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À la suite de difficiles épreuves vécues en France, Line rejoint un club de bikers à Brooklyn. Recrutée par Riley, chasseur de primes, elle se lance dans une traque périlleuse au Mexique pour capturer Carlos, chef d’un gang. Au cours de leur enquête, Line rencontre Jack qui lui apporte son aide et bien plus encore… Entre l’amitié avec Riley, son mentor, et le charismatique Jack, Line devra affronter des obstacles redoutables dans un pays où les trafiquants règnent en maîtres. Mèneront-ils à bien leur mission ?
À PROPOS DE L'AUTRICE
Face aux épreuves dans sa vie personnelle et professionnelle,
Lindsay Pottier a découvert dans l’écriture un puissant moyen d’expression et de libération émotionnelle. À travers les mots, elle a trouvé un refuge où elle pouvait explorer ses passions et surmonter ses défis. "Chasseurs de têtes" est son premier ouvrage publié.
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Lindsay Pottier
Chasseurs de têtes
Tome I
Le commencement
Roman
© Lys Bleu Éditions – Lindsay Pottier
ISBN : 979-10-422-3472-0
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
— Arrête-toi, bordel !
Je saute par-dessus un jouet en traversant la pelouse et cours de plus belle.
Il me fait déjà regretter mes deux croissants que j’ai avalés ce matin ce crétin.
L’homme court de plus en plus vite et passe à travers les jardins des habitants du quartier miteux de Brooklyn.
Les gens sont déjà pauvres, mais cet idiot bousille tout sur son passage. Rien que pour ça, je vais lui coller mon poing dans la figure et aussi parce qu’il me fait courir depuis dix minutes et que j’ai mal aux pieds.
L’homme se détourne pour voir si je le suis toujours, se prend les pieds dans une chaise, tombe sur le gazon, se relève, mais pas assez vite. Je lui saute dessus façon Walker Texas Ranger et le plaque au sol. Le mec se débat et me retourne. Je me retrouve le dos au sol.
— Alors, tu fais moins la maligne maintenant ?
— Tu crois ça, hein ?
J’en profite pour lui mettre mon coude dans la figure et le mec tombe à terre, il se redresse, mais Riley arrive et lui tord le bras derrière le dos. Tout en le soulevant, il explique au gars qu’il est en état d’arrestation pour ne pas s’être présenté au juge.
— Ça va, toi ?
Je me relève.
— Ouais, ça va, merci. Tu en as mis du temps ! Tu foutais quoi ?
— Ben, j’ai vu que tu avais la situation bien en main, alors je t’ai laissé faire. Et puis, je voulais voir si ton entraînement avait porté ses fruits.
— Et ?
— C’est pas mal.
Riley me fait un clin d’œil. On part pour le commissariat de police où on doit remettre notre fugitif.
Mais revenons un peu en arrière, je me présente, je m’appelle Line. J’ai vingt-sept ans, cheveux châtains, yeux verts, assez grande, un mètre soixante-dix pour cinquante-cinq kilos. Je suis mince, je m’entretiens en faisant tout un tas de sports que Riley m’a obligée à pratiquer à cause de notre profession. Je vous expliquerai ça plus tard.
J’ai un sale caractère, enfin, j’ai du caractère, quoi !
Je dis ce que je pense sans contrainte et parfois, ça ne passe pas auprès des autres qui disent de moi que j’ai une grande gueule.
Ben, ça aide parfois d’avoir une grande gueule, enfin, passons.
Je suis arrivée dans l’État de New York à vingt ans. Non, je ne suis pas Américaine, mais Française, pure souche ! Je me suis attiré quelques ennuis en France alors, comme les États-Unis m’ont toujours attirée et plus particulièrement New York – ne me demandez pas pourquoi, je ne sais pas trop –, enfin je pense que toutes les séries policières que je matais étant gamine m’ont forcément influencée. Du coup, j’ai pris le peu d’affaires que j’avais et me voilà débarquée dans un autre univers.
Ce qui m’a tout d’abord frappée en arrivant, c’est la chaleur étouffante en ce mois d’août, avec tous ces véhicules en circulation, le bruit des klaxons toute la journée…
Vous me direz, je suis en ville, quoi de plus normal ?
La population qui est très importante, huit millions quatre cent six mille habitants, ça fait pas mal de gens et beaucoup de piétons. Tous ces immenses immeubles, comme dans les films… Je suis allée dans un café pas trop loin de l’aéroport et j’ai vu des annonces pour des hôtels et des appartements dans le quartier de Brooklyn. J’ai dégotté une petite chambre dans une pension vraiment dégueulasse, mais vu ma fortune personnelle, je n’ai pas le choix. Expatriée, vingt ans, j’ai dû trouver un emploi rapidement pour continuer à vivre dans cet endroit, en attendant d’avoir un peu plus d’argent pour me payer un appartement. Donc, quelle alternative avais-je à part être serveuse ? Je ne connais pas bien l’anglais et je n’ai aucun diplôme. J’ai épluché les petites annonces et j’ai réussi mon entretien.
Au bout d’une semaine, j’ai été recrutée au bar du coin de la rue. Le patron m’a regardée à plusieurs reprises, avec mes tatouages et mes yeux surmaquillés au crayon noir.
J’ai dû lui faire peur.
— C’est quoi ton petit nom, ma jolie ?
— Line.
— Hum !
Il prend une grande latte sur sa clope en continuant à me mater de travers.
— Tu as un accent ? Tu viens d’où ?
— De France.
— Ah ! J’ai vécu quelque temps là-bas, dans ma jeunesse. Tu sais que ton visa ne dure que quatre-vingt-dix jours ? Après tu devras repartir en France ou avoir une carte verte de travailleur immigré.
— Je sais.
Il tire encore une bouffée.
— Bon, voilà ce qu’on va faire : je te prends à l’essai pour une semaine, si tu ne renverses pas tes boissons sur les clients et que tu ne piques pas dans la caisse, je te ferai un contrat comme serveuse dans mon bar, ça te va ?
— Oui, monsieur.
— Et il faudrait que tu caches un peu plus tous tes tatouages. Là, je le regarde et lui sors :
— Pour mes bras, ce ne sera pas négociable, il fait trente-cinq degrés à l’ombre et je ne vais pas mettre des manches longues. Et, soit dit en passant, je ne pense pas que votre clientèle va se plaindre de mes tatouages.
