Sur le chemin de l'illégalité - Josie K - E-Book

Sur le chemin de l'illégalité E-Book

Josie K.

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Beschreibung

Josie, Coach en Nutrition à Yaoundé, se voit offrir une chance en or : participer au prestigieux Congrès International de Nutrition et Santé en Belgique.

Cette invitation semble être la chance de sa vie, voilà peut-être le signe qu’elle attendait... D’ailleurs son frère Gaston la convainc de rester, il y a mieux ici pour elle. Mais dans les rues pavées de Belgique, elle découvre rapidement un univers nébuleux aux dangers insoupçonnés.

Afterworks, sites de rencontres, travail au noir… Sa vie prend un tournant inattendu dans cet environnement étranger.

L’étau se referme. Vite, elle doit quitter l’immeuble qu’elle occupe. Un choix déchirant s’impose : retourner au Cameroun, tout recommencer à zéro, si près du but ? Aller ailleurs ? Où ? Et comment ?

Mais le pire reste à venir. Qui est Bidjoga Geoffrey ? Qui est ce DJ qui veulent à tout prix l’aider ? D’où vient cette étrange compatriote ? Pourquoi eux ? Un coup du destin ? La réponse à ses prières ? Ou font-ils partie d’un plan obscur savamment orchestré ?

Tirer le vrai du faux. Défier conventions et adversités, dans une quête désespérée de vérité et de survie. Plongez dans les pages bouleversantes d’un récit poignant et palpitant, où le suspense vous tiendra en haleine jusqu’à la dernière ligne.






À PROPOS DE L'AUTRICE

Josie-K est Experte en Nutrition Tropicale exerçant en clientèle privée depuis 2012. Cette auteure prolifique compte à ce jour 12 livres de Nutrition Tropicale à succès. Ainsi que deux recueils de poèmes émouvants, qui ont conquis le cœur d‘un large public.

Naviguant entre les mondes de la science et de l‘art, cette auteure polymathe offre une perspective rafraîchissante sur la vie et la créativité. À travers ce récit bouleversant où l‘imagination rencontre l’expertise, cette œuvre rajoute une couche à son parcours multidisciplinaire. Il promet d’être une expérience littéraire unique et enrichissante, nous offrant un prélude passionnant à une série de chefs-d’œuvres futurs…










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Couverture

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Publishroom Factorywww.publishroom.com

ISBN : 978-2-38625-303-4

Le Code de la propriété intellectuelle interdit les copies ou reproductions destinées à une utilisation collective. Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite par quelque procédé que ce soit, sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit, est illicite et constitue une contrefaçon, aux termes des articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Page de Titre

Josie-K

SUR LE CHEMIN DE L’ILLÉGALITÉ.

Merci pour tout Seigneur.À Guy Fabrice Kamto, à son ami Georges, à Freddy.

À la 7-ème promotion de théologiens laïcs de l’UCAC de Yaoundé.À tous mes enseignants de la formation théologique pour laïcs.À l’Abbé Thierry Atangana - O. À mes parents; Mathieu et Christine.

À toutes ces personnes qui m’ont prêté mainforte de près ou de loin puisse le Seigneur vous le rendre, bien au-delà de toutes vos attentes.

Une pensée profonde à tous les citoyens du monde, hors de leurs pays d’origine à la recherche d’un nouveau repère, un nouveau départ.Cet ouvrage vous est également dédié.

PARU DU MÊME AUTEUR :

‒INRI (poésie), avril 2024.

‒TENTATIVE D’ÉVASION (poésie), mars 2024.

‒7 ALIMENTS TROPICAUX MERVEILLEUX À DÉCOUVRIR ABSOLUMENT ! novembre 2023.

‒HYPERTENSION ARTÉRIELLE, L’ALIMENTATION QUI « GUÉRIT », juin 2023.

‒25 JOURS POUR RÉVEILLER SA LIBIDO ET DEVENIR ENDURANT AU LIT ! Janvier 2023

‒LEGUIDE NUTRITIONNEL DU DIABÉTIQUE, août 2022.

‒DÉGONFLE TON VENTRE EN 21 JOURS ! Mai 2022.

‒PERDRE 5 À 10 KGS EN 6 SEMAINES SANS SPORT, octobre 2021.

