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Max, un quadragénaire au passé tumultueux, voit sa vie basculer après avoir traversé des épreuves et des amours passionnés. À un moment crucial, il se lance dans une quête de reconstruction, à la recherche de tranquillité et de bonheur. Néanmoins, ce voyage intérieur, marqué par la résilience, pourrait bien bouleverser son destin de manière inattendue.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Rebecca Lens vous invite dans cet ouvrage à découvrir l’histoire d’une personne qui lui était profondément chère. Son meilleur ami, aujourd’hui disparu, a laissé une empreinte indélébile sur sa vie, forgeant son désir de lui rendre hommage.
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Seitenzahl: 370
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Rebecca Lens
Les femmes de sa vie
Roman
© Lys Bleu Éditions – Rebecca Lens
ISBN : 979-10-422-4458-3
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Max était sur son lit d’hôpital, à l’hôpital l’Archet 2 de Nice, dans le service de cancérologie, chirurgie abdominale et digestive. Son cancer était, paraît-il, assez rare et il ferait l’objet d’une publication par un interne qui fera même une thèse sur son cas. Quand il l’apprit, il se dit qu’il s’en serait bien passé après une vie de sportif. Les visites des infirmières, des plateaux-repas, le nettoyage et la visite du chirurgien suivi de la file d’internes orchestraient le rythme de ses journées, celles-ci commençant très tôt, trop tôt.
L’opération s’était bien passée, d’autant plus que, les yeux plongés dans le décolleté de cette belle infirmière noire antillaise, affairée à lui remonter son lit, lui remontait aussi le moral. Que les infirmières sont admirables, si importantes dans la récupération et le moral d’un malade. Généralement très agréables, elles permettent aux malades de se reprendre en main dignement et divulguent les premiers sons confiants qu’ils entendent après une opération de retour dans leur chambre.
Il était encore sous morphine, tenant de sa main un petit boîtier qui lui permettait de régler lui-même l’intensité d’apport de morphine selon l’état de la douleur. Malgré son endurance au mal, il montait régulièrement le débit en appuyant sur la pipette accrochée à son poignet, grossit et bleuit par tant de perfusions. Il avait perdu du poids.
N’arrivant, ni à suivre la télévision, ni soutenir une lecture, ni même jouer de son harmonica qu’il avait emporté, il laissait son esprit vagabonder. Se rendant compte de combien il avait de la chance d’avoir été, une fois de plus, sorti d’affaire. D’avoir une compagne qui le soutenait et viendrait sûrement le voir bientôt, qu’il aimait. Il attendait aussi ses amis proches. Il se sentait, approchant de la cinquantaine, serein. Alors, il se remémora les femmes de sa vie, celles qui avaient compté le plus, celles qui avaient compté un peu et celles sans lendemain. Il nota leurs prénoms sur son portable, au fur et à mesure de ses retours de mémoire entrecoupés de sieste.
L’idée de raconter sa vie amoureuse lui avait été suggérée par sa meilleure amie, Francine, Cicine, comme il l’appelait, une jolie blonde connue par le biais du travail. Elle travaillait chez l’imprimeur avec qui il était régulièrement en contact et, avec le temps, avec qui il avait sympathisé. Elle devint et resta sa meilleure amie depuis plus de trente ans. C’est dire si elle avait connu sa vie et la majorité des femmes qu’il avait fréquentées. Elle lui dit, après une de ses aventures amoureuses, que c’était si pittoresque qu’il fallait mettre ça par écrit. Il avait quelquefois, cogité sur sa réflexion, mais sans lendemain. Pour l’instant il se contentait de les noter, dans l’ordre, il ne savait pas pourquoi il pensait à ça, mais il devait le faire. Son côté instinctif le guidait depuis toujours et il ne se posait pas toujours la question de savoir le pourquoi du comment, il faisait ce que son feeling lui dictait. Un soir, c’est en regardant le film de 2004, Mensonges et trahison de Laurent Titard que la proposition de Cicine ressurgit et lui parut des plus appropriées. Sa vie, après son divorce, avait pris un tournant pittoresque, c’était vrai. C’est là l’histoire que je vais vous narrer, mais tout d’abord revenons brièvement en arrière : il s’était marié jeune, à vingt-trois ans, avec le premier amour de sa vie de ses seize ans.