Il reprend une bouffée sur sa clope.
— OK ça marche, et mon nom c’est Bill, pas « Monsieur ». Tu commences demain et tu feras toutes les soirées, c’est mieux payé. Tu sais te défendre ?
— Je n’ai jamais pris de cours, mais je sais me battre verbalement.
— Ça, je n’en doute pas. On a des videurs donc ne t’inquiète pas pour ça. Allez, à demain soir, dix-neuf heures.
Ma semaine d’essai s’est finie et Bill m’a dit que je pouvais rester, car je n’étais pas trop conne, merci, et qu’il y avait plus de mecs qui venaient depuis que je bossais ici, du coup il avait plus de tunes.
Et voilà comment une petite Française fraîchement débarquée s’installe à New York. Au bout de trois mois, j’ai commencé, par la force des choses, à parler et comprendre mieux l’anglais. Bill me parlait en français quand il voyait que je ne captais rien. Un soir, une bande de motards, les « Eagles » a débarqué au bar, il devait être une petite dizaine de gars en blouson de cuir, jeans, casque et bandanas sur la tête. Je n’ai pas pu m’empêcher de sourire quand je les ai vus entrer, le cliché typique des motards.
Le bar de Bill est décoré de façon très standard, c’est-à-dire qu’il n’a que le strict minimum dedans. La porte est en verre, le bar en chêne est tout de suite en face de celle-ci, et fait un angle droit. Sur le côté gauche de la porte d’entrée se trouvent plusieurs banquettes en vieux cuir marron déchiré un peu partout, sur la droite, des tables avec des chaises. Derrière les sofas, on peut apercevoir une salle un peu plus sombre où se trouvent trois billards, un juke-box et deux flippers. Quand je vous disais que c’était un vieux bar. Tout le monde fume dedans alors que c’est interdit, mais bon, c’est Bill le boss, alors s’il dit que c’est OK, ben, ça l’est. Il m’a avoué quelques semaines après mon arrivée qu’il avait un deal avec les flics du quartier et qu’ils ne venaient pas l’emmerder pour si peu.
Je me suis approchée de la table des motards pour prendre les commandes.
— Bonsoir, messieurs, que prendrez-vous ce soir ?
— Ils se sont tous arrêtés de parler et m’ont regardée avec insistance. En gros, ils m’ont maté le cul puis ont rigolé et enfin l’un d’eux a pris la parole.
— Salut, ma jolie, t’es pas du coin toi ?
À ce moment précis, il commence déjà à me gonfler. Allez, respire un grand coup et réponds gentiment au gentleman qui se trouve devant toi.
— Quel esprit de déduction vous avez ! Est-ce mon accent qui m’a trahie ?
— On peut dire ça. Bon, on va prendre des chopes de bière et dix babys. C’est comment ton petit nom ?
— Line. Je reviens avec vos boissons.
— Eh, Line ? Tu n’as pas répondu à ma question ? Tu viens d’où ?
— France.
Sur ce, je file voir le barman et lui passe ma commande. Bill s’approche de moi.
— Ça va avec les motards ?
— Ouais, je gère.
— Fais quand même gaffe, tu sais, ce ne sont pas des rigolos ces gars-là.
— Message reçu, boss. Si j’ai un souci, j’appellerai Mike.
Mike, c’est le videur que Bill a engagé, car vu notre clientèle nocturne, il s’est dit que ce ne serait pas du luxe et ma foi, il n’avait pas tort. Il a fait pas mal de sports de combat et à ce qu’il m’a dit, il a été garde du corps pendant quelque temps pour de riches personnalités.
J’aimerais bien qu’il garde mon corps à moi aussi, mais bon là, on s’éloigne du sujet.
Il est grand, dans les un mètre quatre-vingt-quinze, doit peser au bas mot cent quinze kilos de muscles. Il me fait rire, car sous son apparence de grand costaud, il est super timide. C’est à peine s’il me dit bonjour alors moi forcément, je n’arrête pas de lui poser plein de questions et je vois bien qu’il est mal à l’aise.
Ben quoi ? Faut bien que je me marre moi aussi.
Je repars avec mes boissons vers la table des motards. Je pose les chopes de bière et les babys.
— Voilà vos consommations, appelez-moi s’il vous faut autre chose.
Au moment où je me retourne, l’un des gars me met une main aux fesses.
— Ça va aller, je crois, j’ai tout bien en main.
Là, tous ses copains se mettent à rire et à taper sur la table.
À ce moment précis, je regarde Bill qui me fait non de la tête, mais c’est déjà trop tard. Je me tourne et chope la main du type et la retourne vers le haut. Le gars cri de douleur et de surprise. Je lui relâche la main et lui dis :
— Mon cul n’est pas un jouet, alors garde tes mains dans tes poches.
Tous les mecs assis à table me regardent et celui qui m’avait demandé mon prénom les fait taire d’un signe de la main. J’en conclus que c’est lui, le chef.
— OK on se calme les gars. Ça va, Jeff ?
— Ouais, c’est bon.
— T’as des couilles, toi ! C’est notre faute, on s’excuse. Tu as du cran et j’aime ça. Moi, c’est Jack.
Là, il me tend sa main. J’hésite un petit moment et finis par la prendre. Il me regarde et ajoute :
— On vient souvent dans le coin, mais je ne t’avais jamais vue avant ?
— Ça fait que trois mois que je suis à New York.
— T’as fait tes tatouages en France ?
— Ouais…
— Ils sont sympas ! Écoute, pour nous faire pardonner ce geste, je pourrais t’emmener faire une balade sur ma moto ?
Je le regarde, un peu sceptique, et lui réponds :
— Le prends pas mal, mais t’es pas un peu vieux pour traîner avec une fille comme moi ?
Il me regarde et se met à éclater de rire. Je l’observe d’un peu plus près et remarque ses fossettes quand il sourit, ses longs cheveux blonds qui lui arrivent aux épaules, son visage fin avec cette mâchoire carrée et sa barbe de quelques jours.
Très séduisant.
— Je ne sais pas exactement quel est ton âge, Line, mais en ce qui me concerne, j’ai vingt-cinq ans.
— J’en ai vingt.
Je marque une pause et lui demande :
— Comment tu as fait pour te retrouver à la tête d’un club de motards à vingt-cinq ans ? La plupart de tes gars sont plus vieux que toi ?
