Les Mozart, Comme Ils Étaient (Volume 1) - Diego Minoia - E-Book

Les Mozart, Comme Ils Étaient (Volume 1) E-Book

Diego Minoia

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Les Mozart, Comme Ils Étaient (Volume 1)

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Les Mozart, comme ils étaient

© Diego Minoia

Les Mozart, comme ils étaient

Une famille à la conquête de l'Europe

les voyages, l a musique, les rencontres, les curiositésLe contexte historico-social, la famille,

l'enfance et l'adolescence de Wolfgang Amadeus

Volume 1

(1747 - 1763)

Traduit par Loretta Barbarossa

Tous droits réservés

Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite sans le consentement par écrit de l'auteur

www.diegominoia.it

Designer couverture: Marta Colosio

Diego Minoia

Les Mozart, comme ils étaient

Une famille à la conquête de l'Europe

Les voyages, la musique, les rencontres, les curiosités Plan de l'œuvre

Volume 1

1^ partie: Salzbourg et la famille Mozart

Salzbourg - Les Princes - les Évêques - Curiosités de Salzbourg - la musique à la cour des Princes - Évêques - Les musiciens de la Cour de Salzbourg - La famille Mozart (la mère, la sœur, le père, Wolfgang) - La place de Wolfgang dans l'histoire de la Musique - La vie des Mozart à Salzbourg - les revenus des Mozart -

la catalogue des compositions de Mozart.

2^ partie: Pensée, culture et société au XVIIIè siècle La situation géo-politique vers la moitié du XVIII siècle- L'Illuminisme - La société aux temps des Mozart - Théâtre, pouvoir et société - Le théâtre et les imprésarios -

les dédicaces et les gains des compositeurs et librettistes - Les " Castrats" -

Musiciens protégés, prêtés, volés - la musique au XVIIIè siècle- le rôle du musicien dans la seconde moitié du XVIIIè siècle - Le mélodrame - L'église et la musique - Évolution et perfectionnement des instruments musicaux au XVIIIè siècle

3^ partie : La vie quotidienne aux temps des Mozart La maison en Europe au XVIIIè siècle - Le panier ou garde-infante -

Conservatoires et Hôpitaux des pauvres - La lessive - La glace - La nourriture et l’évolution des goûts - Artistes et rôle social - Autres charmes et curiosités : animaux domestiques, Le "Grand habit à la Française" - Paris, le "phare" des modes - Le gossip et les salons aristocratiques - Le "mal obscur" - Les salons de Paris - Le sexe

4^ partie : Les Mozart avant les voyages européens

De 1755 à 1762 : Léopold Mozart, l'École de violon et la formation des jeunes enfants prodiges - La correspondance de Mozart - Les lettres de 1755/1756 -

Léopold Mozart : un peu Auteur, un peu commerçant - Les lettres de l'éditeur Lotter di Augusta - La production de papier jusqu'au XVIIIè siècle - le stratagème

de Léopold - la Foire - L'édition au XVIIIè siècle et les Droits d'Auteur - Les

"copiages de Léopold - Les taxes au XVIII siècle - La formation musicale de Nannerl et Wolfgang à Salzbourg - Les premières compositions de Wolfgang.

5^ partie : Les premiers voyages

Voyager au XVIIIè siècle: les rues, le Guide, les auberges, les dangers - Un peu d'histoire du service des postes jusqu'à l'époque des Mozart - Les premiers voyages: Monaco et Vienne - Vienne, la Capitale de l'Empire - Curiosités -

Correspondance de Vienne - les vêtements au XVIIIè siècle - Les Académies et la musique à la Cour - Le commerce et la diversification de la consommation - les meubles - Que faisaient Wolfgang et Nannerl durant les exhibitions? - Les témoignages de Léopold et des autres personnes présentes - Le phénomène des jeunes enfants prodiges au XVIIIè siècle.

6^ partie: Les Mozart et le Grand Tour européen/1 - Allemagne et Pays Bas, Paris

Ce qu'était le Grand Tour ? - Le grand Tour au contraire des Mozart - Les étapes du voyage: Salzbourg, Monaco, Augusta, Ulm, Ludwigsburg, Bruchsal, Schwetzingen, Heidelberg, Mannheim, Worms, Magonza, Francfort, Magonza, Coblenza, Bonn, Cologne, Aquisgrana, Liège, Tirlemont, Louvain, Bruxelles, Mons, Bonavis, Gournay, Paris

Volume 2

7^partie: Les Mozart et le Grand Tour européen/2

Paris: rencontres, espoirs, cadeaux, succès, curiosités. Les compositions

"parisiennes" de Wolfgang

8^ partie: Les Mozart et le Grand Tour européen/3 - Londres Londres: un monde "nouveau", rencontres musicales de formation, stratégies de marketing et crises du gouvernement. Les compositions " londoniennes" de Wolfgang

9^ partie: Les Mozart et le Grand Tour européen/4 - Le long retour Calais, Dunkerque, Lille, Gand, Anvers, Rotterdam, L'Aja, Amsterdam, L'Aja, Harlem, Amsterdam, Utrecht, Anvers, Bruxelles, Valenciennes, Cambrai, Paris, Dijon, Lion, Genève, Lausanne, Berne, Zurich, Winterthur, Sciaffusa, Donaueschingen, Dillingen, Augusta, Monaco, Salzbourg

10^ partie: Salzbourg/ Vienne/ Salzbourg

Le retour dans la vie courante de Salzbourg, la période de sédimentation et de développement des apprentissages musicaux de Wolfgang, le second voyage à Vienne, la période supplémentaire d'études à Salzbourg en préparation des voyages en Italie

Interlude

le grand Tour en Italie au XVIIIè siècle, les opinions et les journaux des autres voyageurs du Grand Tour. L'Europe et l’Italie dans la seconde moitié du XVIIIè siècle

11^ partie: Premier voyage en Italie

Salzbourg, Innsbruck, Bolzano, Rovereto, Verona, Mantoue, Milan, Lodi, Parme, Bologne, Florence, Rome, Sessa Aurunca, Capua, Naples, Rome, Civita Castellana, Terni, Spoleto, Foligno, Loreto, Senigallia, Pesaro, Rimini, Imola, Bologne, Parme, Piacenza, Milan, Turin, Milan, Brescia, Vérone, VVicenza Padoue, Venise, Padoue,Vicenza, Vérone, Rovereto, Bressanone, Innsbruck, Salzbourg

12^ partie: Second voyage en Italie

A Milan pour la composition de la sérénade théâtrale "Ascanio in alba", de nouveau à Salzbourg.

13^ partie: Troisième voyage en Italie

A Milan pour la composition de l'œuvre "Lucio Silla", à Salzbourg au service de la Cour

14^ partie: Vienne et Monaco

Tentatives infructueuses à Vienne - "la finta giardiniera" à Monaco - Le triste retour à Salzbourg - Le licenciement des Mozart - la séparation entre Léopold et Wolfgang - Départ de Wolfgang et sa mère pour chercher fortune ailleurs Avis au lecteur: des parties sur fond gris sont présentes dans le livre. Il s'agit d'informations et approfondissements qui complètent la discussion et élargissent la compréhension des arguments immédiatement traités auparavant. Bien qu'il soit permis de les ignorer pour ne pas interrompre la lecture des évènements étroitement liés à la famille Mozart (en y retournant peut être à un autre moment), j'espère qu'ils seront appréciés en tant que contribution à l'insertion de chaque situation racontée dans son contexte historique et social.

Présentation

Pourquoi ce livre? Parce qu'il n'existait pas! J'ai cherché durant des années un livre avec ces caractéristiques sur la famille Mozart. N'ayant rien trouvé, comme j'ai toujours fait avec mes livres, je l'ai écrit moi même. Nous pouvons trouver des dizaines de publications sur Mozart, certaines sur la biographie d'Amadeus, d'autres avec des détails et des analyses musicales techniques de ses compositions, d'autres encore avec un mélange de biographie et analyses musicales

Ce livre est différent des autres, le lecteur s'en rendra compte dès les premières pages. D'abord, il s'occupe de la famille Mozart en entier et non seulement de Wolfgang. Ensuite il ne contient pas d'analyses musicales des compositions et la biographie est reconstruite principalement en extrayant les informations de la source la plus directe faisant autorité: la correspondance de Mozart. Enfin, il possède de nombreux arguments qui sont absents dans les autres publications sur la famille Mozart: des informations sur leur époque, sur leur façon de penser et de vivre, des curiosités sur les évènements et les situations dont ils ont été protagonistes etc.

