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Edith, épanouie dans son mariage, mais secrètement liée à Richard, voit son monde s’effondrer lorsqu’elle apprend qu’elle souffre d’une tumeur cérébrale et découvre la trahison de son amant. Dévastée, une rage meurtrière et une soif de vengeance naissent en elle, la poussant à des extrêmes insoupçonnés. Parviendra-t-elle à accomplir ses sombres desseins tout en échappant aux enquêteurs ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
À travers ses écrits,
Jan Pierag partage des histoires inspirées de la réalité. Il a publié plusieurs ouvrages aux éditions Le Lys Bleu parmi lesquels deux romans parus en 2023 : "Deux valises et un sac… – Tome II" et "Tout ça pour ça".
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Jan Pierag
Résolution meurtrière
Roman
© Lys Bleu Éditions – Jan Pierag
ISBN : 979-10-422-3872-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À toi Ode, merci,
sans ta présence, ton aide, et ton soutien,
ce livre n’aurait jamais existé.
Cette histoire est une pure fiction, tous les personnages et événements présents dans cet ouvrage sont fictifs. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations réelles serait une pure coïncidence.
Trois couples, plus un célibataire, forment un groupe partageant beaucoup de temps de loisirs. Ils travaillent aussi ensemble, parfois avec un peu de tension. Ils prennent souvent une partie de leurs vacances les uns avec les autres, et un seul couple a deux enfants.
Guillaume, 42 ans, créateur d’une start-up de e-commerce. Il a deux enfants, Mathis, 13 ans et Celia, 10 ans.
Alexia, 36 ans, assistante d’avocat au barreau. Elle est la femme de Guillaume, mère des enfants.
Richard, 36 ans, assistant de Guillaume, célibataire. Il est la partenaire de Romain au tennis et un grand séducteur.
Romain, 35 ans, pharmacien et compagnon d’Edith. Il est également le partenaire de Richard au tennis.
Edith, 41 ans, collaboratrice de Guillaume. Elle est la compagne de Romain et la maîtresse de Richard.
Luc, 38 ans, décorateur et président de l’Association Dessin-Peinture Frère de Guillaume. Il est en couple avec Cynthia.
Cynthia, 23 ans, responsable d’une agence de voyages. Elle est la compagne de Luc et la maîtresse de Richard.
Situations particulières
Richard et Edith travaillent ensemble. Ils ont une relation amoureuse secrète.
Richard et Cynthia se rencontrent chez Guillaume. Coup de foudre.
Alexia et Cynthia participent à l’Association Dessin-Peinture de Luc. Ils s’apprécient et se voient souvent. Alexia ignore la relation entre Cynthia et Richard.
Romain et Richard sont des partenaires au tennis. Romain ignore les conquêtes et aventures de Richard.
Sans oublier…
Le capitaine de gendarmerie, Delauzier de son nom, sait rester calme.
La lieutenante de gendarmerie, Pascaline, ne lâche jamais rien…
C’est l’hiver, un week-end de janvier, la neige est là en abondance. Ils sont tous là, les sept, plus les deux enfants, pour le week-end, avec en perspective la galette des rois en fin du dîner le samedi. La maison se vide en général le dimanche dans l’après-midi, ils rentrent tous dans la région stéphanoise, chacun chez soi.
Guillaume et Alexia ont deux enfants, Mathis, treize ans et Celia, dix ans. Leur couple est solide, lui créateur d’une start-up il y a six ans, quadra actif, il met un point d’honneur à participer à la vie de sa famille sans jamais travailler le week-end. Alexia est l’assistante d’un avocat inscrit au Barreau, elle aussi favorise la vie de famille.
Romain et Edith vivent en couple depuis deux ans. Romain est pharmacien, associé dans une pharmacie à Firminy. Edith travaille avec Guillaume et Richard, elle est chargée de trouver de nouveaux produits qui seront inclus dans le catalogue de vente de la start-up.
Luc et Cynthia vivent ensemble depuis moins de deux ans, Luc est décorateur, fondateur aussi d’une association de dessin et peinture, c’est le frère de Guillaume. Cynthia est responsable d’une succursale d’un groupe d’agences de voyages. Elle est toute jeune, vingt-trois ans. Luc en a trente-huit.
Et enfin Richard, assistant de Guillaume, célibataire, trente-six ans. Sans que personne n’en soit au courant, il est l’amant d’Edith et de Cynthia aussi ; toutes les deux ignorant cette situation qui pourrait devenir explosive. Richard collectionne les aventures depuis toujours.
