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Brivael, un parrain de la pègre redouté, règne en maître sur les organisations mafieuses à travers le monde. Son empire s’écroule lorsqu’il croise le chemin de mademoiselle De Pla Gil Serra, une femme aux prises avec une maladie dévastatrice. Leur rencontre, en apparence anodine, révèle des liens insoupçonnés, entraînant le lecteur dans un maelstrom de mystères où amitié, amour et secrets s’entremêlent. Alors que leur complicité grandit, des forces obscures se profilent à l’horizon, mettant à l’épreuve leur alliance et leur destin.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Camille Ghilardi Cayrac a tissé des liens intimes avec l’écriture dès son jeune âge, trouvant en elle une source d’inspiration infinie pour raconter des récits inventifs et explorer les nuances de son propre vécu. Son ouvrage "Ne me fuis pas", fruit de plusieurs années de travail et de recherches, reflète cette passion en abordant des thèmes qui lui sont chers.
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Seitenzahl: 372
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Camille Ghilardi Cayrac
Ne me fuis pas
Roman
© Lys Bleu Éditions – Camille Ghilardi Cayrac
ISBN : 979-10-422-2556-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
Ne me fuis pas est un livre classé darkromance. Il est dur à lire et met en scène des actes (abus sexuels, actes violents…) qui peuvent réveiller en vous de nombreux sentiments négatifs. Si vous ne vous sentez pas capable de le lire, ne le faites pas et attendez d’être prêt.
L’histoire est destinée à des personnes assez fortes pour pouvoir apprécier la façon dont les sujets sont traités avec respect et fidélité dans l’aspect psychologique et de résilience.
Prologue
2019
Ses mains disparaissaient entre les siennes tandis que ses yeux n’étaient qu’obscurité.
— Ne lâche rien mon ange, lui dit-il.
Elle ne répondit rien, il se contentait de déposer ses lèvres sur son front et de partir.
Elle hantait ses pensées, son corps tout entier était en alerte. La voir à la fois si près et à la fois si loin, son cœur avait arrêté de battre quand il l’avait lu.
« Le lit bien vide,
Le temps maussade
L’appartement bien calme,
Le cœur en alarme,
Je me sens seul.
Sans vous,
Sans nous,
Le vous du nous. »
L’âme de l’homme loin de l’âme de cette femme.
Il ne faisait qu’un et pourtant il n’était que douleur et obscurité.
[2018]
Milan, Italie
Brivael
***
Je me suis réveillé cette nuit-là dans un sursaut de sueur, encore hanté par la mort de mon géniteur il y a de cela quelques semaines, trente-quatre jours. Depuis ce jour-là, tellement de choses avaient changé en commençant par le changement de dirigeant de l’empire de mon père. En effet, étant le seul héritier, il était légitime que ce soit moi qui hérite de cet empire, mon père le savait très bien, donc tout au long de ma vie, j’ai été formé pour devenir le nouveau Lorenzo De Riesgo Rehayem : un homme froid et sans cœur.
Ses cheveux bruns habitaient mes pensées depuis que je l’avais croisée, son parfum sucré et fruité m’avait mis en éveil, mais ce qui m’avait plu c’étaient ses yeux aussi noirs et impénétrables que ceux de quiconque, pas même les miens. Je n’avais pas croisé beaucoup de personnes ayant les yeux si sombres, mais les siens étaient de loin les plus beaux. Je m’étais un peu trop attardé sur elle et elle avait dû sentir mon regard, son 6e sens avait dû la mettre en alerte et elle n’avait pas mis une seconde avant de monter dans la berline noire qui l’attendait. Vous vous demandez qui est cette femme : c’est Mademoiselle De Pla Gil Serra. Soit la femme la plus inaccessible de toute l’Italie. Elle était prise en charge dans le meilleur service de cancérologie de Milan. Pourquoi je vous dis ça ? Elle est la voisine de chambre de ma mère et cette femme est la fille d’un des plus grands politiciens que le monde n’ait jamais connus. Cet homme, qui fut condamné pour meurtre, triple homicide, blanchiment d’argent et découverte d’un trafic de prostitution colossal dans les 4 coins du globe. Il avait été condamné à 40 ans de prison, seulement après deux mois, il fut retrouvé pendu dans sa cellule, depuis lors, sa fille est la personne la mieux protégée d’Italie au vu du nombre d’ennemis qu’avait son père.
