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Face à l’effondrement de notre civilisation, l’urgence est palpable. Perdus et désorientés, nous sommes submergés par la peur du chaos imminent, nous jetant dans les bras des vendeurs de rêves et transformant chacun en consommateur insatiable et terriblement seul. Il est crucial de changer de cap, de redécouvrir la dimension sacrée de la vie et de réintroduire la spiritualité au cœur de nos préoccupations personnelles et collectives pour préserver la beauté de ce monde précieux.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Comme beaucoup d’adolescents,
Georges Lançon fut tôt intrigué par la question du sens de la vie. En 1979, la découverte de l’enseignement du Bouddha lui offrit des réponses et marqua le début d’un long parcours de pratique et d’études bouddhiques. Aujourd’hui, certifié en Méditation de Pleine Conscience, il partage son expérience avec ceux qui souhaitent s’engager dans cette voie.
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Georges Lançon
L’invitation au voyage intérieur
Se tourner vers la lumière
De l’urgence du spirituel
face à l’effondrement du monde
Essai
© Lys Bleu Éditions – Georges Lançon
ISBN : 979-10-422-4556-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L. 122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L. 122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L. 335-2 et suivante du Code de la propriété intellectuelle.
Aux éditions l’Harmattan
Ces banlieues qui nous font peur, une stratégie d’action pour transformer la gestion des quartiers d’habitat social
Aux éditions Velours
Religion et laïcité, la recherche du sens, une réponse à la question sociale
Aux éditions Panthéon
Lever les voiles, le logement social, à côté de quoi sommes-nous passés ?
À compte d’auteur sur Amazon
Pourquoi je suis « Toujours ! » bouddhiste ? Quelques clefs pour comprendre comment l’engagement spirituel peut aider au quotidien ;
De la Pleine Conscience à la présence du cœur,commentaires du célèbre texte du bouddhisme tibétain « Lodjong » pour ouvrir son cœur et son esprit ;
Le courage de vivre, la Voie Sacrée du Guerrier selon l’enseignement de Chögyam Trungpa.
À mes fils Ludovic et Pierre
Pourquoi « se tourner vers la lumière » ? Et de quelle lumière s’agit-il ? Ces questions supposent la reconnaissance d’une obscurité dans laquelle nous serions plongés. Il nous suffit d’observer le continuum de notre vie pour distinguer, çà et là, des épreuves et des ténèbres d’une profondeur parfois indicible. Et parce qu’il convient « d’aller de l’avant », nous jouons souvent à être heureux. Dans cet élan, nous reconnaissons la joie quand elle se présente, accueillons la beauté d’une fleur, célébrons l’amitié. Nous vivons ainsi dans un clair-obscur.
À ce jeu de bascule s’ajoutent les menaces inédites chaque jour plus perceptibles. Aux incertitudes grandissantes, l’Occident ne semble plus offrir comme contre-feu que le divertissement, la marchandisation intégrale du monde et l’idéal post-humaniste. Avec la perte des valeurs héritées de la Grèce antique, du christianisme primitif et de la Renaissance, certains n’hésitent pas à parler de déclin de notre civilisation.
Jamais le mythe de la caverne de Platon n’aura été aussi actuel. Dans ce mythe, des prisonniers, enchaînés depuis leur naissance au fond d’une caverne, ne voient que les ombres projetées sur la paroi rocheuse par des objets situés derrière eux et éclairés par un feu. Ces ombres constituent leur seule réalité. Un jour, un prisonnier est libéré. Après une douloureuse acclimatation à la lumière, il découvre le monde extérieur et le soleil, symboles de la vérité et de la connaissance. Il revient ensuite vers ses compagnons d’infortune pour les « éclairer ». Aucun n’accepte ce témoignage, préférant l’illusion des ombres.
La sagesse est sans doute cette lumière qui transforme une vie et abolit les résistances au changement. Les philosophes des Lumières ont rêvé justement de pouvoir transformer le plomb de l’ignorance en or de la connaissance. À leur manière, les géants du numérique et les milliardaires de l’IA poursuivent aujourd’hui cette utopie, celle d’un monde meilleur. Mais à la raison se substitue la démesure ; à la connaissance, les savoirs fragmentés et instantanément partagés.