Elle était la femme de sa vie, après avoir partagé les bancs d’école pendant trois ans, ils finirent par se marier et vécurent heureux. Après une dizaine d’années de partage, de complicité, de voyages et de bonheur, l’histoire commença à battre de l’aile, comme beaucoup, me direz-vous, mais on croit toujours que pour soit ce sera différent, que prévenu, on va anticiper et surmonter les problèmes. Mlle Gazelle correspondait à son idéal physique, elle était une grande blonde aux yeux vert clair, calme, intelligente, gentille, sportive et toujours avec le sourire. Elle était du signe du Verseau comme la maman de Max. Après un an de vie commune, ils prirent un chiot auquel ils étaient très attachés et qui le leur rendait bien. Il était très obéissant et affectueux. En tant que mâle il était fan de sa maîtresse. Quelques années plus tard arriva la naissance de leur fils, le bonheur était absolu ! Obligés d’arrêter leurs études pour travailler et pouvoir se marier à cause de parents à l’esprit trop rigoureux, ils vécurent un amour intense de chaque instant, s’entendant à merveille, voyageant et ne se disputant que très rarement, généralement à cause des parents. C’était L’Harmonie. Puis, l’instinct maternel de Mlle Gazelle fit évoluer les choses autrement. Max s’impliquait et faisait de son mieux pour la soulager pendant sa grossesse. Elle avait grossi de vingt-cinq kilos. Il pensait que ce passage de couple d’amants aux responsabilités parentales devait être vécu dans la joie, la tendresse et la complicité, mais le destin en avait décidé autrement pour son cas. Pourtant, même si Mlle Gazelle s’entretenait et avait réussi à retrouver son poids initial par un régime adapté et de l’exercice, très vite, il ne fut plus l’amant désiré du début. « Situation classique, lui dit un psychiatre, quatre-vingt-dix pour cent des femmes oublient de rester amante quand elles deviennent mères, il y a les hommes qui se contentent, ceux qui trompent, nombreux, et ceux qui partent. » Max avait imaginé, pour soulager la nouvelle maman, que sa participation à toutes les nouvelles tâches quotidiennes (les biberons, les parties de jeux, les lectures de comptines le soir au coucher, les réveils de la nuit, les trajets à la crèche après le travail, le bain en rentrant de la crèche, le dîner pour bébé puis pour maman qui rentrait plus tard que lui du travail, il avait pensé qu’en la soulageant au maximum, cela aiderait à la reprise de sa libido. Mais il n’en fut rien.
Au fil du temps la situation devenait de plus en plus insupportable. Tandis qu’au début ils se réservaient deux soirs par semaine pour se retrouver en couple, voilà que ce ne fut plus qu’une fois et que maintenant, elle ne voulait plus laisser le petit chez leurs parents qui, pourtant, ne demandaient que ça, du moins du côté des parents de Max. Les moments privilégiés du couple étaient de moins en moins fréquents et il se détachait progressivement de Mlle Gazelle ainsi que de ses implications familiales. Il s’investissait davantage dans le sport, après un accident de boxe, une opération de l’œil l’obligea d’arrêter les sports de combat. Il se mit donc à la musculation et au maniement du katana, sabre japonais. Puis, il passait son permis moto et acheta une 500 qui le rendait plus indépendant.
La situation avec Mlle Gazelle devenait de plus en plus pénible, malgré l’amour qu’ils éprouvaient l’un pour l’autre. Tout était histoire de choix, quelle vie voulait-il mener et quels choix étaient susceptibles de la créer ? Max aimait sa femme comme un fou, elle était parfaite à ses yeux, il était papa et s’adonnait à fond à son rôle de père avec amour, mais, après plus de deux ans de patience, devait-il ranger sa libido au vestiaire ? Sa femme ne voulait même pas consulter un conseiller conjugal, il était désemparé.
La première des choses qui le marqua fut la séparation forcée de leur chien. Celui-ci avait eu le malheur de montrer les dents au bébé qui l’avait embêté. Même s’il fut donné à une famille adoptive avec jardin, il n’avait pas eu le choix et il avait toujours regretté de ne s’y être pas opposé plus énergiquement. En fait, le chien était comme lui, il ne supportait pas d’être délaissé par sa maîtresse qu’il adorait. Il se dit qu’il aurait dû la quitter à ce moment, partir avec le chien, car cela en était trop, il était frustré. À la fleur de l’âge, la trentaine en bonne santé, sa libido était en demande permanente et cela le rendait nerveux malgré toutes les heures à la salle de gym.
Dans leur salon, au son de la chanson « One » de U2 où Bono chantait la mésentente du couple et la souffrance de celui qui subit. Il commençait à entrevoir l’idée de faire quelque chose pour donner une autre tournure à sa vie. Combien de nuits avaient-ils passées à ressasser la situation qui leur avait échappé, à se dire combien ils s’aimaient, mais, après avoir tout fait pour essayer de communiquer et sauver son couple, toujours fou de sa femme et de son enfant, qui avait trois ans maintenant, il devait faire un choix : céder sur la perte de libido ou perdre son couple !
Délaissé donc par Mlle Gazelle, Max, 1,80 m, 75 kg, se sentait de plus en plus convoité par les femmes de son entourage, au travail, à la salle de Gym… comme si les femmes sentaient ces choses-là. Avouer à sa femme, déjà consciente de leur différence et incompatibilité sexuelle, celle-ci le menaça, s’il passait à l’acte, de demander le divorce. Refusant l’idée de la tromper, il la quitta donc en espérant que, la tempête passée, il aurait des liens privilégiés avec son fils, qu’il adorait.
Ils avaient passé plus de dix ans ensemble et se quittèrent, après quelques premiers moments houleux, dans de bonnes conditions, en parents intelligents.
