, cette mort devenait la chose la plus drôle de sa vie !

Mikael

Mikael Rousseau, l’aîné de ses petits-enfants, qui avait déjà atteint la trentaine était bien triste, même si son grand-père l’avait bien préparé à cette séparation. Ils avaient tant de fois évoqué cet événement, tant de fois débattu du « Qu’est-ce qu’il y a après ? ». Et voilà, le jour fatidique était arrivé. Depuis quelques mois déjà, Lucien, c’était le nom du grand-père, était impatient, oui, impatient de trouver la réponse à cette question. La famille avait célébré, l’année passée, son centième anniversaire. Atteindre cet âge ne relevait plus d’un exploit, et beaucoup le dépassaient encore d’une dizaine d’années. Mais la performance consistait surtout à garder toute son autonomie jusqu’au bout, à pouvoir communiquer avec ses proches, à pouvoir se déplacer sur ses deux pieds, à pouvoir voir, parler et entendre, bref à demeurer vraiment vivant et ne pas ressembler à ces zombies entretenus par une technologie médicale absurde. Un beau matin, Lucien ne s’était tout simplement pas réveillé. Il ne s’était même pas senti partir. Aujourd’hui, c’est en fumée que son corps avait fait le dernier voyage. Son corps, oui, pensait Mikael, mais qu’en était-il de son esprit ?

Au bout de quelques heures, la famille avait pu récupérer l’urne contenant les cendres du défunt et afin de respecter le souhait de Lucien, ils en avaient dispersé le contenu dans l’eau de l’étang de la propriété familiale. Voilà, tout semblait être dit ! L’épisode final et banal d’une vie, bien remplie certes et relativement heureuse, mais sans exploit justifiant une statue sur la place publique. Sans grandes souffrances, car il faisait partie de cette génération qui n’avait participé à aucune guerre. Il n’avait non plus connu de problème de santé important. La séparation d’avec sa première épouse s’était passée sans grande violence et il avait pu conserver de bonnes relations avec la mère de ses deux premiers enfants. Après avoir abandonné à la nature les restes carbonisés de Lucien, la famille et les amis avaient été conviés à la collation d’usage. Elle s’était déroulée dans le petit restaurant d’un ami qui avait apposé sur la porte un « fermé pour cause de décès » bien sévère. Quelle ne fut pas la surprise des clients qui avaient dû rebrousser chemin lorsqu’ils entendirent résonner l’ambiance plutôt joyeuse et festive accompagnée d’une musique tzigane entraînante et gaie peu habituelle en la circonstance. Sûr que Lucien n’aurait pas failli à l’exécution d’un rock endiablé pour fêter l’événement. La fête s’était poursuivie tard dans la soirée et il ne restait plus qu’une poignée de fidèles encore accrochés au bar. Mikael en faisait partie.

— Drôle de personnage quand même, ton grand-père, Mikael, faisait remarquer Bernard le propriétaire de l’établissement.

— Oui. Je n’ai malheureusement pas eu le temps de lui poser toutes les questions qui me tournaient dans la tête. Le décès de ma grand-mère il y a un an, l’avait beaucoup affecté. Il avait hâte de la rejoindre.

Soudain, Mikael aperçut, là, au milieu de quelques cartes postales, derrière le comptoir, une photo qui retint son attention. Il s’agissait d’un moine, un lama bouddhiste qui posait devant un temple extraordinaire accroché au flanc d’une montagne. Et ce qui l’avait davantage étonné c’était la ressemblance du visage avec celui de son grand-père.

— Qu’est-ce que c’est cette photo ? demanda-t-il à Bernard.

— Ah ! Oui… je l’ai reçue il y a quelques jours par la poste. Étonnant hein. On dirait vraiment Lucien. Il n’y avait pas les coordonnées de l’expéditeur.

— Oui. Je peux regarder de plus près ?

— Pas de problème.

Mikael s’empara de l’image et la retourna. Au dos, il était écrit un texte qui ressemblait à du sanscrit.

— Si tu veux, prends-la Mikael, si cette photo te rappelle ton grand-père.

Bizarre quand même !

Testament

Lucien hantait les lieux où il avait vécu ces dernières années et il ne pouvait se résoudre à quitter les personnes qu’il côtoyait de son vivant. S’il profitait pleinement de sa liberté de mouvement et de sa capacité à s’infiltrer partout en restant invisible, il culpabilisait quand même de s’adonner à une forme de voyeurisme qui à la longue pourrait devenir addictif. Et il commençait à trouver pesante cette solitude, car il n’avait fait aucune rencontre encore. Au début, dans les jours qui suivirent son passage à l’Orient éternel, il avait trouvé amusant de suivre le comportement de ses proches, d’évaluer le niveau de leur peine et d’observer comment ils honoraient sa mémoire. Comme tout le monde s’attendait naturellement à cet événement, l’affection fut de courte durée… sauf, il l’avait constaté, dans le cas de son petit-fils qui avait récupéré cette curieuse image de lama qui lui ressemblait. En fait, c’était lui, Lucien, qui avait réalisé un photomontage en remplaçant la figure d’un lama du Bhoutan par la sienne… un clin d’œil relatif à son inclination pour les voies orientales et peut-être une anticipation sur une éventuelle réincarnation. Qui sait ?

