Mushoku Tensei : Nouvelle vie, nouvelle chance (Francais Light Novel) : Tome 1 - Rifujin na Magonote - E-Book

Mushoku Tensei : Nouvelle vie, nouvelle chance (Francais Light Novel) : Tome 1 E-Book

Rifujin Na Magonote

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Beschreibung

Un no-life de 34 ans, puceau, au chômage, expulsé de chez lui et fauché, réalise que sa vie est au point mort. Alors qu’il regrette ses choix, il est percuté par un camion et meurt… puis se réveille soudain dans un monde d’épées et de magie, un monde de fantasy !
Réincarné sous la forme d’un bébé nommé Rudeus, il décide de faire de son mieux dans cet autre monde, afin de n’avoir aucun regret.
Utilisant les connaissances de sa vie précédente, Rudeus développe un talent pour la sorcellerie et devient l’élève d’une préceptrice ayant l’apparence d’une petite fille, puis rencontre un magnifique quart-elfe aux cheveux vert émeraude.
La nouvelle vie de Rudeus commence.

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Table des matières

Cover

Pages couleur

Prologue

1. Serait-ce un autre monde ?

2. La servante rebutée

3. Manuel de sorcellerie

4. Maître

5. Escrime et sorcellerie

6. Les raisons de mon respect

7. Amis

8. Idiot

9. Réunion familiale d’urgence

10. Stagnation

11. Séparation

Conceptions de personnages

A propos de JNC Nina

Copyright

Points de repère

Pages couleur

Table des matières

« Il y a une falaise devant vous. Soit vous avancez et vous vous précipitez vers le sol, soit vous restez où vous êtes et continuez à vociférer des insultes envers les autres, c’est à vous de décider. »

I don’t want to work, no matter what anyone says.

Je ne veux pas travailler, qu’importe ce que les autres disent.

Auteur : Rudeus Greyrat

Traduction : Jean RF Magot

Chapitre 1 — Enfance

Prologue

J’avais 34 ans. J’étais sans emploi et à la rue. Bref, j’étais un petit gros en train de regretter ses choix de vie.

Jusqu’à trois heures auparavant, j’avais encore un toit sur la tête, et je m’étais contenté de n’être qu’un chômeur endurci. Cependant, j’avais découvert que mes parents étaient morts.

Vivant reclus, je n’avais ni assisté aux funérailles ni à la réunion de famille. Résultat, j’avais été mis à la porte sans autre forme de procès.

Passé maître dans l’art d’enfoncer le plancher et de faire des trous dans les murs, mon attitude scandaleuse et colérique avait fait que je n’avais aucun allié à la maison.

Le jour des funérailles, alors que je m’astiquais, mes frères et sœurs firent irruption dans la chambre en habits de deuil et me menacèrent en agitant une lettre de répudiation.

Lorsque je les ignorai, mon petit frère détruisit mon ordinateur, objet plus important que ma vie, à l’aide d’une batte en bois. J’entrai dans une rage folle mais mon frère aîné étant ceinture noire de karaté, il me mit la misère.

Je me mis à pleurer misérablement pour m’attirer leur pitié, mais ils me jetèrent dehors avec pour seul bagage les vêtements que j’avais sur le dos. J’errais à travers la ville en tenant mon flanc endolori (probablement à cause de côtes cassées). Je pouvais encore entendre résonner dans mes oreilles les insultes de ma fratrie lorsque j’avais quitté la maison. Ç’avait été insupportable, mon cœur était brisé. Qu’est-ce que je leur avais fait pour mériter ça ?

Je n’avais fait que sécher l’enterrement de mes parents pour mater des images de lolitas non censurées…

Qu’est-ce que j’allais faire à partir de maintenant ?

Je veux dire… Je sais ce que je dois faire, au fond de moi. Je dois trouver un job à temps partiel ou un emploi, un logement, et acheter de quoi manger. Mais comment ? Je ne sais pas par quel moyen trouver un emploi. Enfin, je sais que je suis supposé aller au Pôle emploi, mais après…

Je n’avais pas été un ermite pendant plus de 10 ans pour rien. J’aurais été incapable d’aller dans un de ces centres. Je savais juste que c’était là-bas qu’on trouvait du travail. Je devais y apporter un CV et on me ferait passer un entretien. Oui, un entretien, avec la tenue que j’avais sur le dos, couverte de taches, de sueur et de sang.