Quelle vie de merde !
Elle était suivie dans l’hôpital depuis quelques mois et ma mère depuis maintenant cinq ans. Elles étaient rapidement devenues les meilleures amies du monde, apparemment, selon ce que m’avait dit Harlem, mon meilleur ami, frère et bras droit. Je n’allais pas souvent voir ma mère malheureusement, mais je me démenais pour trouver les meilleurs médecins pour qu’ils veillent sur son état de santé.
Ses cheveux bruns.
Sa peau hâlée,
Ses yeux sombres.
Je secouais la tête pour la faire sortir de mes pensées. Ça allait tourner à l’obsession si je continuais comme ça, inconsciemment ça l’était déjà. Peut-être que ça l’était déjà, vu les recherches que j’avais faites sur elle et sa famille, mais de nombreuses choses restaient encore à découvrir selon moi.
Elle.
Ma belle.
Ce bout de femme qui subissait un cancer à l’âge de 22 ans. Un cancer des poumons, elle jonglait entre les rayons, les luminothérapies, ou encore les chimiothérapies. Contrôle permanent, régulier et omniprésent pour voir l’avancée de la maladie, elle ne vivait plus, elle ne respirait plus, elle essayait de survivre.
… Douceur et joie, où es-tu passé ? Sagesse et gentillesse, vas-tu partir ? Amour et vie, continueras-tu à vivre ?
Pour une fois, je me laissais emporter par mes sentiments, imaginez quelle fut ma surprise quand j’avais appris que la femme dont j’étais épris était malade.
Quelle vie de merde !
Alors, j’aurais espéré avoir une femme en bonne santé, mais j’aurai une femme malade. Une femme forte, une femme ayant la rage de vivre et de vaincre. Une femme dangereuse, tout simplement ma femme.
Le contraire n’aurait pas été possible, je n’aurais pas pu avoir une femme faible, une femme sans intérêt : car moi aussi j’étais fort et dangereux.
Je suis Brivael Caellum Meridone De Riesgo Rehayem, premier fils de Lorenzo De Riesgo Rehayem et je compte bien te faire tomber dans mes bras ma belle.
— Briva’, m’appela Harlem du côté passager de la voiture que je conduisais, une Maserati dernière génération de la marque.
— Hm ? répondis-je encore trop absorbé par mes pensées avant de finalement détourner le regard de la berline noire qui partait à toute vitesse en face de la nôtre.
— Ça fait un quart d’heure que je te parle et que tu regardes la voiture de l’autre côté de la rue, me dit-il en me regardant sérieusement du côté passager de la voiture.
— Ferme-la, je pensais juste à ma mère Harlem, dis-je en appuyant sur l’embrayage pour démarrer la voiture pour parcourir à toute vitesse les ruelles de Milan.
— Tu devrais passer la voir dans la semaine Brivael, tu lui manques et tu le sais.
Mais mes pensées étaient toujours tournées vers elle, elle qui allait me rendre fou, si je continuais à penser à elle de cette façon. Cette femme allait devenir mienne, je le sentais, je l’espérais.
J’appuyais sur l’embrayage pour faire redémarrer la voiture pour partir à toute vitesse vers le lieu où nous devions nous rendre. Arrivés devant ce grand hangar, Harlem descendit de la voiture tandis que j’éteignais le moteur, glissant la carte de la voiture dans ma poche pour fermer ma voiture. Je marchais aux côtés de mon frère qui se dirigeait à l’intérieur du hangar. La porte grinçait sous ma poigne et les têtes se relevaient vers moi avant de rapidement se baisser de nouveau.
— Buongiurno tutti, dis-je assez fort pour que tout le monde m’entende.
— Buongiurno, entendais-je quelques-uns qui osaient répondre. D’autres se contentaient de faire un signe de tête.
— Je suis content de vous voir si nombreux ce matin. Vous savez pourquoi vous êtes là, alors commencez à bosser. On n’est pas là pour se tourner les pouces.
