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"Mon ado-rexie" témoigne du parcours de Samantha contre l’anorexie et le harcèlement scolaire. Des premières tentatives de suicide au chemin vers la guérison, le lecteur plonge dans sa vie et son combat. Elle vous laisse le soin de découvrir le sens de son existence qui se dévoile au fil des pages.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Rescapée des troubles du comportement alimentaire et victime de harcèlement scolaire,
Samantha Pace a transformé ses blessures passées en force afin de venir en aide aux autres. L’écriture de Mon ado-rexie est la réalisation d’un rêve d’enfance. Ce témoignage vise à apporter de l’espoir aux malades et aux proches qui les accompagnent.
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Seitenzahl: 137
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Samantha Pace
Mon ado-rexie
© Lys Bleu Éditions – Samantha Pace
ISBN : 979-10-422-3764-6
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Je l’ai fait… je les ai pris. J’ai le souffle court. La bouche sèche. Mes gestes sont lents… ah, je titube. Mais qu’ai-je fait ? Je me rends compte des conséquences de mon acte. Je souris.
Je sors de cours, mes jambes fléchissent. Je m’assois dans le couloir, tout devient noir… lorsque je me réveille, j’ai l’impression d’avoir dormi des heures, pourtant il ne s’est écoulé que deux petites minutes.
Je me lève difficilement, mes membres sont de plus en plus lourds. Je suffoque. Il faut que je prenne le bus. Comment me rendre jusque-là ? Je rase les murs, le souffle court. Un pas, puis deux… Je suis dans le bus. Tout tourne autour de moi. L’air est lourd, pesant, étouffant. Je n’entends plus qu’un bruit sourd autour de moi. Je me sens seule, au milieu de ce brouhaha oppressant.
J’arrive enfin chez moi, je m’assois à table, douloureusement. Ma mère m’interroge du regard. Je fuis, son regard me pèse. Je sors de table, de toute manière je ne peux rien avaler, tant mon estomac est retourné. Je chancelle jusqu’aux toilettes, juste à temps pour vomir. Je me vide, toujours plus. Mes parents inquiets se précipitent vers moi, je les repousse. Je leur mens, en disant que tout va bien. L’après-midi qui suit est un calvaire. Je ne sais plus dans quelle position rester tant mes douleurs deviennent puissantes. J’éprouve en ce moment précis un sentiment si compliqué à exprimer… D’une part je pâtis sous la douleur, mais d’autre part je suis tellement heureuse de vivre mes derniers instants.
Mais quand donc arriverai-je à mes fins ? Le temps est si long, et soudain, tout devient noir, encore une fois. Mais lorsque je me réveille, ce ne sont pas les jolies couleurs de ma chambre que je découvre, non, mais bien du blanc, oui du blanc et uniquement du blanc. Tout ce qui m’entoure, les murs, les portes, jusqu’aux draps, tout est blanc. La panique me gagne.
Tout autour de moi s’effondre ; ma mère, près de moi, les joues pleines de larmes, me présente alors les plaquettes de médicaments que j’ai avalés quelques heures plus tôt. Comment les a-t-elle trouvées ? Des questions, des milliers de questions tournent dans ma tête.
Pourquoi suis-je encore en vie ? Pourquoi suis-je ici ? Je ne peux plus bouger, mes membres refusent de m’obéir, mes larmes ne veulent plus couler, je suis paralysée. J’ai peur. Que va-t-il se passer désormais ? Comment ai-je pu rater ce suicide que j’ai si bien préparé ? À quel moment ai-je fauté ? Je ne comprends plus rien, je me rendors, attendant ma mort, qui tarde à venir.