Parmi les femmes qui le courtisaient à la salle de gym, Mlle Lapine lui montrait le plus d’intérêt et lui avait déjà demandé plusieurs fois de la raccompagner, sans succès, c’était l’homme d’une femme, sa femme.
C’était une jolie petite brune de vingt-cinq ans, du signe du Sagittaire, pétillante, elle portait Samsara de Guerlain, ce parfum enivrait Max et ses sourires étaient spontanés et très communicatifs. Même si leurs rapports n’étaient que confidents, ils étaient très complices. Il lui avait raconté sa situation. Un soir, maintenant libre, même si pas encore divorcé, il la raccompagna chez elle et l’embrassa. Ils se rapprochèrent vite, se connaissant bien et vivant tous les deux une rupture simultanée. Lors de leur premier rapport chez elle, pourtant fou de désir, il fut impuissant tant son esprit était encore torturé de sa récente séparation. Elle fut compréhensive, patiente et rassurante et ils n’y perdirent pas au change. Il rattrapa vite ses trois années de vaches maigres, ne pensant pas qu’une femme pouvait être aussi permissive et débridée sexuellement, excepté dans les films pornographiques qu’il regardait le soir tard sur Canal+, chez lui, frustré, en se masturbant. Mlle Lapine adorait le sexe et était très gourmande. « Alors voilà une bonne mère de deux enfants et salope à souhait, cela existe donc bien !! » se disait-il. Elle faisait, visiblement, partie des dix pour cent !
Elle était quelque peu complexée par des cicatrices sur les seins dues à une vieille opération réductrice des glandes mammaires et de son ventre de maman, mais Max la rassura lui expliquant que ce n’était pas là l’important et qu’il était fou d’elle.
Jamais il ne se serait senti capable de faire l’amour sur une barque au bois de Vincennes ou de se faire masturber le sexe en moto. Son idylle avec Mlle Lapine se renforça rapidement en histoire d’amour et ils vécurent ensemble dans un premier temps, seuls, dans un appartement de sa famille Porte d’Orléans, où elle le bichonnait tant affectueusement, moralement que sexuellement, il était son roi. Malgré ses soucis financiers, il planait. Ils partagèrent les mêmes passions : la moto, la musculation, les concerts, le sexe sans tabou, c’était le paradis. Elle le poussait à s’entraîner davantage adorant les hommes très musclés. Après quelques mois, à la suite d’embrouilles violentes avec son ex-mari, elle récupéra, après jugement, ses deux filles en semaines alternées. Cela ne posait pas de problème à Max qui essayait d’avoir son fils dans le même intervalle, les enfants s’entendaient plutôt bien et le couple trouvait même plutôt ludique, les soirs de garde, de se rapprocher en douce des regards des enfants.
Un week-end de libre, il l’emmena à Etretat, la secrétaire de sa salle de gym lui en avait dit beaucoup de bien. Il la calma illico quand il la vit préparer ses affaires, elle ne pourrait prendre que ce que les sacoches de sa moto contenaient. Elle insista pour prendre un sac à dos supplémentaire. Il ne descendit jamais en dessous des 110 km/h, ivres de vitesse tous les deux. Ils visitèrent un peu les lieux, les balades le long de ses plages de galets grisâtres, à marrée basses, les vieux parcs à huîtres, les falaises calcaires magnifiques, les peintres, les magnifiques halles. Max comprenait aisément l’inspiration que dégageait ce lieu à de nombreux peintres qu’il avait pu découvrir lors de visites de musées. Ils passèrent, depuis la sieste, le reste des après-midi dans la chambre à baiser, sûrement les embruns du Nord. Elle lui disait : « Tu peux faire ce que tu veux de moi, je suis à toi. » Cela l’excitait énormément et il ne se gênait pas pour le faire, son côté macho se réveillant, il la dominait et plus il la malmenait et plus elle en demandait. Heureusement ces moments hard étaient entrecoupés de tendres étreintes, de massages et de déclarations d’amour grandissantes. Elle possédait aussi un fort pouvoir sentimental, douce, câline et très fan de chansons d’amour notamment de Brian Adam.