Ils sont en week-end dans la maison de famille qui appartient à Alexia, dans un village de montagne, Champagnac-le-Vieux, à mille mètres d’altitude, en limite Haute-Loire et Puy-de-Dôme. Tout le monde les connaît dans le village. Ils sont estimés, présents à toutes les fêtes.
Alexia et Cynthia pratiquent, toutes les deux, le dessin et la peinture. Elles sont assidues aux réunions de l’association de Luc et s’apprécient mutuellement. Tout comme Richard et Romain, qui sont partenaires de double au tennis. Richard a invité Romain pour un anniversaire. Il a rencontré Edith, plus âgée que lui, sans savoir qu’Edith est aussi l’une des maîtresses de Richard, et ils vivent ensemble leur propre histoire. Cynthia a rencontré Luc et Richard, lors d’une invitation d’Alexia.
Certaines journées, basiques au réveil, peuvent devenir d’un seul coup créatrices d’un poison acide qui vous emplit totalement. Edith vient de sortir, abattue, d’une consultation à l’hôpital, où le neurologue qui l’a reçue lui a annoncé sans ménagement qu’elle développait une tumeur au cerveau. Malheureusement, il est impossible d’opérer. La tumeur est très mal placée, et il faudra passer par une chimio accompagnée de médicaments adaptés. Un choc, cette nouvelle la terrifie.
Elle rejoint sa voiture et s’y installe, restant un long moment à réfléchir autour de cette nouvelle qui l’angoisse. À quarante et un ans, elle se trouve dans la situation qu’a connue sa mère, qui avait vingt ans de plus lorsqu’elle a été atteinte du même mal. C’était, il y a vingt ans.
De combien de temps dispose-t-elle en ayant toutes ses capacités, autant physiques, qu’intellectuelles ? Le neurologue n’a pas répondu, ignorant sa question. Elle ne veut pas rentrer chez elle tout de suite. Il lui faut parler, s’exprimer, avant de rentrer et de retrouver Romain. Leur entente est bonne, ils éprouvent du plaisir à être ensemble, mais leur vie intime ne lui suffit pas. Elle aime le sexe, lui n’est pas très porté sur la chose, et en cela elle est parfaitement satisfaite dans sa relation avec Richard. Avec lui, au contraire, il n’y a que le sexe, pas de questions, pas de projets.
Elle démarre et prend la direction d’Andrézieux, au nord, où habite Richard. Elle a besoin de se sentir femme, désirée, tout de suite.
Elle monte l’escalier et entend quelqu’un qui descend. Une femme. Elle porte des chaussures à talon. Sur le palier du premier étage, elles se croisent, ébahies l’une comme l’autre.
— Cynthia ? Mais…
— Edith, que fais-tu là ?
— Et toi, tu habites ici ?
— Non, tu sais bien que non. J’y viens souvent, et toi ?
— Tu viens chez Richard ?
— Oui, et toi aussi ? Je ne savais pas qu’il aimait aussi les plus vieilles…
— Et Luc dans tout cela ?
— Comme toi pour Romain. On est quittes. Ni toi ni moi n’en parlerons n’est-ce pas ? Le mieux est de garder le silence…
Cynthia est partie, descendant rapidement, sans attendre de réponse.
Edith s’est assise sur les marches. Deuxième choc du jour, elle s’était toujours dit qu’elle ne devait pas être la seule dans la vie de Richard, sans imaginer pour autant que Cynthia profitait du même amant. La vie devient trop compliquée d’un coup. Elle n’est pas montée jusqu’au second étage. Dès demain, elle mettra les choses au point avec Richard. C’est impensable qu’elle le partage avec Cynthia. Elle va lui demander de choisir entre elles deux. Ce sera définitif, il n’y aura pas de retour en arrière. Elle est partie, trente minutes plus tard. En ouvrant la porte, elle a retrouvé Romain, qui lui aussi venait d’arriver.
— Salut bel Ange !
— Bonsoir chéri. Tout va bien pour toi ?
— Oui, et toi ? Ta visite chez le neurologue ?
— Pas bonne. J’ai une mauvaise nouvelle, une tumeur au cerveau. Il m’a fait passer un scanner, et me l’a montrée sur les images. Il ne peut pas opérer, c’est trop dangereux là où elle est placée. Donc, on s’oriente vers la chimio et un traitement en parallèle.
— Pas de panique. Est-ce que tu veux en voir un autre ?