Je pris place autour d’une table accompagnée de Harlem et Kenan qui était déjà sur les lieux. Mes frères se mirent rapidement à faire le point sur le nombre d’hommes, d’armes qu’on avait.
— 679 hommes et 4360 armes au total, lui dit Kenan tandis que Harlem pianotait sur son ordinateur pour rentrer les chiffres.
— Femmes ? lui demanda mon second frère.
— 567, dont 19 tireuses, on a chopé le gros lot, lui dit Kenan le nez dans ses feuilles.
— On a récupéré le centre d’entraînement au Nord de Mozzanica et le centre de tir aussi, comme tu avais demandé Briva’, me dit Kenan en détournant son regard vers moi.
— Depuis quand ? répondis-je à mon frère.
Je n’avais pas été mis au courant de ce nouveau point qui allait grandement nous faciliter les entraînements, surtout pour les femmes.
— Mercredi, j’attendais de finaliser la paperasse pour t’en parler.
— T’as bien fait, donc on l’aménagera pour en faire le centre d’entraînement des femmes. Je te conseille d’organiser un planning pour que les 567 passent à l’entraînement 3 fois par semaine, finissais-je par lui dire pour lui montrer qui prenait les décisions dans mon trafic. On a des nouvelles de l’OP en Allemagne et en Russie ? demandai-je cette fois à Harlem à ma gauche.
— L’Allemagne c’est réglé, on a récupéré la cargaison, dont 5690 kg de coca, 1,2 tonne de méthamphétamine et fermé les 3 maisons closes qu’on avait à Berlin, Hambourg et Dresde. Quant à la Russie, on a récupéré les derniers hôtels de ton père et fermé les dernières maisons closes, dont celles de Moscou, Saint-Pétersbourg, Kazan et Vladivostok.
— J’aurai ça quand ? Je tiens à voir les dirigeants des OP.
— Mardi normalement, ils seront dans ton bureau mercredi à la première heure, me dit Harlem.
Ce que j’aimais avec Harlem c’était qu’il lisait dans mes pensées, donc c’était simple de me faire comprendre. Alors que pour Kenan c’était plus compliqué, il était jeune du haut de ses 19 ans, mais il faisait un bon travail en tant qu’informaticien. Il n’était pas trop dans le social et on avait pas cette complicité que j’avais avec Harlem. Parce qu’Harlem, ça avait beau ne pas être réellement mon frère, mais nous avions une connexion bien spéciale, plus qu’avec Kenan. L’âge faisait la différence, mais il y avait autre chose derrière, il n’avait aucune famille et j’avais été le premier à me dévouer pour lui laisser mon lit pour qu’il y dorme pendant que les travaux de sa chambre étaient faits. J’avais dormi à terre durant six mois, et sans un mot j’avais accepté ce rôle de frère, de meilleur ami, de confident. Et je lui avais rendu en faisant de lui mon bras droit lors de ma mise en lumière après la mort de mon père.
— Briva’, je peux répondre au téléphone ? C’est Tunis, me demanda Kenan.
— Vas-y, vas-y Kenan, lui dis-je en lui faisant signe de sortir pour parler plus calmement, vu le brouhaha ambiant du hangar.
Il racla sa chaise sur le sol pour se diriger vers la sortie. Et le regard de Harlem se posait sur moi.
— Il est allé voir ma mère ?
— Oui hier, il m’a dit qu’elle l’avait engueulé parce qu’il ne venait pas assez souvent, tu devrais lui laisser un peu de temps.
— Si je lui laisse du temps, il va sombrer de nouveau et je ne veux pas d’un drogué dans mes rangs, compris ? Alors, il travaille et c’est tout, et quand il n’y aura plus de travail je lui en trouverai encore. Je le connais aussi bien que toi Harlem, claquai-je à mon frère à mes côtés qui hocha la tête face à ma déclaration.
— Il ne le refera pas, tu te rappelles ce qu’il avait dit quand il est sorti de désintox ? « La désintoxication ce n’est pas aussi pire que la droite que tu m’as filé Briva’. » Tu lui fais plus peur qu’un centre de désintoxication alors tu crois qu’il va le refaire alors que maintenant c’est toi le chef ?