Un soir d’été, ils se retrouvèrent après le travail, prirent à peine le temps de s’embrasser pour se retrouver sur sa bécane en direction de Bercy pour le concert de ZZ Top, l’un de leurs groupes Rock favoris. Il faisait doux, ils étaient un peu en retard et Max roulait vite, elle se serrait contre lui, sa poitrine le calait dans son dos confortablement, sa robe se soulevait à plus de 100 km/h, dévoilant ses cuisses aux automobilistes ravis, sur les quais, qui klaxonnaient. Cela les faisait marrer. Il se faufilait entre les voitures pour arriver dans les temps. Quel concert ! Ils avaient passé leur temps debout à danser, sauter, chanter à en perdre leur voix. À la pause, deux bières, et c’était reparti. En sortant, quel ne fut pas son état en n’arrivant plus à ouvrir l’antivol de sa moto ! Presque deux heures assis par terre à tout essayer grâce à des outils prêtés par le patron du grand bistrot en face. C’est tout juste si on ne le prenait pas pour un voleur, il montra les clefs aux quelques passants trop curieux. De toute façon, il ne fallait pas l’emmerder ! Dans ces moments, il était exécrable et un rien pouvait faire dégénérer les choses, n’ayant plus de limite dans ces tourments. Mlle Lapine ne l’avait jamais vu comme ça et n’arrêtait pas de lui dire calmement que ça ne valait pas la peine. Il avait beau savoir qu’elle avait raison c’était plus fort que lui, il fallait qu’elle se taise maintenant, il devait rentrer avec sa bécane. Il n’arrêtait pas les tentatives, quitte à dormir à côté, sur le trottoir, cette nuit. Il lui conseilla de prendre un taxi et de rentrer quand il entendit un clic magique : la tige du fermoir s’était déplacée, il retira le bloc disque, le jeta dans la poubelle à côté et la prit dans ses bras en s’excusant de lui avoir mal parlé, elle l’embrassa. Elle était patiente et compréhensive face à ses sauts d’humeur passagers. Elle savait qu’il était un amour dans les minutes qui suivaient.
Peu à peu, avec le temps, la différence d’éducation et les malentendus hiérarchiques auprès des gamines le fâchaient souvent, ce qui rendait parfois l’atmosphère tendue, mais la semaine sans enfants arrivait vite et ils se retrouvaient en amoureux. En fait, l’aînée l’aimait beaucoup, mais la cadette était difficile.
Max voyait peu son fils pendant cette période, il lui manquait, mais sa mère n’était pas toujours d’humeur. Après leur divorce, la situation s’améliora. Mlle Gazelle avait rencontré quelqu’un de fiable peu après et Max ne demandait que son bonheur. Ils restèrent donc en contact pour le gosse et par grande estime et affection mutuelle.
Ce fut, comme dira l’avocate, plus tard, « à l’amiable » qu’ils divorcèrent et allèrent déjeuner ensemble dans un moment de cordialité et de complicité, ravi de se n’en tirer pas trop mal, malgré tout, leur priorité étant de tout faire pour le bien-être et l’épanouissement de leur enfant chéri.
Le mois d’après, il fut victime d’un terrible accident de moto, non responsable. Un jeune permis avait fait demi-tour sur la nationale sans le voir, le projetant contre un parapet en béton. Il allait un peu vite sur sa nouvelle 600 cm3 et le choc n’en fut que plus violent. Dans son malheur, sa chance fut que l’un de ses amis d’entraînement, un policier passait par là et l’avait reconnu par terre, avertissant aussitôt les pompiers. Il fut transporté en urgence à l’hôpital le plus proche. Il végéta dans le coma pendant quinze jours suivis de six mois de soins en neuropsychiatrie, kinésithérapie et orthophoniste. La récupération fut tout de même rapide, car il était en excellente condition physique. Il avait perdu un rein, la rate, avait un œdème aux poumons, deux hématomes au cerveau et de multiples fractures. Il lui resta un bégaiement qui évoluait avec le temps et selon ses émotions ainsi qu’une sensibilité exacerbée. D’après le chirurgien, c’était un ressuscité. Il inquiéta tous ses proches notamment ses parents qui avaient déjà perdu leur cadet ainsi que Mlle Gazelle, Mlle Lapine, Cicine ainsi que des relations de travail qui se sont révélés de vrais amis à la longue, Carole, André, Jean Louis, Gilles et Dominique entre autres.
Dans le service de réanimation, seules deux visites étaient autorisées par jour et seulement par les proches. Sa mère, qui avait beaucoup d’influence, tenta de le recaser avec son ex-femme, Mlle Gazelle. Ayant perdu la mémoire, ne reconnaissant même plus sa propre mère, il était manipulable. Sa mère évinça Mlle Lapine et lui présenta sa femme en oubliant, évidemment, de parler du divorce en cours. Mlle Lapine en souffrit énormément et il la défendit dès que sa situation s’améliora. En effet, un caillot se dissipa rapidement et l’autre suivit plus tard. Rentré chez lui, où Mlle Lapine l’attendait, la mémoire commençait à lui revenir et il était ravi de rentrer et de la retrouver. Elle avait entièrement repeint l’appartement, certainement pour tuer le temps en évitant de se ronger et pour prendre un nouveau départ avec lui.
Diminué et se sentant invalide, Max était très irritable malgré les traitements antidépressifs et les calmants qui l’aidaient à dormir un peu. Mlle Lapine faisait preuve de bien du courage et de la patience pour le supporter. C’est grâce à elle qu’il récupéra si vite, le poussant à bouger, sortir marcher avec elle plutôt que de le plaindre et lui mâcher le travail, il lui en serait toujours reconnaissant. Petit à petit il récupérait un peu plus chaque jour, il se rétablissait, mais continuait à se sentir diminué : il avait perdu vingt kilos par son hospitalisation. Pour un bodybuilder se revoir dans le miroir maigri de vingt kilos c’est l’enfer ! Il s’y voyait comme les enfants africains dénutris et fondait en larmes. Mlle Lapine savait le consoler affectivement et sexuellement pour lui redonner confiance et le stimuler pour de nouveaux objectifs, lui disant qu’il retrouverait vite sa force, son volume par sa force de volonté, mais pour l’instant, la confiance n’était pas encore au rendez-vous.