Aucune chance qu’on me retienne. Personnellement, je n’embaucherais jamais quelqu’un avec un look de fou pareil. Je pourrais prendre pitié pour la personne, mais jamais je ne lui accorderais de travail.

De toute façon, je ne savais même pas où on vendait des CV. Dans une papeterie ? À la supérette ?

Si c’était le second cas, je finirais bien par en trouver une en marchant, mais je n’avais pas d’argent.

De toute façon, imaginons que je parvienne à me débarrasser de ces difficultés, que j’arrive à emprunter de l’argent à une banque, que j’achète des vêtements, des feuilles de CV et de quoi écrire.

J’avais cru comprendre qu’il fallait indiquer son lieu de résidence sur le CV.

J’étais coincé. C’est à cet instant précis que je pris conscience du fait que ma vie était totalement foutue.

— Haa…

La pluie se mit à tomber. L’été touchait à sa fin, il commençait à faire froid. La pluie s’infiltrait sans difficulté dans le sweat-shirt que j’avais usé pendant des années, me privant sans pitié de ma chaleur corporelle.

— Si seulement je pouvais tout recommencer à zéro…

Les mots étaient sortis involontairement.

Après tout, je n’étais pas une telle ordure depuis ma naissance. J’avais vu le jour en tant que troisième fils d’une famille aisée. J’étais le quatrième d’une fratrie de cinq enfants. J’avais trois grands frères et sœur ainsi qu’un petit frère. On m’avait beaucoup félicité d’être intelligent pour mon âge lorsque j’étais en primaire. Je n’étais pas doué pour les études, mais j’étais fort aux jeux vidéo et sportif. J’étais le centre d’attention de la classe.

Au collège, je rejoignis le club d’informatique et, en m’inspirant de magazines et en économisant mon argent de poche, je construisis mon premier ordinateur. Ma famille, qui n’y connaissait rien, m’admirait.

C’est au lycée… non, durant ma dernière année de collège, que ma vie dérapa. J’étais si absorbé par mon ordinateur que j’avais délaissé mes études. Avec le recul, c’était sans doute ça, l’élément déclencheur. Je croyais que les études ne me serviraient à rien plus tard, que c’était inutile. En conséquence, j’avais fini scolarisé dans le lycée des abrutis, celui dont on disait qu’il avait le niveau le plus bas de la préfecture. Je croyais que dans cet environnement, je m’en sortirais.

J’étais persuadé d’être différent des autres crétins, moi qui n’avais qu’à faire un petit effort pour réussir. J’en avais la certitude.

Je me souviens encore de l’incident de cette fois-là.

Je faisais la queue pour acheter mon déjeuner quand un type s’incrusta devant moi. Me prenant pour un défenseur de la justice, je lui fis une remarque. À l’époque, j’avais des illusions de grandeur, alors j’avais agi sous le coup de la colère.

Malheureusement pour moi, le type en question était d’une classe supérieure, et l’un des plus fêlés de l’école. Résultat, il me tabassa jusqu’à ce que mon visage soit tuméfié, et on m’attacha nu, tel un crucifié, aux portes du lycée. Ils prirent plein de photos de moi et les diffusèrent dans tout l’établissement juste pour s’amuser. Je tombai en bas de l’échelle sociale et on m’affubla du surnom « M. Phimosis ». Un mois plus tard, je cessai d’aller à l’école et je devins reclus. Mon père et mes frères aînés passaient leur temps à me dire de serrer les dents et de me montrer courageux. J’ignorai tous leurs encouragements.

Ce n’était pas de ma faute. Qui serait retourné à l’école dans une situation pareille ? Personne ne voudrait subir ça, personne. Alors quoi qu’ils en disent, je restai cloîtré chez moi, persuadé que tous les jeunes de mon âge que je connaissais se moquaient en regardant les photos de moi. Grâce à mon ordinateur, je pouvais tuer le temps autant que je le souhaitais sans quitter la maison. Influencé par Internet, je m’intéressai à beaucoup de choses et me lançai dans pas mal de passe-temps. Je fabriquai des maquettes, peignis des figurines ou encore tins un blog. Ma mère me soutint dans ces entreprises et me donna autant d’argent que je lui en demandais. Cependant, je me lassai de chacune de ces activités après à peine un an. Voir quelqu’un de plus doué que moi me faisait perdre toute motivation. De l’extérieur, on croyait certainement que je ne faisais que m’amuser, mais étant ainsi enfermé dans mon coin sombre, je n’avais de toute façon rien d’autre à faire.