Je hochais la tête, comprenant mes torts avant de me calmer en arrêtant de taper du pied sur le sol. Je savais qu’il avait raison, et j’essayais de me calmer pour ne pas lui dire de fermer sa gueule. Je détestais avoir tort, mais je savais aussi reconnaître mes torts avec ma famille.
— Claro, claro, si, adios, finit par dire Kenan en revenant s’asseoir autour de la table avec nous. C’était pour prévenir qu’ils ont réussi à faire plier le cartel qui prenait de l’ampleur en Espagne.
— Ah bien, pour te féliciter je te laisse un jour de repos demain.
— Grazie Brivael, me répondit mon plus jeune frère.
Nous continuâmes donc les règlements des différentes affaires en cours quand je reçus un coup dans l’épaule de la part de Harlem.
— Regarde qui a osé se pointer, me dit-il en me faisant un signe du menton vers la personne qui venait de passer le pas de la porte du hangar.
Il n’avait pas l’air d’avoir compris la dernière fois que je l’avais vu. Et là ce serait la dernière fois qu’il verrait quelque chose.
— Rehayem quelle surprise, me lançait-il en s’approchant vers moi pour me serrer la main.
— Alejandro, répondis-je simplement sans tendre ma main vers la sienne.
— Ta petite maman n’a pas appris la politesse à ses enfants ?
Sans attendre et avant qu’il s’aperçoive que mon arme était chargée contre son front que je lui avais déjà tiré une balle au milieu du front. Son corps gras et flasque retomba sur le sol laissant gicler le sang à travers la pièce. Et je laissais mes hommes s’occuper de lui en essuyant mes mains avec le mouchoir que j’avais dans la poche extérieure de ma veste de costume. Rare était les fois où j’appréciais avoir les mains sales après avoir tiré.
— Tu n’y es pas allé de main morte Briva’ !
— Il le méritait, on ne parle pas de ma famille et encore moins de ma mère, répondis-je à Harlem qui venait de me parler à quelques mètres de moi. Je me casse, finissez sans moi et qu’on me nettoie cette merde, si je dois revenir et que je vois une seule trace de sang c’est le vôtre qui finira à côté.
Mon frère me fit un simple signe de tête comprenant qu’il ne fallait pas me dire un seul mot pour ne pas me faire sortir de mes gonds. Je sortis du hangar sans un mot avant de monter à bord de ma voiture pour rentrer chez moi. Mes pensées toujours tournées vers elle, et son visage me rendant complètement dingue à la vue de ses traits fins et de ses yeux sombres dans mon esprit.
[2018]
Milan, Italie
Mademoiselle de Pla Gil Serra
***
Le chauffeur venait de me déposer devant la clinique privée où je devais effectuer mon traitement et y rester une semaine pour pouvoir faire des examens complémentaires sur mon état. Après s’être assuré que je suis entre de bonnes mains, Fédérico, le chauffeur, se permit de me laisser et de reprendre la route.
— Buongiurno Mademoiselle De Pla Gil Serra, me dit la dame derrière le grand comptoir blanc de l’accueil de la clinique privée.
— Buongiurno Alicia, lui dis-je avant de me diriger vers la chambre où je réside habituellement lors de mes soins et rendez-vous médicaux.
Je toque avant d’entrer sachant très bien que ma voisine de chambre s’y trouve déjà. Le son de sa voix me permet d’entrer c’est alors ce que je fais sans attendre. Son visage pâle annonce déjà la couleur de la journée : gris et maussade.
— Buongiurno Kaemalia, comment allez-vous ? lui dis-je poliment en embrassant sa joue ce qu’elle répond en retour sur la mienne.
— Comme quelqu’un qui vit à l’hôpital depuis longtemps et toi mon enfant ? me demandait-elle avec sa voix roque qui ferait frémir plus d’un qui ne l’a connaîtrait pas. Ses cheveux noirs étaient magnifiquement bien coiffés en un carré parfaitement lisse.
— Comme quelqu’un qui vient deux fois par semaine se faire injecter des produits nocifs pour contrer une maladie nocive, finis-je par dire en lui souriant ayant répondu sur le même ton qu’elle.