Au travers de ce travail je voudrais fournir un nouvel instrument, moins spécialisé et certainement non musicologique, mais plus riche d'informations et d'idées qui permettent de plonger pleinement dans la manière de vivre et de penser de la seconde moitié du XVIIIè siècle.

J'espère être parvenu à humaniser les Mozart, sans avilir le sujet mais en exposant simplement et clairement les arguments provenant de mon intéressement de plus de dix ans pour Amadeus, Léopold, Nannerl et les mille personnages avec lesquels ils ont été en contact.

Depuis le début, mon intention a été d'écrire un livre qui soit intéressant, facile à lire et amusant autant pour les musiciens (qui ne trouvent pas toujours dans les publications spécialistes des informations et des approfondissements qui permettent de mieux comprendre le contexte dans lequel ont vécu les Mozart) que pour les amateurs de musique (qui pourront s'approcher du "Génie" de Salzbourg sans devoir l'observer du bas vers le haut du piédestal sur lequel il est trop souvent relégué).

Le tout traité sans vols pindariques inutiles de "critique", mais avec la proximité et l'affection que les Mozart méritent pour ce qu'ils ont donné à l'Humanité, en obtenant en échange bien moins que ce qu'ils nous ont offert.

Je raconterai donc comment étaient vraiment les Mozart, comment l'on vivait et pensait au XVIIIè siècle en ajoutant, chaque fois que cela m'a semblé utile pour le

lecteur, des curiosités et de brefs approfondissements sur des situations ou des arguments liés étroitement à ce que firent, virent et pensèrent les Mozart lorsqu'ils étaient à Salzbourg, lorsqu’ils voyageaient dans le "tour européen", lorsqu'ils sont venus trois fois dans la bien aimée Italie etc.

Dans ce travail nous nous occuperons de la période qui va de 1747 à 1775, presque trente ans qui comprennent la formation de la famille Mozart, la naissance des enfants, les premières sorties de Salzbourg pour les faire connaître comme des enfants prodiges, le Grand Tour européen, les trois voyages en Italie jusqu'aux dernières tentatives à Vienne et Monaco faites par Wolfgang et son père.

Après cette période, Wolfgang voyagea seul (à l'exception de brève partie du début du voyage entre Monaco et Paris, où il fut accompagne par sa mère, qui mourra dans cette ville), il déménagea définitivement à Vienne, se maria et termina sa parabole artistique et humaine en 1791. la période après 1777, donc, est une nouvelle phase de la vie d'Amadeus qui exulte dans le cadre de ce texte.

Le lecteur intéressé par ce travail pourra choisir, selon ses préférences et habitudes, entre l'achat de la version e-book ou l'édition traditionnelle ou en papier, chacune en deux volumes.

Bonne lecture.

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart 1^ Partie

Salzbourg et les Mozart

Le récit des aventures liées à la famille Mozart pourrait être défini en empruntant le sous-titre du Don Giovanni, un "drame ludique". Un oxymore qui a certainement amusé Mozart qui aimait les jeux de mots et qui, sans aucun doute, s'adapte très bien au séducteur protagoniste de l’œuvre. mais la définition peut également s'adapter à la parabole de Mozart, même si l'inversion des termes

"Comédie dramatique" serait probablement plus adapte et définirait mieux le parcours des Mozart sur cette terre. Les débuts, en effet, furent même si avec quelques difficultés, certainement joyeux et riches de satisfactions pour le tout jeune Wolfgang, enfant prodige avec sa sœur Maria Anna dite Nannerl: des concerts auprès des principales Cours européennes, des compliments et des dons de la part des régnants et du Pape, des admissions à de prestigieuses Académies musicales (Bologne, Vérone), des honneurs (Chevalier de l'ordre de l'Éperon d'or, accordés par le Pape Clément XIV), des voyages d'aventures pleins de rencontres intéressantes, la découverte du monde au delà des frontières de la petite Principauté de Salzbourg.

Toute la famille participa aux tournées, au moins durant les premières années, pour lancer les deux frères prodigieux, y compris lors du long voyage européen qui toucha l'Allemagne, la Hollande, la Belgique, la France, l'Angleterre et la Suisse. Lors des trois voyages italiens, au contraire. voyagèrent uniquement Wolfgang et son père Léopold, désormais décidé à compléter la formation de l'unique fils pour le préparer à la carrière de compositeur, en l’amenant à

"s'abreuver directement à la source" de la musique de l'époque: l'Italie. Aventures et voyages qu'ils entreprirent pleins d'espoir, de curiosités et les oreilles grandes ouvertes pour écouter, comprendre, absorber la musique, les styles, les modes qui auraient fait du petit "phénomène" un géant de la musique. Cependant tout n'alla pas comme ils l’espéraient et l'aventure de la comédie joyeuse se transforma doucement en drame.

Dans la partie finale de la vie de Wolfgang, durant les années de la recherche d'une consécration à Vienne, après les grands succès, un processus de

"refoulement" progressif du musicien de Salzbourg commença dans l'esprit à la mode et superficiel du public viennois, une attitude qui donna certainement beaucoup d'amertume et de déception au musicien et à l'homme. Nous parlerons de tout cela en temps voulu, ainsi que de la musique de Mozart, je pense cependant que, pour connaître réellement un Artiste, il faut comprendre les lieux 11

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart qu'il fréquentait, les manières de vivre et de penser de son époque, les rencontres et les idées qui l'ont formé.

Sans ces informations nous pourrions certainement jouir de l'écoute des compositions de Mozart mais nous risquons de limiter notre compréhension à l’environnement musical, au musicien et pas à l'homme dans son intérêt, vu justement ce qu'apportent les lieux, les personnes et les idées. Il est donc opportun de partir du début, et le début est Salzbourg, la ville qui fut d'abord un berceau et ensuite une prison dans la perception des Mozart.

Salzbourg où tout a commencé

Mon récit commence inévitablement par Salzbourg. Dans cette belle petite ville, maintenant autrichienne mais à l'époque, encore sur les territoires bavarois, étendue sur la rive du fleuve Salzach, en effet, le 27 janvier 1756 naissait JohannesChrysostomus (le saint du jour) Wolfgangus (nom du grand-père maternel) Theophilus (nom du parrain) Mozart. Theophilus (du grec Theofilos, ami de Dieu, qui aime Dieu) fut bientôt transformé en Amadeus et, ensuite, parfois gracieusement réduit à Amadé. dans les lettres du père, parfois également la version allemande Gottlieb, ainsi qu'affectueusement Wolferl.

Salzbourg était à l'époque la petite capitale (elle comptait environ 16000

habitants) d'une des nombreuses Principautés faisant partie du Saint Empire Romain des nations germaniques, une fédération d’états indépendants (certains gouvernés par des souverains laïcs et d'autres par des Princes Archevêques) qui reconnaissaient la suprématie à l'empereur. Le Prince Archevêque de Salzbourg était de droit primat d'Allemagne et chef des évêques bavarois donc, pour être précis, le très revendiqué (par les autrichiens) Wolfgang Amadeus Mozart en réalité est allemand de Bavière. Il le confirme lui même (mais son père Léopold, allemand d'Augusta, en fait de même), lorsque, dans les lettres de la correspondance, il compare les usages et les coutumes des pays étrangers qu'il parcourt, il les compare en disant "ça n'est pas comme en Allemagne" ou "nous les allemands". Nous trouvons d'autres confirmations dans une lettre, envoyée par Léopold Mozart de Paris à Maria Theresia Hagenauer (épouse de l'ami Johann Lorenz Hagenauer) avec l'adresse suivante: "A Madame/ Madame MariaTheresia/Hagenauer/Salzbourg/en Bavière".