— Ah ça ? Je te le dirai si tu viens faire un tour avec moi.
— T’es sérieux ? Je ne te connais pas et tu crois que je vais gentiment monter sur ta bécane parce que tu as une jolie gueule ?
Jack me regarde et s’allume une clope. À ce moment-là, je me dis que j’aurais peut-être dû fermer la mienne.
— C’est déjà pas mal, tu me trouves à ton goût.
Je me rends compte qu’il a de l’humour.
Heureusement pour moi.
— Bon, voilà ce qu’on va faire, Line, on va forcément se revoir vu que tu bosses ici et que moi et mon club, on vient souvent se détendre dans le bar de Bill. On va apprendre à se connaître et quand tu seras prête, je t’emmènerais faire ce tour, ça te va ?
— C’est bon pour moi.
Je m’éloigne de leur table et repars vers le bar. Je sens le regard de Jack sur moi et celui d’un autre type que j’ai déjà vu plusieurs fois, mais je n’ose pas me retourner. Je le regarde du coin de l’œil et vois qu’il me mate toujours. Je mets ça sur le compte de ma petite altercation avec le groupe de motards et je pars vers d’autres tables qui attendent pour passer commande.
Jeff se tourne vers Jack.
— Elle t’a tapé dans l’œil la petite ?
— C’est vrai, j’aime sa façon de voir les choses et puis elle n’a pas eu peur de toi alors qu’on est dix gars à table et ça, je respecte. On verra ce que ça donne. Allez, les gars, buvons aux femmes de caractère.
— Aux femmes de caractère !
J’entends toutes les chopes de bière s’entrechoquer et les motards rire aux éclats.
J’ai évité de peu les emmerdes.
À la fin de mon service, Bill vient me voir.
— T’as bien géré avec les motards tout à l’heure.
— Jack m’a dit qu’il venait souvent ici, mais en trois mois, c’était la première fois que je les voyais, comment ça se fait ?
— Tu sais ma belle, ils partent souvent de la ville pour leurs affaires, parfois pendant plusieurs semaines.
— Tu les connais depuis longtemps ?
— Je connaissais bien la famille de Jack, son père était le chef du club et à sa mort, c’est Jack qui a repris les affaires. Fais gaffe, Line, Jack est un gentil garçon, mais ça reste un chef de club et ses affaires ne sont pas au goût de la justice.
— OK, merci pour les infos, je rentre maintenant. Ah ! Autre chose Bill, c’était qui l’autre gars qui était au fond de la salle près des billards ?
— Riley ?
— Je ne sais pas, un brun aux yeux bleu gris.
— Ouais, c’est bien lui. C’est un habitué, pourquoi ?
— Je ne sais pas, il me matait quand je me suis embrouillée avec les motards.
— Ah ! Tu sais, ma belle, tout le bar t’a matée et plus d’une fois.
Bill me fait un clin d’œil et repart essuyer ses verres derrière le comptoir.
T’as peut-être raison, je deviens parano à force.
— Bon allez, à demain, Bill, Mike.
Celui-ci me fait un signe de la tête et commence à fermer les stores.
Je prends la direction de ma chambre qui est à deux cents mètres du bar. Je regarde les rues qui se ressemblent toutes, je relève les yeux et observe les étoiles, la nuit est dégagée et je me demande comment est le ciel en France. Petit moment de nostalgie dans cette immense ville où tout le monde se croise, mais personne ne se connaît vraiment. J’arrive à mon hôtel, je monte les deux étages et m’arrête devant ma porte, numéro 222 B. Je prends mes clés dans mon sac et l’ouvre. Je jette le tout sur mon lit et m’effondre aussi dessus. Je reste un instant comme ça, avant de me décider à me relever et à enlever mes Doc Martens. Je me déshabille vite fait et pars sous la douche. Je suis fatiguée et je n’ai pas trop le moral, je ne me suis pas fait d’amis et les seuls que j’intéresse, c’est pour mon cul.
C’est déprimant !
Je sors de la salle de bains et regarde ma chambre.
Tu m’étonnes que je déprime.
Elle est décorée façon années 70/80 avec de grosses fleurs en guise de tapisserie, un lit en pin avec sa table de chevet, un petit bureau où j’ai posé mon ordinateur et une salle de bains minuscule avec vue sur les toilettes. La classe ! Je me dirige vers mon ordi et décide de regarder les annonces concernant les appartements. Il est temps que je me bouge les fesses et que je parte de ce trou à rat. Au bout de deux heures, j’avais mal aux yeux et au crâne, mais j’avais repéré quatre appartements dans mon budget et pas trop loin de mon taf. Je regarde l’heure sur mon ordi, cinq heures du matin, je décide d’aller me coucher et de les appeler le lendemain.
La sonnerie de mon portable me réveille vers dix heures du matin, je jette un œil et constate que c’est Mike. Étonnée, je décroche :
— Salut beau gosse, quoi de neuf ?
— Salut, Line, je t’appelle, car je connais un endroit où tu pourrais crécher si ça te dit ?
Euh ! C’est sympa, mais comment tu sais que je cherche quelque chose d’autre ?
— Je ne parle pas beaucoup, mais j’observe. Et je sais où tu vis donc je me suis dit que tu en aurais peut-être marre, mais si ça te convient comme ça…
— Non, attends, justement j’ai regardé les annonces hier soir, il est où ton appart ?
— À Columbia Heights, pas très loin d’ici, mais c’est plus calme.
— Il est à qui ?
— À moi.
— OK très bien, je peux le visiter quand ?
— Cet après-midi si tu veux, je ne bosse pas ce soir.
— Ça marche, on se rejoint où ?
— Je passerai te prendre vers quatorze heures, c’est bon ?
— Pas de souci, à tout à l’heure et merci.
— Pas de problème.
Bon, ça au moins, c’est une bonne nouvelle. Je décide de me lever et de me prendre un super grand café au vendeur du coin. Je mets ma tenue pratique de tous les jours, à savoir, mon jeans, un débardeur, un pull, ma veste en cuir marron et mes Doc Martens. Je me maquille un peu et dévale les escaliers. Au moment où j’ouvre la porte du hall, je tombe nez à nez avec Jack. Surprise, je manque de perdre l’équilibre et me rattrape de justesse.
— Tiens, salut, Jack ! Qu’est-ce que tu fais là ?
