Mes bluettes - Mireille Deygas - E-Book

Mes bluettes E-Book

Mireille Deygas

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Beschreibung

Au gré des saisons et des tourments de la vie, Mireille Deygas capture les moments éphémères qui composent notre existence. Dans une danse envoûtante entre passé et présent, elle tisse une toile narrative où se mêlent rencontres passionnées, séparations déchirantes et émotions changeantes. À travers les époques, laissez-vous emporter par ce ballet saisissant qui ne manquera pas de vous émouvoir.

À PROPOS DE L'AUTRICE

Entre des décès, des séparations et un déménagement qui ont mis fin à une enfance tranquille, Mireille Deygas s’est réfugiée dans la lecture. Enfant solitaire et quelque peu déprimée, elle a inventé des histoires telles que "Mes bluettes", gardées secrètes pendant longtemps.

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Couverture

Page de titre

Mireille Deygas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Mes bluettes

Nouvelles

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Copyright

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

© Lys Bleu Éditions – Mireille Deygas

ISBN : 979-10-422-3462-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À la mémoire de mes parents, de mon frère

Et pour mes enfants, mes petits-enfants et arrière-petit-fils

Avec tout mon amour.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Méprise

 

 

 

 

 

— Pourquoi m’emmènes-tu au terrain ? demanda la jeune Nathalie à son père.

Fabien Barrier avait atteint la quarantaine, il avait pris du ventre, ses traits s’étaient empâtés, mais deux yeux bleus continuaient à illuminer son visage.

Barrier était commandant de la base militaire-civile de l’Estérel-Roc-Rouge. Le terrain d’aviation était composé de 2 pistes civiles et de 4 militaires pour l’essai de prototypes.

Nathalie Barrier avait 17 ans et demi. Depuis la mort de sa mère, elle s’était retirée, volontairement, de ce qu’on appelle « l’univers copain ». Elle était très belle, son visage mutin était auréolé de blond cheveux courts et était éclairé par deux yeux bleus.

À la question de sa fille, Barrier répondit :

— Je veux t’initier à l’aviation, puisque tu m’as souvent dit que tu aimerais apprendre à piloter. C’est le moment : j’ai rencontré, l’autre jour, aux civiles, un jeune pilote, Michel Fertier, qui veut bien te donner des leçons.

 

***

 

En arrivant au terrain civil, ils se dirigèrent vers les hangars où brillaient au soleil de juin, les « Yodell » bleu et blanc. Ils s’avancèrent vers un jeune homme en blue-jean et blouson de cuir. Les regards de Nathalie et Michel se croisèrent…

Michel Fertier était grand, aux cheveux noirs, aux yeux bleus horizon, au visage hâlé par l’air du large. Il ne paraissait guère plus de 25 ans, il était très beau, bien que, par instant, son visage se crispa sous quelques terribles souvenirs.

 

***

 

Pour le premier jour, ce ne fut guère une leçon : ce fut plutôt un baptême de l’air.

En rentrant le soir, Nathalie posa, à son père, beaucoup de questions sur le jeune pilote, ce qui fit rire le commandant qui demanda :

— Dis donc, petite, il t’intéresse bien ce jeune ?
— Je m’intéresse à lui, oui, car je voudrais bien savoir qui est mon professeur !
— Bon ! Alors, ouvre grand tes oreilles, et écoute-moi : d’après les renseignements que j’ai sur lui, Fertier, en arrivant à l’Esterel, tomba amoureux d’une jeune fille de Sablon. Alors que leurs fiançailles étaient imminentes, il se rendit compte que la fille sortait avec un autre gars et qu’elle ne cachait même pas qu’elle était sa maîtresse. Si bien que Fertier, dépité par tant de bassesse, reprit sa parole, et depuis 2 ans, vit dans un état de perpétuelle dépression. Il y a des fois où il amorce des « piqués » et ne redresse qu’à quelques mètres du sol ! Je crois… que je vais te choisir un autre moniteur !
— À aucun prix ! Dans l’Arlésienne, rappelle-toi ce qu’a dit Vivette à Frédéri : « Le mal qu’une femme a fait, seule une femme peut le réparer. » Alors, laisse-moi essayer : je pourrai toujours lui changer les idées.