L'empreinte religieuse, à Salzbourg, était bien évidente, même architecturalement, vu la présence de nombreuses églises et d'un Chapitre de la Cathédrale qui comptait jusqu'à 24 canons. La Principauté fut durant des siècles liées à la Bavière, culturellement et économiquement, ce n'est qu'en 1816, après 12

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart des hauts et des bas qu'elle fut attribuée territorialement à l'Autriche suite aux décisions

prises

lors

du

11

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Congrès de Vienne, Dans la Principauté le Prince-Évêque avait (comme du reste le Pape dans l'État de l’église) tant le pouvoir spirituel que temporel. Les origines de l’assaut nous ramènent à un monastère présent depuis le Vè siècle mais la ville commença à se développer après que S.Rupert s'y installa au siècle suivant. Au fil des siècles la ville connu de nombreuses luttes de pouvoir mais se développa avec un aspect médiéval, sombre et gris, tant au Château que sur le sommet de la colline et dans la zone urbaine en contrebas, traversée par des rues étroites et sombres.

Le tournant architectural et culturel de la ville eut cependant lieu avec le Prince-Évêque Wolf-Dietrich von Raitenau (1559-1617), parent de la famille De'

Medici car neveu de Giovanni Angelo de' Medici, Pape Pie IV. Ce fut Von Raitenau, fortement contre-réformateur durant sa jeunesse à Rome qui conçut la transformation baroque en style italien de Salzbourg, achevée ensuite par ses successeurs. L'ambition de faire de Salzbourg une "petite Rome" se voit également dans la Cajetan Kirche (Église de S.Gaetan) commandée à l'architecte italien Gaspare Zugalli, qui rappelle S.Pierre et dans laquelle fut ensuite créée une Échelle sainte qui rappelait l'échelle romaine de San Giovanni in laterano. Von Raitenau restaura la Residenz, le Palais de la ville où l'on pouvait vivre plus confortablement et que l'on administrait plus facilement par rapport aux froids locaux du Château et attribua la mission de projeter le nouvelle Cathédrale à l'architecte de Vincence Vincenzo Scamozzi (le même qui projeta le Théâtre de Sabbioneta, premier édifice en brique utilisé comme théâtre depuis l'ère moderne). Il fit démolir et reconstruire une grande partie du centre habité sous forme d'inspiration italienne, avec d'amples places et des maisons aux couleurs pastelles qui rappelaient, sans nier les traditions locales, des aspects et des caractères de type plus méridionaux.

Le lien avec l'Italie est également démontré par le fait que justement à Salzbourg, en 1614, fut réalisé le premier mélodrame hors des frontières italiennes : il s'agit d' Orfeo (vraisemblablement celui de Monteverdi, qui l'avait créé en 1607 pour la Cour de Mantoue des Gonzague et qui en avait publié la partition en 1609). Cependant, le personnage de von Raitenau, sans nier ses incontestables mérites, ne manquait certainement pas de côtés en contraste avec sa passion pour l'art : à partir de sa prédisposition guerrière (il eut une longue querelle pour le contrôle des mines de sel gemme présentent sur le territoire, une vraie source de richesse ) jusqu'à l'indulgence envers des aspects mondains qui sortaient du cadre ecclésiastique (il eut une maîtresse, Salomé Alt, qui l'honora de quinze enfants et pour laquelle il fit construire le Palais Mirabel avec ses splendides jardins).

13

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart De nombreux Princes-Évêques succédèrent à Von Raitenau, ils complétèrent la transformation de la ville en ce petit bijou que l'on peut encore admirer, jusqu'à Sigismund III Christoph von Schrattenbach (1698-1771). D'origines nobles et de formation culturelle romaine, il fut amant des arts et eut Léopold Mozart à son service ainsi que Johann Michael Haydn (frère du plus fameux Franz Joseph Haydn), qui fut Maître de chapelle à Salzbourg et influença musicalement les premières œuvres de composition de Wolfgang Mozart . A Schrattenbach suivi Hieronymus Joseph Franz de Paula Colloredo von Wallseey und Mels (1732-1812) qui gouverna la Principauté de 1772 à 1803, lorsque le domaine fut sécularisé il fut d'abord confié à Ferdinand d'Hasdbourg et ensuite directement administré par Vienne, la capitale de l'Empire des Habsbourg.

Colloredo, d'un caractère autoritaire bien qu'adepte d'un certain Illuminisme paternaliste, fut un homme de culture amant de l'art, ainsi qu'un violoniste amateur. La diffusion de certaines idées illuministes auprès des Princes européens est démontrée par le fait que Colloredo avait dans son atelier les portraits de Rousseau et de Voltaire. Il avait des idées précises et des goûts très définis, certes non avant-gardistes par rapport à l'époque, concernant les musiques qu'il voulait utiliser dans les situations civiles et religieuses de la Principauté . A un certain point, afin de réduire les frais, il élimina les activités théâtrales auxquelles Wolfgang aspirait en tant que compositeur. La relative compétence musicale de Colloredo peut sans doute expliquer le bas concept qu'il avait de Léopold Mozart comme musicien, sans doute également embêté par les pressions insistantes de celui-ci qui aspirait à une promotion de vice maître de chapelle en charge supérieure. Chose qui, entre autre, n'arriva jamais malgré le récit des succès triomphants que Léopold avait certainement diffusé en ville en rappelant les étapes du Grand Tour européen effectué quelques années auparavant.

Ensuite, le caractère rebelle et effronté du jeune Amadeus ainsi que les insubordinations difficilement retenues (entre temps il avait été engagé comme musicien auprès de la Cour archiépiscopale et, ensuite, comme organiste), ne le rendirent pas un personnage apprécié, au point qu'à la fin Wolfgang "obtint"

d'être licencié, avec en plus le fameux coup de pied reçut par le comte KarlJoseph Félix Arco, Chamberlan de l'Archevêque. Nous parlerons de cela et de bien d'autres choses par la suite en suivant les aventures de Mozart au travers de la riche correspondance qui nous est parvenue.

Mais comment la ville de Salzbourg était-elle organisée socialement à l'époque des Mozart ?

La petite ville princière, comme toutes les autres capitales des nombreux États indépendants et confédérés de l'Empire, avait le Prince et sa Cour au centre, ceux-14

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart ci, tout comme les ondes concentriques formées par une pierre jetée dans l'eau, étaient couronnés par des groupes sociaux qui présentaient des niveaux culturels et économiques inférieurs à mesure que l'on s'éloignait du centre.

13

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Le premier groupe était formé par la partie la plus élevée de l'aristocratie locale, distinguée de nominations et de charges pour la gestion de la Principauté (ou bien spirituelles, avec les Chanoines de la Cathédrale, ou bien temporelles, avec les responsables des différentes administrations) et des activités publiques et privées de l'Archevêque (Grand Chamberlain, Conseillers, Ministres etc.). Dans un ultérieur cercle, qui agissait sur les précises indications du "cercle magique"

décisionnel, un groupe de fonctionnaires qui pouvaient gérer leur peu de pouvoir envers leurs soumis et qui avait donc un certain prestige social provenant de leur rôle: les fonctionnaires du palais, les hautes hiérarchies militaires, les musiciens avec des charges importantes (Maîtres de Chapelle, Maîtres de concerts, Compositeurs de Cour).

Encore plus éloigné du pouvoir mais qui dépendaient économiquement, au moins en partie, du Palais, se trouvaient les bourgeois, moyens et petits (artisans, commerçants, divers professionnels) qui faisaient des affaires et fournissaient des services à ceux qui possédaient de l'argent. Enfin, il y avait la populace qui allait du garçon au serviteur, de l'homme de labeur à ceux qui vivaient au jour le jour: ceux-ci n'avaient ni droit ni prospectives et se considéraient chanceux s'ils parvenaient à obtenir quelques subventions qui puissent les aider à vivre.