Petit à petit, la situation s’enlisait avec Mlle Lapine, les disputes devenaient fréquentes. Au début il faisait des crises de jalousie vis-à-vis de ses copains en visite se souvenant de son corps d’avant. Au fur et à mesure de ses progrès de santé, il s’apercevait que l’attitude de Mlle lapine changeait. Il sentait qu’il perdait le contrôle, qu’elle prenait les rênes. Si cela n’avait pas été à son désavantage, cela ne l’aurait, sans doute, pas dérangé, mais il en fut autrement. Pourtant, petit à petit, il l’imposa à sa famille. Son dévouement enfin reconnu, les relations avec sa mère et son ex-femme s’amélioraient. En ce qui concernait la santé de Max, tout son entourage prenait de ses nouvelles et admirait sa récupération. Lui, remerciait le Seigneur tous les soirs au coucher.
Peu à peu, il prenait confiance en lui, à l’écoute de son corps, la moto étant une pratique plutôt physique, c’est lorsqu’on est déficient que l’on s’en rend vite compte. Il se sentait de mieux en mieux, il revendit la BMW 316 d’occasion qu’il avait achetée pour se donner des sensations de vitesse maîtrisée et acheta un 1200 de chez Yamaha, un V. Max neuf à crédit qu’il fit débrider par le concessionnaire en rajoutant des pots sports. L’engin qui lui ferait oublier son accident et lui fera profiter de la vie à plus de 230 km/h. Certains midis, il grignotait un sandwich et descendait au parking de la mairie récupérer sa moto et se faire plaisir. Une fois gagné l’embranchement de l’autoroute non loin de là, il ouvrait la poignée jusqu’à Roissy, à fond, c’était son moment de lâché prise.
Pour la fin d’année, il programma d’emmener sa belle en Belgique. Il avait réservé un Ibis à Bruxelles, pour le week-end, depuis Paris. Malheureusement, le temps tourna vite à la pluie, les billets de train de dernières minutes étant hors de prix et ils durent s’y résoudre ; ils préparèrent les tenues de pluies. Le temps resta pluvieux et venteux durant tout le trajet de Paris à Bruxelles ; près de trois cents kilomètres sous la pluie sur l’autoroute où ils évitèrent une sortie de route de justesse. Il n’avait pas encore bien l’habitude et sa moto à cardan chassait énormément en freinant de l’arrière sous la pluie. Arrivés à l’hôtel Ibis, trempés, il était exécrable. Heureusement, Mlle Lapine, elle, toujours de bonne humeur, dédramatisait la situation. Tous les clients et le personnel les regardaient comme des fous de sortir à moto par ce temps-là. Ils trempèrent le hall d’entrée. Il fit un scandale à la réception quand on lui annonça qu’il devait y avoir une erreur, que sa réservation n’avait pas été prise et qu’il n’y avait plus de chambre disponible. Il menaça de dormir dans le hall. Après un coup de fil, le chef réceptionniste détendit l’atmosphère en leur proposant une alternative : une chambre de meilleure qualité dans un 4 étoiles de la même chaîne, non loin de là était à leur disposition. La chance leur sourit, ils avaient atterri dans un hôtel qu’ils n’auraient jamais pu s’offrir. Ce luxe leur paraissait inconvenant : la chambre trop grande, l’ascenseur immense et sculpté, entièrement recouvert de glaces fumées, le piano-bar… Ils n’étaient pas habitués à tant de luxe et y passèrent un séjour inoubliable malgré le temps maussade.
Ces séjours passèrent trop vite et revenus dans leur vie, ils n’avaient malheureusement pas la possibilité de renouveler l’expérience à cause de leur budget de plus en plus limité. Mlle Lapine ne travaillait pas et Max gagnait modestement sa vie en tant que fonctionnaire encore en bas de l’échelle.
Peu après, Mlle Lapine dut subir une opération du dos, il était inquiet et là pour elle, l’entourant de tout son amour. Elle craignait la paralysie et Max la rassurait de son soutien quoiqu’il advienne. Il allait la voir régulièrement à l’hôpital Saint-Louis dans le Xe et, au fil des visites, se rapprocha de son père et son frère cadet. Sortie d’affaires, maintenant, elle voulait un enfant, il éludait la question et finit par refuser carrément. Elle en avait deux, lui, un et c’était déjà une tannée pour l’organisation et les frais… quelle insouciance ! Même si cela partait d’un bon sentiment, elle voulait un enfant de lui, c’était romantique, il en était fier, mais son refus était catégorique. Elle voulait qu’ils choisissent un prénom, il devenait, peu à peu, parano et craignait qu’elle ne tombe enceinte volontairement, de plus, elle lui faisait souvent des crises quand il n’était pas d’accord avec elle.