Le commandant soupira, mais laissa faire sa fille.

 

***

 

Le lendemain après-midi, Nathalie se rendit au terrain. Fertier l’accueillit en souriant, et la leçon commença.

La même scène se reproduisit tous les jours pendant plusieurs mois.

Certains soirs, ils allaient au bal ou au cinéma. Nathalie se mit à penser au jeune pilote autrement qu’en frère ou copain : elle y pensait en « fiancé ». Elle se bâtissait des rêves, elle se voyait, vêtue de blanc, à son bras.

Un jour, la leçon terminée, Michel lui demanda :

— Nathalie, je viens vous chercher ce soir ? Il y a bal à Sablon.
— Oui, oui ! Vers 19 heures ? Bon, au revoir Michel, à ce soir…

Ils se serrèrent la main, et Michel partit vers les hangars. Nathalie le regarda s’éloigner et des larmes coulèrent sur ses joues.

Eh oui, elle qui voulait aider Michel, était tombée dans le piège de l’amour !

 

***

 

Lorsque Michel vint chercher la jeune fille, celle-ci lui apparut comme une fée : elle portait une robe droite d’un bleu pâle qui s’harmonisait avec la couleur de ses yeux.

Elle monta dans la voiture et s’assit sur le siège vacant à côté du conducteur.

Ils dansèrent presque jusqu’à minuit, et c’est sur le chemin du retour que soudain, sans quitter la route du regard, Michel dit :

— Je vous aime, Nathalie. Voulez-vous m’épouser ?
— Oui, Michel, car moi aussi, je vous aime.

Nathalie s’attendait à ce que Michel gare la voiture, la prenne dans ses bras pour l’embrasser. Mais non !

Michel ne l’embrassa que lorsqu’il la déposa devant la grille de la villa des Barrier. Nathalie fut vraiment déçue. Elle aurait voulu rester avec lui de plus longues minutes.

 

***

 

Le lendemain, Michel vint demander sa main au commandant qui accepta devant l’air heureux de sa fille. Michel n’eut pas à demander d’autorisation aux siens : il était orphelin et fils unique !

Les fiançailles furent officielles 3 mois plus tard, et le mariage célébré 6 mois après les fiançailles.

 

***

 

6 semaines après leur union, Michel partit pour Paris pour un meeting d’aviation, et laissa sa femme seule pendant 8 jours. Lorsqu’il revint, Nathalie lui sembla changée. Elle n’avait jamais été si prévenante et tendre.

Plusieurs semaines plus tard, elle lui apprit qu’elle attendait un bébé, leur enfant !

— Le tien sûrement, mais il n’est pas de moi. Quand il a été conçu, je n’étais pas ici !

Nathalie le regarda, les yeux exorbités :

— Quoi ? Tu crois que je t’ai trompé pendant la semaine du meeting ? Oh, Michel, comment peux-tu croire une chose pareille ? C’est affreux !

Michel la prit par les épaules et la secoua :

— Dis, je ne suis pas un enfant de chœur. On m’a déjà fait le coup une fois, ça me suffit ! Ton gosse aura un nom, le mien, mais ne me demande pas plus. Je pars dans un pays lointain. Tous les mois, tu recevras de l’argent pour ton entretien et celui du petit, ce sera tout !
— Mais, Michel, il faut me croire : c’est ton enfant !
— Le mien ? Et pourquoi pas celui de Claude Dangel qui venait te voir, tous les soirs de cette fameuse semaine, et qui ne repartait qu’à la nuit noire, et Dieu sait, si les nuits tombent tard l’été !
— Oui, je le reconnais, Claude venait tous les jours, mais tu es mal renseigné sur un point : c’est que mon père venait en même temps que lui et ne repartait que lorsque ton copain partait ! Et ça, tu pourras le vérifier ! Comme tu ne veux pas reconnaître pour ton enfant ce bébé, ton argent tu pourras le garder, ou si tu l’envoies, il sera déposé, à la banque, sur un compte au nom de ton fils. Mais sois sûr d’une chose, Michel, c’est qu’il méritera son nom, et tu pourras t’en apercevoir si, à sa naissance, tu acceptes de le voir !
— Je ne serai plus là ! Maintenant, monte dans ta chambre, moi je coucherai au salon, sur le divan ! Mais ne compte pas sur le divorce pour te séparer de moi…
— Mais pourquoi ne demanderais-tu pas le divorce ?
— Pourquoi ? Parce que je continue de t’aimer et que je souffre ! Et toi aussi, comme ça, tu souffriras !
— Qui te dit que je souffrirais ?