Georges Lançon dresse une analyse pertinente de cette aspiration, de ses conséquences et de nos difficultés à échapper à la déliaison avec la nature et le sacré. « L’effondrement du monde » – pour reprendre une expression du sous-titre – coïncide avec le sentiment d’être égaré, livré à soi-même, dans un état de grande vulnérabilité et de porosité intérieure inégalée.
Si l’auteur accueille les « lumières » de la philosophie indienne traditionnelle, celles du bouddhisme essentiellement, ce n’est pas pour tourner le dos à l’Occident, mais bien pour faire appel à des méthodes éprouvées permettant d’assembler un puzzle dont nous aurions oublié le modèle. Ainsi, la critique des excès de la rationalité, l’exploration des contradictions de la société moderne et le constat relatif à la fin des grandes transcendances mettent en relief notre besoin d’une quête de sens. C’est pourquoi orienter notre regard vers l’immémoriale pensée indienne peut être un pas de côté salutaire pour celles et ceux qui se confrontent à la question décisive, celle du « Qui suis-je » ? Cette question demeure centrale dans la métaphysique indienne, car l’ombre première est bien celle de l’ignorance de soi-même.
Cette ignorance s’ignore elle-même. Elle est une puissance d’aveuglement qui se cristallise dans les conventions linguistiques, les pratiques sociales et morales, au point de nous enfermer dans un rêve collectif unanimement partagé. Ce rêve masque l’absence de la connaissance authentique par une pseudo-connaissance très élaborée, efficace et complexe, dont l’une des formes coïncide aujourd’hui avec la pensée purement technique et scientifique.
Cette méconnaissance de soi naturelle se renforce au gré de notre façon de penser et de concevoir le réel. Elle poursuit l’œuvre mystérieuse qui consiste à nous éparpiller dans le monde des formes et des représentations mentales, renforçant les limites de la conscience de soi, l’attachement à soi-même et le jeu des désirs. Autrement dit, l’ombre première jette son dévolu sur tous nos actes, au point de nous réduire à une cohorte d’aveugles guidés par d’autres aveugles, comme dans le tableau éponyme de Brueghel l’Ancien.
Cependant, cette ignorance conserve un obscur souvenir de la nature authentique du réel. Elle relève donc de l’oubli. Pour reprendre le mythe de la caverne de Platon, nous sommes en effet enchaînés, mais nos chaînes ne comportent pas de verrous. Étrangement, nous ne pensons pas à vérifier une telle situation, convaincus de l’impossibilité de notre liberté. Incapable de s’éclairer elle-même, notre conscience nous maintient enchaînés dans un état de servitude. Or, à tout moment, nous dit la pensée indienne, nous pouvons nous libérer de cette vue mentale erronée pour laisser s’épancher la béatitude incréée de l’état naturel.
Fort de cette compréhension, de sa longue et profonde amitié pour le bouddhisme tibétain, de sa grande expérience de méditant et d’instructeur certifié du programme MBSR, Georges Lançon expose avec clarté les principaux enseignements du Bouddha. Son ouvrage prend ainsi la forme d’un guide pour naviguer avec sérénité sur les eaux souvent tumultueuses de la vie. C’est aussi un manuel de transformation de soi, car il met en avant notre sens de la responsabilité et notre capacité à construire une vie personnelle plus accomplie, pour le bien du plus grand nombre.
Alain Grosrey
Auteur chez Albin Michel du Grand Livre du bouddhisme (2007), d’Initiation au bouddhisme, un chemin pour lire en soi-même (2022) et du long-seller Le Cercle des Anciens. Des hommes-médecine du monde entier autour du Dalaï-Lama (1998, [co-écrit avec Patrice Van Eersel], rééd. Livre de Poche, 2022).
Le sage n’est donc pas simplement plus vertueux que les autres, il est devenu la vertu en devenant la sagesse.
Ce savoir-sagesse a transformé son esprit, son désir, ses volontés, son rapport aux autres, son rapport à lui-même – de manière si profonde et si radicale qu’il a désormais échappé définitivement au malheur d’exister.
Mais cette « sapience » qui rend sage n’est pas un savoir théorique, une suite d’idées, d’analyses, de concepts. C’est un transformateur. Ce que le sage sait l’a transformé en un autre.