— Non, les images sont là. Il va en parler en réunion, peut-être qu’ils vont proposer un essai par le laser, mais là aussi c’est dangereux.
— Bon. Je suis avec toi, tu le sais, et on va demander à Guillaume un aménagement de ton poste pour que tu aies moins de déplacements. Il pourrait t’adjoindre quelqu’un qui irait sur place avec tes instructions pour négocier les contrats.
— On va voir, maintenant prends-moi dans tes bras. J’ai besoin de toi.
Le lendemain, dans la matinée, Edith est allée retrouver Richard dans son espace de travail. Ils travaillaient tous en open-space, avec des cloisons ne dépassant pas un mètre soixante, isolant de la vue des autres, mais ne permettant pas une conversation animée à voix haute. Elle s’est assise en face de lui, le fixant droit dans les yeux, en disant :
— Je te donne une minute pour choisir entre Cynthia et moi. Je l’ai croisée hier dans l’escalier en voulant venir chez toi. Je ne veux rien savoir sur vous deux, choisis, dis-moi qui sera l’élue, et rien d’autre.
— Je ne peux pas choisir. Je vous apprécie toutes les deux. Tu sais bien que je ne peux pas vivre avec une seule femme.
— Ce n’est pas ma demande. Tu ne choisis pas ? Alors va te faire foutre.
Richard l’a regardée, ne comprenant pas bien.
— Tu ne veux plus de moi et des plaisirs qu’on se donne ?
— Non, si tu continues avec Cynthia. Non, définitivement.
— Elle est au courant ?
— Je l’ai croisée hier, nous avons échangé quelques mots…
— Je ne souhaite pas arrêter, ni avec toi ni avec elle.
— Alors salut. Ne compte pas sur moi pour mettre à jour tes références. Tu te débrouilleras bien tout seul. C’est juste un peu plus de travail.
— Pour ça, il faut voir Guillaume !
— Je sais. J’y vais maintenant…
— Edith, attends…
— Non. C’est fini.
Guillaume est au téléphone. La voyant arriver, il a fait signe pour qu’elle s’assoie et il a conclu rapidement sa conversation.
— Edith, bonjour. Tout va bien ? Qu’est-ce qui t’amène ?
— Bonjour Guillaume. J’ai eu mon rendez-vous hier. On m’a annoncé une tumeur au cerveau, inopérable. Donc je ne sais pas trop ce qui va se passer dans les semaines ou les mois à venir. Je voulais te prévenir, et peut-être que l’on peut réfléchir un peu à organiser le travail ici, qu’en penses-tu ?
— La première chose est qu’il faut que tu te soignes. Fais tout ce qu’il faut. Tes conditions financières ici ne changeront pas, et prends le temps qui est nécessaire à chaque fois que tu en auras besoin. Ensuite, tu me diras au fil du temps, si tu veux te déplacer moins, on trouvera une solution, et si tu veux travailler chez toi c’est possible aussi. Je te propose, en dehors de ce que je viens de dire, que Richard reprenne, comme c’était avant, le contrôle des références et l’attribution des codes. Il n’est pas surchargé et trouvera le temps pour le faire. Pour ça, on peut le mettre en route dès lundi prochain. Je vais le prévenir, mais je ne parle pas de ta santé. Cela reste entre toi et moi. Tu es d’accord ?
— Oui, merci Guillaume. Pour Richard, je te l’aurai demandé si tu n’en avais pas parlé. Je suis d’accord, et je te remercie vraiment. Je suis très heureuse de te l’avoir dit. C’est un peu lourd à porter et je n’ai pas envie d’en parler avec tout le monde.
— Il n’y a pas d’inquiétude à avoir pour ça, personne d’autre ici ne le saura. Je suis là si tu en as besoin, prends ça avec courage et bon moral.
— Merci Guillaume. J’y retourne, j’ai des contacts à appeler.
Edith en se levant s’est sentie beaucoup plus forte, les propositions de Guillaume lui avaient prouvé qu’il avait de l’estime pour elle et c’était un grand réconfort par rapport au comportement de Richard. Elle le méprisait depuis qu’il lui avait refusé, par deux fois, de choisir. Il n’a pas eu le courage de lui dire qu’il choisissait Cynthia. Un pleutre, voilà ce qu’il était. Il y eut, juste après ce mot, un déclic qui lui donna le vertige. Edith s’est assise, proche d’un étourdissement, elle est à peine consciente et voit, comme dans un film, devant elle Richard courant, affolé. Cette vision a duré quelques secondes. Elle transpire, elle a froid, tant bien que mal, se lève pour aller chercher un thé bien chaud à la machine installée dans le coin pause. Elle s’assoit pour boire et repense à cette vision, pourquoi est-ce que Richard courait en étant affolé ? Était-ce elle qui le poursuivait, et voulait le tuer ? Elle sourit à cette idée. Lui faire peur à ce point, oui, elle aimerait ça !