‒ÉQUILIBRE ALIMENTAIRE À L’AFRICAINE : LES 6 RÈGLES-CLÉS POUR Y ARRIVER, avril 2021.

‒PERFORMANCES SEXUELLES AU TOP ! MESSIEURS, VOICI L’ALIMENTATION QU’IL VOUS FAUT, décembre 2020.

‒LE GUIDE COMPLET DE LA FEMME MÉNOPAUSÉE AFRICAINE, août 2020.

‒LE GUIDE COMPLET DU VENTRE PLAT, janvier 2020.

‒7 ALIMENTS À BANNIR D’URGENCE DE SON ALIMENTATION (Tome 1), octobre 2019.

‒9 ALIMENTS TROPICAUX QUI CHANGERONT RADICALEMENT VOTRE SANTÉ (Tome 1), août 2019.

Tous illustrés en couleur, disponibles sur Amazon, à la Fnac en version électronique et papier.

« On ne se retourne pas quand on marche sur la corde du rêve. »

Fatou Diome.

1

15h35, Arlon-Belgique.

Je descendais les escaliers de l’immeuble en direction de la cuisine, située au rez-de-chaussée pour réchauffer mon repas, lorsque le bruit sourd et fort « toum » de la porte d’entrée en fer lourde, me fit sursauter.

Je vis entrer d’un pas assuré et énergique, un homme de taille moyenne, la cinquantaine d’années environ, mais bien entretenu. Il tenait un trousseau de clés qui balançait bruyamment dans sa main droite. C’était peut-être un habitant de l’immeuble ou un visiteur. M’étais-je dit intérieurement sans y prêter de l’attention plus que ça.

Je le trouvais tout de même trop bien vêtu pour cet endroit. Peau fraîche et nette, cheveux blonds coupés correctement. Son profil ne collait pas vraiment, à celui d’un habitant potentiel de cet immeuble à 6 chambres où les toilettes et la cuisine étaient communautaires.

Ce n’étaient pas mes oignons, bref. Je finis la dernière marche d’escalier. Au moment de bifurquer à ma gauche pour entrer dans la cuisine, sa voix grave et son ton agressif me stoppèrent net. Je sursautais au même moment. Mon bol de choux-fleurs sauté manqua de se verser.

‒ Bonjour mademoiselle, je suis le proprio de cet immeuble et vous ? Qui êtes-vous ? Que faites-vous ici ? gronda-t-il à tel point que la vapeur sortit simultanément de sa bouche et de ses narines.

Aïe c’était le bailleur, malchance ! Guemto mon frère, m’avait déjà briefé à son sujet, en soulignant que ce serait mal barré pour nous, s’il tombait sur l’un de nous par hasard. Il nous avait par conséquent donné les recommandations suivantes :

‒ Ne jamais s’attarder à la cuisine en journée, au mieux l’éviter.

‒ Toujours cuisiner très tard dans la nuit (où il ne risquerait pas de rendre visite).

‒ N’avoir aucune conversation avec les autres habitants de l’immeuble, en dehors du bonjour / bonsoir.

‒ Ne jamais ouvrir la porte de la chambre s’il n’était pas là, au cas où quelqu’un frappait.

Depuis 3 mois que j’étais là avec Tchego, nous avions respecté sans faille ces recommandations. Depuis trois mois, aucun incident ne s’était jamais produit.

Jusque cet après-midi…

Il me regardait fixement dans les yeux, l’air farouche, prêt à en découdre. On aurait dit qu’il venait d’attraper un malfaiteur.

Complètement tétanisée, je n’osais plus bouger. Mes yeux fixes posés sur lui n’osaient plus bouger non plus. Mon cerveau se mit rapidement en marche à la recherche rapide de cette réponse particulière. Celle que mon frère m’avait recommandé de donner si par hasard, au pire des cas, je tombais sur lui un jour.

« S’il te voit, dis-lui que tu es ma Nga1 et que tu es juste là pour le week-end ».

Ça y est, ceci me revenait.

‒ C’est à vous que je parle bordel ! Vous êtes dans mon immeuble, je ne vous connais pas et je vous demande qui vous êtes ! Il criait littéralement.

Je ne voulais pas attirer l’attention des voisins, ni me donner en spectacle ou provoquer un esclandre. Lui si, visiblement.

