Le Bourgeois gentilhomme - Molière - E-Book

Le Bourgeois gentilhomme E-Book

Moliere

0,0

Beschreibung

Le Bourgeois gentilhomme de Molière est une comédie satirique qui plonge les spectateurs dans les arcanes de la société du XVIIème siècle. Ce livre est un incontournable de la littérature française, qui a su traverser les siècles pour devenir un classique de la comédie. Il raconte l'histoire de Monsieur Jourdain, un riche marchand qui rêve de devenir un gentilhomme. Il s'entoure d'un professeur de danse, d'un maître d'armes, d'un musicien et d'un philosophe pour l'aider à atteindre son objectif. Les efforts de M. Jourdain pour s'élever socialement sont à la fois comiques et pathétiques, et c'est grâce à cette ironie que Molière critique les prétentions de la société de son époque. Le livre est écrit dans un style brillant et spirituel, avec des dialogues savoureux et des personnages hauts en couleur. Il est également riche en enseignements moraux et sociaux, qui restent pertinents aujourd'hui encore. En résumé, Le Bourgeois gentilhomme est une comédie divertissante et réfléchie qui a su résister à l'épreuve du temps.


À PROPOS DE L'AUTEUR


Molière, de son vrai nom Jean-Baptiste Poquelin, est considéré comme l'un des plus grands comédiens et dramaturges français de tous les temps. Il a écrit et joué dans de nombreuses pièces comiques telles que " Tartuffe", " Les Fourberies de Scapin" et " L'Avare", qui ont encore un impact sur le théâtre et la culture populaire aujourd'hui. Il a également joué dans ses propres pièces et a dirigé sa propre troupe de théâtre, le Théâtre du Palais-Royal. Il a révolutionné le théâtre français en introduisant des personnages complexes et en explorant des thèmes sociaux et politiques. Sa vie privée était également riche en histoires et en controverses. Il est mort sur scène en 1673 lors d'une représentation de son dernière pièce " Le Malade Imaginaire". Molière est considéré comme un génie de la comédie et une icône culturelle en France.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 127

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Le Bourgeois gentilhomme

Molière

– 1670 –

 

 

NOTICE.

 

 

« C’est là, dit Voltaire, un des plus heureux sujets de comédie que le ridicule des hommes ait jamais pu fournir. » Voltaire a raison, car la sottise et la vanité, ces deux compagnes inséparables si bien personnifiées dans M. Jourdain, survivent à toutes les transformations sociales. Aujourd’hui, il n’y a plus ni bourgeois ni gentilshommes, et cependant M. Jourdain, tout en se métamorphosant, est aussi vrai qu’au temps de Molière. Sa vanité a changé d’objet, mais au fond elle est restée la même. Et c’est précisément parce que nous le connaissons tous, que le Bourgeois gentilhomme est l’une des pièces qui sont encore le plus goûtées et le plus applaudies du répertoire de Molière.

Le Bourgeois gentilhomme fut joué pour la première fois à Chambord, le 14 octobre 1670. Voici, sur la manière dont cet ouvrage fut accueilli par la cour, ce que M. Taschereau raconte d’après Grimarest : « L’impénétrable impassibilité que le roi conserva pendant la représentation, et la crainte qu’eurent les courtisans d’émettre un avis contraire à celui du monarque, les empêchèrent de se prononcer. Au souper, Louis XIV ne se déclara pas davantage, et l’on crut même remarquer qu’il n’adressa pas la parole à Molière, qui remplissait auprès de lui les fonctions de valet de chambre. Ce silence suffit pour persuader aux marquis et aux comtes, qui n’avaient point oublié leurs anciens griefs contre l’auteur, et auxquels le rôle de Dorante en fournissait même de nouveaux, que le roi partageait leur sentiment sur la pièce ; alors ils cessèrent de le dissimuler. Les censures les plus amères lui furent prodiguées ; et certain duc, dont la chronique a cru mal à propos devoir taire le nom, laissa plus particulièrement éclater son dépit et sa fureur. « Molière, disait ce zoïle titré, nous prend assurément pour des grues, de croire nous divertir avec de telles pauvretés. Qu’est ce qu’il veut dire avec son Ha la ba, ba la chou ? Le pauvre homme extravague, il est épuisé : si quelque autre auteur ne prend le théâtre, il va tomber dans la farce italienne ! ». Voilà ce que la vanité, la sottise et l’ignorance dictaient a monsieur le duc et à ses nobles confrères ; voilà ce qu’ils repétèrent tous à l’envi pendant cinq grands jours que la seconde représentation se fit attendre. Nous disons cinq grands jours : en effet, que l’on se peigne le malheureux Molière désespéré de ce concert de diatribes, mais plus encore du silence du roi, renfermé dans sa chambre, dont il n’osait sortir, et envoyant, de temps à autre, Baron chercher des nouvelles qui n’avaient jamais rien de consolant.