Non, en y repensant, ce n’était qu’une excuse. Il aurait encore mieux valu que je déclare que j’allais devenir mangaka et commencer à publier une série sans saveur sur Internet, ou encore commencer à écrire des romans autopubliés. C’était ce qu’avaient fait de nombreuses personnes dans la même situation que moi. Mais eux aussi, je les prenais de haut. Je me moquais de leurs créations et postais des commentaires acerbes en tant que critique autoproclamé, alors que je n’avais rien fait de productif moi-même…

J’aimerais revenir en arrière.

Si possible, à l’école primaire, ou au collège. Non, même un an ou deux auparavant aurait suffi. Si j’avais eu un peu de temps supplémentaire, j’aurais pu me reprendre en main. J’avais tout abandonné à mi-chemin, je pouvais reprendre sur n’importe quelle activité au même point.

Si j’y avais mis du mien, même si je n’étais pas le meilleur, j’aurais peut-être pu devenir professionnel.

— …

Pourquoi n’ai-je rien fait jusqu’à maintenant ?

J’avais eu tout le temps du monde. J’étais resté enfermé dans ma chambre, mais il y avait beaucoup de choses que j’aurais pu faire, assis derrière mon ordinateur. J’aurais très bien pu atteindre un niveau suffisant dans certains domaines, que ce soient les mangas, les romans, la programmation. Avec un peu de sérieux, j’aurais pu terminer quelque chose. Reste à savoir si ç’aurait pu me rapporter de l’argent, mais…

Non, laissons tomber, réfléchir à ça est inutile.

Je n’avais pas fait de mon mieux. Même si je remontais dans le temps, je coincerais sur le même genre de problèmes. J’en étais arrivé là parce que j’étais incapable de surmonter ce qu’une personne normale parvenait à dépasser sans y prêter attention.

— Hmm ?

Soudain, j’entendis des éclats de voix sous la pluie battante.

C’est une dispute ? Je ne veux pas être mêlé à tout ça, pensai-je… tout en dirigeant mes pas droits dans cette direction.

— … Puisque je te dis que c’est toi…

— Et toi alors…

Je trouvai là trois lycéens qui semblaient être au milieu d’une querelle amoureuse. Il y avait deux garçons et une fille.

Les garçons étaient vêtus d’uniformes à col droit noirs, et la fille d’une marinière, ce qui n’était plus très courant de nos jours.

Le plus grand des garçons avait l’air en pleine dispute avec la fille. L’autre tentait de les calmer, sans succès. Personne ne l’écoutait.

Aaah, moi aussi, j’ai connu ça.

En voyant cette scène, un souvenir me revint. Quand j’étais au collège, moi aussi, j’avais eu une amie d’enfance mignonne. Enfin, elle faisait partie des quatre ou cinq filles les plus mignonnes de la classe. Elle était membre du club d’athlétisme, donc ses cheveux étaient très courts. Si elle avait marché en ville et croisé 10 personnes, trois d’entre elles se seraient retournées pour la regarder. Cependant, pour moi qui étais accro aux animés et considérais que club d’athlétisme rimait avec queue de cheval, je la trouvais plutôt moche.

Mais nos maisons étaient à proximité l’une de l’autre, et nous étions souvent dans la même classe en primaire et au collège. Nous étions donc rentrés de l’école ensemble plus d’une fois, même après être devenus collégiens. Nous avions souvent l’occasion de parler, et de nous disputer aussi. Quel gâchis. De nos jours, les termes collégienne, amie d’enfance et club d’athlétisme m’auraient suffi pour m’astiquer trois fois de suite.

Par ailleurs, j’avais appris par une rumeur que cette fameuse amie d’enfance s’était mariée il y a sept ans. Enfin, plus qu’une rumeur, il s’agissait d’une conversation entre mes frères, que j’avais entendue dans le salon.

Je n’avais pas eu de mauvaises relations avec elle. Nous nous connaissions depuis longtemps, nous pouvions donc nous parler sans retenue. Je doutais qu’elle ait été amoureuse de moi, mais si j’avais fait plus d’efforts dans mes études et que j’étais allé dans le même lycée qu’elle, ou si nous avions rejoint le même club d’athlétisme, peut-être aurais-je eu une chance. Si je lui avais fait une déclaration sérieuse, nous serions peut-être au moins sortis ensemble. Et puis, comme les trois jeunes devant moi, nous nous serions peut-être disputés en rentrant de l’école. Et si l’occasion s’était présentée, j’aurais peut-être même fait des choses cochonnes avec elle dans une salle de classe vide après les cours.