Mlle Lapine ne travaillait toujours pas et leur situation financière s’aggravant, il lui suggéra de chercher du boulot, lui disant qu’il n’en pouvait plus de supplier le banquier, bien que compréhensif après son accident. Il avait déjà dépassé les plafonds autorisés. Sa mère était de parti-pris et il évitait de se confier, mais heureusement sa meilleure amie, Cicine, le conseillait toujours avec bienveillance sans rien imposer, cela lui faisait du bien. Quand Mlle Lapine dut sortir travailler, très vite, il ne reconnaissait plus la femme disponible et câline qu’elle avait été.
Peu à peu, partiellement rétabli, fatigué de tant de complications et déçu de la métamorphose de Mlle Lapine, Max commençait à entrevoir l’idée de rompre. Cette femme qui lui avait fait tant d’effet et de bien, se transformait en mère louve et les semaines avec les gamines ne se passaient pas toujours très bien, souvent indisciplinées et capricieuses en le faisant, trop souvent, péter les plombs. L’ex. de Mlle Lapine montait la plus jeune, sa fille, contre lui.
Très libres sexuellement, ils échangeaient souvent leurs fantasmes, même si Max était un peu en berne, par moment, dans son état. Elle voulait se faire sodomiser, être toute à son homme. Il n’était pas fan de la chose : ces principes hygiéniques et religieux le freinaient, mais il le fit quelques fois pour la satisfaire. Elle disait adorer les jets de spermes dans son petit cul. Et il reconnaissait sentir du plaisir à la dominer quelquefois ce qui renforça sa reprise de confiance en lui.
Un jour, elle lui parla d’expérience bisexuelle, il ne lui refusait jamais rien sexuellement, l’encourageant à inviter la compagne à la maison et restant en retrait selon ses désirs. Mais voilà qu’elle voulait se déplacer. Il avait beau lui expliquer les risques, lui proposant même de sortir de l’appartement lors de ces échanges, mais elle ne voulait rien savoir, finissant par pleurer comme une incomprise, le faisant culpabiliser en le traitant de coincé et de jaloux. Les problèmes se rajoutaient, ils n’étaient plus en symbiose, elle voulait un enfant, elle gérait mal ses gamines et maintenant même le sexe dérapait ! Il souffrait énormément, même si c’était lui qui souhaita leur rupture. Elle était, malgré tout, très attachante et il se disait que leurs rapprochements sensuels lui manqueraient vite cruellement. Un des bons côtés avec Mlle Lapine c’est que les tracas et engueulades de la vie pratique ne l’emportaient que très peu sur sa vie sexuelle et cela le rendait plus patient. Ils avaient passé près de quatre ans ensemble et cela avait été une période pleine de vie, de lutte, d’amour. Surtout après l’accident, Max sentait son esprit et son corps vouloir s’en sortir.
La vie continuait, il était, malgré tout, meurtri par cette rupture même si sa meilleure amie l’avait prévenu depuis longtemps. Sa mère se rapprocha de lui et l’aidait moralement. Petit à petit, ces relations avec Mlle Gazelle, son ex. femme, s’amélioraient avec le temps, il voyait de plus en plus souvent Raphaël, son fils, faisait des économies, reprenait le sport doucement et tout ce cocktail affectif le renforçait énormément.
Son esprit se reposait, son corps se métamorphosait au fil des mois. Il avait, progressivement, repris une hygiène de vie de bodybuilder : une alimentation hypercalorique, mangeant toutes les trois heures, faisant des nuits de huit heures et la reprise de l’entraînement, léger pour commencer. C’est fou ce que les muscles ont de la mémoire et récupèrent vite. Surtout à trente ans ! Pour progresser, il avait une vraie vie de moine : pas de sorties, il s’était fixé deux objectifs : rétablir son déficit bancaire et se reforger son corps d’avant. Il lisait tout ce qu’il pouvait lire sur la diététique, les cycles d’entraînement, le repos, la récupération. Il demandait conseil aux champions lors des salons ou dans les boutiques. Même s’il s’était pleinement investi, il ne retrouva jamais sa forme d’antan et il lui fallut deux bonnes années pour finir par apprendre à s’accepter tel qu’il était. Le travail avec le psy était indispensable et très profiteur, car c’était psychiquement que le travail avait été le plus difficile. C’était très éprouvant pour lui de se sentir « fragile » vis-à-vis des autres, des passants. Ne plus occuper son espace. Jamais il n’y avait songé auparavant, mais c’était donc ça cette sensation de puissance et d’invincibilité quand on était bodybuilder. Cette masse musculaire, cette lenteur à se déplacer, de bouger ses muscles qui occupent tant de place, de sentir les vêtements serrer sa peau, de sentir son poids quand on s’assoit sans parler de cette quasi-invincibilité dont on devient si vite dépendant. Son poids, avec quelques kilos retrouvés, lui donnait de la maîtrise, de la sûreté, de la puissance ; cette sensation jouissive d’occuper à nouveau l’espace même s’il était loin de ses quatre-vingt-dix kilos d’avant accident. Du point de vue psychique, le fait de se résoudre à avoir « perdu » sa trentième année dans les lits d’hôpitaux, chez les neuro-psys, les toubibs et les kinés lui était encore difficile, mais dans sa tête il était de mieux en mieux, gagnait en confiance et remerciait les médecins et le Seigneur de lui avoir donné la chance de s’en sortir.