Il entretenait une relation privilégiée avec son petit-fils, car celui-ci avait suivi la même voie professionnelle que lui, le journalisme.

La procédure de sa succession l’avait encore beaucoup amusé. Chez le notaire, assis sur une pile de gros dossiers, il avait écouté sagement la lecture du testament rédigé à l’intention de ses trois enfants.

Mes chers enfants. J’avais décidé il y a quelques moments déjà de m’exercer à faire un testament. Un testament, pour quoi faire ? Entendons-nous bien d’abord ; qu’est-ce qu’un testament ? Étymologiquement, il convient de rapprocher le mot testament du latin testa qui a donné tête. Testa désigne un objet en terre cuite. Le testament fait donc référence à l’origine à des textes gravés sur des tablettes en terre cuite. Il s’agissait au début de documents comptables… puis d’écrits administratifs.

Quelles recommandations pourrais-je vous faire ? Un riche laboureur sentant sa fin prochaine… Non, ça, c’est déjà fait. Et puis je ne suis ni riche ni laboureur. Mes chers enfants… je n’ai pas grand-chose à vous léguer sur le plan matériel… sinon des objets bizarres, des livres et beaucoup de dessins, des toiles et surtout des écrits. Plutôt encombrant tout ça. Donc, il ne sera pas question d’éléments matériels, tout ça étant parfaitement réglé par les dispositions réglementaires de succession. Je souhaiterais davantage placer mes propos sur le plan spirituel et dans le cadre d’une transmission plus que d’une succession. Mais il n’est nullement question de vous faire la morale… cela n’est pas mon genre.

Si vous profitez aujourd’hui de situations professionnelles confortables et d’une bonne santé, c’est bien à vos parents et grands-parents que vous le devez… voilà l’héritage. Bien sûr, vous n’avez pas vécu dans l’opulence et j’ai moi-même souvent tiré le diable par la queue… j’en ai ainsi tiré une certaine sympathie pour ce personnage mythique… malgré tout, vous n’avez manqué de rien. Je ne sais pas de quoi votre avenir sera fait… car de gros nuages apparaissent à l’horizon. Je ne vais pas vous servir le « n’ayez pas peur » du pape ou le « aie confiance » du serpent du Livre de la Jungle, mais il semblerait qu’il va vous falloir vraiment garder la tête sur les épaules pour affronter les bouleversements du monde à venir. Je vous recommanderai donc d’user de la devise d’un Spinoza ; « Caute »… méfie-toi, sois prudent.

Voilà… mais que cela n’empêche pas le Carpe Diem… J’ignore totalement s’il existe quelque chose après la mort, mais je ne peux pas concevoir qu’un Adolphe Hitler soit logé à la même enseigne qu’un François d’Assise. Je suis donc assez sensible à la notion de karma qui voudrait que nos destinées soient liées à nos actions passées. En tout cas, on a tout à gagner à investir dans ce concept… En conclusion, je vous souhaite de profiter pleinement de la vie, mais en sagesse et en sérénité.

Il attendait un minimum de réaction de la part de ses héritiers. Sa fille fut la première à répondre :

— Ce que je retiendrai de mon père ce sont surtout… ses réflexions alambiquées sur la vie, ses jeux de mots permanents pas toujours compréhensibles et surtout ces grandes crises de rigolade qu’il déclenchait chez nous, quand il nous faisait peur avec un saladier sur la tête. Et avec ses idées loufoques sur les monstres, les diables, les dragons et toutes ces bestioles hybrides fantastiques qui le passionnaient et qui ornaient ses dessins.

Son petit-fils Mikael poursuivit :

— Quand il évoque l’aspect matériel, il est vrai qu’il y a un sacré stock d’objets, de livres, de dessins à débarrasser. Comment va-t-on s’y prendre pour gérer tout ça ?

— Peut-être faut-il tout passer en salle des ventes ? Bon, il ne faut pas se presser… dans un premier temps, il faudra faire un inventaire de son « œuvre ». Je sais qu’il existe pas mal de projets d’écrits manuscrits.

— Et quelques vieux grimoires qui ont peut-être de la valeur.

Le notaire intervient alors pour proposer de faire procéder à un inventaire et une expertise de l’ensemble. Ils décidèrent donc de se revoir avant de donner suite à cette initiative.

Lucien s’amusait de cette discussion. Son œuvre ? Il n’avait jamais vraiment réussi à en tirer profit et à vivre de ses dessins et de ses écrits.

Quarantième jour