La journée s’est écoulée. Elle a aperçu Guillaume et Richard en grande conversation. Guillaume semblait autoritaire et décideur face à un petit Richard qui opinait sans répondre. Là aussi, il ne décidera rien, il n’en aura pas le courage. Elle comprend mieux, en voyant cela, pourquoi elle avait eu tant de plaisir en le dominant lorsqu’ils faisaient l’amour. Cette image de Richard affolé la poursuit, elle la gardera en filigrane devant les yeux jusqu’au moment de s’endormir. Que signifiait-elle exactement ? Quel était le message, et qui lui envoyait ?
Richard est rentré chez lui, seul ce soir, habituellement c’est avec Edith qu’à cette heure ils prenaient tout le temps de se faire plaisir. Elle l’avait écarté de sa vie, ce matin, d’une façon brutale, chose qui ne lui était pas arrivée depuis plus de douze ans. C’est toujours lui qui éloigne celles dont il ne veut plus. Cette fois, il a été pris au piège. Il domine et manipule Cynthia comme il le veut. Elle est encore très jeune, tendre et fraîche, mais il ne pensait pas qu’Edith le mettrait devant un choix définitif, et que les conséquences en arriveraient jusqu’à son emploi. Il a bien compris qu’elle n’a pas parlé de leur relation avec Guillaume, mais elle a bien su, en revanche, orienter les choses pour que leurs attributions soient révisées, ce qui supprimait toute possibilité de passer du temps avec elle pendant les heures de travail. S’il voulait la voir, il faudrait le faire en dehors du bureau, ça, elle le refuserait. Elle l’a dit : « C’est fini. » Au fond de lui, il regrettait cette rupture. Elle avait la connaissance des plaisirs que l’on partage à deux au fond d’un lit. Cynthia, pas encore. À son âge, on ne sait pas tout, et parmi ses conquêtes Edith était pour lui dans le haut du tableau. Dans son carnet intime où il notait toutes ses partenaires. Elle se trouvait dans le top cinq. Oui, il était obsédé, depuis toujours, quatre ou cinq relations simultanées ne l’effrayaient pas. Cette addiction était tellement jouissive qu’il ne pouvait s’en dispenser. Dommage quand même que Guillaume lui ait refilé un travail fastidieux, dont il avait su se dessaisir, et qu’Edith lui avait renvoyé en même temps qu’elle l’avait quitté.
Les jours passaient, et de plus en plus Edith sentait monter en elle une envie de vengeance envers Richard, pire même, par instants, l’envie de lui faire mal, physiquement et surtout psychologiquement. Détruire cette espèce de supériorité qu’il affichait face à toutes les femmes. Elle lui avait toujours résisté. C’est elle qui le dominait, et il n’a jamais réussi à lui imposer des situations dégradantes quand ils faisaient l’amour. Elle était plus forte que lui, et une fois encore, elle allait lui prouver. Sans trop savoir comment pour le moment, mais on dit bien que la vengeance est un plat qui se mange froid, non ? Elle prendrait son temps, il n’aura aucune chance de l’éviter. Et puis aussi, lors de leurs prochains week-ends, s’ils sont tous là, elle observera bien le comportement de Cynthia. Luc sera présent. Est-ce qu’il imagine que sa chérie est aussi le jouet d’un malade du sexe ? Il y a là quelque chose à regarder de près, leur entente est-elle toujours aussi tendre ? Jusqu’à la fin de l’année passée, c’était évident qu’ils étaient tous les deux très amoureux. Le soir de la galette, c’est Richard qui a eu la fève et qui s’est empressé de l’offrir à Cynthia, laquelle s’est jetée dans ses bras, au bord d’un baiser fougueux. Luc a peut-être pris cela pour une fin de dîner un peu arrosé, mais Edith comprenait maintenant que cette étreinte n’était pas accidentelle…
Elle avait aujourd’hui une tournée à faire aux alentours de Saint-Étienne jusqu’à Roanne. Elle effectuerait son travail avec la même envie et la même rigueur qu’elle affichait ordinairement, mettant de côté toutes ses réflexions sur le moyen de faire mal, vraiment mal, à Richard. Par instants, elle pensait que Cynthia, jeune et encore un peu naïve, devait ne pas se sentir complètement satisfaite avec Luc, avec Richard, oui…
Mais alors, pourquoi rester avec Luc dans ce cas ?