Elle me souriait en retour avant de se replonger dans le livre qu’elle était en train de lire avant que je ne passe la porte de notre chambre commune. Je commençais donc à installer les petites affaires que j’avais prises pour cette petite semaine de soin. Vacant à mes occupations je n’avais pas entendu la porte de la chambre s’ouvrir, c’est uniquement lorsque je sortis de la salle de bain tombant nez à nez avec Harlem le fils de Kaemalia qui venait lui rendre visite deux fois par semaine.
— Buongiurno, lui lançai-je la première avant qu’il ne puisse le dire.
— ¡ Holá Señora De Pla Gil Serra ! me dit-il à son tour avec un sourire aux lèvres dévoilant les petits défauts de ses dents blanches.
— Tu vas arrêter de l’appeler comme ça oui ? dit la doyenne de la chambre à l’égard de son fils Harlem assis sur le fauteuil à droite du lit de la dame grecque allongée.
— Perdona, Perdona Kaemalia, dit-il avant de reprendre pour me saluer correctement sous les regards noirs de sa mère.
Kaemalia n’était pas la mère biologique de Harlem. Elle l’avait accueillie comme son fils au décès des parents de Harlem à l’âge de 3 ans et demi. Je ne savais pas exactement la cause de leur décès, mais Kaemalia m’avait dit que le mieux pour moi était que je ne sache rien alors je n’avais rien dit, son regard noir me dissuadant de toute rébellion face au sujet.
— Mon fils compte venir me voir un jour ? Ou il compte me laisser pourrir là ronger par les médicaments ? finit-elle par dire à Harlem qui pianotait sur son téléphone à une vitesse hallucinante.
— Je lui demanderais Mamma, mais il est occupé, tu le sais, dit-il sans relever les yeux du téléphone sur lequel il pianotait.
C’était bien la seule fois que je voyais un homme savoir faire deux choses en même temps.
— Son travail est plus important que sa propre mère ? Attends qu’il vienne pour que je lui touche deux mots à cet enfant, dit-elle en me souriant comprenant que je n’avais plus la chance d’avoir mes parents à mes côtés, mais elle ne savait pas que j’étais bien heureuse de ne plus les avoir à mes côtés.
— Il ne sait pas la chance qu’il a de vous avoir encore Kaemalia, dit Harlem en relevant enfin sa tête de son téléphone.
— Heureusement que mes filles et toi êtes là, qu’est-ce que je deviendrais sans vous mes enfants, finit-elle par dire en lâchant une larme qu’elle essuyait pour que personne ne s’en rende compte, mais ça n’avait pas empêché que moi je la vois.
Je décidais de me changer pour troquer ma tenue composée de mon pantalon en cuir noir et mon chemisier bleu électrique pour un bas de jogging gris, un débardeur noir et un gilet rose que j’enfilais dans la salle de bain ayant préalablement fermé le verrou. Je pris la décision de m’allonger de nouveau sur mon lit, attendant que les infirmières décident de me poser le cathéter pour les produits de la chimiothérapie.
— Ça va mieux depuis la dernière fois, me demandait Harlem toujours assis sur son fauteuil aux côtés de sa mère adoptive.
— Oui, oui, dis-je en détournant mon regard vers la baie vitrée qui donne sur le grand jardin de la clinique privée.
Harlem faisait référence à ma dernière semaine au centre qui avait été plus que chaotique. Épuisante, mais aussi éprouvante mentalement pour ma part, mais aussi pour ma voisine de chambre qui avait mal vécu sa séance de chimioradiothérapie. Nous avions eu très peur avec le marocain. Kaemalia avait totalement été vidée de toute l’énergie de son corps et avait malheureusement fait un arrêt cardiaque ce qui avait entraîné un état de panique à l’intérieur de moi et avait fini par me créer une crise d’angoisse qui avait mis énormément de temps à passer me laissant plus de deux jours dans mon lit en état totalement léthargique. Enfin, mon regard sombre se posait sur le jardin extérieur, peu de personnes s’y trouvaient, cela était dû à la pluie qui s’abattait sur la ville italienne. La mare au milieu du jardin était trouée par les gouttelettes s’écrasant, créant des vaguelettes dans ce trou d’eau. La pluie m’apaisait énormément depuis que j’étais tombée malade. J’aimais voir le ciel grisâtre prêt à imploser au-dessus de nous.