Enfin il arriva, ce jour qu’il redoutait même en le désirant. La seconde représentation fut aussi calme que la première ; mais le roi dit à Molière après le spectacle : « Je ne vous ai point parlé de votre pièce le premier jour, parce que j’ai appréhendé d’être séduit par la manière dont elle avait été représentée ; mais, en vérité, Molière, vous n’avez encore rien fait qui m’ait plus diverti, et votre pièce est excellente. » On rendrait difficilement la joie qu’un tel jugement, qu’un tel acte de justice fit éprouver au malheureux patient ; mais on aurait tort de se figurer que ses critiques, si violents et si acharnés, en demeurèrent confus. À peine l’approbation royale leur fut-elle annoncée qu’ils entourèrent Molière et l’accablèrent de louanges. « Cet homme-là est inimitable, disait ce même duc, naguère si furieux ; il y a un vis comica dans tout ce qu’il fait que les anciens n’ont pas aussi heureusement rencontré. »

Le 23 novembre de cette même année 1670, le Bourgeois gentilhomme fut représenté à Paris, sur le théâtre du Palais-Royal ; et là le succès fut encore plus grand que devant la cour, parce que chaque bourgeois, dit Grimarest, y croyait trouver son voisin peint au naturel, et ne se lassait point d’aller voir ce portrait. » Quelques personnes crurent aussi reconnaître dans M. Jourdain un chapelier nommé Gandoin, qui s’était rendu célèbre par ses prodigalités, et qui avait dépensé cinquante mille écus avec une femme de la connaissance de Molière.

Malgré les sarcasmes qui tombaient sur elle avec tant de gaieté et de malice, la bourgeoisie ne se montra nullement scandalisée. Elle rit de bon cœur et ne se fâcha point ; mais parmi les gens de cour, on murmura contre le rôle de Dorante, qui offrait le type accompli, et sans aucun doute très-reconnaissable, de ces chevaliers d’industrie du dix-septième siècle, si nombreux alors dans la haute société, et qu’on acceptait malgré leurs vices sur la foi de leur titre. Ce rôle offrait même aux ennemis de Molière une nouvelle occasion de le signaler comme un homme dangereux, qui ne respectait rien, pas même les marquis. Mais entre Molière et ses adversaires, il y avait Louis XIV ; et cette fois encore, l’attaque dirigée contre le poëte vint se briser contre la protection du grand roi.

Les critiques les plus compétents sont unanimes à reconnaître la verve et la puissante originalité des trois premiers actes du Bourgeois gentilhomme. « Ces trois actes, dit M. Génin — et c’est là aussi l’opinion de Geoffroy — égalent ce que Molière a produit de meilleur. Quel dommage que l’impatience et les ordres de Louis XIV aient précipité les deux derniers dans la farce ! Au reste, cette farce joyeuse n’est pas si loin de la vérité qu’elle le paraît. L’abbé de Saint-Martin, célèbre dans ce temps-là, justifie la réception du Mamamouchi : on lui fit accroire que le roi de Siam l’avait créé mandarin et marquis de Miskou, et il apposa sa signature à ces deux diplômes. Molière n’est jamais sorti de la nature ; ce n’est pas sa faute si le vrai n’est pas toujours vraisemblable1. »

1On sait que la réception de l’abbé de Saint-Martin se fit à Caen en 1686, c’est-à-dire seize ans après la première représentation du Bourgeois gentilhomme. Cette histoire a été recueillie en trois volumes in-12, sous le titre de Mandarinade, ou Histoire comique du mandarinat de M. l’abbé de Saint-Martin, marquis de Miskou, docteur en théologie, et protonotaire du saint-siége, etc. ; La Haye, 1738.