— Bonjour à toi aussi ma belle. Il me déshabille du regard. Et là je peux vous dire que ce n’est pas un euphémisme.
— Tu pars où comme ça de si bon matin ?
— J’allais me prendre un café au vendeur du coin. Et toi tu fais quoi devant ma porte ?
— J’allais t’offrir un café. Je te dépose ?
— Euh, ouais.
Je monte sur sa Harley-Davidson, il me tend un casque et je m’accroche à sa taille. Je me rends compte à ce moment-là qu’il est sacrément bien foutu. Je peux sentir son ventre dur sous mes doigts. Un peu gênée, je desserre mon étreinte et Jack se met à rire.
— Ne sois pas intimidée, Line, il faut bien que tu t’accroches quelque part et moi ça ne m’ennuie pas du tout, tu sais ?
— Je m’en doute.
Le vent commence à se lever et je rentre ma tête dans mon cou. On est en novembre et il commence à faire froid.
Merde, j’aurais dû prendre mon écharpe.
Encore, quelques jours et la neige sera là. Jack fait démarrer sa moto et on descend la route qui mène au café. Je commande mon maxi latte et lui, un corsé. Il me fait signe de la tête et on commence à marcher le long du parc.
Où sont tous tes potes motards ?
Jack sourit et me répond :
— Au club, ils ne sont pas toujours avec moi tu sais, Line.
— Pourquoi tu souris ?
— C’est toi qui me fais rire, tu as toujours de ces questions !
— Ouais je sais, je suis un peu trop curieuse.
— J’aimerais t’en poser une ?
— Vas-y ?
— Pourquoi une jeune femme aussi débrouillarde et gentille que toi a-t-elle atterri à New York ? Ça m’intrigue.
— Ah ça ! Comme tu le sais, je viens de France. J’ai eu quelques petits problèmes là-bas et j’ai voulu changer d’air. J’ai toujours aimé New York alors je me suis dit, pourquoi pas ? J’ai pris tout l’argent qui me restait, mes fringues et je suis partie. Voilà ! Et toi, c’est quoi ton histoire ?
— J’ai l’impression que c’est un peu plus compliqué que ça, mais ça me va comme réponse. Tu as commencé jeune à te faire tatouer ?
— Oui, j’avais dix-sept ans.
— Je m’en doutais, car pour avoir tes manchettes entièrement faites ainsi que ton dos et le reste, ça prend du temps.
— Je sortais avec un tatoueur donc c’est vrai que j’en ai pas mal. Parle-moi un peu du chef des « Eagles » ?
Je lui souris tout en avalant une gorgée de mon latte.
— Tu sais que tu as vraiment de très jolis yeux, Line.
Prise au dépourvu, je rougis comme une tomate. Jack se met à rire et se rapproche de moi. Il passe son pouce sur ma joue en feu, me regarde un instant et pose ses lèvres sur les miennes. Waouh ! Ses lèvres sont douces et chaudes en même temps. Il prend mon visage dans sa main et pose son autre main dans mon dos. Je suis complètement à sa merci et je réponds à son baiser en retour. Ça faisait un bon moment que plus personne ne m’avait embrassée comme ça, avec passion et tendresse. Jack me regarde à nouveau et met fin à notre étreinte.
— J’aime beaucoup quand tu rougis comme ça, Line, ça me donne envie de t’embrasser.
— Ah ! Euh oui, j’ai vu.
— Alors que veux-tu savoir sur moi ?
On se remet à marcher et Jack me prend la main. Je ne dis rien et lui demande :
— Je sais déjà que tu es le chef du club, mais je me demande pourquoi tu n’as pas tout un tas de midinettes collées à toi ?
— Ah ! La question sur les filles ? J’en ai eu plusieurs, je l’avoue, mais aucune qui m’intéresse vraiment.
— Pourquoi ?
— Ce sont des filles faciles, elles ne voient que le côté « je sors avec un motard », et moi, ça me gonfle.
Tu vois quoi en moi alors ?
Jack s’arrête de marcher, me regarde et me dit :
— Je vois une belle jeune femme qui ne craint pas de dire ce qu’elle pense, qui ne prête pas attention au regard des autres et qui a beaucoup d’humour. Une jeune femme que j’aimerais mieux connaître si elle le veut bien.
Je me mets de nouveau à rougir et Jack me prend dans ses bras et me sourit.
— Tu as du mal avec les compliments toi !
— Oui, c’est vrai, je ne suis pas habituée. D’habitude, ce sont plus des réflexions sur mon caractère que je reçois que des compliments.
— Je vois.
— Je t’avoue que ça me fait bizarre de me balader avec toi, main dans la main.
— Tu sais, Line, je peux être très doux quand il le faut.
— Je n’en doute pas.
On continue notre balade et Jack me ramène à ma chambre.
— Tu bosses ce soir ?
— Non, pourquoi ?
— Ça te dirait de venir au club avec moi ?
— Ce n’est pas un peu tôt ? Enfin je veux dire, on s’est juste embrassé alors…
— Line, je ne te demande pas en mariage. Je veux juste te montrer mon club.
— OK, ça marche.
— Je passe te prendre vers vingt heures, habille-toi chaudement, car sur une bécane, il fait froid.
— À tout à l’heure alors.
Je descends de la moto. Jack me retient le bras et m’attire à lui. On s’embrasse un long moment puis il me laisse partir. Il démarre et s’en va. Je reste un moment, là, devant la porte, à le regarder partir, complètement sous le choc de cette matinée. Je n’en reviens pas de sortir avec Jack. Bon ben, ça, c’est fait.
Je remonte les marches jusqu’au deuxième étage et rentre dans ma chambre.
En une matinée, j’ai trouvé un appartement et un mec. Que demander de plus !
Mike arrive comme prévu à quatorze heures. Je monte dans son 4x4 et on prend la direction de Columbia Heights.
— Je ne savais pas que tu habitais ce quartier ? J’ai cru entendre qu’il y avait un parc pas loin ?
— Oui, c’est pour cette raison que j’ai acheté là-bas, j’aime bien faire mon jogging dans ce parc.
— Pourquoi tu veux le louer alors ?
J’emménage avec ma copine ce week-end alors c’est pour ça que je te le propose.
— Ta copine, hein ? Tu m’avais caché ça ? Elle s’appelle comment ?
— Qu’est-ce que tu es curieuse toi !
Je le vois faire un demi-sourire.