Souvent, en effet, des supplications de tout genre étaient adressées aux bureaux princiers, celles-ci pouvaient aller de la demande d'un poste de travail à une demande d'aide financière pour leur chômage, de la demande d'être exempté de quelque taxe (nous verrons que même Léopold Mozart le fit par rapport à la taxe sur le vin importé) au permis pour se marier. Presque chaque aspect de la vie des citoyens était soumis à la volonté (parfois au caprice) des puissants. Il est vrai que la majorité de ces demandes de subsides étaient généralement satisfaite (vingt pourcent de la population de Salzbourg jouissait de quelques subsides), parfois moins importants par rapport à la demande, ce qui permettait au Prince de maintenir une certaine tranquillité sociale en faisant cependant clairement comprendre qu'il ne s'agissait pas de droit mais de dons gracieusement accordés aux sujets.

Curiosités de Salzbourg

Voici quelques curiosités (certaines provenant du Journal écrit par Nannerl), liées à la vie quotidienne de Salzbourg, qui peuvent nous aider à mieux comprendre cette lointaine époque et la vie quotidienne de la famille Mozart.

Coups de fouet à la municipalité: lorsque l'on "découvrait" des jeunes filles qui se comportaient de manière moralement inconvenante par rapport à la sexualité, 15

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart elles étaient publiquement fouettées dans la Mairie et envoyées dans une "maison de correction". Le 11 août 1775 ce sort arriva à sept femmes de chambre.

Les Grenadiers: lorsque l'Archevêque se déplaçait pour se rendre hors de la ville il était escorté par de nombreux grenadiers (40, dans les notes de Nannerl) comme escorte d'honneur et de protection contre des attaques éventuelles La grace: la Fraternité de la Trinité avait obtenu le privilège de pouvoir demander, à l'occasion du Vendredi Saint, la grace pour un condamné à mort. Nannerl écrit qu'il s'agissait d'un meunier qui avait assassiné un huissier de justice.

Les dangers dans les brasseries: un certain Mr. Stadler s'est asphyxié dans la cave de la brasserie Stockhammer (encore active aujourd'hui à Salzbourg).

Expériences physiques: à l'Université de Salzbourg occasionnellement se tenaient des leçons de physique avec la réalisation d'expériences, auxquelles uniquement les nobles de la ville pouvaient participer. Dans des lieux moins austères également, comme par exemple dans la Brasserie Kugel, où dans la salle de la municipalité on "représentait" des expériences de physique, c'est ce qui arriva durant la période du marché de la part de Phisicus Hooghe. On ne connaît rien de ce Hooghe mais il est certain qu'à l'époque, des personnages comme Docteur Dulcamara dans l’ élixir d'amour de Donizetti, circulaient dans les foires en même temps que les vrais savants, avec quelques astuces ils joignaient les deux bouts en atteignant la crédibilité populaire et le croissant intérêt pour les sciences typiques de ces temps là.

Les expériences scientifiques parmi les curiosités et le phénomène social Parmi les expériences les plus simples qui étaient à la mode à la moitié du XVIIIè siècle, au point de les afficher en peinture dans les milieux familiaux, il y avait celle de démontrer l'importance de l'air pour les êtres vivants: on mettait un petit animal sous une cloche en verre de laquelle on extrayait l'air à l'aide d'une pompe spéciale et on restait là à le regarder mourir. Dans l'Europe toute entière la curiosité pour les sciences se propageait, même parmi les femmes, au point que dans les salons parisiens on formait des groupes de 20/25 personnes pour assister à des cours de chimie, de physique ou d'histoire naturelle. Sur les tables des femmes les traités de physique et de chimie remplaçaient les romans et les livres de philosophie. En Europe on publie des journaux pour femmes qui unissent des arguments scientifiques à la poésie, des conseils pour l'étiquette aux nouvelles d'astronomie etc. Des accidents et des "martyrs" dans la recherche du progrès, 16

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart comme celui de J.P. de Rozier, chimiste et physique qui donnait des leçons aux nobles parisiens et qui est passé à l'histoire pour avoir été le protagoniste, avec sa montgolfière, du premier accident aérien mortel de l'histoire. Même l'anatomie eut ses adeptes, comme la comtesse de Coigny âgée de dix-huit ans qui semble t-il, durant ses voyages, emmenait un cadavre dans une caisse pour ses exercices dissection.

les exercices: dans un environnement comme Salzbourg, pauvre en évènements susceptibles d'interrompre la vie quotidienne, même aller voir l'entraînement des soldats devient une occasion pour sortir de chez soi et se distraire.

Les processions : à différents moments de la vie liturgique, on célébrait des évènements solennels. Parmi ceux-ci la procession du Corpus Domini accompagnée par la chevalerie princière et par des tirs à blanc durant les différents arrêts effectués sur la Place de la Cathédrale. Il est évident qu'à Salzbourg, les fêtes liturgiques étaient célébrées de manière moins cruelle que celles de Paris où lors de la fête de la S. Jean, le Roi de France lui même mettait le feu à un bûcher sur lequel des chats et des renards étaient jetés et brûlés vifs.

Suicides et folies: même alors, les situations de désespoir induites par la misère et par l’insupportable méchanceté de quelques "maîtres" trop autoritaires ne manquaient pas. Dans les chroniques de Nannerl on rapporte par exemple, le suicide d'un pauvre Schlauka, domestique pendu à 23h30 dans sa chambre. Un certain von Amann, au contraire, devenu fou, semble t'il et hospitalisé en ville pendant qu'un certain Edlenbach meurt dans la forteresse où il était enfermé à cause de son embêtante ivresse.

Au théâtre: la vie théâtrale à Salzbourg n'était pas régulière car il n'y avait pas toujours une Compagnie théâtrale résident en ville. Par contre, lorsqu'arrivaient les périodes privilégiées pour les représentations (comme au temps du Carnaval) un grand nombre de textes étaient représentés, avec et sans musique et ballets. Un exemple: durant la période entre le 16 janvier 1783 et le 12 février 1783 onze différentes "comédies" furent représentées, en alternance avec des Sérénades, une opérette, trois "comédies" françaises, deux bals dans la salle de la municipalité (65

personnes présentes au premier et 160 au second), ainsi que quatre autres bals de Carnaval.

17

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Les musiciens fameux de passage: comme dans toutes les Cours européennes, même à Salzbourg des musiciens fameux arrivaient fréquemment, vertueux de leur instrument, ils voyageaient continuellement parmi les plus importants centres culturels et politiques du continent. Une exemple, repris dans le Journal de Nannerl, est l’arrivée en ville du fameux hautboïste Friedrich Ramm, qui rejoint le célèbre orchestre de Mannheim dès l'âge de 14 ans et grand vertueux de cet instrument, il se produit à la Cour de Salzbourg lors de deux concerts avant de repartir pour l'étape suivante de sa tournée, Monaco.

Les excursions hors de la ville: durant la belle saison, on organisait fréquemment des excursions à pieds ou en calèche, dans les alentours de la ville. Parmi les destinations les plus appréciées le Sanctuaire de Maria Plain, le Mönchsberg (une des deux basses montagnes qui surmontent Salzbourg, sur lesquelles s'élèvent la forteresse Hohensalzburg et le monastère féminin) et le Kapuzinerberg (Mont des Cappucins, de par le monastère qui s'y trouve).

Les jeux: durant les réunions d'amis, dans la maison des Mozart ou dans celle des connaissances, on jouait. Les jeux de cartes étaient presque quotidiens (souvent tresette et tarots, mais également d'autres jeux avec de petites mises d'argent). On jouait également aux fléchettes, avec des fusils à air comprimé et des prix pour le vainqueur, qui devait cependant payer à boire à toute la compagnie. Un autre jeu de société pratiqué était celui des broches, une espèce de bowling. Dans une note de 1783 du Journal de Nannerl apparaît pour la première fois le terme "Loterie", probablement le jeu du lot ou quelque chose de semblable au bingo. le Lot, diffusé depuis très longtemps sous différentes formes dans d'autres pays européens (Jeu du Séminaire, Lot de la vieille fille etc.), se diffusa durant la seconde moitié du XVIIIè siècle en Autriche. Il n'est pas improbable que ça soit Wolfgang Mozart lui même qui l'ait fait connaître à son groupe d'amis une fois rentré à Salzbourg après son mariage avec Constance à Vienne. Il est possible qu'il ait connu ce jeu à Vienne, où il y vivait à l'époque depuis deux ans et où toutes les nouvelles modes arrivaient avant qu'à Salzbourg. En effet, avant ce moment on ne trouve aucune trace de ce jeu dans le Journal de Nannerl.