Le premier week-end de février était traditionnellement pour eux une fête où tous étaient présents, et où il était établi de manger des crêpes à chaque repas. La date du deux février n’était pas forcément respectée. Ils ne pouvaient pas se déplacer en semaine, et c’est pour cette raison que cela avait lieu pendant le premier week-end. La maison était très grande, toutes les chambres possédaient leur salle d’eau, les anciennes dépendances avaient été réunies à la maison pour en faire des pièces habitables. On pouvait y vivre à une douzaine de personnes sans se gêner, et il y avait autour de la maison deux hectares de terrain, en partie boisé, avec un petit potager, et des zones en herbe, tout cela conservé à l’état naturel.
Guillaume et Alexia, avec leurs enfants, étaient arrivés vendredi soir. Romain et Edith sont arrivés tôt le samedi, suivis de Luc et Cynthia, visiblement absorbés dans une discussion qui semblait houleuse. Richard pour sa part est arrivé juste avant midi. Il faisait froid, Luc et Cynthia s’étaient isolés dans l’ancienne grange, devenue bibliothèque, au fond de la maison. Luc était calme.
— Je ne te comprends pas bien. Pourquoi veux-tu arrêter de participer aux réunions de dessin et peinture, alors que tu es douée pour ça, pour t’inscrire dans un club de fitness ? Franchement, tu n’en as pas besoin, tu as un corps parfait.
— Ce corps parfait comme tu dis, je veux le garder et je n’ai pas assez de dépenses d’énergie et d’exercice physique dans mes journées pour bien m’entretenir. Et puis le dessin, oui cela m’intéresse, mais je voudrais un peu changer d’air et surtout rester en forme.
— Ce changement d’air, cela signifie que tu es enfermée dans une vie qui ne te convient pas complètement ? Dans ce cas alors qu’est-ce que je peux faire pour que tu sois bien, et que l’on soit ensemble ?
— Je ne cherche pas une activité que l’on pourrait pratiquer ensemble, je voudrais seulement entretenir ma forme et je n’ai aucun moyen de faire ça en conservant le rythme actuel. Je ne peux pas aller à l’agence à pied, c’est trop loin, et nous ne sommes pas des « randonneurs du dimanche », j’espère que tu comprends, cela me faciliterait la vie.
— Si tu veux absolument, je ne vais pas m’y opposer. Est-ce que tu sais où tu veux aller, dans quelle salle ?
— Il y a un club à côté de l’agence, c’est à cinq minutes à pied, je vais y aller voir pour connaître les tarifs et les horaires. Je te dirai ensuite.
— Bien. Maintenant, viens, on va rejoindre tout le monde. C’est l’heure de l’apéro. On en reparle entre nous, pas la peine d’alerter Alexia pour le moment, si tu quittes l’asso. D’accord ?
— Oui, oui. Comme tu veux.
Ils étaient tous dans la cuisine, où dix personnes au moins pouvaient prendre place pour un repas, autour d’une ancienne table en chêne, provenant d’un monastère détruit par un incendie il y a une quarantaine d’années. Lorsque Luc et Cynthia sont entrés dans la pièce, tout le monde s’est tu, les regardant et guettant un éventuel signe indiquant leur humeur. L’ambiance s’est détendue en les voyant sourire.
— Bon, on vous attendait pour ouvrir le cidre. Alexia nous a préparé des mini-crêpes aux crevettes, d’autres aux pommes ou encore au jambon. Installez-vous, et bon week-end à tous !
— Merci, Alexia, c’est sympa et en plus c’est bon ! Comme l’a dit Guillaume, maintenant on peut ouvrir le cidre.
Le hasard a fait que Cynthia et Edith se sont trouvées côte à côte, et à l’autre bout de la table, Richard était entouré par Alexia et les deux enfants. Il n’y avait jamais d’ordre établi autour de la table, chacun s’y installait comme il voulait. En aparté, à voix basse, elles se sont parlé.
— Cela ne t’ennuie pas que je sois près de toi ?
— Non Cynthia, cela ne m’ennuie pas. Je voudrais même te dire de faire attention à toi, de ne pas te laisser embarquer dans des délires.
— Je ne sais pas ce que tu veux dire, ni à propos de quoi.
