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Le Livre de la Voie et la Vertu est un texte majeur au sein duquel chacun trouvera des éléments de réflexion ainsi qu’une source inépuisable d’inspiration philosophique, le texte laissant volontairement la porte ouverte à de multiples interprétations.
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LAO-TSEU
TAO TE KING
LIVRE PREMIER
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LIVRE II
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NOTES
Également Disponible
Copyright © 2015 by FV Éditions
Chinese background / [email protected]
Notes et Traduction de Stanislas Julien
ISBN 978-2-36668-508-4
Tous Droits Réservés
老子
Portrait de Lao-Tseu
in E. T. C. Werner, Mythes et Légendes de Chine, 1922.
*
Considéré comme le père fondateur du Taoisme, Lao-Tseu aurait vécu environ 600 ans avant Jésus Christ dans la province actuelle du Honan. L’emploi du conditionnel est ici important dans la mesure où Lao-Tseu pourrait n’être, selon certains chercheurs, qu’un personnage fictif. Représenté comme un Dieu par les mouvements religieux taoïstes, de nombreuses légendes circulent d’ailleurs à son sujet. On raconte par exemple qu’il fut conçu miraculeusement par le passage d’une comète et que c’est de la sorte qu’il reçu dès sa naissance une pénétration divine le destinant à être protégé toute sa vie durant par les esprits du ciel.
Qu’il eut été véritablement écrit par Lao-Tseu ou par d’autres auteurs qui auraient utilisé au fil du temps ce même pseudonyme, le Livre de la Voie et la Vertu n’en constitue pas moins un texte majeur au sein duquel chacun trouvera des éléments de réflexion ainsi qu’une source inépuisable d’inspiration philosophique, le texte laissant volontairement la porte ouverte à de multiples interprétations.
Notons en dernier lieu que la traduction reproduite dans cette édition date de 1842 et fut écrite par Stanislas Julien (1797-1873), alors titulaire de la chaire de langue et littérature chinoise et tartare-mandchoue au Collège de France. D’une rigueur exemplaire, cette traduction est le fruit d’une recherche méthodique sur différentes éditions chinoises antérieures du Tao Te King. Dans les notes présentées en fin de texte, il est ainsi fait référence à ces versions par les lettres A, B, C, D, E, F, G et H :
- Édition A: composée par Lo-tchin-kong, an 163 av. JC.
- Édition B: composée par Ko-tchang-keng, 1208.
- Édition C : composée par par un Tao-sse qui prenait le titre de Thi-we-tseu, entre 1368 et 1647
- Édition D: composée par Wang-pi, entre les années 386 et 543.
- Édition E: composée par Sie-hoei, 1530.
- Édition F: composée par Chun-yang-tchin- jin, 1690.
- Édition G : composée parTsiao-hong, 1588.
- Édition H: composée par un religieux bouddhiste nommé Te-thsing, entre les années 1368 et 1617.
Il semblait ici important de souligner cette information, non seulement pour faciliter la lecture de ces notes, mais aussi et surtout afin de mieux apprécier l’impressionnante érudition du traducteur.
FVE
LE LIVRE DE LA VOIE ET DE LA VERTU
道德经
La voie qui peut être exprimée par la parole (001) n'est pas la Voie éternelle ; le nom qui peut être nommé (002) n'est pas le Nom éternel.
(L'être) sans nom (003) est l'origine du ciel et de la terre ; avec un nom, il est la mère de toutes choses.
C'est pourquoi, lorsqu'on est constamment (004) exempt de passions, on voit son essence spirituelle (005) ; lorsqu'on a constamment des passions, on le voit sous une forme bornée (006).
Ces deux choses (007) ont une même origine et reçoivent des noms différents. On les appelle toutes deux profondes. Elles sont profondes, doublement profondes. C'est la porte de toutes les choses spirituelles.
Dans le monde, lorsque tous les hommes ont su apprécier la beauté (morale) (008), alors la laideur (du vice) a paru.
Lorsque tous les hommes ont su apprécier le bien, alors le mal a paru.
C'est pourquoi (009) l'être et le non-être (010) naissent l'un de l'autre.
Le difficile et le facile (011) se produisent mutuellement.
Le long et le court (012) se donnent mutuellement leur forme.
Le haut et le bas (013) montrent mutuellement leur inégalité.
Les tons et la voix (014) s'accordent mutuellement.
L'antériorité et la postériorité (015)sont la conséquence l'une de l'autre.
De là vient que le Saint fait son occupation du non-agir(016).
Il fait consister ses instructions dans le silence.
Alors tous les êtres se mettent en mouvement (017), et il ne leur refuse rien.
Il les produit (018) et ne se les approprie pas.