— Mademoiselle, nous venons vous poser votre cathéter, dit l’infirmière dans mon dos qui venait de rentrer dans la chambre il y a quelques secondes sans toquer.
Je me retournais doucement vers elle en prenant le temps de l’observer de haut en bas avant de la fixer du regard.
— La prochaine fois que vous rentrez sans toquer je vous fais virer, envoyez-moi mon infirmière habituelle au lieu de faire l’insolente avec les gens.
Mon regard sombre l’avait, je pense, dissuade de me répondre et c’est quand elle fit demi-tour pour aller sûrement chercher mon infirmière habituelle que je m’assis enfin sur le lit qui m’était destiné m’étant levé quelques secondes avant pour récupérer mon téléphone dans mon sac à main.
— Bon je vais vous laisser moi je reviendrais demain ou après de toute façon Kaemalia, lui dit Harlem en me faisant un clin d’œil discret. Il partit en embrassant la joue de sa mère et en tapant dans ma main croisant l’infirmière qui entrait me poser ma perfusion.
— Bonjour, je viens vous poser le cathéter, Mademoiselle Pla Gil Serra, me dit-elle en me souriant timidement.
— Arrête de me vouvoyer per favore, lui répondis-je simplement à l’infirmière qui s’affairait à préparer mon bras pour me poser le cathéter au-dessus de ma main.
— On voit bien vos veines aujourd’hui ça va être facile comparer à la semaine précédente, reprit-elle en insérant le cathéter dans mon bras.
— Ravie de savoir que pour une fois je vous facilite la vie, rigolais-je en même temps que ma voisine de chambre.
— Vous êtes une patiente agréable Mademoiselle, ne vous en faites pas, me dit-elle pour me rassurer.
Malgré mon jeune âge, chaque personne savait très bien qui j’étais d’où le fait que beaucoup me vouvoient encore. J’imposais le respect de par mon visage froid, mes traits marqués par la maladie et la vie ainsi que par mon regard extrêmement sombre. Ma famille était reconnue mondialement, activités légales ou illégales, mais toutes reconnues dans le monde entier. Mon géniteur ayant énormément d’ennemis, j’étais surveillé comme le lait sur le feu. Entourée d’hommes et de femmes exclusivement embauchés pour ma surveillance et ma protection par le président actuel, j’avais l’impression d’être constamment épiée dans ma vie quotidienne. Même lorsque j’étais dans mon appartement, j’avais des gardes à l’intérieur pour veiller à ma surveillance.
— J’ai fini Mademoiselle.
— Merci à vous, répondis-je à l’infirmière avant qu’elle sorte de la chambre après avoir posé mon cathéter et ma première perfusion.
— Elle est gentille, cette petite, je l’aime bien, me dit Kaemalia tandis que je détournais mon regard de la porte pour la regarder.
— Elle est gentille, ça change de vieilles aigries en effet. Alors votre fille va venir dans la semaine ?
— Oh tu sais avec son travail elle n’a pas trop longtemps alors je ne sais pas. Elle m’avait dit la semaine dernière, mais elle n’a pas pu alors peut-être qu’elle aura un moment pour moi cette semaine.
— Mais oui ne vous inquiétez pas Kaemalia. Et vos fils ?
— Brivael est occupé apparemment il est parti 3 jours à Tunis cette semaine d’après ce que m’a rapporté Harlem. Et Kenan, je ne sais pas, il ne vient plus depuis un bon moment voir sa mère.
— Je suis sûre qu’il a de bonnes raisons, vous savez.
— Je me plains alors que toi personne ne vient te voir, qu’est-ce qu’il se passe avec ta famille ma fille ?
— Je vous l’ai déjà dit Kaemalia c’est compliqué et très peu agréable à entendre.
— Tu crois que je ne le sais pas ? Tu peux me le dire ma fille, je suis assez vieille et j’ai connu assez de situations pour comprendre les plus compliquées.
Mon regard se plongeait dans le sien, son regard transparent et rempli d’émotion tellement différent du mien. À travers son regard, on voyait toutes les épreuves qu’elle avait dû traverser, parfois même à son insu.