Ce savoir fondamental concerne le sens de l’existence – ses buts ou son absence de buts – et détient le pouvoir unique de faire rendre à l’existence un son juste.
Roger Paul Droit
Ce livre n’est pas un essai de philosophie ni de science sociale. Il n’a pas la prétention d’offrir un savoir issu de recherches universitaires. C’est un témoignage basé sur une double expérience. L’auteur fut confronté à l’âge de 9 ans au décès de sa sœur aînée. La mort avait franchi le seuil de la maison, y avait installé la douleur de l’absence et n’en est plus jamais sortie. Ses parents, inconsolables, porteront le deuil jusqu’au terme de leur vie en 2009. Cette expérience, et surtout sa durée, a provoqué dès l’adolescence en lui une immense anxiété à laquelle il n’a pas su répondre. Éduqué dans la religion catholique durant son enfance, il chercha en vain les clefs de compréhension à son désarroi, ressentant un vide vertigineux que rien ne pouvait combler. Dans cette quête éperdue, il tourna la page de ce que la culture ambiante lui offrait. La psychologie et la psychanalyse qui commençaient à prendre place dans la société apportèrent un début de compréhension, toutefois insuffisant, ses questions étaient d’une autre nature. Le trouble qui le heurtait sans cesse était plus profond. Une question centrale le préoccupait : pourquoi ? Derrière cette question formulée à l’envie se nichait celle du sens, à vivre, à étudier, à faire, à travailler. Comment orienter ses choix et sa vie ? Le rapport à l’existence, à la nature, aux autres et au monde constituait un socle de questionnement qu’aucun argument de raison n’était en mesure de combler. Attiré par l’hindouisme et le yoga, de manière plus instinctive que rationnelle, il eut le pressentiment que la philosophie des pays d’Orient avait peut-être les réponses à ce mal-être existentiel. C’est plus tard, à l’âge de 30 ans, qu’il rencontra le Maître tibétain Kyabié Kalou Rinpoché. C’était un vieil homme, un sage. Ne parlant que tibétain, ses paroles étaient traduites en français. Elles le touchèrent profondément. Il prit refuge auprès de lui et compris son message, laisser tomber le questionneur et ses questions, et travailler sans relâche à sa transformation intérieure, un programme de vie ! Ces expériences fondèrent son existence. Une ligne directrice avait été trouvée, un sillon commençait à dessiner son empreinte. Il devient instructeur de méditation en 2002. En 2007, il fut le président fondateur du mouvement scout bouddhiste « Les Éclaireuses et Éclaireurs de la Nature » qui aujourd’hui regroupe quelque 2000 membres. En 2014, il découvre le programme d’enseignement de la Méditation de Pleine Conscience (MBSR), initié par Jon Kabat Zinn. Le cadre non confessionnel proposé offrait la possibilité d’apporter la méditation à un public plus large. Formé à cette pratique, il devient instructeur certifié du programme MBSR. Pèlerin apaisé, il fonde avec Pierre l’association Quiétude au sein de laquelle il partage son expérience, et les ressources découvertes au cours de son parcours, avec les êtres désireux de s’engager dans cette voie. Ainsi poursuit-il son chemin.
Si vous dites que rien ne vous ennuie, que vous n’avez pas de problèmes dans votre vie, que tout va pour le mieux dans la société, que le monde traverse une période idyllique, et qu’il ne saurait être question d’interpeller vos croyances, alors vous pouvez en rester là et ne pas lire la suite. Si ce n’est pas le cas et que des préoccupations sournoises tissent votre quotidien d’une lueur grisâtre alors, prenez quelques instants pour questionner le chemin que nous sommes en train de parcourir.