Ce qui est déjà super rare.
— Alice.
— Et elle fait quoi, Alice, comme travail ?
— Coiffeuse.
Je vois qu’il ne veut pas en dire plus donc je me cale bien au fond de mon siège et regarde le paysage défiler. C’est vrai que c’est magnifique. On s’éloigne un peu de la ville et la verdure se profile. Ça fait dix minutes qu’on roule. On arrive dans un quartier résidentiel. C’est vraiment typique des USA, toutes ces maisons bien alignées avec leur gazon bien tondu et aucune clôture. Je souris et je repense à ma série d’enfance, Beverly Hills 90210. Dans ce quartier en revanche, il n’y a pas autant de voitures de luxe, mais je le trouve mignon et calme. Ça me rappelle mon enfance en France. Je me ressaisis et dis à Mike :
— C’est vraiment joli ici.
— Je savais que ça allait te plaire. On y est.
Mike gare le 4x4 devant une maison à la façade blanche. Je le regarde, étonnée.
— Je croyais que tu m’avais dit que c’était un appartement ?
En fait, c’est une maison avec un étage, comme tu peux le voir. Il y a deux chambres et j’aimerais louer les deux, en faire une coloc quoi. Ça te dit ou pas ?
— Carrément. Avoir un peu de compagnie me fera du bien. Tu as trouvé la deuxième personne ?
— Pas encore, tu es la première, comme ça tu pourras choisir ta chambre.
— Génial ! Bon, tu me fais visiter ?
— Suis-moi.
On avance sur une allée en pierre blanche avant de gravir trois marches pour se retrouver sous un porche en bois. Une petite table et deux rocking-chairs s’y trouvent. Mike ouvre la porte et me laisse entrer dans le hall. Un superbe escalier trône au milieu de celui-ci. Sur ma droite, on peut apercevoir le salon-salle à manger. La pièce est de forme hexagonale avec deux fenêtres. Sur ma gauche, la cuisine tout équipée.
C’est ce que j’aime ici, tu peux emménager avec juste une valise, il y a tout ce qu’il faut dans la maison, des meubles à l’électroménager.
Je suis Mike à l’étage. On arrive sur un petit palier, les deux chambres sont sur la gauche et s’ensuivent la salle de bains et les toilettes. Les deux chambres sont identiques, je choisis la première, je rentre dans la salle de bains. Une double vasque avec un énorme miroir à droite ; à gauche, il y a une baignoire et une douche.
La douche est hallucinante !
On peut largement y rentrer à deux. Je m’imagine Jack sous l’eau lavant son corps musclé. Je commence à rougir et Mike me dit :
— Ça va, Line ? T’es toute rouge ?
— Oui, oui, très bien. Elle est grande, dis donc, la douche !
— Tu as vu mon gabarit ? Je voulais être à l’aise.
— Je comprends.
— Alors tu en penses quoi ?
— Je serais folle si je te disais qu’elle ne me plaisait pas. Mais tu ne m’as pas dit combien tu en veux pour le loyer.
— C’est huit cents, mais vu que vous serez deux, ça te fait quatre cents dollars.
Je lui souris et lui tends la main.
— Marché conclu, Mike, tu as ta première locataire.
— OK viens avec moi, je vais te montrer l’extérieur.
— On n’a pas tout vu ?
— Non, suis-moi.
Je suis excitée comme une puce. On repasse dans la cuisine et Mike ouvre une porte. Je le suis et me retrouve sur une terrasse couverte ouvrant sur un beau jardin avec de la pelouse et trois arbres fruitiers. Typique du coin.
— Waouh ! C’est vraiment très joli et reposant.
— Ouais, j’aimais bien venir me ressourcer dans ce jardin. Je déménage ce week-end donc tu pourras emménager la semaine prochaine, ça te va ?
— Carrément ! Merci, Mike, d’avoir pensé à moi. Je n’aurais pas pu trouver une maison à ce prix-là.
— Ça sert à ça les amis.
Depuis mon arrivée à New York, c’est la première fois que quelqu’un me considère comme son amie. J’en ai les larmes aux yeux et préfère me retourner pour ne pas que Mike le voie.
Ben quoi ! J’ai ma fierté, moi.
Après ma petite séance émotion, Mike me ramène chez moi. Il est déjà presque dix-sept heures. J’enfile mon jogging et mes baskets. Je mets mon bonnet et cale mon MP3. Je suis fin prête pour aller courir un peu. Je sors de l’hôtel, respire un bon bol d’air frais et commence à petites foulées. Je fais le tour du pâté de maisons. J’ai commencé à courir à mon arrivée à Brooklyn. Étant seule la plupart du temps, ça m’a permis de ne pas devenir folle et d’évacuer mon angoisse. De plus, je reste en forme et comme je suis une femme active, j’ai besoin d’un défouloir. Et le voici. Quand je m’aperçois que le soleil a décliné et qu’il commence sérieusement à faire sombre, je reprends la direction de l’hôtel. Plus que quelques jours à vivre ici et bye-bye ma chambre pourrie !
Je rentre rapidement et me dirige vers la douche. Je dois me dépêcher, car Jack ne va pas tarder et je ne suis pas prête. Ce que je redoutais arrive, j’entends deux coups frappés à la porte.
Merde, c’est lui.
— J’arrive. Une minute !
J’ouvre la porte et vois ce beau gosse en jeans et cuir noir me faire l’un de ses plus jolis sourires, puis me dévisage.
— Euh ! Ce n’est pas la tenue à laquelle je pensais quand je t’ai dit de t’habiller plus chaudement.
— Je sais idiot, entre. Je reviens de mon jogging et j’allais sous la douche. Je n’ai pas vu l’heure passer, désolée.
— Tu me parles de douche là ?
Je me mets à rougir jusqu’aux oreilles et me rends compte de l’invitation que je viens de lui faire sans le vouloir. Il s’approche de moi et m’embrasse avec passion.
— Je croyais que t’emmener au club ça allait trop vite, mais bon, moi, ça me va très bien la douche comme préliminaire.
Je lui mets un coup de poing sur l’épaule.
— Je ne t’ai pas dit que tu venais avec moi.
— Mais si je le veux ?