La musique à la Cour des Princes Archevêques de Salzbourg Pour comprendre les dimensions de l'aspect musical dans une Cour assez riche mais quand même petite, comme celle de Salzbourg nous prendrons en considération les informations contenues dans un article concernant l'institution 18

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart musicale de Salzbourg, publié à l'époque sur un journal de Berlin. L'article est apparu

de

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Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart manière anonyme mais est attribuable à Léopold Mozart, vu que sa présentation est la plus longue et la plus détaillée de toutes et si l'on considère qu'il correspondait avec le directeur du journal. On y cite une centaine de musiciens appartenant à la Chapelle musicale archiépiscopale, des instrumentistes à cordes (une vingtaine), des claviéristes (deux), des instrumentistes à vent (une dizaine entre bois et cuivres), sans compter les instrumentistes supplémentaires pour les occasions et les fêtes spéciales, tout comme une dizaine de trompettistes et timpanistes.

Aux instrumentistes s'ajoutent ensuite les chanteurs solistes (une dizaine d'ensembles complets comprenant des sopranos, des ténors, des basses), le chœur (une vingtaine d'hommes dont altos/falsettistes, ténors et basses) et le chœur de voix blanches comprenant 15 garçons. La quantité ne correspondait cependant pas toujours à la qualité musicale, si nous nous en tenons aux paroles de Wolfgang Mozart écrites de Paris à son père le 9 juillet 1778 : "Un des principauxmotif pour lequel je déteste Salzbourg est l'orchestre de Cour, vulgaire, misérable etbâclé... C'est sans doute pour cette raison que chez nous la musique n'est ni aimée ni priseen considération. Si seulement les choses allaient ici aussi bien qu'à Mannheim! Quellediscipline dans cet orchestre!"

Le voyageur anglais Charles Burney nous dit également, même sans jamais avoir été personnellement à Salzbourg, mais étant informé par son correspondant en 1772, que l'Archevêque Colloredo était un bon violoniste débutant qui était en train d'essayer d'améliorer son orchestre de toutes les manières possibles

"l’orchestre se faisait remarquer, selon certain, davantage par le bruit et la grossièreté quepar la délicatesse et la perfection" . Ce même correspondant, qui était allé chez Mozart, informait Burney de la situation des deux ex enfants prodiges: "Le jeunehomme, qui durantson enfance a émerveillé toute l'Europe par sa surprenante précocité,est encore aujourd'hui un grand maître de son instrument" . Nannerl "désormais enpossession de toutes ses possibilités ne démontre pas de dons extraordinaires" . Enfin un jugement sur les dons de Wolfgang âgé de seize ans en ce qui concerne la composition, à confronter avec les paroles enthousiastes de Léopold pour comprendre qu'ils n'avaient pas tous la même opinion: "Si je dois en juger à partirde la musique que j'ai entendue, composée pour un orchestre par le jeune Mozart, je laconsidère encore un exemple de la précoce floraison, plus étonnante qu'excellente".

Si les nombres cités semblent exagérés aux yeux de certains (et ils l'étaient peut-être, si l'on considère le niveau de pauvreté dans lequel vivaient les sujets qui, avec leurs taxes, contribuaient au soutien des dépenses de la Cour) voici un autre exemple en Allemagne en 1772. Mannheim, petite capitale (environ 25000

habitants en 1766, environ comme à Salzbourg) siège du Prince Électeur du 19

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Palatinat et du plus fameux orchestre de son temps. Burney nous dit qu'il y avait presque cent musiciens et chanteurs (23) au service du prince et que beaucoup d'entre eux étaient italiens (comme les chanteurs Roncaglio, Pesarini et Saporosi).

La considération que le Prince attribuait aux musiciens, chose non commune à l'époque, est clarifiée par une libéralité spécifique: dans la liste des 100 musiciens, tous n'étaient pas en "service effectif", certains pour des motifs de vieillesse ou de maladie. Eh bien, le Prince garantissait à tous les musiciens ayant perdu de l'habileté au travail une bonne pension jusqu'à ce qu'ils restent résidents à Mannheim, cette pension aurait continué à être versée, même si seulement la moitié, également dans le cas d'un déménagement sur leur territoire de naissance ou ailleurs. Les avantages pour les courtisans de l'Électeur Palatinat, du reste, ne se limitait pas à cela vu que pour le transfert d'été dans la résidence de Schwetzingen, son Altesse se faisait accompagner par 1500 personnes, toutes logées et nourries aux frais du Prince (mais il vaudrait sans doute mieux dire aux frais des contribuables de Mannheim).

Un autre exemple, encore plus coûteux, qui indique la perception sociale que les classes inférieures avaient des dépenses artistiques faites par les souverains?

Le voici: Ludwigsburg, nouveau siège en 1772 de la Cour du Duché de Württemberg, après le départ de Stuttgart. L'italien Niccolò Jommelli (1714-1774) au service du Duché dès 1754 en tant que Maître de chapelle et compositeur, dirigea les saisons théâtrales de la cour qui étaient considérées les plus splendides et somptueuses. Les frais pour les installations théâtrales et musicales, cependant, furent tellement énormes qu'ils aggravèrent à un tel point le prélèvement fiscal que les citoyens s'adressèrent au Régime Impérial (assemblée comprenant l'Empereur et les plus influents Princes de l'Empire) en protestant car ils considéraient excessifs les frais à charge de la communauté.

Le résultat des contestations fut la réduction de 50% des salaires des musiciens, ce qui provoqua la "fuite" des meilleurs auprès des Cours moins économes (en 1770 même le contrat de Jommelli fut annulé). En 1772, cependant, l'orchestre du Duc de Württemberg sous la direction du violoniste italien Antonio Lolli (premier violon soliste qui dans les années précédentes, grace à son extraordinaire talent avait vu son salaire augmenter de 700 florins à 2000) pouvait encore compter sur 18 violons, 6 altos, 3 violoncelles, 4 contrebasses, 4 hautbois, 2 flûtes, 3 cors et 2

bassons (42 musiciens) auxquels nous devons ajouter 2 organistes principaux.

Plus les chanteurs, presque tous italiens, pour l'opéra sérieux (2 sopranos, 2 altos, 2 castrés) et pour l'opéra comique (3 voix féminines et 5 voix masculines), 32

danseurs, hommes et femmes, ainsi que les transporteurs d'instruments, les souffleurs pour l'opéra et les copistes pour la préparation des partitions à distribuer aux musiciens. Ici aussi nous trouvons une liste de 90 artistes 20

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart pensionnés. Burney nous communique également une nouvelle particulière, c'est à

dire

que

la

Cour

de

19

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Württemberg, avait à disposition 15 chanteurs castrés, car elle pouvait disposer de deux chirurgiens bolognais "experts dans ce genre d'interventions qui agissent sur la voix".

Les musiciens de la Cour de Salzbourg

Connaître les musiciens qui se sont succédés progressivement dans les différents rôles apicaux au service de la Cour de Salzbourg, peut nous permettre de comprendre qui fréquentait la famille Mozart et, certainement, comprendre également pourquoi Léopold, après différentes avancées de carrière, s'arrêta de manière définitive au rôle de Vice Kapellmeister. Les noms de ces musiciens se trouvent occasionnellement aussi dans la correspondance de Mozart, quelques informations les concernant peuvent donc nous être utiles pour mieux comprendre les situations et les relations qui influencèrent la vie des Mozart.