Pff, dans quel jeu vidéo érotique est-ce que je me crois ? Maintenant que j’y pense, ils m’énervent, ces normies. Fichez-moi le camp… Hein ?

Au même moment, je réalisai quelque chose. Un camion fonçait droit sur le trio et le chauffeur était affalé sur le tableau de bord.

Il s’était endormi au volant !

Les trois jeunes ne s’étaient encore rendu compte de rien.

— At… tten… tion…

J’avais voulu crier, mais mes cordes vocales, que je n’avais presque pas utilisées pendant plus de 10 ans, se resserrèrent encore davantage à cause de la douleur de mon flanc, du froid et de la pluie, et je ne parvins qu’à produire un son pathétique et tremblotant qui se noya dans le bruit de l’averse.

Je dois les sauver, me dis-je.

Mais en même temps, je me demandais pourquoi un type comme moi ferait ça. J’avais cependant l’intuition que si je ne le faisais pas, je le regretterais cinq minutes plus tard. Je savais que je ne supporterais pas la vue de ces trois jeunes réduits en bouillie après avoir été percutés à pleine vitesse par le camion. Je penserais que j’aurais dû les sauver. J’allais bientôt mourir dehors comme un chien, je voulais juste avoir le sentiment d’avoir accompli quelque chose sur l’instant. Je ne voulais pas avoir des regrets jusqu’au dernier moment.

… Je courus donc de toutes mes forces.

Mes jambes, que je n’avais pas fait bouger correctement pendant plus d’une décennie, refusaient de m’écouter. Pour la première fois de ma vie, je regrettais de ne pas avoir fait plus d’exercice. Mes côtes cassées me procuraient une douleur fulgurante et manquaient de me faire m’arrêter. Pour la première fois de ma vie, je regrettais de ne pas avoir pris plus de calcium.

J’avais mal. Si mal que je peinais à mettre un pied devant l’autre.

Mais je courus.

Je parvins à courir.

Le garçon qui se disputait avec la fille serra cette dernière contre lui lorsqu’il réalisa que le camion se dirigeait droit sur eux. L’autre garçon, qui tournait le dos au véhicule, ne l’avait pas encore remarqué et fut surpris du geste soudain de son camarade.

Sans hésiter, je saisis le garçon par le col et le tirai de toutes mes forces vers l’arrière. Il passa derrière moi et roula en dehors de la trajectoire du camion.

Bien, plus que deux.

Au moment où je me disais ça, le camion fut sur moi. Je voulus tendre le bras et les tirer depuis un endroit sûr, mais en le faisant, la réaction physique naturelle fut de me retrouver happé vers l’avant. Que je fasse plus de 100 kilos ne changeait rien. Mes jambes, qui tremblaient à cause du sprint, n’offrirent aucune résistance.

Au moment où j’entrai en contact avec le camion, j’eus l’impression de voir quelque chose briller derrière moi.

Était-ce le fameux film de sa vie qu’on voyait défiler au moment de mourir ? C’était allé si vite que je n’avais rien vu. Cela signifiait juste que ma vie n’avait rien qui vaille la peine d’être rappelé.

Le camion qui pesait plus de 50 fois mon poids m’envoya voler et m’écraser contre un mur en béton.

— Guuah !!

L’air contenu dans mes poumons fut expulsé en un instant. Ces derniers convulsèrent dans une recherche désespérée d’oxygène. J’étais incapable de parler. Mais je n’étais pas mort. La graisse que j’avais emmagasinée m’avait sauvé…

C’était du moins ce que je pensais. Or, le camion continua sa course. Pris en tenaille entre le poids lourd et le béton, j’éclatai comme une tomate.

1. Serait-ce un autre monde ?

La première chose que je ressentis en me réveillant fut un éblouissement. La lumière remplissait mon champ de vision et je plissai les yeux, gêné.

Peu de temps après, lorsqu’enfin mes yeux se furent ajustés, je remarquai une jeune fille blonde qui me regardait. C’était une magnifique fille… ou plutôt une magnifique jeune femme.

Qui est-ce ?

À côté d’elle, un homme aux cheveux bruns, lui aussi assez jeune, me fit un sourire maladroit. Il avait l’air fort et égoïste, et aussi musclé. Entre son air nombriliste et ses cheveux clairs, j’aurais dû avoir une réaction de rejet instinctive en le voyant, mais je ne ressentis aucun dégoût. Probablement parce que ses cheveux n’étaient pas teints : ils étaient d’un beau brun naturel.