Puis Nathalie tourna les talons et sortit de la pièce. Elle se jeta sur le lit et se mit à pleurer.

Michel, lui aussi, pleurait. Il aurait voulu aller vers sa femme, la prendre dans ses bras et lui demander pardon. Mais, pour lui, c’était à elle de faire le premier pas : c’était elle qui avait fauté, pas lui. Cet enfant ne pouvait être le sien. Lors de la visite prénuptiale, le médecin lui avait trouvé une anomalie génétique qui doit l’empêcher de procréer. Et maintenant, sa femme lui apprend qu’elle… Une seule solution à ce dilemme, elle l’avait trompé, et quand on trompe son mari après 6 semaines de mariage…

Michel secoua la tête, et entra dans la cuisine pour se faire un café très fort, puis il sortit faire un tour. Il erra toute la nuit comme une âme en peine. Lorsqu’il rentra chez lui à l’aube, il se dirigea vers la chambre où reposait Nathalie. Celle-ci ne dormait pas non plus, et quand elle entendit ses pas rapprocher, elle eut un fol espoir, mais au moment où sa main allait appuyer la poignée, l’orgueil et l’amour-propre de son mari reprirent le dessus.

En baissant la tête, Michel alla dans la salle de bain se passer un linge humide sur le visage et de là, gagna le terrain d’aviation.

 

***

 

Il ne rentra que le soir, après avoir volé et réfléchi toute la journée. Mais il ne desserra pas les dents de tout le repas. Nathalie, quant à elle, s’était tracé une ligne de conduite : avenante, souriante et indifférente. Elle l’a suivi parfaitement. Advienne que pourra !

Ils regardèrent la télé, comme par le passé. Au moment d’aller se coucher, Michel prit Nathalie dans ses bras et lui dit :

— J’ai bien réfléchi. Je reste jusqu’à la naissance ; excuse mon comportement. Est-ce que je… ?
— Non ! pas tant que tu n’auras pas retrouvé toute confiance en moi !
— Tu ne veux plus, non plus, m’embrasser ?
— Si, ça, je le peux !

Michel sera plus fort, Nathalie contre lui et posa sa bouche sur la sienne. Ils étaient tous les deux au paroxysme du bonheur, et avaient fait le premier pas sur le chemin de la réconciliation.

Lorsqu’ils se séparent, Nathalie avait les yeux brillants de larmes : il lui était dur d’interdire, à son mari, sa chambre.

 

***

 

Nathalie dormit cette nuit-là, mais d’un sommeil léger et interrompu de cauchemars.

Pour Michel, ce fut encore une nuit blanche. Il voulut lire, mais il ne comprenait rien au texte. Il se leva et s’approcha de la fenêtre. La vitre reflétait son image. Tout à coup, il se dit :

« Et si le médecin s’était trompé… Si… Si… Je l’aime tant ! Oh, il faut que je voie Dangel immédiatement ! »

Il enfila son blouson et sortit dans la froide nuit de décembre. Un vent aigre l’accueillit, Michel frissonna, mais continua d’avancer. Bientôt, il fut en vue du pavillon qui abritait Claude Dangel et d’autres pilotes célibataires. Il sonna à la porte du studio de Dangel qui vint lui ouvrir, au bout de quelques minutes, en grognant.

Quand Claude l’eut reconnu, il l’invita à entrer et à s’asseoir. Sans prendre cette peine, Michel attaqua :

— Es-tu l’amant de ma femme ?