Évidemment, il essaya de rattraper le temps, multipliant les conquêtes en quête de bien-être, de revalorisation et par manque d’affection et de présence féminine. S’apercevant que son accident cérébral n’avait pas que modifié sa parole dont les visites répétées chez l’orthophoniste le décourageaient parfois avec sa force de caractère, il s’acclimatait à ce défaut, parfois très déstabilisant, n’ayant pas le choix. Cela ne dérangeait pas tant que ça les femmes qu’il côtoyait et c’était le plus important pour lui. Celles que cela dérangeait, il le comprenait et de toute façon il s’en désintéressait aussitôt, car, selon lui, certainement trop superficielles.
Au travail, tout le monde au courant de son aventure, conscient de sa chance après ce terrible accident et devant sa récupération, n’avait que respect et peine pour lui. Il y avait toujours certaines personnes, certaines moqueries, les rires ou les regards qui en disaient long. Sa sensibilité interprétait les regards quand il commençait à buter sur un mot et lui reflétait les pensées de la personne et, selon ce regard, il était à l’aise ou encore plus bloqué, pétrit dans son monde, impuissant à sortir les consonnes, sa gorge nouée d’angoisse. Personne n’imagine les souffrances d’un bègue : cette frustration permanente qui le met en doute avant même de s’exprimer. C’est cette peur du regard de l’autre, de la moquerie et de la méchanceté qui le raidit davantage et le fait plonger dans un désespoir sans nom. Pour sa part, il n’avait pas à se plaindre, se disait-il. Il ne se plaignait jamais d’ailleurs, conscient de sa chance de vivre « normalement ». Mais il imaginait ce que ressentaient les bègues bien plus atteints que lui et qui n’avaient peut-être pas sa force de caractère. Surtout quand il s’agit de rencontre, ce sont les premières secondes qui déterminent souvent si, oui ou non, vous avez votre chance. Le bègue part avec un handicap énorme même si, avec le temps, en général, la décontraction apparaît et le détend pour mieux s’exprimer.
Sa sensibilité développée modifia aussi ses réactions et ses goûts, au début Max trouvait cela normal puis bizarre et même gênant. En effet, maintenant il pleurait fréquemment devant une info triste ou le dénouement dramatique d’un film. La visite de routine chez le Psy le rassura, c’était fréquent d’après lui. Il devait laisser le temps au temps, se redécouvrir entièrement, il n’était plus le même. Le médecin lui conseilla de retracer les périodes de sa vie par écrit. Cette liste, progressivement, compléterait sa vie chaque fois que lui revenait un détail, un de plus, qui renforcerait, peu à peu, sa mémoire défaillante et lui rendrait son identité. Avec sa sensibilité, ses goûts aussi avaient changé. Lui qui aimait l’or, ne portait plus que de l’argent. Il s’agissait d’un avantage économique certain. Il vendit ses bijoux en or ou les donna à son fils. Autre chose de plus intéressant : Lui, qui était un fan inconditionnel des grandes blondes aux yeux clairs, se retournait maintenant sur les brunes ou les rousses et il se foutait complètement de leur taille. Ses facultés auditives avaient décuplé lui causant d’ailleurs souvent des problèmes, amplifiant tous les bruits, l’angoissant et lui faisant, parfois même, peur. Ses facultés olfactives avaient progressé également, il reconnaissait de nouvelles odeurs. Comme Jean-Baptiste Grenouille dans Le parfum de Patrick Süskind, il découvrait et emmagasinait les odeurs dans sa tête. Il lui suffisait de fermer les yeux pour retrouver le ressenti des peaux, les parfums des femmes fréquentées, leur transpiration, leur odeur charnelle et même leur goût intime. Il n’avait jamais ressenti de telles impressions, aussi fortes, quasi réelles et plutôt agréables. D’ailleurs, il était très sensible au toucher et à l’odeur de peau des femmes. La seule chose qui ferait, ou ne ferait pas qu’il fasse l’amour avec l’une d’elles serait la découverte d’un PH incompatible, même avec la plus belle d’entre elles. Préférant vite la communication, les odeurs et le goût à la beauté, il avait de vastes projets de conquêtes sensuelles, à la recherche de plaisirs nouveaux.