Un homme entre dans la pièce et discute longuement avec mes parents. Sa voix est grave et calme. La discussion est intense, mes parents ont un air affolé, je le ressens dans leurs voix. Je garde les yeux fermés, pour écouter cette conversation dont je suis le principal sujet. Je me sens mal à l’aise tout à coup. Je ne saisis que quelques mots par-ci par-là : « suicide », « Service psychiatrique », « séparation de la famille »… j’ouvre les yeux et je hurle :
« NOOOOON ! »
Je refuse que l’on me sépare des seules personnes que j’aime. Ce n’est pas eux que je veux fuir, mais bien le reste du monde. Pourquoi veut-on me punir encore plus ? Comme si la vie n’était pas assez dure comme cela. Je comprends alors que je vais payer les conséquences de mon acte. Je pleure sans pouvoir m’arrêter. De nouveau tout tourne autour de moi, mais cette fois, le malaise est différent. En effet, ce n’est plus la fin que je sens venir, mais bien une nouvelle vie minable dans le monde des fous.
La psychiatrie… Il ne manquait plus qu’elle ! Je regrette tellement d’avoir échoué. Mes parents, épuisés, tristes et en colère, tentent en vain de comprendre mon geste. Mais je ne peux leur expliquer. Il y a tant de choses qui m’ont conduite jusque-là. Ils ne comprendraient pas ma détresse. Ils ne peuvent pas savoir ce qui me passe par la tête dans mes moments de faiblesse.
Je ne leur en veux pas, j’ai moi-même du mal à me comprendre parfois. Je m’en veux d’être là. De devoir répondre à leurs interrogations. Désormais, le monde qui m’entoure n’est plus le même. J’ai basculé du côté obscur de la vie. Dorénavant, je suis une patiente atteinte de troubles psychiatriques. Jamais je n’aurais pu imaginer que je raterais ma vie à ce point. Comme si les problèmes ne suffisaient pas, comme si l’on m’interdisait de les fuir. Je dois les affronter coûte que coûte, je n’ai plus le choix. Je pleure encore, encore, et je m’endors.
Je me réveille quelques années auparavant. J’ai cinq ans ou peut-être six. Je suis dans la cour de l’école quand deux de mes camarades viennent m’aborder. Sophie et Julie s’approchent de moi, le sourire aux lèvres. Je sens de l’arrogance dans leur regard. Je n’aime pas ces deux petites pestes, pourtant je les laisse me parler. Elles prétendent avoir une surprise pour moi, et malgré la peur qui me tiraille, je leur obéis, par peur de représailles. Je ferme les yeux, j’ouvre la bouche. Puis, quelques instants après, je crache alors les cailloux répugnants qu’elles viennent d’insérer dans ma bouche d’enfant. Elles partent en courant, rigolant de plus en plus fort. J’ai honte ! Je pars me cacher dans un coin de la cour pour pleurer.
Je rouvre mes yeux, et je sens les larmes couler sur mes joues. Je me souviens alors de l’endroit où je suis et une vague de désespoir s’empare de moi. Mon transfert se fait en cette soirée hivernale du mois de janvier. Deux ambulanciers arrivent, me demandent de les suivre. Je suis escortée par mes parents mais pas par le docteur Jean, l’homme qui parlait avec eux pendant mes instants d’absence. Je ne comprends pas tellement ce qui se passe autour de moi. Tout s’active, passe très vite, je crois que j’ai retrouvé tous mes sens. J’ai donc bel et bien raté mon suicide, et je ne suis pas au bout de mes surprises.
Je suis à l’arrière de l’ambulance. J’ai de nouveau la tête dans les nuages. Que va-t-il se passer maintenant ? La peur s’empare de nouveau de moi. Je regarde ma mère avec de grands yeux ronds, affolée. Il se trame quelque chose de pas net. Je sens de la haine et de l’incompréhension dans le regard de mon père, et de la peine et de la désolation dans celui de ma mère. J’ai encore plus envie de mourir, pour ne pas avoir à répondre de mes actes. J’ai des remords. Je voudrais être un petit lapin et pouvoir me cacher et m’enfermer dans mon terrier.
Je n’ai plus le temps de réfléchir, voilà que l’ambulance s’arrête. Il fait nuit noire désormais. Il pleut, comme si le ciel aussi était triste.
Nous entrons par une petite porte sécurisée par un code. Lorsque nous pénétrons dans le bâtiment, je remarque un escalier qui se dessine sur la droite. L’entrée est étroite, sombre, presque effrayante. Mais où suis-je donc ? Mon estomac se noue davantage.