La femme me regarda en souriant et dit quelque chose.

— ──××──××××

Qu’est-ce qu’elle dit ? C’est confus et j’ai du mal à entendre, je comprends rien.

Ce n’était peut-être pas du japonais. L’homme répondit sur un ton doux :

— ────×××××───×××…

Je ne comprenais définitivement pas ce qu’ils disaient.

— ──××──×××

Une troisième voix se fit entendre quelque part ailleurs. Je ne voyais pas qui en était le propriétaire.

Je tentai de me relever et de leur demander où j’étais et qui ils étaient. J’avais beau être un chômeur reclus, cela ne voulait pas dire que j’étais incapable de communiquer.

Je suis au moins capable de faire ça.

— Auuh, uaah.

Du moins, c’était ce que je croyais, mais le son qui sortit de ma bouche était à mi-chemin entre le gémissement et le hoquet. Je restai immobile. Je sentais le bout de mes doigts et mes bras bouger mais je n’arrivais pas à relever le haut de mon corps.

— ×××───××××××

Alors que je pensais cela, l’homme me souleva.

Sérieux, comment il arrive à me porter si facilement alors que je pèse plus de 100 kilos ? Non, si ça fait plusieurs dizaines de jours que je suis alité, j’ai perdu du poids.

Avec un accident pareil, il y avait de fortes chances que j’aie même des membres en moins.

C’est un véritable enfer…

C’était du moins ce que je pensais ce jour-là.

★ ★ ★

Un mois s’était écoulé.

Apparemment, je m’étais réincarné. J’avais enfin digéré cette réalité. J’étais redevenu un bébé.

J’en avais eu la confirmation lorsqu’on m’avait soulevé, et que, la tête en l’air, j’avais pu voir mon propre corps. Je ne savais pas pourquoi j’avais encore les souvenirs de ma vie antérieure, mais les posséder ne me posait aucun problème. Renaître en gardant ses souvenirs d’antan, c’était un fantasme que tout le monde avait au moins eu une fois. Je n’aurais jamais cru que ce rêve deviendrait réalité…

La femme et l’homme que j’avais vus en premier lors de mon réveil étaient mes parents. Ils avaient sans doute une vingtaine d’années. Du moins, ils étaient bien plus jeunes que je ne l’étais dans ma vie précédente. De mon point de vue de 34 ans, c’étaient des jeunots.

Avoir un enfant à cet âge-là, je suis jaloux.

Je l’avais constaté dès le premier jour, mais je ne devais pas être au Japon. Le langage était différent, les visages de mes parents n’étaient pas ceux de Japonais et leurs vêtements ressemblaient plutôt à des tenues folkloriques. Je ne voyais rien qui ressemble à des appareils ménagers (j’avais repéré une personne en tenue de servante qui faisait le ménage avec des chiffons) et la vaisselle ainsi que les meubles étaient en bois, et d’une qualité médiocre. Ce ne devait pas être un pays industrialisé. Ils utilisaient des bougies et des lanternes à la place des lampes électriques. Il était toutefois possible qu’ils soient juste très pauvres et n’aient pas les moyens de payer leur facture d’électricité. Mais était-ce possible… ?

Comme il y avait une sorte de servante, j’avais cru qu’ils avaient les moyens, mais si cette dernière était la sœur de mon père ou de ma mère, alors tout s’expliquait. Rien d’étonnant à ce qu’elle s’occupe de faire au moins le ménage dans la maison. J’avais souhaité reprendre ma vie à partir de zéro, mais qui savait ce que l’avenir me réservait en renaissant dans une famille si pauvre qu’elle était incapable de payer pour de l’électricité ?

★ ★ ★

Six mois supplémentaires s’écoulèrent.

Après une demi-année à écouter les conversations de mes parents, j’avais commencé à comprendre leur langage. Je n’avais jamais été très doué en anglais, mais il semblait être vrai que rester trop accroché à sa langue maternelle ralentissait l’apprentissage d’autres dialectes. Ou alors, c’était parce que ce corps possédait d’excellentes capacités intellectuelles. Comme j’étais encore très jeune, je retenais très bien toutes sortes de choses.

Arrivé à ce stade, je parvins enfin à ramper. Être capable de me déplacer était merveilleux. Je n’avais jamais ressenti autant de reconnaissance envers le fait de pouvoir bouger.

— Dès que je le quitte des yeux, il s’enfuit quelque part.