Il les perfectionne et ne compte pas sur eux (019).
Ses mérites étant accomplis, il ne s'y attache pas (020).
Il ne s'attache pas à ses mérites ; c'est pourquoi ils ne le quittent point (021).
En n'exaltant (022) pas les sages, on empêche le peuple de se disputer.
En ne prisant pas les biens d'une acquisition difficile on empêche le peuple de se livrer au vol (023).
En ne regardant point des objets propres à exciter des désirs, on empêche que le cœur du peuple ne se troublée (024).
C'est pourquoi, lorsque le Saint gouverne, il vide son cœur (025), il remplit son ventre (son intérieur), il affaiblit sa volonté, et il fortifie ses os (026).
Il s'étudie constamment à rendre le peuple ignorant et exempt de désirs (027).
Il fait en sorte que ceux qui ont du savoir n'osent pas agir (028).
Il pratique le non-agir, et alors il n'y a rien qui ne soit bien gouverné.
Le Tao est vide (029) ; si l'on en fait usage, il paraît inépuisable.
O qu'il est profond ! Il semble le patriarche (030) de tous les êtres.
Il émousse (031) sa subtilité, il se dégage de tous liens, il tempère sa splendeur, il s'assimile à la poussière.
O qu'il est pur ! Il semble subsister éternellement (032).
J'ignore de qui il est fils ; il semble avoir précédé le maître du ciel.
Le ciel et la terre n'ont point d'affection particulière (033). Ils regardent toutes les créatures comme le chien (034) de paille (du sacrifice).
Le Saint (035) n'a point d'affection particulière ; il regarde tout le peuple comme le chien de paille (du sacrifice).
L'être qui est entre le ciel et la terre (036) ressemble à un soufflet de forge qui est vide et ne s'épuise point, que l'on met en mouvement et qui produit de plus en plus (du vent).
Celui qui parle beaucoup (du Tao) est souvent réduit au silence (037).
Il vaut mieux observer le milieu.
L'esprit de la vallée (038) ne meurt pas ; on l'appelle la femelle (039) mystérieuse.
La porte (040) de la femelle mystérieuse s'appelle la racine (041) du ciel et de la terre.
Il est éternel (042) et semble (043) exister (matériellement).
Si l'on en fait usage (044), on n'éprouve aucune fatigue.
Le ciel et la terre ont une durée éternelle (045).
S'ils peuvent avoir une durée éternelle, c'est parce qu'ils ne vivent pas pour eux seuls. C'est pourquoi ils peuvent avoir une durée éternelle.
De là vient que le Saint se met après les autres, et il devient le premier (046).
Il se dégage de son corps, et son corps se conserve.
N'est-ce pas parce qu'il n'a point d'intérêts privés ?
C'est pourquoi il peut réussir dans ses intérêts privés (047).
L'homme d'une vertu supérieure est comme l'eau (048).
L'eau excelle à faire du bien aux êtres et ne lutte point.
Elle habite les lieux que déteste la foule (049).
C'est pourquoi (le sage) approche du Tao (050).
Il (051) se plaît dans la situation la plus humble.
Son cœur aime à être profond comme un abîme (052).
S'il fait des largesses, il excelle à montrer de l'humanité (053).
S'il parle, il excelle à pratiquer la vérité (054).
S'il gouverne (055), il excelle à procurer la paix.
S'il agit (056), il excelle à montrer de la capacité.
S'il se meut (057), il excelle à se conformer aux temps.
Il ne lutte contre personne ; c'est pourquoi il ne reçoit aucune marque de blâme (058).
Il vaut mieux ne pas remplir (059) un vase que de vouloir le maintenir (lorsqu'il est plein).
Si l'on aiguise (060) une lame, bien qu'on l'explore avec la main, on ne pourra la conserver constamment (tranchante).
Si une salle est remplie d'or et de pierres précieuses, personne ne pourra (061) les garder.
Si l'on est comblé d'honneurs et qu'on s'enorgueillisse, on s'attirera des malheurs (062).
Lorsqu'on a fait de grandes choses et obtenu de la réputation (063), il faut se retirer à l'écart.
Telle est la voie du ciel (064).
L'âme spirituelle (065) doit commander à l'âme sensitive.
Si l'homme conserve l'unité (066), elles pourront rester indissolubles.
S'il dompte sa force vitale (067) et la rend extrêmement souple, il pourra être comme un nouveau-né (068).
S'il se délivre des lumières de l'intelligence (069), il pourra être exempt de toute infirmité (morale).
S'il chérit le peuple et procure la paix au royaume, il pourra pratiquer le non-agir.
S'il laisse les portes du ciel s'ouvrir et se fermer (070), il pourra être comme la femelle (c'est-à-dire rester en repos).