Lorsque Léopold Mozart fut engagé en 1743 comme violoniste dans l'orchestre du Prince Archevêque de Salzbourg, on trouvait aux sommets musicaux de la ville, Johann Ernst Eberlin (organiste de Cour en service depuis déjà 17 ans et ensuite devenu Kapellmeister, en 1750) et AntonCajetan Adlgasser (engagé d'abord comme choriste et ensuite en remplacement d'Eberlin dans le rôle d'organiste de Cour). Ces deux musiciens, tous deux provenant de la Bavière, étaient donc les deux directs supérieurs de Léopold qui certainement, en plus d'aspirer à l'emploi qu'ils occupaient, plus important et rémunéré que le sien, tira quelques profits de la connaissance de leurs compositions, dans son parcours formatif en tant que compositeur.

Johann Ernst Eberlin (Jettingen 1702 - Salzbourg 1762) Le parcours formatif d'Eberlin fut assez semblable à celui de Léopold Mozart, duquel il fut ami, enseignant et probablement également mentor dans le milieu musical de la Cour. En effet, tout comme Léopold, Eberlin étudia au lycée des Jésuites d'Augusta, où il reçut une formation musicale, il se rendit ensuite à Salzbourg pour étudier le droit à l'Université bénédictine, mais là aussi comme Léopold, il abandonna les études après deux ans. Engagé en 1727 comme organiste (à l'époque de l'Archevêque Firmian, dont presque 20000 habitants de son gouvernement furent contraints d'émigrer), il obtint en 1749

contemporainement les charges de Kapellmeister de Cour et DomKapellmeister, c'est à dire Directeur des cours et des formations instrumentales pour toutes les cérémonies de la Cathédrale de Salzbourg. Eberlin fut un compositeur estimé et le même Léopold Mozart eut une bonne opinion de ses musiques qui cependant, furent bien vite oubliées. Ses morceaux pour clavier, 9 Toccatas et fugues pour 21

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart orgue, furent demandées par Wolfgang en 1782, tandis qu'il se trouvait à Vienne et découvrait les fugues de Bach, grace aux soirées chez le Baron van Swieten.

Probablement que l'intention de Wolfgang était de les utiliser pour approfondir l'étude de la Fugue ou, peut-être, comme cela était déjà arrivé dans le passé, se les attribuer (ce qui expliquerait sa requête de les recevoir en secret en demandant à son père à Salzbourg de les copier) en acquérant la bienveillance de van Swieten, grand estimateur de la polyphonie bachienne. Dans une lettre du 20 avril à sa sœur Nannerl il écrit cependant: " Si papa n'a pas encore copié les œuvres d'Eberlin,j'en suis heureux, car je les ai reçu en cachette et, et malheureusement j'ai constaté (...)qu'elles étaient trop banales pour mériter un place aux côtés de Haendel et Bach".

Anton Cajetan Adlgasser (Inzell 1729 - Salzbourg 1777) Une fois transféré dans la région de sa naissance, la Bavière à Salzbourg, il fut élève d'Eberlin (dont ensuite il épousa la fille) et fut organiste de la Cathédrale jusqu'à sa mort (Wolfgang Mozart fut son successeur). Il se maria trois fois, la dernière fois avec la chanteuse Maria Anna Fesemayer, en cette dernière occasion, il eut comme témoins pour ses noces, le père et le fils des Mozart dont il était ami et avec qui il collabora pour la réalisation de l'Oratoire Die Schuldigkeit des

ersten Gebots (L'obligation du premier commandement). La composition, en trois parties, vit Wolfgang Mozart âgé de dix ans composer la première, Michael Haydn la seconde, Adlgasser la troisième. Il mourut d'une crise cardiaque, de manière spectaculaire mais en accomplissant la mission de sa vie, en jouant de l'orgue dans la Cathédrale de Salzbourg..

Giuseppe Francesco Lolli (Bologne 1701 - Salzbourg 1778) Engagé en 1722 comme ténor dans l'orchestre de la Cour de Salzbourg, il devient Vice Kapellmeister en 1743 et Kapellmeister en 1762. Léopold Mozart, qui aspirait à la même charge n'apprécia pas la préférence accordée à Lolli, au point d'écrire sur les compositions du rival " Il n'a écrit que quelques oratoires de chambre et desmusiques religieuses". En 1772, étant âgé, il fut remplacé par Domenico Fischietti dans le rôle de Kapellmeister.

Johann Michael Haydn (1737-1806)

Frère cadet (même d'un point de vue musical) du grand Franz Joseph, il suivi le même parcours que son frère aîné en devenant à huit ans choriste dans le chœur de la cathédrale de S. Etienne à Vienne. Par la suite, il étudia le violon, orgue et composition et dès qu'il termina ses études, il obtint immédiatement la charge de 22

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Kapellmeister à Gran Varadino, une localité périphérique (en Romania) qui convenait très bien à un jeune musicien qui devait "acquérir de l'expérience". Cinq 21

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart années après, en 1762, nous le retrouvons à Salzbourg en remplacement de Léopold Mozart (absent de ses fonctions car engagé dans son premier voyage pourpromouvoir ses jeunes enfants prodiges, à Vienne) et enfin comme Kapellmeister et Maître de concerts (salaire initial de 300 Florins par ans), une charge qu'il recouvra pendant quarante trois ans avec le privilège de pouvoir manger gratuitement à la cantine des officiers.

Les Mozart, tant Léopold que Wolfgang, n'eurent jamais un tel privilège et devaient manger dans les cuisines, avec les domestiques. Léopold et Wolfgang Mozart naturellement eurent de fréquentes relations avec Michael Haydn, qui représenta un modèle pour certaines compositions de la jeunesse de Wolfgang, vu que comme compositeur, il eut une production très ample et dans tous les genres musicaux utilisés à l'époque (symphonies, concerts, sérénades, trios, quatuors, sonates, musiques vocales sacrées et profanes). Certains travaux de Michael Haydn ont été cités dans la correspondance de Mozart car transcrits (pas toujours de manière autorisée) et utilisés pour des fins didactiques, mais peut-être également pour les exhibitions de ses deux fils. Malgré la relation presque quotidienne Léopold Mozart maintint par rapport à Michael Haydn une attitude négative, qui est confirmée dans les lettres à Wolfgang où il dénigre son supérieur en grade en l'accusant d'être un vaurien (cette accusation n'est pas fondée vu l'immense catalogue compositionnel) et un ivrogne. De telles opinions ont certainement été exprimées verbalement dans le groupe des amis de famille et il n'est pas exclu qu'elles soient arrivées également aux oreilles de l'Archevêque, ce qui n’améliora certainement pas son opinion sur l'envieux Léopold.

Domenico Fischietti (Naples 1725 - Salzbourg 1810) Fils de Giovanni Fischietti, Maître de Chapelle et compositeur, après des études musicales à Naples sous le guide de son père et ensuite, entre autre, de Francesco Durante, il débute dans la même ville avec sa première œuvre, Armindo, en 1742.

En 1755 il se rend à Venise où il est le premier qui met en scène en obtenant un grand succès des œuvres comiques sur des textes de Carlo Goldoni. Après des expériences à Prague comme Directeur de la Compagnie théâtrale Bustelli (1764), il fut nommé Kapellmeister à Dresda auprès de la Cour (1766) succédant à Johann Adolf Hasse, avec un salaire annuel de 600 florins. Ayant perdu son poste de travail à Dresda il se rendit à Vienne en 1772, où il connut l'Archevêque de Salzbourg Colloredo qui, appréciant ses dons musicaux, l'engagea pendant trois ans comme compositeur pour la Chapelle de la Cathédrale et collaborateur du Maître de Chapelle Lolli et du vice Léopold Mozart. De 1776 à 1783 il fut Kapellmeister de la Cour de Salzbourg et de la Cathédrale, avec un salaire annuel 23

Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart de 800 florins. Luigi Maria Baldassarre Gatti lui succéda dans sa charge de Kapellmeister.