— C’est la preuve qu’il est en forme. On s’est sacrément inquiétés en voyant qu’il ne pleurait pas du tout lorsqu’il est né.

— Mais il ne pleure toujours pas.

Mes parents discutaient en me regardant gigoter ainsi. Je n’étais plus en âge de pleurer juste parce que j’avais faim. Par contre, même si je me retenais, je finissais toujours par me faire dessus, alors je me laissais totalement aller de ce côté-là.

Même si ce n’était qu’en rampant, puisque j’arrivais à me déplacer, j’avais commencé à comprendre beaucoup de choses sur mon entourage. Tout d’abord, cette maison était opulente.

Il s’agissait d’un bâtiment en bois d’un étage avec au moins cinq pièces. Une servante y était employée. J’avais cru qu’il s’agissait de ma tante, mais son attitude envers mes parents était si formelle que j’en déduisis qu’elle n’était pas de la famille.

La maison se trouvait à la campagne. La vue depuis la fenêtre était celle d’une région rurale. Les quelques autres maisons étaient clairsemées et entourées de champs de blé. C’était la cambrousse. Je ne voyais aucun poteau électrique ou lampadaire. Il était possible qu’il n’y ait pas de centrale électrique dans les parages.

J’avais entendu dire que les lignes électriques étaient enfouies sous terre à l’étranger, mais il restait bizarre qu’il n’y ait pas du tout d’électricité dans la maison. C’était beaucoup trop rural, surtout pour quelqu’un comme moi, habitué à la vie moderne. Même si je m’étais réincarné, je voulais au moins pouvoir utiliser un ordinateur.

C’était du moins ce que je ruminais un jour, en fin d’après-midi. Comme je n’avais rien à faire, je décidai de profiter du calme de la campagne et, comme à mon habitude, je grimpai sur une chaise pour regarder par la fenêtre. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’aperçus mon père brandissant une épée dans le jardin.

Attendez, mais qu’est-ce qu’il fait ? Mon père est bien trop vieux pour encore jouer les chevaliers, il se prend pour un héros ou quoi ?

De stupeur, je glissai de ma chaise. Mes mains inexpérimentées ne parvinrent pas à me retenir bien que je me sois agrippé au dossier et je chutai, la tête contre le sol. Alors que je tombais avec un bruit sourd, j’entendis un cri.

— Oh mon dieu !

C’était celui de ma mère, qui laissa tomber le linge pour porter ses mains à sa bouche de son visage blême.

— Rudy !! Est-ce que ça va ?!

Elle se précipita à mes côtés et me prit dans ses bras. Lorsque je croisai son regard, elle sembla avoir l’air soulagée et poussa un soupir.

— Pfiou, ça a l’air d’aller.

Il vaut mieux ne pas trop faire bouger quelqu’un qui vient de se cogner la tête, ma bonne dame.

Vu sa panique, j’avais dû faire une chute dangereuse. J’étais tombé sur l’arrière de la tête, peut-être étais-je devenu idiot. Non, ça, ça n’avait pas dû changer. Je ressentais une douleur lancinante, mais comme j’avais tenté de m’accrocher à la chaise, il n’y avait pas eu d’élan dans ma chute.

Ma mère ne semblant pas si bouleversée que ça, il ne devait pas y avoir de saignement. Je ne m’étais sans doute fait qu’une bosse. Elle regardait ma tête avec l’air de dire que la moindre égratignure serait traitée avec la plus grande gravité. Finalement, elle posa sa main sur mon crâne.

— Juste au cas où… Ô pouvoir divin, source nourricière, donne à ceux qui ont perdu leurs forces la capacité de se relever. Guérison.

Je manquai d’éclater de rire.

Allons bon, est-ce que c’est leur version locale du bisou magique ?

Ou bien avais-je une mère qui prenait ses rêves pour la réalité en plus du père qui se croyait dans un RPG ? Le guerrier et la prêtresse s’étaient mariés, c’est ça ?

Mais l’instant d’après, la main de ma mère brilla et la douleur disparut.

… Hein ?

— Et voilà, c’est réglé. Tu sais, j’étais une aventurière plutôt célèbre autrefois, dit ma mère.

Pour ma part, j’étais désorienté. Épée, guerrier, aventurier, guérison, incantation, prêtresse. Tous ces mots tourbillonnaient dans mon esprit.

C’était quoi, à l’instant ?

— Qu’est-ce qui se passe ?