Il portait un jean bleu ciel, une chemise de même teinte dont le col et les bouts de manche ressortaient sous son pull-over vert clair. Il avait dû être très blond plus jeune, si j’en jugeais à la masse mi-blanche, mi-blonde laquée sur sa tête. En quelques secondes, je vis ses yeux bleus s’assombrir comme s’ils tiraient vers le gris. Son visage rougissait progressivement, je le vis serrer les dents, mettre ses clés dans sa poche droite et serrer le poing. Il était vraiment en colère. Prêt à jouter avec moi. Avant que je ne puisse dire quoi que ce soit, il enchaîna :

‒ D’ailleurs, j’appelle la police tout de suite !

Ce mot me fit l’effet d’une douche froide et suffit à me sortir de mon mutisme.

‒ Monsieur, svp, calmez-vous… Sans me laisser continuer, il me coupa net.

‒ Je ne me calmerais pas madame, ici c’est chez moi ! Vous ne me dites pas ce que je fais ou ce que je ne fais pas. En revanche, vous si ! vociféra-t-il en pointant son index menaçant vers moi, tout en relevant son visage avec autorité.

Ceci me fit découvrir des poils blancs à l’intérieur de ses narines. Il parlait vraiment fort. J’eus l’impression qu’il était sur le point de me frapper, car il avait fait un pas de plus en ma direction.

Ooh non je n’aurais pas dûlui dire de se calmer, culpabilisais-je intérieurement.

‒ Je suis la copine de Guemto Gaston. Je suis là pour quelques jours seulement, toutes mes excuses, fis-je avec un ton bas. La tête penchant vers la droite comme une preuve supplémentaire de mon aveu de culpabilité.

Surtout, qu’il n’appelle pas la police, pitié, Seigneur, pitié, priais-je intérieurement. Ce serait la pire des choses qui pouvait arriver.

Jusqu’ici, j’avais survécu trois mois dans cette ville vide, vielle, froide, sans opportunité concluante. Je ne pouvais pas me permettre de rentrer au Cameroun, bredouille et en plus de cette manière; expulsée par les autorités. Non ! Pas après avoir fourni autant d’efforts, même s’ils avaient tous été soldés par un échec.

Seigneur, je fais comment ? Je dis quoi ? implorais-je intérieurement. Je ne voulais pas dire une bêtise supplémentaire et attiser sans le vouloir le courroux de cet homme.

Mes jambes se mirent à trembloter. Mais je stoppais cette vague de panique qui m’envahit, en appuyant mes plantes de pieds fortement au sol. Le faisant, je ressentis aussitôt le froid, plus intense, qui congelait davantage, la plante de mes pieds déjà engourdie.

Je portais des chaussettes et pantoufles fines, comme c’était le cas lorsque je restais à la maison. Au bout de quelques secondes, je sentis le froid monter progressivement vers mes jambes, mes cuisses, mes reins et bientôt mes mains. Un frisson accompagné de chair de poule m’envahit complètement. Le froid monta à ma nuque, à ma tête et bientôt dans ma bouche. Cette vague de froid telle une décharge électrique se répandit sans prévenir sur mes dents, les obligeant à se cogner contre elles.

Je menaçais de claquer les dents bruyamment, mais je les serrais fort pour ne pas émettre ce son typique de claquettes. Qui se produisait lorsque j’avais très froid et que mes dents s’entrechoquaient entre elles.

Il aurait probablement pris cela pour un aveu de culpabilité supplémentaire, à un autre crime que je n’avais pas commis. Je luttais intérieurement pour garder une posture ferme. Mes deux mains jusqu’ici agrippées à mon bol de choux-fleurs sautés se serrèrent, lentement entre elles en bloquant le bol contre mon ventre. Les traces d’huile sur le bord allaient certainement tacher le polo à capuche blanc que je portais. Deux fois plus grand que ma taille normale, recouvrant ainsi mon tronc serré dans un collant bleu.

‒ Ici, c’est une résidence pour étudiants uniquement, pas un bordel madame ! Je n’en ai rien foutre que vous soyez sa copine ! Qu’il vous visite chez vous pas ici ! Deux personnes dans une chambre aussi petite, ça ne se fait pas ! C’est deux fois plus d’eau gaspillée, deux fois plus d’électricité, il est hors de question que je paye pour ça moi ! Et en plus, il ne m’a pas avisé ! cria-t-il en jetant sa main droite vers l’avant, l’index menaçant toujours pointé vers moi.