Nous suivons les ambulanciers vers une petite salle un peu désordonnée, mais qui semble être un bureau. Dans l’armoire entrouverte, je remarque des dossiers, certains semblent beaucoup plus épais que d’autres. Deux hommes sont assis au fond de la salle. Ils arrêtent leur conversation pour nous accueillir. Ils semblent savoir qui je suis.
Ils se lèvent pour serrer la main de mes parents. Les ambulanciers repartent. Il y a un blanc de quelques secondes qui me paraissent durer des heures. La petite pièce est éclairée par un petit néon accroché au-dessus de la table qui fait office de bureau. J’entends un bruit, probablement la porte qui s’ouvre, et je vois alors entrer le docteur Jean. Je commence à en avoir assez de le voir, mais c’est ainsi, dans ma nouvelle vie minable, je vais devoir apprendre à vivre de nouveau avec des gens que je n’apprécie pas plus que cela, et qui sans doute ne m’apprécient pas non plus.
L’un des veilleurs de nuit qui nous ont accueillis attrape une pochette dans l’armoire entrouverte. Je comprends que c’est dans le but d’ouvrir mon nouveau dossier médical. Enfin, psychiatrique. Je me sens faible tout à coup. Le docteur commence alors à expliquer les règles de l’établissement. Le service s’appelle le USAD : c’est le l’Unité de Soins pour Adolescents en Difficulté. Ce nom ne me plaît pas, et je ne me sens pas à l’aise dans ce bureau, j’étouffe. Au fur et à mesure que les règles sont énoncées, je sens mon cœur se serrer, mon estomac est de plus en plus lourd.
Tout d’abord, il m’indique que je n’aurai pas de cours assurés pendant mon « séjour » car on ne peut en estimer, dit-il, la durée. Cette nouvelle ne me réjouit pas, mais je suis tellement épuisée que je ne me rends même plus compte de ce qui se passe réellement. Ensuite, des examens médicaux seront réalisés tous les deux jours afin de réévaluer mes constantes mais que, au vu de l’heure, on ne pourrait les évaluer qu’au matin. Vient alors le moment que je redoute depuis mon arrivée, et que j’espérais ne jamais voir venir. En effet, plus le temps avance et plus l’air devient lourd de sens, et ces paroles que j’entends au ralenti me brouillent l’esprit et de grosses larmes commencent à ruisseler sur mes joues. Mon père hausse les épaules en disant qu’il faut faire ce qui est le mieux pour moi. Je sens une colère immense monter en moi.
Dans quel monde m’enfermer chez les fous est-il le mieux pour moi ? Mais où donc a-t-il vu cela ? Mes larmes ne s’arrêtent plus, j’ai du mal à respirer. Je regarde brièvement ma mère en larmes elle aussi, avant que mes jambes ne se dérobent sous moi.
Je me réveille dans les minutes qui suivent en me demandant si tout ce qui venait de se passer n’était qu’un mauvais rêve ou bien si toute cette horrible situation est bien réelle. La vérité me fend le cœur. Les minutes passent vite, trop vite, et bientôt mes parents s’en vont. Ils me laissent, ils m’abandonnent. Ma vie devient un enfer.
Je hais cet endroit. C’est minable, sombre, étroit. Le veilleur de nuit m’accompagne jusqu’à une petite chambre qui comporte le numéro sept sur la porte. Nous pénétrons dans cette petite pièce. Il y a un lit, avec des draps blancs, les murs sont jaunes, un jaune sale, fade et sans vie. Il y a une petite table, blanche elle aussi. Je sens que ce blanc va me passer par-dessus la tête, passez-moi l’expression !
On m’apporte un pyjama d’hôpital, il est immonde, on me force à l’enfiler. Je n’ai même plus mes vêtements sur moi. Je suis en larmes et je me sens tellement seule, une fois de plus…
***
« Ma naissance est une erreur », me dis-je parfois. Certains me demanderont pourquoi, d’autres me comprendront. Ce n’est pas bien compliqué, ma vie est une histoire à elle toute seule.