Je suis prise de court et ne sais pas quoi lui répondre. Alors je commence à me déshabiller. J’enlève d’abord mon haut, puis mes baskets et enfin mon jogging. Jack ne me quitte pas des yeux et sourit. Je me retrouve en string et soutien-gorge devant lui pour la première fois, mais bizarrement, je ne suis pas gênée. Je le regarde à mon tour. Il enlève son blouson qu’il jette par terre puis retire ses chaussures, son jeans et passe son tee-shirt par-dessus sa tête. Je peux enfin admirer son corps et croyez-moi, il est carrément canon !
— Je vois que je ne suis pas la seule à avoir des tatouages.
— En effet ma belle. Approche !
Je m’exécute. Il me prend dans ses bras et caresse ma joue.
— Tu es magnifique dans cette tenue, Line.
Je pouffe de rire et l’embrasse. Je m’éloigne un peu pour admirer ses tatouages de plus près. Tout son torse est recouvert d’un aigle aux ailes déployées avec des flammes rouges et orange sur le côté. Je suis de mon doigt le contour du rapace et je le sens frémir. Je continue mon exploration en descendant vers son ventre pour voir deux 357 magnums qui se croisent. Je sens qu’il n’y a pas que son corps qui réagit à mes caresses. Il me prend la main, me relève la tête et m’embrasse. Son baiser est sauvage et fougueux. Il me chope les cuisses et me soulève. Je l’entoure de mes jambes et il me plaque contre le mur. On continue à s’embrasser, je mets ma main dans ses cheveux.
Il sent si bon !
Il dégrafe d’une main mon soutien-gorge, me l’enlève et le jette par terre. Il prend l’un de mes tétons dans sa bouche et commence à le sucer fort. Il joue avec sa langue et je commence à suffoquer de plaisir. Il me repose à terre et joue doucement sur mon corps. Il pose ses mains d’abord sur mes seins puis commence doucement son exploration.
— Tu es vraiment très excitante, Line ! Tu te rends compte dans quel état tu me mets ?
— Oui là, je le sens bien en fait !
Il se met à rire et glisse jusqu’à mon string. Il s’accroupit et me le retire d’un geste. Il m’écarte les cuisses et je sens sa langue faire des va-et-vient contre mon clitoris.
Au bordel que c’est bon !
Il alterne entre sa langue et des aspirations fortes. Je me mets à jouir. Il s’arrête et se redresse.
— Ce n’est que le début ma belle ! Suis-moi.
Il allume la douche, enlève son boxer et me tend la main.
Je suis restée bloquée sur son sexe. Il est dressé et n’attend qu’une seule chose, moi. Je me rends compte qu’il me tend la main et la prend. Il m’embrasse.
— Tu vois comme je suis prêt à te recevoir ? Depuis que je t’ai vue au bar, j’ai envie de toi. Tu me rends fou, Line.
Il m’embrasse de plus belle et introduit un doigt en moi. Je bouge de plaisir sous ses caresses. Je prends son sexe dans ma main et commence à descendre puis monter tout doucement. Je l’entends grogner sous mes caresses et ça m’excite encore plus. Il me soulève de nouveau et introduit son sexe soudainement. Je retiens mon souffle et lâche un soupir de plaisir. Il va doucement puis accélère la cadence. J’ai mes bras accrochés à son dos et le serre de plus en plus tout en déhanchant mon bassin. J’ai du mal à respirer. Toutes ces sensations en même temps me donnent le tournis. J’ai la bouche ouverte et le souffle court. Il continue à rentrer en moi, de plus en plus vite, puis je le sens qui me serre un peu plus et je le vois partir dans l’extase. Il jouit bruyamment et je me joins à lui en criant comme une folle. Il me pose et m’embrasse avec fougue.
— Mon Dieu, Line, c’était magnifique !
Il promène ses mains sur mes hanches et descend sur mes fesses. L’eau coule sur nos corps. Il me regarde avec tendresse. Je ne sais pas à quoi il pense à ce moment-là, mais se reprend et me dit :
— On la prend cette douche ?
J’éclate de rire et pose ma tête sur son torse.
— J’adore ton humour, Jack.
— Il n’est pas trop vieux pour toi ?
— Tais-toi et passe-moi le shampoing !
— Tout ce que tu veux, ma belle.
— J’aime bien quand tu dis ça.
— Tu aimes le contrôle, hein ?
— J’avoue. J’aime diriger.
— C’est bon à savoir.
Je lui donne une tape sur l’épaule et commence à me laver. Il fait de même de son côté. On sort de la douche et on commence à se rhabiller quand le portable de Jack se met à sonner.
— Ouais ! On arrive de toute manière. Ça marche.
Je finis de me sécher les cheveux et Jack pointe le bout de son nez.
— Tu es prête ?
— Ouais, c’est bon.
J’enfile mon écharpe, mon blouson et ferme la porte derrière moi. C’est la première fois que je vais rentrer dans un club de motards et je suis tout excitée. Je monte derrière Jack, je mets le casque qu’il me tend et c’est parti !
Sa moto fait un bruit très sourd.
J’adore !
— Je ne t’ai pas demandé, il est où ton club ?
— Sortie de Brooklyn.
— OK.
Je me tais pendant tout le trajet. Je profite du paysage. De nuit, Brooklyn n’est plus la même. Les familles ont fini leur journée et rentrent chez elles alors que nous, c’est le moment qu’on choisit pour sortir et s’amuser. L’ambiance y est tout à fait différente et dangereuse. Les rues défilent devant nous avec toutes ses lumières. C’est magnifique ! On arrive à la sortie de Brooklyn. Je ne me suis jamais aventurée jusque-là.
En même temps, je ne vois pas ce que je serais venu faire ici.
On prend une petite route sur la droite. On continue sur 200 mètres et soudain se dresse devant moi une énorme bâtisse en bois. Jack gare sa moto en marche arrière, prêt à partir si besoin est. Il me tape sur la cuisse.
— On y est ma belle. Voici mon repaire !
Je lui souris et descends de selle.
— C’est joli !
— Attends de voir l’intérieur. C’est une vieille grange qu’on a intégralement retapée.
— Je te suis, beau gosse !
Jack me prend la main et m’embrasse.
— Ce que tu peux être désirable, tu sais !
— On m’a dit ça deux ou trois fois, je crois.
Jack éclate de rire et me tire vers la porte.
— Il n’y a pas à dire, j’adore ton humour.
Il ouvre la porte et une musique assourdissante vient taper dans mes oreilles. De la fumée sort de l’ouverture de celle-ci et j’entre à mon tour. À peine arrivés, Jeff vient à notre rencontre.