Attiré par le cri de ma mère, mon père jeta un coup d’œil depuis la fenêtre. Il était en sueur, sans doute à force de brandir son épée.

— Mon amour, écoute, Rudy est monté sur une chaise et a manqué de se blesser…

— Bah, c’est normal qu’un garçon soit aussi énergique.

Une mère trop inquiète et un père trop laxiste, c’était une scène récurrente ici. Mais cette fois-ci, ma mère ne lâcha pas le morceau, sans doute parce que j’étais tombé sur l’arrière du crâne.

— Mon amour, ce bébé n’a même pas un an, tu devrais t’inquiéter davantage pour lui !!

— Quand bien même. On dit bien que les enfants deviennent plus forts en culbutant et en tombant, pas vrai ? Et puis, s’il se blesse, tu pourras le soigner.

— Mais… j’ai peur qu’il se blesse trop et que je ne puisse pas le guérir.

— Ne t’inquiète pas, répondit mon père en nous enlaçant dans ses bras, ma mère et moi.

Les joues de ma mère rosirent.

— Moi aussi, j’étais inquiet, au début, parce qu’il ne pleurait pas, mais s’il est aussi énergique, alors tout ira bien…

Il embrassa ma mère.

Hé là, vous êtes chauds bouillants, les deux tourtereaux, trouvez-vous une chambre.

Après ça, ils me couchèrent dans la chambre voisine et montèrent à l’étage puis s’attelèrent à me faire un petit frère ou une petite sœur. J’entendais les grincements du lit et les gémissements jusqu’ici… Saletés de normies…

Mais il y a donc de la magie…

★ ★ ★

Dès lors, je commençai à écouter attentivement les conversations de mes parents et de la servante. Ce faisant, je constatai qu’il y avait beaucoup de termes qui m’étaient inconnus. En particulier des noms de pays, de domaines, de régions. Aucun des noms propres que j’entendais ne me disait quoi que ce soit.

Se pourrait-il que ce soit… Je veux dire, c’est une certitude, maintenant. Ce n’est pas la Terre, ici, mais un autre monde.

Un monde d’épées et de magie.

C’est alors qu’une idée me vint.

Si c’était dans ce monde, un monde de fantasy où le bon sens de ma vie antérieure ne s’appliquait pas, peut-être que je pouvais me reprendre en main. Je pourrais vivre, travailler dur comme n’importe qui d’autre. Me relever quand je trébucherais, prendre la vie en allant de l’avant.

J’avais été pris de regrets, à l’article de la mort, dans ma vie antérieure. J’avais expiré en étant assailli d’un sentiment d’impuissance et de frustration face à ma propre inaction. Mais avec ce savoir et ces connaissances de ma vie d’avant, je pourrais peut-être enfin faire de mon mieux, cette fois.

2. La servante rebutée

Lilia était une servante guerrière du sérail d’Asura. Les servantes guerrières étaient des domestiques ayant les capacités de combat d’une garde rapprochée. Elles remplissaient leurs fonctions habituelles de servantes, mais en cas d’urgence, elles devaient prendre l’épée et protéger leur maître. Lilia était une femme assidue et s’acquittait de son travail de servante avec brio. Elle n’avait, cependant, qu’un talent très limité en tant que bretteuse. C’est pourquoi elle fut prise par surprise lorsqu’elle combattit un assassin qui voulait tuer la princesse nouvellement née, et se retrouva avec une dague dans la jambe. La lame était empoisonnée. C’était le genre de poison utilisé pour tuer les membres de la famille royale. Il s’agissait d’une substance dangereuse qu’aucune magie antipoison ne pouvait éliminer. La blessure fut soignée avec une magie de soin, et grâce aux tentatives de neutralisation du poison par les médecins, elle survécut. Mais ce ne fut pas sans séquelles. Bien que cela n’interfère pas avec les mouvements de la vie quotidienne, elle n’était plus capable de courir à pleine vitesse, et elle avait perdu en agilité. Sa carrière d’épéiste avait pris fin ce jour-là. La cour royale la congédia sans la moindre hésitation.

Cela n’avait rien de rare, et l’intéressée était d’accord avec ce verdict. Il était normal de renvoyer quelqu’un lorsqu’il n’était plus apte à remplir ses fonctions. Elle n’avait pas reçu de somme de départ pour ses dépenses immédiates, mais elle se considéra chanceuse de ne pas avoir été exécutée en secret pour la seule raison d’avoir officié au sérail.