Je m’appelle Samantha. J’ai dix-huit ans, et comme vous pouvez le constater, je suis toujours en vie, mais peut-être pas pour longtemps…
Je suis née dans une petite ville du sud de la France, et autant dire que je ne m’y plais pas du tout. Dans mon village, les gens sont sournois et me regardent souvent de bas en haut comme si quelque chose ne leur plaisait pas chez moi. Et ce, depuis que je suis née, mais disons que je m’en suis rendu compte il n’y a que peu de temps. En effet, ma naïveté – ou ma stupidité, peut-être – a fait de moi une enfant heureuse, joyeuse de vivre le moment présent et profitant pleinement des bons moments. Mais cela ne dura qu’un temps.
Rapidement, ma joie enfantine s’est transformée en une forme de supplice. Les sourires cachaient des larmes et mes danses traduisaient ma peur de vivre, mais là encore, je n’en avais point conscience.
Je suis à l’école, un après-midi d’été. Je rejoins un petit groupe de filles qui me semblent être mes amies, mais je me trompe… Camille, celle dont je suis la plus proche, se trouve à l’écart du petit groupe. Ne comprenant pas ce qui semble la préoccuper, je m’approche d’elle avec entrain, espérant lui rendre le sourire. Elle est assise, et pleure, sa tête posée sur ses genoux.
Inquiète, je lui demande ce qui la chagrine autant. Il faut dire que j’éprouve rapidement de l’empathie pour les gens, bien que ceux-là ne me le rendent pas forcément.
Elle relève la tête doucement. Des larmes coulent sur ses petites joues rouges, un peu potelées. Elle me fait de la peine. Je l’aide à se relever et je l’écoute. Son chagrin vient de ses petites pestes de camarades qui lui font la tête et ne la veulent pas dans leur groupe. Je suis bête et gentille, je ne peux pas l’abandonner comme ça. Alors je pars retrouver nos amies. Je m’avance et leur demande des explications. La réponse qu’elles me donnent ne me convient pas, et je leur expose ainsi les faits : il est ridicule de laisser seule une amie sous le prétexte qu’elle ne sait pas jouer. Elle a sa place comme tout le monde au sein du groupe et rien ne doit empêcher une enfant de s’amuser.
J’ai quatre ou cinq ans, mais mes idées sont claires, il y a une justice dans la vie, et nul ne doit être privé de ses droits tant qu’il n’a rien à se reprocher. Ainsi, après une longue discussion avec elles, j’obtiens enfin gain de cause et le soir, lorsque je rentre chez moi, je suis non pas fière de moi, mais satisfaite de mon action. Du haut de mon âge, c’est comme si je venais de sauver une vie, de rétablir une justice remise en cause.
Je m’empresse de raconter cette histoire à mes parents. Ils sont comme, je dirais, mon journal intime. Ils savent tout de ma vie, ce qui se passe à l’école, mes petits délires d’enfant… La nuit se passe, mais j’étais loin de me douter que ce qui allait se passer le lendemain bouleverserait à jamais ma vie, et que ça ne serait que le début d’une longue histoire, trop longue à mon goût, de désespoir et de déceptions que je m’apprêtais à encaisser sans jamais rien dire jusqu’au jour où la vérité a enfin éclaté.
Effectivement, le lendemain matin, lorsque j’arrive dans mon école, je suis heureuse de constater que toutes mes amies, y compris Camille, jouent ensemble. Seulement, lorsque je commence à m’approcher du groupe, les voix se taisent et un silence de mort souffle sur le groupe. Je me sens mal à l’aise. Pourquoi cette réaction ? Qu’ai-je fait de mal ? Je ne comprends plus. Je regarde autour de moi, le temps semble s’être arrêté et pour la toute première fois je me sens seule, exclue. Camille également me lance un regard de reproche alors que j’ai tout fait pour l’aider, je lui en veux. Je n’ai pas pour habitude d’avoir de la rancœur mais les années m’ont forcée à ne plus pouvoir pardonner. J’ai trop subi pour m’abaisser. Je pars m’effondrer dans un coin de la cour, mais en ce qui me concerne, personne ne vient rendre la justice et je reste seule cette fois, et pour toujours.