— Salut, Jack, Line. C’est un plaisir de te revoir.
— Merci. Pour moi aussi, du moment que tu gardes tes mains dans tes poches.
— Tu ne l’as pas volé celle-là, répond Jack.
— C’est vrai, je m’excuse encore pour l’autre jour.
— C’est bon, t’inquiète !
— Va te prendre une bière au bar, ma belle, je dois voir quelques trucs pour le club avec Jeff et après je suis tout à toi.
Il m’embrasse sur la bouche et se dirige vers une pièce qui se trouve derrière le bar. Je présume que c’est son bureau. Bon, je me retrouve toute seule dans un club de motards où je ne connais que le chef.
Je ne suis pas dans la merde ! Allez, prends ton courage à deux mains et va au bar, ma fille.
— Salut ! Tu pourrais me servir une pression ?
Le barman me regarde du coin de l’œil.
— T’es la nouvelle pouliche de Jack ? C’est ça ?
Alors, comment te dire que je ne suis pas une jument ?
Je respire un bon coup et lui fais mon plus beau sourire.
— On peut dire ça comme ça, mais bon, c’est très imagé. Tu ne trouves pas ?
Le gars rit et pose sa clope dans le cendrier.
— Je vois ce qui lui a plu chez toi. Assois-toi. Je t’apporte ça tout de suite.
— Merci.
Il pose devant moi une bière.
— Vous avez eu le temps de manger entre deux baises ?
Je manque de m’étouffer avec ma gorgée et repose ma chope sur le comptoir. Tous les mecs autour de moi se mettent à rire.
Génial ! Ça se voit sur ma gueule ou quoi ?
Je décide de ne pas répondre et bois une autre gorgée. Le barman me tend une assiette avec de la charcuterie et du pain.
— Tiens, pour faire passer le tout.
Et là, rebelote, ils se remettent tous à rire.
— C’est trop généreux !
— Que veux-tu, on est comme ça nous autres, très généreux.
Je commence à manger quelques tranches de saucisson. Je ne m’étais pas rendu compte que j’avais super faim. Je n’ai pas eu le temps de manger un morceau avant que Jack ne débarque et encore moins après. Je suis dans mes pensées quand je vois Jack sortir de son bureau. Il vient s’asseoir à côté de moi.
— Ça va ma belle ? John ne t’a pas trop embêtée ?
— Alors c’est John ton prénom ? Tu n’as pas la tête d’un John.
— C’est pour ça que tout le monde m’appelle Jo. Et tu fais bien de faire pareil.
— Ok Jo, ça me va.
— Allez, viens, Line, on va se faire un billard.
Je suis Jack jusqu’au fond du club où se trouvent les quatre billards. Je prends au passage l’assiette de charcuterie et j’entends Jo qui me crie :
— Ça donne toujours faim après !
Je deviens toute rouge et Jack me prend par la taille.
— Laisse tomber, il te taquine pour voir ce que tu as dans le ventre. Mais c’est vrai que tu m’as donné faim.
Je lui souris et pose l’assiette sur une petite table.
— Tu sais jouer au billard américain ?
— Non, juste au Français.
— Viens par-là, je vais t’apprendre les règles.
Pendant qu’il explique, je regarde tout autour de moi. C’est un grand club, en effet. Il y a plusieurs tables avec des chaises, des banquettes contre les murs. Une énorme tête d’aigle empaillée est suspendue juste au-dessus du bar qui fait toute la longueur de la salle. Plusieurs portraits sont accrochés aux murs. Jack suit mon regard et sourit.
— Celui-là, c’est mon père.
— Ah désolée, je ne t’écoutais plus.
— J’ai vu.
— Tu lui ressembles beaucoup. C’est de famille d’être beau gosse.
— Ouais, je sais. Que je lui ressemble, je veux dire.
— On la fait, cette partie, les amoureux ?
— Je crois que Jeff s’impatiente.
Jack me réexplique les règles et on commence la partie.
Le week-end de mon emménagement arrive enfin. J’ai récupéré plusieurs cartons et j’ai rangé tout ce que j’avais dedans. Jack vient m’aider avec son 4x4, car je n’ai pas acheté de voiture. Pas assez de sous.
— Ce sont toutes tes affaires ça ? Quatre malheureux cartons ?
— Oui. J’économise pour m’acheter une voiture.
Plusieurs mois ont passé depuis mon emménagement à Columbia. Mike m’a trouvé une coloc, Nancy. On ne se voit pas beaucoup, car elle bosse de jours dans un magasin de prêt-à-porter. Nous sommes dans ma saison préférée, le printemps. Nos arbres fruitiers sont en fleur, ça sent super bon et les journées sont plus douces. Je sors toujours avec Jack, mais ses affaires le font partir souvent de Brooklyn. Je ne lui pose jamais de questions sur ses départs, je sais bien ce qu’il fait et franchement, je ne veux pas tremper là-dedans.
J’ai su, par inadvertance, que Jack avait racheté le bar de Bill, il y a de cela plusieurs années. Je comprends mieux maintenant pourquoi les flics leur foutent la paix et pourquoi Jack et son club sont si souvent là-bas. En fait, ils ont acheté pratiquement tous les commerces de Brooklyn au fil des années. Une certaine routine s’est installée entre nous deux. Il fait ses affaires pour le club la journée et me rejoint le soir au bar. Il attend que je finisse mon service et après, soit il vient chez moi, soit je vais au club. Il a une chambre là-bas, c’est sa maison. Ça fait deux semaines que je n’ai pas eu d’appel de Jack. Je sens la chance tourner. Je décide de me rendre au club après mon service. Mike m’a trouvé une petite Audi pas chère.
Je peux enfin me déplacer sans toujours devoir demander à quelqu’un de m’aider. Le pied !
Arrivée sur place, je vois sa moto. Je rentre dans le club, mais ne le trouve pas. Je m’approche de Jo.
— Salut, Jo, Jack est dans son bureau ?
Je vois Jo se décomposer et mettre un peu de temps avant de me répondre.
— Euh non, il n’y est pas. Mais je lui dirai que tu es passée.
— Laisse tomber, je sais où il est.
Je passe sur le côté du bar et prends la direction de sa chambre. J’entends Jo qui me crie :
— Tu ne devrais pas faire ça !