— Je suis la cadette de ma famille, donc en premier il y a Aliénor, en second Benjamin, en troisième Charles, en quatrième Délia, en cinquième Eliséa, ensuite François, et en avant dernière Gaélla. Aliénor, Benjamin, et François ont disparu avec ma mère il y a plus de 6 ans. Mon père a consacré sa vie à chercher sa femme et ses enfants, sans succès, sans une seule piste, sans un indice.
— Et les autres ? me demandait Kaemalia en me regardant reprendre ma respiration.
— Charles, Eliséa, Gaélla sont décédés lors d’un incendie en 2010 dans la résidence principale où nous vivions. Je garderais toujours leurs cris, leurs larmes, leurs peines gravés dans mon âme. Puis Délia a été internée à la suite de tout cela en 2014, ne supportant plus cette pression, et cette peine autour de notre famille. Mon père s’est suicidé dans sa cellule de prison il y a quelques mois maintenant, après qu’il a appris que j’étais atteinte de mon cancer.
— Il ne reste que toi ? me demandait Kaemalia.
— Si on ne compte pas ma sœur Délia, oui il ne reste que moi de la lignée De Pla Gil Serra.
— Je suis navrée de l’entendre, je comprends ce que ça fait de se retrouver seule et isolée, et sans famille. Je l’ai vécu avant de rencontrer mon mari qui est maintenant décédé. Mais dis-moi vos prénoms…
— Par ordre alphabétique ? C’était une idée de ma mère.
— Je trouve que parmi tous les prénoms le tien est le plus beau et reflète parfaitement ta personnalité mon enfant, finit-elle par me dire avant de reprendre son livre ayant entendu mon récit patiemment.
J’avais vécu les pires horreurs et perdre l’entièreté de ma famille en faisait partie. Mais ce n’étaient pas les seules, mais elle ne les connaîtrait probablement jamais. Je m’allongeais dans mon lit pour me reposer, afin que le traitement fasse effet. Mon regard se posait sur mon téléphone portable et je l’attrapais pour regarder des vidéos dessus, pour que le temps passe plus vite. Le premier jour d’hospitalisation était toujours le plus difficile à passer, les autres étaient toujours les mêmes, j’étais trop fatigué pour avoir le temps de m’ennuyer.
Mes paupières étaient lourdes, et mon corps se détendait rapidement avec la perfusion. Je ne cherchais pas à lutter contre le sommeil qui était en train de prendre mes derniers moments de lucidités. Dormir c’était fuir la réalité, car dans mes rêves je vivais dans un monde sans cancer.
[2018]
Milan, Italie
Brivael
***
Je m’étais levé de bonne humeur, ce qui était rare par les temps qui courent en ce moment dans le pays. Une attaque avait eu lieu sur la place du Dôme touchant de nombreuses personnes. Ça avait foutu le bordel au niveau du cartel et de nos ennemies en pensant que c’était nous qui avions fait ça alors que je n’avais pas bougé le petit doigt et que je n’aurais jamais fait ça devant un monument religieux. J’avais décidé d’aller voir ma mère aujourd’hui. Ça faisait longtemps que je n’étais pas allé la voir et je regrettais les paroles qu’elle avait dites à mon frère : Harlem. Je n’étais pas présent pour elle, car je savais qu’elle était bien entourée, mais je regrettais de ne pas prendre soin d’elle comme elle l’avait si bien fait.
— On est arrivé, me dit Harlem en coupant le moteur de ma voiture. Autre avantage de ma bonne humeur : le laisser conduire ma voiture.
Je descendis de mon véhicule accompagné de mon frère qui m’indiquait le chemin jusqu’à la chambre de la première femme de ma vie et secrètement j’espérais y avoir la seconde.
Mon poing s’abattit sur la porte en bois pour annoncer ma présence. Et on me répondit que je pouvais entrer derrière celle-ci, ce que l’on fit évidemment avec Harlem.
— Ah, mon fils, j’ai cru que tu avais oublié que tu avais une mère ! me dit-elle en me souriant quand je me penchais pour embrasser sa tempe.
— Jamais maman, jamais, répétai-je avant de m’asseoir sur le lit vide face au sien.