— Ce n’est pas grave. Quand il le faudra, tu t’en souviendras.
Cet échange terminé, personne ne s’en étant préoccupé, le repas s’est déroulé dans la bonne humeur, comme d’habitude. Il n’y avait pas de tension visible. Au moment de la vaisselle et du rangement, Edith qui était très attentive aux comportements de Cynthia, de Richard et de Luc, a aperçu des frôlements furtifs, mais un peu appuyés, au moment où Luc ne pouvait pas les voir. Cette histoire devenait gênante, cela risquait de détériorer assez vite l’ambiance du groupe dès qu’un ou deux se rendraient compte de la situation. Edith était confortée dans ses pensées et se posait les questions essentielles de savoir comment faire, et aussi de comment se préparer, avec qui ? Pour arriver à son but de faire très mal, très, très, mal à Richard. Il faudrait qu’elle l’immobilise, pour lui faire entendre ce qu’elle voulait lui dire, et aussi le torturer un peu. C’était ce qui l’interrogeait le plus dans cette première partie, elle devait l’immobiliser, mais qu’il reste lucide, qu’il puisse l’écouter, et surtout qu’il puisse la voit préparer une séance de souffrances lui étant destinée, en s’angoissant du moment où elle s’approchera de lui. Elle voulait voir la peur, ou même la terreur, dans son regard, qu’il comprenne bien qu’il n’en sortirait pas indemne. Sans appréhension, elle imaginait bien la scène, mais dans l’immédiat n’avait pas le moyen pour le bloquer. Elle allait chercher, sur internet, elle trouverait sûrement quelques idées, à elle ensuite de les mettre en forme dans sa propre situation. Elle a pensé à ce moment-là qu’elle avait, aussi, dans la bibliothèque, quelques thrillers et polars qui allaient l’aider dans l’art et la manière de faire souffrir.
Deux fois par semaine, le soir, Cynthia rentrait près de Luc vers vingt-deux heures trente, avant vingt-trois heures, soi-disant de la salle de fitness, en réalité de chez Richard. Elle grignotait un repas très léger, puis allait se coucher, sans être très bavarde, ni très présente, perdue dans ses pensées. Luc n’insistait pas, il commençait à se poser des questions, que faisait-elle vraiment pour rentrer dans cet état absent ? Il en a parlé avec Guillaume, son frère, qui lui a conseillé d’essayer de parler avec elle, l’un des soirs où elle était présente. Ce n’était peut-être qu’une grosse fatigue physique après la séance de « gym ». S’il y avait une autre raison, il fallait en parler et prendre les dispositions adéquates pour sortir de cette situation bizarre.
Quelques jours plus tard, Luc a mis en pratique les conseils de son frère. Un soir où Cynthia était présente, il lui a demandé :
— Peux-tu m’expliquer, je ne comprends pas ce qui se passe, pourquoi le mardi et le jeudi, lorsque tu rentres, tu es inaccessible et complètement absente. J’ai l’impression d’être assis en face de ton fantôme.
— Je vais être honnête avec toi, Luc. Je crois que je n’y arrive plus, que notre couple se dissout petit à petit, et que j’ai envie d’autre chose. Peut-être est-ce dû à notre différence d’âge, nous ne voyons pas la vie de la même façon, et je n’éprouve plus de plaisir dans notre relation.
— Donc… Tu souhaites que l’on se sépare pour aller vivre ta vie ailleurs, c’est bien cela ? Tu as rencontré quelqu’un ?
— Oui, et oui, et non. Oui, je souhaite que l’on se sépare, oui j’ai rencontré quelqu’un, mais j’ai mis un terme à cette relation qui devenait toxique, et non je n’ai personne d’autre dans ma vie en ce moment.
— Ce quelqu’un que tu as rencontré, je le connais ?
— Cela n’a aucune importance, c’est fini, je n’ai pas envie d’y repenser.
— Comment veux-tu faire ? Je n’ai aucune raison de te forcer à rester ici, et dans ce cas, plus vite tu partiras, mieux ce sera.
— Toi, de ton côté, tu acceptes sans regret ?
— Je vais garder cela pour moi, c’est mon problème. Tu as choisi, semble-t-il, sans que j’aie la possibilité de te garder près de moi, donc pars, bonne chance. J’aimerais que tu sois partie avant la fin de semaine.
— Je ne gênerais pas, mais si je pouvais rester jusqu’à lundi ce serait une bonne nouvelle. Le temps de trouver quelque chose proche de l’agence.