‒ Vous êtes quelle étudiante vous, pour rendre visite à votre copain un mardi ? Où est votre carte d’étudiant ? Je vais appeler la police tout de suite ! fit-il enragé, en tapotant les poches de son jean, probablement à la recherche de son téléphone.

Mama eh ! C’est grave !

Ça ne sentait pas bon du tout, si la police arrivait ce serait la catastrophe, mon benjamin et moi serions embarqués et certainement rapatriés, car lui aussi était sans-papiers depuis 3 ans déjà. Guemto qui avait encore son séjour étudiant serait peut-être expulsé de sa chambre avec peut-être d’autres soucis administratifs.

Non Seigneur pas ça… Priais-je. Pas maintenant Papa, surtout pas maintenant…

‒ Je vous présente toutes mes excuses de me trouver là sans votre permission, monsieur, si je l’avais su je vous aurais avisé. Mes sincères excuses, cela ne se reproduira plus.

Fis-je en secouant la tête, priant intérieurement que mon benjamin Tchego resté dans la chambre ne descende pas. Sinon, gros scandale ! Ce serait une catastrophe. Aucun argumentaire ne justifierait la présence de 3 personnes, dans ce kot étudiant minuscule de 10 m², en plus sans l’autorisation du bailleur. Pire encore, si les voisins confirmaient bel et bien que nous étions là depuis plus de 3 mois déjà, ouille !

Il se retourna légèrement pour checker la poche arrière de son jean et rien. Il tapota à nouveau les poches de son jeans, d’avant vers l’arrière et maugréa. Il semblait avoir oublié son téléphone ailleurs, ceci ne le réjouissait guère.

‒ Je n’en ai rien à branler de vos excuses à la con ! reprit-il en pointant son index vers le bas, synchronisant ce geste à ses paroles, son corps entier balançait. Foutez le camp d’ici ! Ici, ce n’est pas une maison sociale ! Je paye des factures, je règle des impôts et ça me coûte cher ! Dégagez d’ici ! hurla-t-il à nouveau.

Ses paroles sifflaient littéralement dans mon tympan, tellement elles étaient chargées de colère et d’agressivité. Je ne sus quoi répondre et je n’osais pas dire quoi que ce soit, de peur d’envenimer la situation. Il enchaîna :

‒ Je reviens demain matin pour régler la plomberie, à mon retour je ne veux plus vous voir ici, sinon j’appellerais immédiatement les flics ! Et ce Gaston, il va devoir m’expliquer ce que des étrangers font dans mon immeuble et sans mon consentement ! Juste pour ça son loyer sera doublé ce mois ! Informez-le, bande d’étrangers de merde !

Conclut-il en se retournant pour sortir. Il claqua la porte violemment, « toum » ! C’est de justesse que je ne perdis pas mon équilibre. Je saisis par réflexe le bout de rampe d’escalier à ma droite pour ne pas m’écrouler.

L’air frais jaillit de la porte de courte durée à sa sortie. Ceci me rafraichit brièvement le visage et les poumons. Nous étions au mois de janvier, l’hiver rude battait son plein.

Mon Dieu, où allons-nous aller ? Où allons-nous dormir avec ce froid horrible?

Je n’avais plus faim. Lentement, je remuais mes jambes endolories de crampes, mes mains également. Mon ventre se mit à bourdonner comme si j’avais une indigestion. Pourtant je n’avais mangé que des fruits et un yaourt depuis le matin. Tout à coup, ma bouche se remplit de salive, comme un robinet qui remplit un verre d’eau et déborde.

Je remuais ma mâchoire pour stopper cette sensation inconfortable, mais cela ne s’arrêta pas. Un filet de salive s’échappa de ma bouche comme un long élastique. Je ne sais pas ce qui m’arrivait. Il fallait que j’aille aux toilettes cracher ce trop-plein de salive qui abondait involontairement dans ma bouche. Je remontais les escaliers pour me diriger à la douche, non sans avoir déposé rapidement le bol au sol, à l’entrée de la chambre.

Pas de chance. Les toilettes étaient occupées, quelqu’un y prenait visiblement sa douche. Mon ventre bourdonnait si fort, que le bruit n’échappa pas à mon benjamin Tchego Paul quand je rentrais dans la chambre. Il avait peut-être aussi noté ma mine différente. Il se déplaça et vint à ma hauteur.