Si ses lumières pénètrent en tous lieux, il pourra paraître ignorant (071).
Il produit les êtres (072) et les nourrit.
Il les produit et ne les regarde pas comme sa propriété.
Il leur fait du bien et ne compte pas (073) sur eux.
Il règne sur eux (074) et ne les traite pas en maître (075).
C'est ce qu'on appelle posséder une vertu profonde.
Trente rais (076) se réunissent autour d'un moyeu. C'est de son vide que dépend l'usage du char.
On pétrit de la terre glaise pour faire des vases (077). C'est de son vide que dépend l'usage des vases.
On perce des portes et des fenêtres pour faire une maison (078). C'est de leur vide que dépend l'usage de la maison.
C'est pourquoi l'utilité vient de l'être (079), l'usage naît du non-être.
Les cinq couleurs (080) émoussent la vue de l'homme (081).
Les cinq (082) notes (de musique) émoussent l'ouïe de l'homme (083).
Les cinq saveurs (084) émoussent le goût de l'homme (085).
Les courses violentes, l'exercice de la chasse égarent (086) le cœur de l'homme.
Les biens d'une acquisition difficile poussent l'homme à des actes qui lui nuisent (087).
De là vient que le Saint (088) s'occupe de son intérieur et ne s'occupe pas de ses yeux (089).
C'est pourquoi il renonce à ceci et adopte cela.
Le sage redoute la gloire (090) comme l'ignominie ; son corps lui pèse comme une grande calamité (091).
Qu'entend-on par ces mots : il redoute la gloire comme l'ignominie(092)?
La gloire est quelque chose de bas. Lorsqu'on l'a obtenue, on est comme rempli de crainte : lorsqu'on l'a perdue, on est comme rempli de crainte.
C'est pourquoi l'on dit : il redoute la gloire comme l'ignominie(093).
Qu'entend-on par ces mots : son corps lui pèse comme une grande calamité ?
Si nous éprouvons de grandes calamités, c'est parce que nous avons un corps.
Quand nous n'avons plus de corps (quand nous nous sommes dégagés de notre corps), quelles calamités pourrions-nous éprouver ?
C'est pourquoi (094), lorsqu'un homme redoute de gouverner lui-même l'empire, on peut lui confier l'empire ; lorsqu'il a regret (095) de gouverner l'empire, on peut lui remettre le soin de l'empire.
Vous le regardez (le Tao) et vous ne le voyez pas : on le dit incolore(096).
Vous l'écoutez et vous ne l'entendez pas : on le dit aphone.
Vous voulez le toucher et vous ne l'atteignez pas : on le dit incorporel.
Ces trois qualités (097) ne peuvent être scrutées à l'aide de la parole. C'est pourquoi on les confond en une seule (098).
Sa partie supérieure (099) n'est point éclairée ; sa partie inférieure n'est point obscure.
Il est éternel (100) et ne peut être nommé (101).
Il rentre dans le non-être.
On l'appelle une forme sans forme une image sans image (102).
On l'appelle vague, indéterminé (103).
Si vous allez au-devant de lui, vous ne voyez point sa face ; si vous le suivez, vous ne voyez point son dos (104).
C'est en observant le Tao des temps anciens qu'on peut gouverner les existences d'aujourd'hui (105).
Si l'homme peut connaître l'origine des choses anciennes (106), on dit qu'il tient le fil du Tao (107).
Dans l'antiquité, ceux qui excellaient à pratiquer le Tao (108) étaient déliés et subtils, abstraits et pénétrants.
Ils étaient tellement profonds qu'on ne pouvait les connaître.
Comme on ne pouvait les connaître, je m'efforcerai de donner une idée (de ce qu'ils étaient).
Ils étaient timides comme celui qui traverse un torrent en hiver (109).
Ils étaient irrésolus comme celui qui craint d'être aperçu de ses voisins (110).
Ils étaient graves (111) comme un étranger (en présence de l'hôte).
Ils s'effaçaient comme la glace qui se fond (112).
Ils étaient rudes (113) comme le bois non travaillé.
Ils étaient vides (114) comme une vallée.
Ils étaient troubles (115) comme une eau limoneuse (116).
Qui est-ce qui sait apaiser peu à peu (117) le trouble (de son cœur) en le laissant reposer ?
Qui est-ce qui sait naître peu à peu (à la vie spirituelle) par un calme prolongé (118) ?
Celui qui conserve ce Tao ne désire pas d'être plein (119).
Il n'est pas plein (de lui-même), c'est pourquoi il garde ses défauts (apparents), et ne désire pas (d'être jugé) parfait.
Lesen Sie weiter in der vollständigen Ausgabe!
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