PERSONNAGES DE LA COMÉDIE.

 

MONSIEUR JOURDAIN, bourgeois2.

MADAME JOURDAIN, sa femme3.

LUCILE, fille de M. Jourdain4.

CLÉONTE, amoureux de Lucile5.

DORIMÈNE, marquise6.

DORANTE, comte, amant de Dorimène7.

NICOLE, servante de Jourdain8.

COVIELLE, valet de Cléonte.

UN MAÎTRE DE MUSIQUE.

UN ÉLÈVE du maître de musique.

UN MAÎTRE À DANSER.

UN MAÎTRE D’ARMES9.

UN MAÎTRE DE PHILOSOPHIE10.

UN MAÎTRE TAILLEUR.

UN GARÇON TAILLEUR.

DEUX LAQUAIS.

 

2Acteurs de la troupe de Molière : Molière.

3Hubert.

4Mademoiselle Molière.

5La Grange.

6Mademoiselle de Brie.

7La Thorillière.

8Mademoiselle Beauval.

9de Brie.

10Du Croisy.

PERSONNAGES DU BALLET.

 

DANS LE PREMIER ACTE.

UNE MUSICIENNE.

DEUX MUSICIENS.

DANSEURS.

DANS LE SECOND ACTE.

GARÇONS TAILLEURS dansants.

DANS LE TROISIÈME ACTE.

CUISINIERS dansants.

DANS LE QUATRIÈME ACTE.

cérémonie turque.

LE MUFTI.

TURCS assistants du mufti, chantants.

DERVIS chantants.

TURCS dansants.

DANS LE CINQUIÈME ACTE.

ballet des nations.

UN DONNEUR DE LIVRES dansant.

IMPORTUNS dansants.

TROUPE DE SPECTATEURS chantants.

PREMIER HOMME du bel air.

SECOND HOMME du bel air.

PREMIÈRE FEMME du bel air.

SECONDE FEMME du bel air.

PREMIER GASCON.

SECOND GASCON.

UN SUISSE.

UN VIEUX BOURGEOIS babillard.

UNE VIEILLE BOURGEOISE babillarde.

ESPAGNOLS chantants.

ESPAGNOLS dansants.

UNE ITALIENNE.

UN ITALIEN.

DEUX SCARAMOUCHES.

DEUX TRIVELINS.

ARLEQUINS.

DEUX POITEVINS chantants et dansants.

POITEVINS et POITEVINES dansants.

 

La scène est à Paris, dans la maison de M. Jourdain.

ACTE PREMIER.

L’ouverture se fait par un grand assemblage d’instruments ; et dans le milieu du théâtre on voit un élève du maître de musique qui compose sur une table un air que le bourgeois a demandé pour une sérénade.

 

 

 

Scène I.

UN MAÎTRE DE MUSIQUE, UN MAÎTRE À DANSER, TROIS MUSICIENS. DEUX VIOLONS, QUATRE DANSEURS.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE, aux musiciens.

Venez, entrez dans cette salle, et vous reposez là, en attendant qu’il vienne.

LE MAÎTRE À DANSER, aux danseurs.

Et vous aussi, de ce côté.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE, à son élève.

Est-ce fait ?

L’ÉLÈVE.

Oui.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Voyons… Voilà qui est bien.

LE MAÎTRE À DANSER.

Est-ce quelque chose de nouveau ?