‒ Il y a quoi récé2 ? J’ai suivi les voix tout à l’heure quelqu’un criait fort, il y a eu quoi ? interrogea -t-il inquiet.

Sans lui répondre, je rasais la chambre du regard à la recherche d’un mouchoir pour me vider de l’excès de salive qui ne cessait d’emplir ma bouche. Je me saisis de l’essuie-tout gisant non loin de la table.

Lentement, j’épongeais ma bouche avec l’essuie-tout, tout en m’asseyant sur le lit. La tête baissée, je scrutais ce papier humidifié à la recherche de mots justes pour expliquer à mon petit frère que nous devions déguerpir d’ici au plus vite.

Il était très sensible, un peu plus fragile émotionnellement que moi. Je devais choisir mes mots avec parcimonie pour l’expliquer la situation. Sans l’apeurer ni le décourager. Son moral était au plus bas point, et ce, depuis deux années déjà.

Il n’avait pas pu renouveler son inscription à l’université faute de moyens. Il avait par la même occasion perdu son titre de séjour étudiant, ainsi que la chambre qu’il occupait. Depuis deux ans exactement, il dormait à la gare, parfois chez un ami, ou chez une âme de bonne volonté qui proposait de l’héberger quelques jours. Il faisait quelques jobs ici et là de toutes natures pour avoir un bout de pain. C’était un sportif de haut niveau deux ans auparavant, il avait développé un physique musclé défiant à tout égard celui de Guemto, son grand frère. À présent, il était complètement amaigri, on lui aurait donné 18 ans alors qu’il en faisait 26. Tellement il était devenu chétif. Blanc de poulet, brocoli, Whey, amandes… ça coûte. M’avait-il répondu face à ma réaction-choc lorsque je l’avais revu deux mois auparavant.

Depuis le Cameroun, il me contait tous ses déboires au téléphone. Et pour son jeune âge, il avait touché le fond émotionnellement, sans y avoir été véritablement préparé.

Il nous avait rejoints ici à Arlon à ma demande insistante. J’avais pensé que se retrouver tous les trois, se serrer les coudes, discuter, réfléchir serait la meilleure approche pour améliorer nos situations respectives : trouver un travail stable, avoir les papiers et donner vie à nos projets respectifs et communs.

Deux mois déjà qu’il était là, nous avions remué ciel et terre, passer des nuits blanches à discuter, élaborer des stratégies qui ne nous avaient menés nulle part. Même les contacts de Guemto, les contacts de ses contacts, amis, camarades n’avaient pas su nous trouver un job au noir. Ni même une quelconque faille susceptible de faire un pas en avant.

Il déprimait presque. Je le voyais au quotidien à son silence, son regard vide et les nombreux piaffements qu’il émettait tout seul sans raison apparente, de jour comme de nuit.

Il regrettait presque d’avoir quitté Namur pour Arlon. C’était ma faute, je m’en voulais, mais j’avais tellement eu espoir qu’on trouverait quelque chose, que quelque chose se produirait. Je priais tous les jours pour, j’enchaînais neuvaine sur neuvaine, j’allais à la messe tous les jours c’était l’intention numéro une à chaque fois.

Il avança vers moi, se courba littéralement et posa ses deux mains glacées sur mes genoux,

‒ Récé il ya quoi ? Tu es encore malade ?

Je relevais lentement la tête et le fixant droit dans les yeux, je lui répondis calmement.

‒ Il faut qu’on parte d’ici ce soir, c’est le bailleur qui était là, il revient demain et risque appeler la police s’il nous trouve.

1 Nga : compagne dans le jargon camerounais ↑

2 Récé : grande sœur dans le jargon camerounais. ↑

2

10h50, Yaoundé - Cameroun.

‒ Gars récé, je te dis que si tu came1 ici avec le work2 que tu fais là, tu vas t’en sortir. Déjà qu’au pays même comme c’est dur comme tout là, tu t’en sors quand même. Imagine un peu si tu étais ici où tout est organisé…

C’était la énième fois au téléphone que Guemto, tentait à nouveau de me convaincre de laisser tomber toutes mes activités au Cameroun pour « tenter ma chance » en Europe. Chaque fois que nous nous appelions, il ne manquait pas de me présenter l’exemple de telle ou telle autre connaissance qui avait pris le risque de tenter l’aventure et qui avait une meilleure vie désormais. Du moins apparemment. Et à chaque fois ma réponse était pareille :

‒ Tu as peut-être raison, mais gars, je préfère rester ici continuer de me battre et peut-être venir là-bas pour les vacances, un évènement ponctuel et rentrer. Je ne peux pas tout abandonner comme ça.