Trop tard ! J’ouvre la porte et vois Jack sur une superbe blonde en train de lui faire l’amour.
Quand je vous disais que je ne le sentais pas.
Je suis restée quelques secondes sous le choc, sans pouvoir bouger ou parler. La fille me voit et me dit :
— Tu ne vois pas qu’on est occupé là, pétasse !
Jack se retourne et me voit. Il se retire de la fille et reste comme ça, s’en bouger. La fille le regarde, énervée.
— Putain, tu fais quoi, là ?
— La ferme, Eva.
Je retrouve mes esprits.
— Je vois que tu es bien rentré et que tes affaires se portent bien, Jack. Bonne continuation !
Jack ne bouge pas et ne dit pas un mot.
Sur ce, je referme la porte et quitte le club. Ce n’est qu’une fois arrivée à la maison que je pète un plomb.
Bordel ! Je ne l’ai pas vu venir celle-là. Mais pour qui il me prend, ce con. En même temps, je ne sais pas à quoi je m’attendais venant d’un motard. Quelle conne ! J’aurais dû le savoir, il n’y a que les régulières qui ne se font pas tromper. Et Jack ne m’a jamais dit que je l’étais.
Au fond de moi, je savais que ça finirait comme ça. Ça finit toujours comme ça.
Je me mets sur le canapé et laisse couler mes larmes. Je suis furieuse après moi, car je commençais à tenir à lui.
Mais quelle conne !
Il faut savoir que chaque club à ses propres règles. En ce qui concerne les motards, les femmes sont pour eux comme un jouet. La plupart d’entre elles d’ailleurs, considèrent que c’est un honneur que l’un des gars s’intéresse un peu à elles. Ils changent de filles comme de bottes. Mais quand la relation devient sérieuse, le motard dit à ses potes que c’est sa régulière. En gros, il ne doit plus la tromper. Elle fait partie intégrale du club, ils la protégeront et elle sera au courant de leur business.
Je pensais, visiblement à tort, que Jack tenait un minimum à moi. Mais sa petite démonstration de tout à l’heure m’a prouvé le contraire.
Ne trouvant pas le sommeil, je décide de me changer et d’aller courir un peu. Ouais, je sais, on est en pleine nuit, mais là, j’ai vraiment besoin d’évacuer. Je suis le même parcours que d’habitude. Je longe le pâté de maisons et prends la direction du parc. J’aime courir là-bas. C’est calme et je peux mettre de l’ordre dans mes idées. Au bout de trente minutes, je rentre en petites foulées à la maison. Je suis fatiguée physiquement et mentalement.
Je remarque une voiture garée un peu plus haut dans la rue. Je suis sûre qu’elle n’y était pas quand je suis partie tout à l’heure. Je fais semblant de ne pas l’avoir vue et rentre chez moi. Je prends une bonne douche et monte me coucher. Demain sera un autre jour !
Trois jours ont passé et Jack n’a toujours pas remis les pieds au bar. Je suis soulagée, mais angoissée à l’idée qu’il revienne aussi. Il faudra bien qu’on se revoie vu que c’est son bar. La poisse !
Une demi-heure avant la fin de mon service, je prends les sacs poubelles et me dirige vers la porte pour les mettre dans la benne à ordures, quand je repère cette même voiture qui s’était garée quelques jours plus tôt dans ma rue. Intriguée, je pose les sacs et m’approche de celle-ci. Une Audi A1, gris métallisé.
Jolie caisse !
Je note discrètement la plaque et me retourne pour me retrouver nez à nez avec le beau brun aux yeux gris/bleu. Je sursaute et un petit cri m’échappe.
— N’ayez pas peur, je ne mords pas. C’est ma voiture qui vous intéresse ?
Prise en flagrant délit, je décide de mentir.
— Elle est jolie. Je voulais juste voir de plus près, c’est tout.
— Pas de problème.
— Vous êtes un habitué du bar, je me trompe ?
— En effet, je viens régulièrement quand je suis dans le coin. Je me présente, Riley. Et vous êtes ?
— Line, la serveuse, mais ça, vous avez dû le remarquer.
— Comment ne pas vous remarquer, Line ?
— Ah ! Très bien, je dois rentrer maintenant, j’ai fini mon service. Bonsoir, Riley.
— Bonsoir, Line.
Ah ben merde alors ! C’est au beau brun qu’appartient la voiture qui était garée dans ma rue. Je vais questionner Bill à son sujet.
De retour dans le bar, je vais directement voir Bill.
— Dis-moi, Bill, ce Riley, il fait quoi dans la vie ?
— Il est chasseur de têtes.
— C’est quoi ça ?
— Chasseur de primes, si tu préfères. La police fait appel à ses services quand ils ont des personnes qui ne sont pas venues témoigner ou qu’ils doivent arrêter, mais qu’ils n’ont pas le temps de le faire eux-mêmes. Monnayant un pourcentage pour le chasseur de têtes, évidemment. C’est un métier très risqué, car la plupart des types qu’il doit arrêter sont des hors-la-loi, donc tous armés. Et crois-moi, ils savent s’en servir. Riley s’est fait tirer dessus plusieurs fois d’ailleurs. Pourquoi tu t’intéresses à lui ?
— Comme ça, je suis curieuse, car je l’ai vu pendant plusieurs semaines au bar et puis plus rien pendant plusieurs mois.
— Suivant ses contrats, il peut s’absenter longtemps.
— Je vois. Merci pour ces renseignements, je rentre. À demain.
— À demain, ma belle.
Bon maintenant que j’en sais un peu plus, je ne suis plus du tout rassurée.
Merde ! On n’a quand même pas mis un contrat sur ma tête ? Bill m’avait dit de faire gaffe à mes fréquentations et moi, je fais quoi ? Je sors avec le chef du club des « Eagles ». Super idée, Line !
Allez, respire un bon coup. Ne va pas te faire des idées.
Depuis que j’ai surpris la voiture de Riley devant chez moi, je regarde partout où je vais.
Une vraie parano !
Ce week-end-là, Jack débarque au bar avec toute sa clique. Je le vois entrer alors que je sers une table. On se regarde un petit moment et je me dirige vers le bar pour poser mes verres vides. Je reviens vers leur table et leur dis :
— Salut, les gars, je vous sers quoi ce soir ?
Jeff prend la parole :
— Quatre whiskys et des chopes de bière.
— OK, je vous emmène ça.