Luigi Maria Baldassarre Gatti (1740 - 1817)

Musicalement formé entre Vérone et Mantoue, l'abbé Gatti débuta sa carrière comme ténor auprès de la Chapelle de S. Barbara à Mantoue, mais eut bien vite du succès en tant que compositeur grace à son œuvre Alexandre dans les Indes. En 1769 nous le trouvons comme Vice Maître de Chapelle de l'Académie Royale de Mantoue à peine formée, avec un salaire de 6 sequins de 45 lires. En 1770, à l'occasion du premier voyage des Mozart en Italie, il a l'occasion d'écouter le jeune Wolfgang à Mantoue dans la performance acclamée au Théâtre scientifique (aujourd'hui Théâtre Bibiena, du nom de l'auteur du projet) et connaît les deux salzbourgeois.

En 1778, nous le trouvons à Salzbourg comme Vice Kapellmeister à la Cour et en bons rapports avec les Mozart, tout au moins jusqu'en février 1783 lorsqu'il obtint le poste de kapellmeister à Salzbourg au détriment de Léopold Mozart, qui désirait ce poste depuis des années. Léopold exprime violemment sa colère dans le journal de Nannerl contre une Sérénade de Gatti exécutée dans un théâtre en la définissant " une délicieuse musique italienne davantage pour les oreilles que pour lecœur car elle s'accorde très mal avec l'expression des paroles et avec la vraie passion". Du reste Gatti était un Abbé... et en ce qui concerne les passions, il devait les imaginer. Gatti fut le dernier Kapellmeister de la Cour de Salzbourg car la Principauté fut abolie et le territoire fut absorbé dans les frontières de l'Empire Habsbourg.

Voici une synthèse concernant les musiciens de Cour de Salzbourg durant la période qui intéresse la famille Mozart dans les activités musicales de la Principauté.

Archevêque-Prince: Léopold Antonio Eleuterio Firmian (de 1727 à 1744)

- Kapellmeister: Matthias Sigismund Biechteler (jusqu'en 1743) Karl Heinrichvon Bibern (de 1743 à 1749)

- Organiste de Cour: Johann Ernst Eberlin (dès 1727)

- Léopold Mozart - 1737: arrive à Salzbourg. 1740: valet de chambre et musicien auprès du comte Johann Baptist von Thurn-Valsassina et Taxis. Premières compositions. 1743: engagé comme 4° violoniste dans l'orchestre de Cour.

- Archevêque-Prince:Jakob Ernst von Liechtenstein-Kastelkorn (de 1745 à 1747) 24

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart

- Kapellmeister: Johann Ernst Eberlin (jusqu'en 1749 à 1762)

- Organiste de Cour: Johann Ernst Eberlin (dès 1727)

- Léopold Mozart - 1744: en plus de violoniste il devient professeur de violon et clavier pour les jeunes garçons du chœur de la Cathédrale. 1747: se marie.

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Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart

- Archevêque-Prince: Andreas Jakob von Dietrichstein (de 1747 à 1753) Famille Mozart: 1751: naissance de Nannerl Mozart.

- Archevêque-Prince: Sigismund III Christoph von Schrattenbach (de 1753 à 1771)

- Kapellmeister: Giuseppe Francesco Lolli et Johann Michael Haydn (dès 1762)

- Organiste de Cour : Anton Cajetan Adlgasser (dès 1762)

- Léopold Mozart - 1756: publie la Violinschule, naissance de Wolfgang.

1757: nommé Compositeur de Cour

1758: devient 2° violon de l'orchestre de Cour.

1763: nommé Vice Kapellmeister

Wolfgang Mozart:

1769: nommé 3° maître interprète de concerts de Cour, sans salaire.

- Archevêque-Prince: Hieronymus Joseph Franz de Paula Colloredo von Wallseeund Mels (de 1772 à1803)

- Kapellmeister: Domenico Fischietti (dès 1772); Luigi Maria Baldassarre Gatti (dès 1783)

- Organiste de Cour: Wolfgang Amadeus Mozart (dès 1777)

- Léopold Mozart: Compositeur de Cour (avec Caspar Cristelli et Ferdinand Seidl)

- Wolfgang Mozart:

Dès 1772: violoniste dans l'orchestre de Cour sans salaire et ensuite comme Maître de concerts avec un salaire très bas de 150 florins annuel. En septembre 1777 il se licencie pour entreprendre son voyage à Monaco et à Paris. Dès janvier 1779, à son retour de voyage, il est nommé organiste de Cour et Maître de concerts. Avril 1781, Vienne, démission définitive de son service auprès de l'Archevêque Colloredo.

La famille Mozart

Nous pouvons commencer par un "instantané" de l'époque. La peinture de Johann Nepomuk della Croce est célèbre et représente la famille Mozart en 1780/81: Wolfgang et sa sœur Nannerl au clavier durant l’exécution d'un morceau à 4 mains, leur père Léopold à l'écoute avec un violon en main, prêt à intervenir. Dans l’ovale pendu au mur, la mère morte à Paris quatre ans auparavant. A droite sur le mur, Apollon, le Dieu grec des arts, représenté avec un instrument qui lui était sacré: la cithare. La famille Mozart se forme le 21

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Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart novembre 1747 lorsque LéopoldMozart (28 ans) après une assez longue fréquentation, épouse Anna Maria Pertl (27 ans) dans la Cathédrale de Salzbourg.

Il semble que le couple avait un bel aspect et au cours des années, le lien apparaît bien solide, tout au moins c'est ce que l'on peut apprendre de la correspondance dont nous disposons sur la famille. Depuis une lettre envoyée à son épouse par Léopold Mozart, en voyage en Italie avec leur fils Wolfgang : "Aujourd'hui c'estl'anniversaire de notre mariage. Vingt-cinq ans déjà sont passés, je crois, depuis que nousavons eu cette heureuse idée de nous marier: cette idée,à vrai dire, était arrivée denombreuses années auparavant: Les choses bien faites prennent du temps!".

Les rôles étaient bien clairs et respectaient les usages de l'époque: l'homme s'occupait de tous les aspects économiques et mondains (en cela Léopold était pointilleux au point d'en devenir maniaque, comme nous le verrons par la suite dans ses lettres) tandis que la femme s'occupait de la maison et des enfants en maintenant les relations avec les groupes d'amis ou les personnes, en quelque sorte utiles pour atteindre certains objectifs. Le couple Mozart eut sept enfants mais uniquement deux survécurent, la quatrième fille Maria Anna (dite Nannerl), née en 1751, et le septième fils Wolfgang (dans la famille Wolferl) venu au monde en 1756. A cette époque, la mortalité néonatale et infantile était une situation acceptée avec une douloureuse résignation de la part des parents qui, pour cette raison, procréaient de nombreux enfants. Wolfgang lui même eut six enfants dont seulement deux survécurent.

Du journal de Nannerl, qui couvre les années de 1775 à 1783, nous apprenons que la famille Mozart avait de nombreuses connaissances, des amis qui fréquentaient (certains au quotidien) leur maison et des visites qu'ils effectuaient chez des connaissances ou des élèves de Léopold et de Nannerl. Avec leurs amis, ils passaient leur temps à des bavardages et à des potins ou bien à jouer aux cartes (tresette, tarots, cartes découvertes etc...) ou aux fléchettes (avec des fusils à air comprimé), toujours avec des petites mises d'argent, ou bien des quilles.

Fréquemment les Mozart étaient invités chez des connaissances. Naturellement, les occasions pour la musique ne manquaient pas. En attendant, il y avait les leçons de musique, tenues par Léopold (violon) et Nannerl (clavecin) chez eux ou chez leurs élèves. Mais chez les Mozart on jouait de la musique également avec les amis de Salzbourg (beaucoup desquels faisaient partie de l'orchestre de Cour de l’Archevêque) et avec des musiciens étrangers de passage en ville, qui étaient invités par Léopold ou amenés par d'autres personnes qui fréquentaient la maison

Les amies de Nannerl la peignaient, l’accompagnaient en promenade sur les remparts (n'existant plus aujourd'hui), aux fonctions religieuses presque 26

Diego Minoia – Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart quotidiennes, qui souvent étaient accompagnées par la musique des compositeurs de

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Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart Cour Eberlin, Adlgasser, Michael Haydn et par Wolfgang Mozart lui même. Les Processions étaient d'autres moments d'attraction pour la population, souvent celles pour les occasions solennelles, auxquelles assistait également le Prince -

Archevêque ou, comme à l'occasion du Corpus Domini accompagné en grande pompe également par la chevalerie princière (Wolfgang ironise, dans le journal de Nannerl, sur le fait qu'en cette occasion ils allèrent chez la famille Hagenauer, les patrons précédents de la maison des Mozart à Getreidegasse, pour " voirchier leschevaux" et qu'il fit tomber une bougie allumée sur la procession).