— D’accord. Lundi soir, tu es partie, sans aucun délai supplémentaire. Et en attendant, tu prends la chambre d’amis. Bonne nuit. À demain.
Dès le lendemain, la nouvelle a fait le tour du groupe, Guillaume, le tout premier mis au courant, et bien sûr Alexia qui était à côté de lui lorsque Luc a téléphoné. Puis Guillaume l’a dit à Edith, qui le dira à Romain le soir lorsqu’ils se retrouveront chez eux. Quant à Edith, elle est passée proche de Richard en lui disant ironiquement :
— Alors, la jeune gazelle a quitté le roi lion ? Ça fait beaucoup, en peu de temps, après la vieille lionne que je suis. Que se passe-t-il ?
Richard a fusillé du regard Edith, en murmurant.
— Ta gueule, mêle-toi de ce qui te regarde.
Il était visiblement furieux.
Edith était ravie, une première pique qui l’avait mis en colère, ce n’était qu’un début. Elle avait trouvé, en effectuant quelques recherches sur des sites liés à des métiers courants, menuisiers, bouchers, plombiers, et quelques autres, une série d’outils qui lui rendraient bien service. Elle s’en est équipée. Deux couteaux et une feuille de boucher, des pinces, trois sortes dont une coupante, du fil de fer, une hachette, un flacon de chloroforme, un autre d’éther, des lingettes neutres, des gants très fins et imperméables, un rouleau d’adhésif puissant, qui permettrait d’éviter d’être entendus par des cris, et une matraque. Tout cela rangé dans un sac à outils, avec deux bâches de deux mètres par deux, ce sera caché dans le coffre de sa voiture. Elle réfléchissait sur la décision de Cynthia. Quitter Luc après presque deux ans, on peut supposer que cela soit logique, elle aura vingt-cinq ans quand lui en sera à quarante, l’écart est important. Mais Luc est un homme gentil, serviable, et il va en souffrir. Elle a bien profité de lui, de tout le groupe aussi, elle a pris de l’expérience, ce qui lui manquait sûrement, avec Richard, elle a profité aussi d’Alexia qui l’a fait entrer dans le groupe, elle mérite qu’on lui rappelle un peu ce que ce groupe lui a apporté et qu’elle rejette aujourd’hui en se sauvant comme une voleuse. Edith s’était décidée pour la rencontrer, pour lui rappeler qu’elle se conduisait mal vis-à-vis de tout le monde. Il n’était pas exclu, d’ailleurs, qu’elle ne lui fasse pas un peu peur en la menaçant de choses désagréables si elle ne s’excusait pas. Elle savait où travaillait Cynthia, et pourquoi ne pas lui rendre visite comme une future cliente, en pleine journée de travail ?
Elle pourrait peut-être aujourd’hui, elle avait prévu une tournée pour visiter deux potentiels fournisseurs, l’un fabriquant du linge de maison, et l’autre artisan innovant dans les cosmétiques pour hommes. L’agence de voyages de Cynthia était au milieu sur le trajet entre les deux visites à faire. C’était une bonne raison, attendre pour la rencontrer ne serait pas utile, une fois partie, il sera difficile de lui faire prononcer des excuses. Par chance, elle a pu se garer tout près de l’agence. Elle est entrée, Cynthia était présente, une autre personne était de l’autre côté du local, visiblement occupée au téléphone et sur son clavier d’ordinateur.
— Edith, que viens-tu faire ici ?
— Te dire bonjour Cynthia, je passais devant l’agence pour aller d’un rendez-vous à un autre. C’est tout simple, et je voulais te voir avant que tu ne partes puisque j’ai appris que tu quittais Luc.
— Oui, bon, je ne vois pas en quoi tout cela te concerne.
— Aurais-tu convaincu Richard de partir avec toi ?
— Ah non. Je reconnais que le conseil que tu m’avais donné n’était pas anodin, nous nous sommes battus un soir, il voulait carrément me violer, je refusais ce qu’il voulait et cela s’est terminé à coups de poings et coups de pied. J’ai visé juste, mon pied, lancé très fort dans son entrejambe l’a plié en deux. Je me suis rhabillée en hâte, avant de partir en courant. Je n’ai pas parlé de lui, à personne. J’ai dit à Luc que j’avais rencontré quelqu’un, mais que je n’avais pas continué parce que c’était une relation toxique. Voilà. Mais en dehors de cela, je voulais le quitter, nous n’avions pas les mêmes envies, et cela devenait difficile de vivre ensemble sans y trouver de plaisir. J’ai renoncé, il a compris.