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Oui, c’est un air pour une sérénade, que je lui ai fait composer ici, en attendant que notre homme fût éveillé.

LE MAÎTRE À DANSER.

Peut-on voir ce que c’est ?

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Vous l’allez entendre avec le dialogue, quand il viendra. Il ne tardera guère.

LE MAÎTRE À DANSER.

Nos occupations, à vous et à moi, ne sont pas petites maintenant.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il est vrai. Nous avons trouvé ici un homme comme il nous le faut à tous deux. Ce nous est une douce rente que ce monsieur Jourdain, avec les visions de noblesse et de galanterie qu’il est allé se mettre en tête, et votre danse et ma musique auroient à souhaiter que tout le monde lui ressemblât.

LE MAÎTRE À DANSER.

Non pas entièrement ; et je voudrois, pour lui, qu’il se connût mieux qu’il ne fait aux choses que nous lui donnons.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il est vrai qu’il les connoît mal, mais il les paie bien ; et c’est de quoi maintenant nos arts ont plus besoin que de toute autre chose.

LE MAÎTRE À DANSER.

Pour moi, je vous l’avoue, je me repais un peu de gloire. Les applaudissements me touchent, et je tiens que, dans tous les beaux-arts, c’est un supplice assez fâcheux que de se produire à des sots, que d’essuyer, sur des compositions, la barbarie d’un stupide. Il y a plaisir, ne m’en parlez point, à travailler pour des personnes qui soient capables de sentir les délicatesses d’un art, qui sachent faire un doux accueil aux beautés d’un ouvrage, et, par de chatouillantes approbations, vous régaler de votre travail11. Oui, la récompense la plus agréable qu’on puisse recevoir des choses que l’on fait, c’est de les voir connues, de les voir caressées d’un applaudissement qui vous honore. Il n’y a rien, à mon avis, qui nous paie mieux que cela de toutes nos fatigues ; et ce sont des douceurs exquises que des louanges éclairées.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

J’en demeure d’accord, et je les goûte comme vous. Il n’y a rien assurément qui chatouille davantage que les applaudissements que vous dites ; mais cet encens ne fait pas vivre. Des louanges toutes pures ne mettent point un homme à son aise : il y faut mêler du solide ; et la meilleure façon de louer, c’est de louer avec les mains. C’est un homme, à la vérité, dont les lumières sont petites, qui parle à tort et à travers de toutes choses, et n’applaudit qu’à contre-sens ; mais son argent redresse les jugements de son esprit ; il a du discernement dans sa bourse ; ses louanges sont monnoyées ; et ce bourgeois ignorant nous vaut mieux, comme vous voyez, que le grand seigneur éclairé qui nous a introduits ici.

LE MAÎTRE À DANSER.

Il y a quelque chose de vrai dans ce que vous dites ; mais Je trouve que vous appuyez un peu trop sur l’argent ; et l’intérêt est quelque chose de si bas, qu’il ne faut jamais qu’un honnête homme montre pour lui de l’attachement.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Vous recevez fort bien pourtant l’argent que notre homme vous donne.

LE MAÎTRE À DANSER.

Assurément ; mais je n’en fais pas tout mon bonheur ; et je voudrois qu’avec son bien il eût encore quelque bon goût des choses.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Je le voudrois aussi ; et c’est à quoi nous travaillons tous deux autant que nous pouvons. Mais, en tout cas, il nous donne moyen de nous faire connoître dans le monde ; et il paiera pour les autres ce que les autres loueront pour lui.

LE MAÎTRE À DANSER.

Le voilà qui vient.

 

Scène II.

MONSIEUR JOURDAIN, en robe de chambre et en bonnet de nuit ; LE MAÎTRE DE MUSIQUE, LE MAÎTRE À DANSER, L’ÉLÈVE du maître de musique, UNE MUSICIENNE, DEUX MUSICIENS, DANSEURS, DEUX LAQUAIS.

MONSIEUR JOURDAIN.

Hé bien, messieurs ? Qu’est-ce ? Me ferez-vous voir votre petite drôlerie ?