Si vous dites que le bouddhisme est une religion dont témoignent les moines, les monastères et les rituels, vous avez raison. Pour les 600 millions d’Asiatiques, cela ne fait aucun doute, c’est le cas. Mais pour la France qui reçoit ces enseignements depuis quelques dizaines d’années seulement, cette évocation est questionnante. Dans une société sécularisée et laïque, qui a rejeté la religion à l’extérieur du champ social, affirmer la dimension religieuse de l’enseignement du bouddha, jette un trouble. La réponse communément admise, rassurante, est que le bouddhisme est une philosophie. Il se trouve que celui-ci est beaucoup plus. Notons au passage une évidence, ce n’est pas Bouddha qui a institué le bouddhisme, ce sont ses successeurs. Lui-même a enseigné pendant près de 40 années, des propositions et des méthodes pour mieux vivre sa vie, en répondant à des questions et non en créant un corpus doctrinal destiné à être transmis. Sur un plan philosophique, le bouddhisme est une phénoménologique de l’esprit, c’est-à-dire un courant philosophique, dont l’objectif est d’observer et de décrire le sens attribué à une expérience, à partir de la conscience qu’en a le sujet qui la vit. C’est aussi une métaphysique dans le sens où la nature fondamentale de la réalité est étudiée. Il répond à de nombreux concepts tels que l’être et l’identité, l’espace et le temps, la causalité, la nature de la conscience, le soi, la relation entre l’esprit et la matière, le flux mémoriel circulant d’une vie à l’autre… S’arrêter à ces considérations serait toutefois réducteur et insuffisant pour englober la totalité. Associé aux dimensions philosophiques, l’enseignement propose également des moyens pour en faire un outil opératif, qui œuvre chez les pratiquants. C’est une praxis, une pratique transformatrice. Révolutionnaire, car il installe du sens à exister et des moyens pour s’y relier et s’y sentir profondément heureux, au-delà de toutes les contingences, favorables ou défavorables de la vie. Pour ses adeptes, quelle que soit l’étude des phénomènes physiques ou mentaux, l’esprit ou ses composants psychologiques, la libération est le but du chemin.
Cet essai s’adresse aux questeurs désireux d’avancer sur la connaissance de soi et ayant le désir de sortir des cadres civilisationnels institués, barrières dont il est difficile de s’affranchir. Se libérer des formes connues pour cheminer à la rencontre de ce que d’autres civilisations ont fait émerger comme savoirs et connaissances. Cette rencontre Orient/Occident peut être une opportunité pour la construction d’un monde plus harmonieux.
Nous sommes pèlerins, en marche, « en chemin vers l’éveil », de passage sur terre, il faut découvrir le sens de cette marche et de cette fatigue qui attaque parfois à tel ou tel tournant. Peut-être les mots sont-ils décevants, mais ils font miroiter un trésor, à la fois proche et inaccessible…
Auteur inconnu
La recherche du bonheur est le moteur de tout être vivant. L’arbre cherchant le soleil, les escargots attendant la pluie, le paon rayonnant d’ocelles pour attirer la femelle, la mante religieuse dévorant le mâle qui la féconde… Dans cette nature sauvage, la morale n’a d’horizon que la satisfaction légitime d’un besoin naturel irrépressible. Tout semble réglé d’avance, comme la durée de rotation de la Terre autour du soleil nécessite 365,26 jours depuis quelques milliards d’années. La nature a fixé des règles pour que l’ensemble trouve durablement sa cohérence et permette à chaque « étant » de perpétuer la vie. Les non-humains sont assez prévisibles dans leurs demandes, se nourrir, donner la vie, se protéger des dangers, et pour les plus avancés dans la chaîne de l’évolution, jouer. Tous les jours les mêmes activités jusqu’au dernier instant.
Dans cette symphonie bien réglée, un être semble avoir une place singulière, l’homme. Ce désir de bonheur simple, attribué au monde des non-humains, lui est insuffisant. Sa recherche s’augmente d’un double désir. La stabilité et la durabilité de celui-ci. Quand quelque chose est bon, tout l’effort fait pour en garder une satisfaction durable est une source de souffrance, celle-ci disparaît quoi que l’on fasse pour la retenir. Les processus addictifs sont un témoignage exacerbé de cette tendance générale : la frustration liée à la disparition du plaisir. Difficile de sortir de cet enchaînement. L’attachement au plaisir est un moteur puissant qui va au-delà des simples besoins. Désir d’intensité, de changement, d’exotisme, d’étourdissement même, et par-dessus tout supprimer la rupture dans la chaîne désir/plaisir. La recherche d’un état émotionnel élevé et permanent monopolise toutes les ressources. Il ne suffit pas de ressentir un bref contentement pour être heureux, une joie, éphémère ou intense, n’est pas suffisante. Le bonheur recherché serait un état de satisfaction et de complétude qui ne doit ni ternir, ni s’effacer, ni être soumis aux conditions de variabilité et d’impermanence de la vie. La difficulté pour s’y maintenir est un mal prométhéen. Le mythe grec décrivait avec pertinence cette aporie constitutive, le désir de toute-puissance confronté à la fragilité de l’existence. L’être humain, voleur de feu, être souffrant, cloué au rocher, torturé par le vautour venant lui dévorer un foie qui renaît chaque jour. Le mythe de Prométhée pointait le risque de déséquilibre et de décentrage dû à la condition humaine.