Dangel le regarda avec effarement :

— Non, mais ça va pas ! Tu ne travaillerais pas du chapeau des fois ? lui dit-il en tapant de son index sa tempe gauche.
— C’est bien vrai ?
— Tu apprendras que ta femme n’est, à mes yeux, qu’une enfant. Qu’elle t’aime bien trop pour que je pense à faire d’elle ma maîtresse ! Et n’oublie pas non plus que je suis ton meilleur copain, et donc, par-là, même le sien !
— Tu ne sais pas la joie que tu viens de me donner. D’après un médecin, je suis stérile et Nathalie vient de m’apprendre qu’elle est enceinte…
— Et tu t’es imaginé que ce n’était pas le tien, n’est-ce pas ? Eh bien, sache que Nathalie t’appartient et n’appartiendra à aucun autre homme que toi. Je suppose que vous vous êtes disputés et qu’elle est seule dans sa chambre à penser, à pleurer, à rêver de toi. Allez, va vite la rejoindre et demande-lui pardon d’avoir douté d’elle. Sincèrement, ne crois-tu pas possible qu’un médecin puisse se tromper ?
— Si, je le crois. Merci, Claude.

 

***

 

Michel rentra chez lui, le cœur léger, et se dirigea vers la chambre. Il y pénétra sur la pointe des pieds, s’approcha de Nathalie et lui demanda pardon en déposant un baiser sur son front. Nathalie ouvrit les yeux, noua ses bras autour du cou de son mari, et murmura :

— Tu me crois ?
— Je te cr…

La réponse de Michel se perdit dans le baiser qu’ils échangèrent.

 

***

 

Lorsque naquit Stéphane, tous les doutes qui pouvaient, malgré tout, subsister s’envolèrent. La confiance était revenue.

Et on ne vit point famille plus unie à l’Esterel-Roc-Rouge.

 

 

Été 1964

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Presque une légende…

 

 

 

 

 

19… ? Dans une petite ville de province, une jeune femme mettait au monde une petite fille, abandonnée immédiatement à l’Assistance publique. Né sous « X », le bébé pouvait être adopté. On la prénomma Monique et elle fut adoptée par un couple de 40 ans qui, marié depuis près de 20 ans, était resté stérile.

Le mari était grand, blond aux yeux bleus. De sa grand-mère suédoise, il avait hérité du charme nordique.

Sa femme était très belle, et elle aussi, grande, blonde, aux yeux bleus.

Gérald et Maryse de Kerguelen habitaient, en Bretagne, le manoir de Kerlem.

Le manoir abritait, depuis des siècles, les Kerguelen. Massif, mais accueillant, il était encore empreint du passage des corsaires et des flibustiers qui portaient le nom de Kerguelen.

Le couple choisit la petite Monique, et après les formalités d’adoption signées, il repartit avec sa fille pour le manoir.

 

***

 

Les mois s’écoulèrent lentement, mais dans la joie. Lorsque Monique eut un an, ce fut une grande fête au château.

 

***

 

À 4 ans, Monique chuta dans l’escalier et se blessa grièvement. Pendant plus d’une semaine, ses parents la veillèrent. Tous, au château, vivaient dans l’anxiété, ayant peur qu’on ne vienne leur annoncer que la petite Monique n’était plus. Mais dès qu’elle put subir l’opération qui pouvait la sauver, et qui, bien heureusement, réussit, tous respirèrent de nouveau. Lorsqu’elle rentra au château, tous ses braves gens l’accueillirent avec des larmes dans les yeux, mais elle était trop jeune pour comprendre le danger auquel elle avait échappé. Et tout aussitôt arrivée, elle reprit ses jeux avec un garçonnet de 3 ans son aîné, Olivier de Karner.

 

***

 

Lorsqu’elle eut 10 ans, ses parents lui apprirent qu’elle était une enfant adoptée. Elle n’en fut pas peinée, et leur dit :

— Je vous en aime que mieux. C’est vous qui m’avez donné les joies de mon enfance. Mais que dira Olivier ?
— Olivier le sait déjà. Ses parents le lui ont dit depuis longtemps.

Elle les embrassa et s’en fut dans le parc, près de l’étang de Géval, où elle fut, bientôt, rejointe par Olivier, et ils se mirent à essayer de faire des ricochets.