Il y avait par exemple dans notre quartier, la fille de Ma’a Ô3 qu’on appelait Mami. Elle avait arrêté l’école en classe de première, faute d’obtenir le probatoire4 et avait rencontré un « blanc » sur internet. Il était venu sur place l’épouser officiellement et entamer la procédure d’immigration, pour elle et son fils. Six mois plus tard, elle faisait « monter » sa sœur cadette, et cela faisait quelques jours que la photo de sa maman circulait sur internet. Vendeuse de poisson braisé, on l’y voyait clairement en Europe, en compagnie de ses filles en plein hiver. Voilà l’un des exemples parmi tant d’autres que mon frère employait pour m’encourager à me lancer.

‒ Gars récé regarde toi-même Mami, elle n’a même pas le bac, mais regarde comment « sa life a change »5 ? Imagine un peu que toi que je connais là, avec tes diplômes, les papiers de ton entreprise et tout, tu came ici, ce sera la magie ! Tu vas t’en sortir ici mieux qu’eux !

Cependant, je restais catégorique sur ma décision :

‒ Si tu veux, invite-moi pour les vacances ou le jour de ton mariage, je viendrais. Mais je ne peux pas lep6 ma boutique-ci comme ça gars, j’ai trop war7 pour avoir ça. Gars, je ne peux pas.

Et comme toujours, faute de me convaincre, il me balança son éternelle vanne, sacrément drôle qu’il utilisait toujours chaque fois que nous abordions ce sujet  :

‒ Tu attends ton « blanc » au quartier-bami,8 hein ? Reste là, attends toujours, voilà tes petites sœurs qui évoluent devant toi, sous tes yeux…

‒ Oui j’attends, coupais-je avec véhémence et nous éclatâmes de rire comme toutes les autres fois où il me sortait cet argumentaire.

Mon frère était une personne joyeuse et optimiste. Il voyait des opportunités partout et était toujours prêt à tenter « un truc ». Un fonceur par excellence. Au fond, c’était un rêveur dans l’âme, qui malgré ces 31 ans passés avait su garder son âme d’enfant. Il était passionné de sport, de danse et poursuivait désormais ses études d’ingénierie en Belgique dans la filière « froid et climatisation ». Il y était depuis 3 ans déjà et malgré toutes les difficultés auxquelles il avait fait face, il n’avait pas déchanté. Il était plus dynamique, plus spontané et rêveur que tous mes autres frères et moi.

Après cet appel, je jetais un regard furtif sur l’imprimante située à ma gauche, où reposait la pile des fiches individuelles d’accompagnement de mes patients. Je méditais quelques minutes sur mon échange avec mon frère. En réalité, il n’avait pas tort. Ça faisait 5 ans déjà que j’avais ouvert mon cabinet diététique. Après avoir démissionné de mon premier et unique employeur, au bout de deux années de service plein. Je ramais dur, jamais mes revenus n’avaient jamais été aussi instables. Il ne se passait pas un jour, sans que je ne m’interroge sur mon avenir et celle de mon activité, dont la trajectoire n’indiquait que des incertitudes.

J’avais démissionné de mon employeur parce que je pensais déjà sérieusement à avoir une vie de famille. Et il était clair qu’en ayant une, elle ne survivrait pas à des horaires impossibles et à la charge de travail qui m’incombait à cet endroit.

Le travail commençait à 8h45, mais il fallait être hors de la maison dès 7h-7h30 pour ne pas risquer le retard, compte tenu des embouteillages. Le travail s’achevait à 18h, mais j’arrivais rarement à la maison avant 19h30 - 20h. Je voulais déjà être maman et je ne me voyais pas abandonner mes enfants en bas âge, toute la journée entière avec une nounou. La seule solution qui m’était venue à l’esprit était de m’installer à mon propre compte. Ce qui m’offrirait la flexibilité sur mes horaires de travail et l’opportunité de veiller aux besoins et à l’éducation de mes enfants. Chose curieuse, je n’étais ni fiancée ni mariée à l’époque, mais je ne voulais pas attendre de l’être pour sauter ce pas.