L’homme possède le feu sacré de la connaissance et de la technique, en est-il vraiment digne ? Toutes les vicissitudes du monde actuel semblent indiquer que le chemin de l’harmonie n’est pas encore venu. L’antiquité avait observé depuis longtemps ce point de bascule vers lequel se dirigeait l’humanité. Nous y sommes aujourd’hui. Il faut se réinventer pour survivre. Peut-être en passant un nouveau pacte avec les dieux, autrement dit en retrouvant un chemin spirituel. Le principal obstacle à la survie de l’homme est l’homme lui-même. Regardant le monde sans passion ni frayeur excessive, se découvre l’évidence criante d’un déséquilibre manifeste. Il suffit de se connecter aux sources médiatiques existantes pour se rendre compte qu’une boîte de pandore s’est ouverte. Dans toutes les aires géographiques de la planète, les sociétés traversent une multitude de crises ou de dérèglements, écologique, économique, alimentaire, sociale, politique, conflits et guerres… Sur un plan individuel, malgré d’évidents progrès de la médecine, la dégradation physique est un horizon inévitable. Le corps continu au fil de la vie à perdre ses qualités physiques. La santé s’amoindrit, se dégrade, la vieillesse, la maladie et la mort, sont des perspectives qui font obstacle à l’idée de permanence, de durabilité. Quels que soient les progrès accomplis, la maîtrise de plus en plus poussée de la science et de la technique ne fournit pas les clefs de l’éternité.
Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel, dit un proverbe que l’on retrouve dans de nombreuses civilisations. L’humanité est arrivée à un moment critique où il lui faut choisir. Le danger n’est éradiqué que par des actions appropriées. Ni la fuite ni le déni ne sont des modes opératoires efficaces. La viabilité de la planète pour la vie de tous, humains et non humains n’est pas encore gagnée. Tant d’obstacles sont encore sur cette route, que la science et la technique vont devoir régler. Si les efforts engagés sont réels, certains disent insuffisants, arriveront-ils assez tôt pour enrayer l’irréversibilité ? La démographie du monde va devoir se stabiliser car la planète n’est pas extensible. L’univers est immense et regorge peut-être de terres de remplacement. Rien n’est moins sûr ! Selon l’indice de similarité avec la terre (IST), les scientifiques ont calculé que des centaines de millions d’exoplanètes seraient potentiellement habitables. Mais les premières d’entre elles se situent à plus de 4 années-lumière de distance. Pour tout dire inatteignables. Le troisième danger à résoudre est celui de la pauvreté. L’accès aux ressources minimales pour vivre. Selon Oxfam, il y a près de 700 millions de personnes en situation d’extrême pauvreté dans le monde, c’est-à-dire vivant avec moins de 2,15 dollars par jour (soit environ 64 euros par mois). À la congruence de ces trois dangers se surajoute leur dimension systémique et planétaire. Quand la pandémie de Covid s’est déclarée sur un marché en Chine, en quelques mois elle a affecté l’ensemble de la population du globe. Tout est en interconnexion avec tout et les difficultés rencontrées nécessitent une coordination collective, c’est-à-dire associer et impliquer les 197 États de la planète. Nécessaire aussi de sortir des logiques de spécialisation qui trop souvent conduisent chaque discipline à ne considérer que son champ. L’aventure offerte à l’humanité ne peut pas se satisfaire de progrès scientifiques et techniques. Ils seront indispensables car les difficultés sont immenses et 11 milliards de personnes promises pour la fin du XXIe siècle devront trouver des solutions.