Olivier de Karner avait eu un frère aîné, Lionel, qui disparut pendant la dernière guerre. Il avait maintenant une petite sœur de 2 ans, Liliane. Ses parents, Ronald et Camille, habitaient le manoir voisin de Kerlem.

Prochainement, c’est-à-dire à la fin des vacances scolaires, Olivier allait partir pensionnaire dans un collège de Brest. Il ressemblait beaucoup à Monique avec ses cheveux blonds et ses yeux bleus, mais du haut de ses 13 ans, il paraissait presque un jeune homme, grand, avec un corps musclé qui transparaissait sous le blue-jean et la chemisette de toile ; Monique faisait très gamine comparée à son grand ami.

En septembre, Olivier prit le train pour Brest. Monique versa beaucoup de larmes le jour de la séparation, mais jamais devant lui. Elle voulait qu’il la croie courageuse. Olivier la serra longuement contre son cœur en lui caressant ses cheveux couleur de blé. Il était triste, lui aussi, il lui semblait que son cœur allait éclater !

Et maintenant sur ce quai de gare, on ne distinguait même plus le train ! La petite Monique éclata en sanglots et c’est en vain que son père essaya de la consoler.

 

***

 

Cinq ans allaient s’écouler avant qu’Olivier et Monique ne se retrouvent.

Olivier alla, en Angleterre, parfaire ses études. Et lorsqu’il revenait, pendant les vacances scolaires, Monique était, soit dans les Alpes, soit en Corse, pour sa santé.

Après le départ d’Olivier, Gérald et Maryse décidèrent d’adopter un petit garçon, car Monique errait en pleurant dans les couloirs. Et ils avaient tant d’amour à donner et à partager.

Ils prirent un garçonnet de 5 ans, atteint d’une légère claudication, qui se prénommait Joël : un rayon de soleil pour Monique.

C’est peu après son arrivée qu’atteinte par un risque de tuberculose, elle quitta Kerlem pour les vacances. Et c’est ainsi que passa 5 ans.

 

***

 

Lorsqu’Olivier revint en Bretagne, il reconnut difficilement dans la jeune fille de 16 ans, la gamine qu’il avait laissée.

Quelques mois s’évanouirent sans savoir comment : pour Olivier et Monique, ils étaient bien finis le temps des Indiens et des corsaires, le temps de l’amour commençait !

Un jour qu’ils se promenaient, main dans la main, au bord de l’étang de Géval, ils s’assirent sur une souche, et Olivier fit sa déclaration d’amour et sa demande en mariage à Monique qui posa sa tête sur l’épaule de son compagnon en signe d’acquiescement. Un long baiser les unit.

À leur retour à Kerlem, Olivier alla demander la main de l’élue de son cœur à ses parents. Ceux-ci acceptèrent, malgré le jeune âge des amoureux. De même, les Karner ne mirent pas d’opposition.

Et le 3 juin, les cloches de l’église de Kernalen sonnaient à toute volée pour le mariage. Ils partirent pour la Suède et le Danemark en voyage de noces.

 

***

 

Quelques mois plus tard, Monique annonça qu’elle attendait un bébé pour avril.

Mais leur bonheur fut de courte durée.

Un couple assez âgé se présenta chez les jeunes mariés. Alain et Martine Clerc déclarèrent être les parents de Monique et qu’elle devait venir vivre avec eux.

Monique, les mains sur les hanches, son ventre arrondi en avant, les bras d’Olivier autour de ses épaules, leur répondit d’une voix indifférente :

— Alors ainsi, après m’avoir abandonnée à ma naissance, vous vous souvenez 16 ans après que vous avez une fille. Seulement, voilà, j’ai déjà des parents, je suis mariée et bientôt mère. Vos élans cachent quelque chose de louche, et de toute façon, sont trop tardifs.

Les Clercs n’insistèrent pas, mais trois jours après, les Karner recevaient la visite d’un huissier, mandaté par un avocat, qui leur remit une convocation du Tribunal. 4 mois plus tard, s’ouvrait le procès.

À son terme, le Président demanda à Monique si elle avait une requête à formuler :

—