Je n’avais jamais imaginé que s’installer à son propre compte serait si périlleux, surtout lorsqu’on est seule et qu’on a que ses parents pour appui moral. Entre les techniciens véreux, les rendez-vous à honorer pour les formalités administratives, mobilisant parfois la journée entière. La méconnaissance totale de l’entrepreneuriat et ses rouages dans le contexte camerounais, j’avais expérimenté un niveau de stress comme jamais auparavant. Heureusement, je finirais par ouvrir le cabinet officiellement six mois après ma démission, ayant perdu près de sept kilos, épuisée, sans savoir que le pire était à venir.

Mon téléphone sonna, me tirant de ma rêverie, j’y jetais un œil, c’était la notification SMS d’une dame avec qui j’avais un rendez-vous. Elle me signalait qu’elle était en chemin, bloquée dans les embouteillages. Elle s’excusait du retard et me priait de l’attendre.

Il était 11h 07mn, j’avais prévu achever son rendez-vous avant de me rendre à la Cathédrale Notre-Dame des Victoires pour la traditionnelle messe de midi. Mais son message présageait déjà que je ne pourrais pas rejoindre cette messe à temps.

J’allais à la messe de midi à la cathédrale de lundi à vendredi. Dès 11h20 - 11h 30, je fermais le cabinet et vivant au Quartier-Bami, juste après le carrefour Belibi, le taxi n’était pas difficile. C’était mon moment favori de la journée. L’occasion de faire une pause, d’écouter l’évangile, de me nourrir de force et d’espérance avant de retourner affronter la vie qui ne me souriait pas comme je l’aurais espéré jusqu’ici…

Guemto avait peut-être raison, songeais-je. Au fond, qu’est-ce qui me retenait vraiment au Cameroun ? Je n’avais ni compagnon, ni enfant, ni biens quelconques qui auraient justifié ma volonté de m’accrocher à cet environnement.

5 ans d’exercice en autonome dans mon cabinet, je peinais à avoir au moins 10 patients stables par mois. Et même avec les quelques-uns que j’avais, je ne pouvais pas toujours y compter à 100%. Certains disparaissaient dans la nature au moment de régler leurs dettes, d’aucuns ne répondaient plus aux messages. Même avec la règle de payer à l’avance que j’avais établie, il n’était pas toujours évident de recouvrer le paiement, après avoir dûment rendu le service dont les résultats étaient plus que visibles. Ce n’était pas facile pour moi.

Les deux premières années, juste après l’ouverture du cabinet avaient été horribles, quatre mois après l’ouverture, je m’étais vu dans l’obligation de me séparer de l’assistante que j’avais prise pour s’occuper de l’accueil et des tâches basiques de secrétariat. Désormais, je m’occupais de tout toute seule : le ménage, le rangement, le contact des prospects, les courses, la prise de rendez-vous, la préparation des canevas alimentaires, la comptabilité, les formalités administratives, en plus des massages qui faisaient partie des services que je proposais. C’était épuisant. Au bout de quelques mois à ramer toute seule, j’avais perdu mon enthousiasme de l’ouverture. J’étais fatiguée moralement, physiquement.

Après cette période vint une autre, plus rude, où le téléphone ne sonnait plus du tout. Je contactais les prospects, certains me contactaient d’eux-mêmes à l’issue des émissions télé, mais tous prenaient des rendez-vous sans les honorer. Cinq mois, six, sept… treize, quinze mois passés, je galérais lamentablement au point de faire une cessation d’activité officielle parce que ça n’allait vraiment pas.

J’avais la chance que l’espace que je louais pour le cabinet était assez grand. Donc j’occupais une chambre du même bâtiment. Je me levais le matin, je nettoyais, j’ouvrais la porte, le portail et je m’asseyais sur l’un des fauteuils de la réception pour relancer par appel ou SMS les personnes que j’avais déjà relancées 1 mois ou 1 semaine à l’avance pour leur rendez-vous. Ça frôlait presque le harcèlement, quand j’y repense.