Cet horizon, inquiétant par les risques qu’il pointe, porte en germe une évolution en marche, ce que le poète Hölderlin formulait ainsi Là où croît le péril croît aussi ce qui sauve :la transformation intérieure des êtres humains. Un chemin vers plus de lumière, une sorte de terre promise, Arcadie pour les Grecs, Shambhala pour les bouddhistes, Jardin d’Eden pour les religions du livre… Ce n’est pas un lieu géographique terrestre, c’est un état mental accessible à celui qui réussit à dépasser les effets des multiples sources de négativités et obscurcissements surgis en lui, nommés « kléshas » dans la tradition bouddhique. Sous leur emprise, les cinq énergies de sagesse primordialement présentes chez les êtres humains se manifestent sous la forme de cinq passions destructrices : l’ignorance-stupidité, la colère, l’orgueil, le désir-attachement, et la jalousie. Dans chaque individu se combinent toutes les possibilités en termes de pondération et d’intensité. Ces cinq passions et leurs déclinaisons multiples, qui encombrent tout le champ psychique intérieur des individus, obstruent la vision claire du présent. La proposition de cet essai est de livrer modestement quelques-unes des clefs de cette transformation intérieure, pour cheminer en beauté dans ce monde.
Tout Homme qui a entendu l’appel intérieur doit nécessairement suivre la voie qui mène du connu à l’inconnu, du manifesté au non manifesté, et qui finalement témoigne de l’existence d’un au-delà de toute possibilité de connaissance voire de toute possibilité de manifestation.
La vie n’est que Montée, la vie n’est que passage, une Pâque.
Juste le temps de poser le pied. Toujours repartir. Au-delà, l’Homme ne vit que dans son dépassement. Il ne s’atteint qu’en se perdant.
Henri le Saux
Georges Bernanos disait On ne comprend rien à la civilisation moderne si on ne comprend pas tout d’abord qu’elle est une immense conspiration universelle contre toute forme de vie intérieure. Il soulignait ainsi la place surplombante que la raison triomphante s’était octroyée, forte de ses conquêtes techniques. Cet écrivain français qui connut les deux guerres mondiales dans cette première moitié du XXe siècle savait de quoi il voulait parler. La distance qui s’était introduite entre les évolutions techniques depuis la période industrielle et les évolutions morales et sociétales étaient devenues absolument colossales. Dans les temps plus anciens, la force brute mise au profit de la haine et de la colère avait une portée relativement limitée. L’épée d’un guerrier pouvait tuer quelques personnes autour de lui, le poison également. Mais une bombe atomique avait la capacité d’anéantir d’un seul coup des centaines de milliers de personnes, ruiner des villes entières, provoquant mort et désolation, désastre irréparable. Décédé en 1948 quelque temps après Hiroshima et Nagasaki, Georges Bernanos pointait l’hubris du monde en devenir. Il en attribuait la déraison à l’ignorance de ce qui constitue l’être humain : la dimension d’intériorité dont la nature l’a dotée, condamnée par une exploitation exagérée du rôle de la raison dans tous les choix et décisions humaines. La relégation de toute forme d’approche intérieure dans les recoins cachés des inconscients personnels et collectifs. La vie et le monde pouvaient enfin exister dans l’univers simpliste, dessiné par les lignes de force de nos croyances, instituées en dogmes universels. Derrière la caricature d’un monde parfait, les droites savamment construites par l’ingéniosité technicienne se tordaient en sous-main. Les peuples résistaient à la domination culturelle, à l’écrasement de leur propre modèle, à la perte de leurs repères traditionnels. Quelque chose défaillait dans la vision idyllique d’un ordre raisonnable dont les paramètres pouvaient enfin se définir clairement et faire l’objet d’un partage « urbi et orbi ». L’Occident sûr de sa pertinence, convaincu d’être la « figure de proue » de l’évolution était devenu missionnaire. Il fallait aider les autres à franchir le chemin les séparant de la modernité. Dans ce moment de l’histoire du XXe siècle, l’anthropologie découvrait avec Claude Levy Strauss que l’Occident n’était pas seul au monde. Il montrait que la vision portée par des sociétés dites « moins avancées » ou « primitives » n’était pas désincarnée, elle s’était construite patiemment dans un rapport profond avec le territoire, les ressources, les environnements, l’histoire et les mémoires.