Les distractions profanes ne manquaient pas, tout comme les fréquentes participations de la famille Mozart (même au quotidien pour plusieurs jours de suite) aux représentations des Comédies proposées par les Compagnies théâtrales, qui se déroulaient à Salzbourg durant leurs tournées. Ils s'arrêtaient en ville durant quelques semaines et proposaient les divers titres de leur répertoire.

En 1779, par exemple, à Salzbourg la Compagnie de Johann Bohm s'était installée pour la Saison théâtrale, elle proposait tout au long de l'année des dizaines de répliques (au moins une soixantaine, si on s'en tient au journal de Nannerl) de différentes comédies et ballets, à vrai dire dans certains cas jugés " très mauvais".

Ensuite il y avait les Académies musicales et les ballets, mais aussi les soirées dansantes organisées chaque semaine, surtout durant la période du Carnaval, auprès de la sale de la municipalité.

Voici le programme musical d'une Académie tenue le 18 mars 1779 (dans le journal de Nannerl, Wolfgang âgé de vingt-trois ans, qui de temps en temps écrivait au lieu de sa sœur avec ses typiques plaisanteries, la décrit comme

"cacadémie à lamode" ):

1 - une symphonie (la Haffner KV385 de Wolfgang NdA);

2 - un air italien;

3 - un trio à trois voix de Mr Salieri (à l'époque Compositeur impérial et Maître de Chapelle à Vienne NdA);

4 - un Concert pour violoncelle de Joseph Fiala (hautboïste et violoncelliste ami des Mozart NdA);

5 - un air pour voix, hautbois et harpe;

6 - L'air avec trompettes, timbales, flûtes, altos, bassons et basses écrit par moi (Wolfgang NdA);

7 - Le premier final d'Anfossi de “Perseguita incognitata” (distorsion bouffonne du titre par Wolfgang. Le titre correct de l’œuvre du compositeur italien Pasquale Anfossi était “L'incognita perseguitata” NdA);

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Diego Minoia - Les Mozart comme ils étaient

1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart 8 - par simple compassion nous avons fait chanter à Ceccarelli un Rondeau (Ceccarelli, ami de famille des Mozart et "castré" en service auprès de la Cour de Salzbourg, pour lequel par la suite Wolfgang écrit un air et récitatif NdA); 9 - En conclusion nous avons représenté l'entière ville de Milan NB: avec trompettes et timbales.

En outre il y avait des divertissements pour les occasions spéciales, comme les feux d'artifices dans l'École Hippique d'Été.

Une autre activité à la mode dans la moitié du XVIIIè siècle, également documentée par les passe temps de la maison Mozart était la silhouette, une technique de portrait où l'on esquisse uniquement le contour de la personne ou de l'objet que l'on veut représenter, en colorant de noir l'intérieur du dessin. On les réalisait quelques fois en mettant une toile blanche ou une feuille en papier devant l'objet à représenter, mis dans l'ombre.

Au milieu de ces activités naturellement, mais sans un particulier emploi du temps (à part les leçons, qui pouvaient être presque quotidiennes mais de brève durée) il y avait les engagements de la Cour, pour les concerts ou les différentes charges comme pour Léopold, devoir accorder le piano au Château Mirabel, la résidence d'été de l'Archevêque.

Parfois, il y avait des promenades dans les jardins du Château Mirabel, dans la nouvelle partie de la ville, au delà du fleuve, ou bien aussi des excursions "hors des remparts", comme la visite effectuée en 1780 à la raffinerie de sel à S. Zeno (je rappelle que le sel gemme était la source principale de richesse de la région, dont dérivait, non par hasard, également le nom de la ville Salzbourg, Château du sel, et du fleuve Salzbach, rue du sel). Cette dernière curiosité qui concerne la famille Mozart est le code crypté que Léopold et sa femme utilisaient pour éviter la curiosité de la censure (qui à l'époque ouvrait et lisait souvent les lettres pour contrôler la pensée des sujets et éviter des complots). Les lettres que Léopold écrivait circulaient dans Salzbourg pour prendre note des prouesses musicales effectuées dans les différentes Cours, pour autant le chiffrement secret était utilisé pour communiquer avec sa femme lorsqu'il y avait dans les lettres des mensonges qu'il fallait faire croire à l'Archevêque.

Nous trouvons les exemples les plus éclatants dans les lettres envoyées de Milan au cours du troisième et dernier voyage italien de Léopold et Wolfgang, dans lesquelles il se plaint des terribles douleurs aux bras et aux jambes qui l'empêchent de rentrer à Salzbourg. En réalité, il prenait du temps dans l'attente de connaître le résultat de ses contacts avec Pietro Léopold d'Habsbourg-Lorraine, Grand Duc de Toscane, concernant un engagement à la Cour florentine de Wolfgang. Cela se termina négativement et Léopold du, malgré lui, rentrer à Salzbourg, tête baissée: le grand rêve italien était évanoui. Concernant le langage 28

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1^ partie - Salzbourg et la famille Mozart crypté, il n'était pas compliqué et, si un censeur avait pris la peine de le déchiffrer, il aurait probablement compris très facilement.

Du reste il est probable qu'aucune lettre avec des parties cryptées n'ait jamais subi de contrôle puisque, si cela était arrivé, le censeur aurait certainement eu la curiosité de savoir quels secrets pouvaient se cacher dans ces phrases sans signification, insérées dans une lettre, en plus compréhensible. Les motifs qui nous permettent de le dire ne manquent certainement pas. Voici, en tout cas, le petit secret des Mozart: remplacer les voyelles de certaines paroles par des consones.

Voulant dire Milan il aurait écrit Mflmn

La mère

Anna Maria Walburga Pert (1720-1778) est née à Sankt Gilgen, une petite commune située à 545 mètres sur le niveau de la mer, sur les rives du lac Wolfgangsee, et à une trentaine de kilomètres de Salzbourg, chef lieu de la région.

Située dans une région agréable enrichie de petits lacs alpins, à l'époque il ne devait s'agir que d'une poignée de maisons habitées par des paysans.

Le père d'Anna Maria, Wolfgang Nikolaus Pertl, épousa Euphrosina Puxbaum (fille et veuve de deux musiciens d'église) il accomplit des études de droit et eut un début de carrière qui promettait, comme fonctionnaire d'État à Salzbourg, Vienne et Graz. Une maladie invalidante le contraint à accepter une charge inférieure (avec une réduction de salaire à 250 florins annuels) en tant que Surintendant adjoint à Huttenstein, un village près de St. Gilgen. Vu la situation (si on pense qu'aujourd'hui ce village compte un peu plus de 3000 habitants partagés en 7 hameaux et qu'à l'époque ils étaient encore moins nombreux) une telle charge ne devait pas être un honneur particulier et encore moins bien rémunéré. A la mort du père, en 1724, la famille vivait dans la pauvreté, pire encore, avec des dettes qui allaient au delà de mille florins et qui portèrent à la saisie des biens. Cette si-tuation amena son épouse à la décision (avec deux filles en bas âge, une desquelles mourra peu après) de déménager à Salzbourg, lieu d'origine de la famille, où cependant il menèrent une vie de misère et survivaient uniquement grace à un subside de la municipalité et à de petits travaux domestiques pour d'autres familles. la rencontre entre Anna Maria et Léopold eu donc certainement lieu à Salzbourg.

Les habitudes culturelles paysannes acquéries à St. Gilgen et dans le milieu des déshérités de Salzbourg, durent certainement influencer la formation d'Anna Maria qui démontre, de ce qui émane des sources, une certaine spontanéité et une 29

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