Avais-je vraiment le choix ? Un mois après l’ouverture du cabinet, par un concours heureux de circonstances, j’avais été invité à participer gratuitement à la rubrique diététique à la chaîne de télévision nationale dans le programme du matin. J’étais donc exposée à des millions de personnes qui écoutaient mes interventions. Je recevais donc à la suite des appels, des messages de personnes intéressées. Elles souhaitaient me rencontrer pour un accompagnement, une consultation. Mais pour une raison que j’ignore, ces rendez-vous n’aboutissaient pas.

Voilà pourquoi une semaine, un mois plus tard, je rappelais pour prendre de leurs nouvelles, rafraichir leur mémoire sur leur besoin de se faire accompagner et éventuellement conclure un rendez-vous. Jusque-là, cela n’aboutissait toujours pas.

Six mois après l’ouverture, toutes mes économies s’étaient épuisées. À trois, quatre reprises, j’avais été obligé de demander 1000, 2000 frs CFA à ma mère. Pour acheter quelques aliments de la démo de la rubrique nutrition à la télé et avoir de quoi me payer le taxi aller et retour.

Tout le monde autour de moi pensait que je roulais sur l’or. Seuls mes parents et moi connaissions ma véritable réalité.

Au quartier où se trouvait mon cabinet, qui n’était pas loin de mon quartier d’enfance, je recevais des remarques à la suite de mes interventions télé : « je t’ai vu à la télé ce matin, waouh, tu es déjà avec les boss ». « Stp, prête-moi 10 000 frs, je te remets la semaine prochaine ». « Comment tu peux passer à la télé et tu montes encore sur la moto non récé ? Ton niveau maintenant c’est le taxi-dépôt au moins, ou tu achètes ta voiture avec un chauffeur… ».

Hum eh ah !

Comment leur expliquer ce que je vivais ? Et d’ailleurs, qui m’aurait cru ? Bref.

Une trentaine de minutes plus tard, le bruit du portail m’indiqua que la dame était déjà arrivée. Je sortis sa fiche d’accompagnement, je déroulais le mètre-ruban de couturière pour la prise de ses mensurations après sa pesée. Elle entra en trombe dans le bureau.

‒ Eh Josie ! Excuse-moi pour le retard mama, toi-même tu connais nos embouteillages, c’est comment non ma fille ?

Nous échangeâmes les civilités, tandis qu’elle posait son sac à main sur la seconde chaise en face de moi et son sac du marché plein au coin du mur.

‒ Hummm Josie, tu vas me « tuer » ! J’étais au deuil ce week-end, j’ai mangé jusqu’àààà ! Même 1 kg, je sais que je n’ai pas perdu. Mami ne te fâche pas hein, l’affaire de régime-là n’est pas facile, surtout quand tu dois assister aux évènements chaque week-end là comme moi… avait-elle enchaîné.

Elle avait perdu juste 300 grs sur les 1 - 1,5kg attendus pour les deux semaines qui distanciaient notre dernier rendez-vous. Ce n’était pas grave, sa performance jusqu’ici était appréciable. En six semaines, elle avait perdu près de 8 kg. Elle avait tellement rajeuni, ses douleurs aux genoux s’étaient envolées et elle dormait beaucoup mieux. Ceci me réjouissait tellement.

‒ Hummm Josie, je suis arrivée au deuil avec une petite robe tissu-pagne, maaaama ! Tout le monde a crié! On m’a demandé si j’avais 18 ans. Les plus courageuses m’ont demandé le secret, je leur ai dit que « c’est ma fille Josie, elle est petite comme ça, mais son travail est efficace. Elle passe même souvent à la télé le matin… ». J’ai donné ton numéro au moins à sept personnes. Seulement que ces gens ne vivent pas sur Yaoundé, je ne sais pas alors s’ils vont accepter se déplacer, beaucoup sont à Douala…

Nous terminâmes notre rendez-vous une trentaine de minutes plus tard, après qu’elle ait reçu son nouveau canevas alimentaire, que j’avais pris soin de lui expliquer en détail à l’avance. Elle s’en alla. Comme je m’en étais douté, il était tard pour rejoindre la messe de midi. Il était presque 12h15, l’heure de l’homélie…

Je rangeais le matériel et je repensais au rendez-vous avec la dame. Ce n’était pas la première fois que je recevais cette remarque :  « Josie, tu viens à Douala quand ? ». « Josie est-ce que tu as tes bureaux sur Douala », il ya plein de gens qui veulent tes services, qui ont vu le résultat sur moi, mais ils ne peuvent pas venir sur Yaoundé… ».