D’ailleurs, ce mois de juin, il partit en Grèce, à Mykonos, voyage qu’il avait réservé pour le passer avec Mlle Lapine, mais séparés moins d’un mois avant, il décida de profiter seul et de se changer les idées. Super séjour en juin où le temps n’était pas trop chaud, les enfants à l’école et les prix plus abordables. Au bout de deux jours sur place, il rencontra une touriste belge, Hélène, dans le bus vers les plages de Platis Yalos, une des plages les plus animées du sud de l’île. Dans les îles grecques, tout le monde rentre dans le bus directement et prend place, ce n’est qu’après, pendant le début du voyage, que le contrôleur fait valider les tickets ou encaisse pour le trajet. Cette jolie blonde, Hélène, très à l’aise, lui demanda en anglais à quel hôtel il était, plus jeune que lui, elle lui souriait et lui parla de son tatouage, le voyage passa très vite, elle descendait plus loin en lui proposant de la retrouver à son hôtel le lendemain pour se rendre à une fiesta à Super Paradise, l’une des plus plages les plus branchées de l’île. C’était une habituée des lieux, elle y venait chaque année. Elle tint parole et arriva dans une robe blanche transparente à son hôtel où il fut appelé. Elle lui fit découvrir le café glacé qu’il avait, aussitôt, adopté. Ils discutèrent en anglais, le courant passait très bien et ils s’embrassèrent rapidement après quelques regards appuyés, comme s’ils avaient été ensemble depuis un moment. Max la conduisit dans sa chambre où le lit de deux places servirait peut-être enfin à quelque chose, mais pour l’instant elle lui dit qu’ils n’avaient pas le temps, qu’elle voulait l’emmener à une soirée et ils devaient reprendre un bus, n’ayant pas assez d’argent pour le taxi. Cette fille lui plaisait, elle ne posait jamais de problème et s’adaptait vite avec un sourire d’ange. La soirée fut une véritable épreuve pour les oreilles de Max, le son de la techno était trop fort et devait certainement dépasser le seuil autorisé, elle lui donna ses boules Quies en mousse fluo, il fut aussitôt apaisé. La soirée se termina en débauche, il tira sa main vers un coin tranquille où, assis au bord de l’eau, ils s’embrassèrent. Il plongea sa main dans son short jean sous sa culotte de maillot, le contact de ses poils l’excita davantage, il fit sauter les boutons du short et commença à la masturber sur le rythme de la techno endiablée. Plus tard, elle demanda à une amie de les raccompagner en voiture à son hôtel où ils firent l’amour une bonne partie de la nuit, tout doucement alternant les verres d’Ouzo et les joints pour elle. Puis après un bon petit déjeuner, ils se laissèrent leurs coordonnées, elle devait partir en bateau dans la matinée pour Paros, l’île voisine. Après ce court Eden, le voyage prenait une mauvaise tournure. En effet, sa carte bleue débitrice ne répondait plus et il n’arrivait pas à sortir d’argent. N’ayant amené que le minimum, les frais sur places étaient censés, à l’origine, être à la charge de Mlle Lapine. Sa priorité était de s’hydrater pour ménager son rein. Il acheta le lot de bouteilles nécessaires pour terminer le séjour, ne s’autorisant qu’un sandwich Shawarma, le midi et une pomme, le soir. Heureusement le petit déjeuner de l’hôtel était compris, et très copieux. En rentrant de la plage le soir, traînant devant les boutiques et surtout les restaurants sans argent, le ventre qui grognait, lui fit toucher du doigt la réalité sur la faim et la misère. La belle Hélène ne donna plus de ses nouvelles aussi vite qu’elle l’avait eu accosté dans ce bus. Elle avait dû rencontrer quelqu’un d’autre qui restait. À la fin de son séjour, après son dernier bon petit déjeuner à l’hôtel, Max reprenait la navette pour l’aéroport et rentrait à Paris, sans une once de graisse. Il avait peut-être été tiraillé par la faim, mais ce qui le consolait c’est que jamais ses abdominaux n’avaient été aussi tracés. Mlle Gazelle vint le chercher, ils furent ravis de se retrouver et passèrent la journée ensemble avec leur fils.
Puis, revenant à la réalité de la vie active, dans le cadre de son travail, il devait se mettre à l’informatique. On lui avait déjà lancé l’allusion dans quelques réunions, le besoin de suivre le progrès et, coûte que coûte, malgré ses réticences, il avait été inscrit et retenu pour un stage informatique dès la rentrée. Ce fut le jeune ingénieur de son service qui, avec patience et diplomatie, l’avait convaincu qu’il n’aurait pas de mal à s’adapter.
C’était une grande rousse de la quarantaine, son nouveau professeur d’informatique. De grands yeux noirs, de petits seins en poire, un fessier rebondi, plutôt sportive. Face à la montée de l’informatique à cette époque, il devait se mettre à la page tant dans son métier de projeteur dans le bâtiment que pour les applications Word et Excel. Au travail, il avait, tout d’abord, tout fait pour retarder l’échéance, adorant dessiner sur sa table à dessin réglable avec ses Rotrings et ses pistolets plastiques. Il était retord au progrès informatique en matière de conception de plans, mais il n’eut guère le choix, car pour l’obtention d’un emploi cela devenait indispensable.
Mlle Hirondelle, dès les premières présentations en classe où ils étaient une dizaine en cours, lui faisait de l’effet. Son parfum émerveillait ses sens. C’était un Chanel, le fameux No