Lilia quitta la capitale royale. Le commanditaire de l’assassinat de la princesse n’avait pas encore été retrouvé. Lilia, qui connaissait la configuration du sérail, comprit qu’elle risquait elle aussi d’être visée. Ou bien que la cour tentait de l’utiliser comme appât pour attraper le cerveau du coup monté.

Elle s’était autrefois demandé pourquoi elle, qui n’était pas de bonne famille, était parvenue à entrer au service du sérail, mais avec le recul, on avait sans doute voulu une servante dont on pourrait se débarrasser aisément.

Quoi qu’il en soit, elle devait s’éloigner le plus possible de la capitale pour son propre bien. Même si la cour royale l’avait relâchée comme appât, elle n’avait reçu aucun ordre. Rien ne la retenait. Elle ne ressentait aucune obligation envers ses anciens maîtres.

Elle prit plusieurs charriots à la suite et arriva finalement dans la vaste région agricole et reculée du Fittoa. Hormis la cité fortifiée de Roa, où vivait le seigneur, il s’agissait d’un lieu paisible entouré de champs de blé. La servante décida de chercher du travail dans les environs. Cependant, avec une jambe dans un tel état, le travail physique était hors de question. Elle aurait pu enseigner le maniement de l’épée mais préférait être employée comme servante parce que le salaire était bien meilleur. Dans une telle région reculée, il devait y avoir beaucoup de gens qui savaient manier l’épée et pouvaient l’enseigner, mais il ne devait pas y avoir beaucoup de servantes instruites, capables d’un travail parfait dans la maisonnée. Avec une offre faible, les salaires seraient d’autant plus élevés. Mais il était dangereux d’entrer au service du seigneur du Fittoa ou d’un noble de haut rang. Ces personnes avaient des liens avec la capitale. Si on apprenait qu’elle avait officié au sérail, il était possible qu’elle soit utilisée comme pion sur l’échiquier politique. Il en était hors de question. Elle ne voulait pas risquer de subir le même sort deux fois, et de voir à nouveau la mort de si près. Elle se sentait désolée pour la princesse, mais elle ne voulait pas être impliquée dans les guerres de succession de la cour et préférait que tout cela se passe loin d’elle.

Cependant, être recrutée dans un lieu où le salaire serait trop bas ne lui permettrait pas d’envoyer de l’argent à sa famille. Il lui fut difficile de trouver un endroit combinant la sécurité et un salaire décent.

★ ★ ★

Après un mois d’errance à travers le pays, elle trouva enfin une offre d’emploi dans le village de Buena, toujours dans le Fittoa. Un chevalier de rang inférieur cherchait une domestique. Il précisait que la préférence serait donnée à ceux qui avaient de l’expérience dans l’éducation des enfants et les connaissances de sage-femme. Buena était un tout petit village situé en bordure de fief du Fittoa. C’était le fond du fond de la campagne. Le lieu était peu pratique, mais c’était ce que Lilia recherchait. De plus, les conditions d’embauche étaient si bonnes qu’il aurait été difficile de croire que l’employeur était un chevalier de rang inférieur.

Enfin, le nom du recruteur était familier pour la jeune femme.

Paul Greyrat.

Ce dernier était un cadet de Lilia. C’était un fauteur de troubles, un fils de noble qui avait un jour débarqué dans l’école où elle apprenait le maniement de l’épée. Il aurait été renié par son père après une dispute, et avait commencé à s’entraîner tout en vivant au sein de l’école. Même si le style était différent, il avait déjà appris des bases chez lui, et il ne lui avait pas fallu longtemps pour dépasser la jeune femme. Cela n’enchantait guère cette dernière, mais elle s’était résignée au fait de ne pas avoir autant de talent que lui.

Un jour, ce talentueux Paul avait quitté l’école après avoir causé des problèmes. Il avait aussi quitté Lilia en lui disant :

— Je vais devenir un aventurier.

Il était comme la tempête.

Cette séparation avait eu lieu environ sept ans plus tôt. Lilia n’aurait jamais cru qu’un garçon comme lui deviendrait chevalier et se marierait… Elle ignorait quelle vie haute en couleur il avait eue jusque-là, mais dans les souvenirs de Lilia, ce n’était pas un mauvais bougre. Si elle lui disait avoir des problèmes, il lui viendrait peut-être en aide. Sinon, elle n’aurait qu’à évoquer le bon vieux temps. Elle avait plusieurs anecdotes qui pouvaient servir de monnaie d’échange. Elle se rendit donc au village de Buena avec un esprit calculateur.