— Bon, je ne vais pas m’éterniser, sauf si tu veux que l’on passe un moment ensemble pour un déjeuner rapide.
— C’est une proposition curieuse, je n’ai pas trop le temps aujourd’hui, un commercial doit venir pendant la coupure, mais si tu repasses par ici, pourquoi pas, il y a plusieurs endroits possibles, rapides et abordables dans les rues autour d’ici.
— D’accord, je te préviendrai. Je prends une carte pour avoir ton numéro.
— Oui, sers-toi, et alors à bientôt. Je suis surprise que tu sois venue, mais c’est sympa, merci. À plus tard.
Edith est ressortie, elle avait fait un premier pas, le principe du déjeuner était acquis, donc elles auraient le temps d’échanger, et pour Edith de dire tout ce qu’elle avait à dire.
En réfléchissant honnêtement sur son comportement, Edith était quand même obligée d’admettre qu’elle avait échoué. Son but était de faire sortir Cynthia dehors pour lui dire tout ce qu’elle avait préparé, y compris les menaces sous-entendues. À aucun moment, elle s’est montrée persuasive au point de la faire se lever de son fauteuil. Elle doit progresser. Si elle n’arrive pas à ça, elle n’arrivera jamais à faire mal à Richard. Il sera capable d’éclater de rire en la traitant de bouffonne. Et ça, c’est hors de question. Elle fait une constatation un peu amère de son propre comportement qui l’a déçu d’elle-même. Ce n’est pas facile de devenir une méchante lorsqu’on débute dans ce registre. Il va falloir qu’elle s’entraîne, ce n’est pas encore au point, qui pourrait l’aider ? Un coach dans ce domaine, ça ne doit pas se trouver sur internet, est-ce que seulement ça existe ? Elle a cherché dans la bibliothèque, elle a trouvé différents titres d’auteurs bien connus dans le genre « polars » ou « thrillers », chacun dans son style lui donnera quelques clés qui vont lui permettre d’ouvrir l’éventail des possibilités. Cela l’a fait un peu frissonner de se sentir en apprentissage, dans le but d’être la méchante parmi toutes les femmes de son entourage, celle qui fait peur, que l’on craint, et qui ne pardonne rien. Dans l’esprit, elle est prête, dans la réalité elle en est loin. Elle voit défiler des images devant elle, comme une bande dessinée, elle va devoir apprendre à les réaliser pour de bon. Ces images, il va falloir qu’elles deviennent une réalité avec tout ce que ça comporte, du sang qui coule, des cris éteints par l’adhésif, une violence froide, rigoureuse, méthodique. Faire ce qui est prévu, sans aucun remords, dans l’ordre prévu, sans s’apitoyer, froidement.
Elle a raté son premier test, elle sait ce qu’il faut faire, ce qu’elle doit, très vite, maîtriser, pour arriver à un niveau acceptable lui permettant de commencer réellement à faire mal, par paliers, jusqu’à la souffrance insoutenable. Arrivant à ce point crucial dans ses réflexions, elle a compris qu’elle ne pouvait atteindre son but que d’une seule façon : s’entraîner en situation réelle, sur des personnes qu’elle devait trouver, qui subiraient ce qu’elle déciderait de leur appliquer. Elle a réalisé à ce moment précis qu’elle ne pourrait pas tous les garder vivants. Une telle violence lui semblait inacceptable, et en même temps indispensable.
Pendant plusieurs jours, elle a réfléchi, tout pesé, analysé, pour choisir entre inacceptable et indispensable. Sans Richard, c’est inacceptable, mais avec Richard en fond d’image c’est indispensable. Elle n’avait pas encore vraiment décidé, c’était presque fait, il lui manquait un signal…
Tous les matins, en arrivant dans son espace de travail, Edith affichait son emploi du temps, surtout les horaires où elle serait à l’extérieur, de telle façon que personne ne la cherche si elle était dehors. On pouvait la joindre sur son portable, elle ne répondait pas forcément tout de suite. Ce jour-là, elle était en train de remplir l’ardoise du jour quand Richard est arrivé. Depuis quelque temps ils ne s’adressaient plus la parole, n’avaient plus de contact dans l’entreprise, et aucun à l’extérieur bien sûr. Donc Edith fut surprise de voir Richard s’arrêter dans le passage devant son espace.
— Bonjour, tu as besoin de quelque chose ?