LE MAÎTRE À DANSER.

Comment ? Quelle petite drôlerie ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Hé ! la… Comment appelez-vous cela ? Votre prologue ou dialogue de chansons et de danse.

LE MAÎTRE À DANSER.

Ah ! ah !

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Vous nous y voyez préparés.

MONSIEUR JOURDAIN.

Je vous ai fait un peu attendre ; mais c’est que je me fais habiller aujourd’hui comme les gens de qualité ; et mon tailleur m’a envoyé des bas de soie que j’ai pensé ne mettre jamais.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Nous ne sommes ici que pour attendre votre loisir.

MONSIEUR JOURDAIN.

Je vous prie tous deux de ne vous point en aller qu’on ne m’ait apporté mon habit, afin que vous me puissiez voir.

LE MAÎTRE À DANSER.

Tout ce qu’il vous plaira.

MONSIEUR JOURDAIN.

Vous me verrez équipé comme il faut, depuis les pieds jusqu’à la tête.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Nous n’en doutons point.

MONSIEUR JOURDAIN.

Je me suis fait faire cette indienne-ci.

LE MAÎTRE À DANSER.

Elle est fort belle.

MONSIEUR JOURDAIN.

Mon tailleur m’a dit que les gens de qualité étoient comme cela le matin.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Cela vous sied à merveille.

MONSIEUR JOURDAIN.

Laquais ! holà, mes deux laquais !

PREMIER LAQUAIS.

Que voulez-vous, monsieur ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Rien. C’est pour voir si vous m’entendez bien. (Au maître de musique et au maître à danser.) Que dites-vous de mes livrées ?

LE MAÎTRE À DANSER.

Elles sont magnifiques.

MONSIEUR JOURDAIN, entr’ouvrant sa robe, et faisant voir son haut-de-chausses étroit de velours rouge, et sa camisole de velours vert.

Voici encore un petit déshabillé pour faire le matin mes exercices.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il est galant.

MONSIEUR JOURDAIN.

Laquais !

PREMIER LAQUAIS.

Monsieur.

MONSIEUR JOURDAIN.

L’autre laquais !

SECOND LAQUAIS.

Monsieur.

MONSIEUR JOURDAIN, ôtant sa robe de chambre.

Tenez ma robe. (Au maître de musique et au maître à danser.) Me trouvez-vous bien comme cela ?

LE MAÎTRE À DANSER.

Fort bien. On ne peut pas mieux.

MONSIEUR JOURDAIN.

Voyons un peu votre affaire.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Je voudrois bien auparavant vous faire entendre un air (montrant son élève) qu’il vient de composer pour la sérénade que vous m’avez demandée. C’est un de mes écoliers, qui a pour ces sortes de choses un talent admirable.

MONSIEUR JOURDAIN.

Oui, mais il ne falloit pas faire faire cela par un écolier ; et vous n’étiez pas trop bon vous-même pour cette besogne-là.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il ne faut pas, monsieur, que le nom d’écolier vous abuse. Ces sortes d’écoliers en savent autant que les plus grands maîtres ; et l’air est aussi beau qu’il s’en puisse faire. Écoutez seulement.

MONSIEUR JOURDAIN, à ses laquais.

Donnez-moi ma robe, pour mieux entendre… Attendez, je crois que je serai mieux sans robe. Non, redonnez-la-moi ; cela ira mieux.

LA MUSICIENNE.

Je languis nuit et jour, et mon mal est extrême Depuis qu’à vos rigueurs vos beaux yeux m’ont soumis. Si vous traitez ainsi, belle Iris, qui vous aime, Hélas ! que pourriez-vous faire à vos ennemis ?

MONSIEUR JOURDAIN.

Cette chanson me semble un peu lugubre ; elle endort, et je voudrois que vous la pussiez un peu ragaillardir par-ci par-là.

LE MAÎTRE DE MUSIQUE.

Il faut, monsieur, que l’air soit accommodé aux paroles.

MONSIEUR JOURDAIN.