— Come stai Kaemalia ? demanda Harlem avant que je pose moi-même la question à ma mère.
— Comme quelqu’un qui passe ses journées seul ici et vous mes fils ? nous dit-elle quand même souriante face à sa phrase plus que cinglante.
— Bien, répondit Harlem pour nous deux sachant que j’allais aussi lui donner la même réponse.
— Elle est pas là la politicienne ? demanda Harlem toujours sur le même ton.
— Ça fait une semaine qu’elle est en soins intensifs, car son cœur a lâché lors de sa dernière semaine de soin, je savais que tu demanderais, j’ai vu comme tu la regardais mon fils.
Il la regardait ? Comment ça ? Comment pouvait-il faire ça ? Il savait ce que j’éprouvais pour cette femme. Je détournais mon regard vers mon frère qui en un seul regard me rassurait face à la situation. Il ne l’aimait pas, non il veillait sur elle comme un frère sur sa sœur ou comme un père sur sa fille. Ma mère se faisait toujours des idées quand il était question de fille. Cependant, je savais que mon propre frère ne m’aurait jamais fait une telle chose.
— J’irai la voir tout à l’heure, et arrête de croire que je l’aime maman, je la vois simplement comme une sœur, finit-il par dire. Ce qui me rassura une fois de plus.
Elle levait ses yeux au ciel en soufflant légèrement face à la remarque de mon frère préférant ne rien dire plutôt que d’avouer qu’elle avait tort. Je le savais parce que je tenais ça d’elle, je détestais avouer que j’avais tort. Voulant les laisser tous les deux, je décidais de m’éclipser prétextant avoir une demande sur les soins de ma mère à poser à l’équipe de la clinique médicale sur le dossier de ma mère.
Je suivais les panneaux indiquant ce que je recherchais, après plusieurs couloirs parcourus à vitesse grand V, j’aperçus enfin « Soins intensifs ». Le couloir était long et paraissait beaucoup plus froid que les autres. C’est quand je tombais sur elle allongée sur ce lit, que je me rendais compte que la vie était une belle pute. Son visage si pur et beau aurait pu être irréel si je n’avais pas cette pointe au cœur, cette souffrance au fond de moi de la voir dans ce lit d’hôpital, si fine et si fragile. Ses doigts bougeaient légèrement sur le drap, et instinctivement je posais ma main sur la sienne pour lui donner mon courage et mon soutien.
— Accroche-toi ma belle, tu mérites de vivre, lui chuchotai-je à l’oreille en serrant doucement sa main.
— Que faites-vous là ? m’interrogea l’infirmière qui arrivait derrière moi.
— J’allais partir, ne vous inquiétez pas, je venais juste lui dire de ne pas baisser les bras, dis-je en partant de cette pièce qui était devenue bien trop petite pour 3 personnes.
Je n’attendais pas de réponses de l’infirmière alors je fis demi-tour pour retourner auprès de ma mère et de mon frère. Mais mon esprit était resté dans cette chambre avec elle. Sa beauté m’avait enlevé tout l’air que j’avais dans les poumons coupant ma respiration, qui m’avait rendu haletant sur le retour. Mes mains étaient moites. Et mes jambes flageolaient entre elles. Mais ce qui m’avait rendu l’esprit embrumé c’était sa délicatesse, ses yeux clos, ses clavicules apparentes par la famine qu’elle devait s’infliger. Ses cheveux bruns longs qui reposaient sur le coussin de ce lit contrastant avec les draps blancs. L’image de son visage ne quittait pas ma mémoire.
— Tu as l’air dans la lune mon fils, me dit ma mère en me voyant rentrer dans la chambre.
— Désolé maman, le personnel m’a contrarié, répondis-je en lui souriant finement.
— On va pas tarder à y aller nous, me fit part Harlem voyant que je m’impatientais de rester ici.
— Tu n’oublies pas d’aller voir ma fille Harlem, sinon je le saurais, menaçait ma mère mon meilleur ami et frère.
— Non, j’y vais tout de suite, regarde je suis déjà parti ! rigolait-il en sortant de la chambre après avoir déposé un baiser sur la joue de ma mère, je fis de même et nous sortons enfin de cette chambre.
— Tu m’attends dans la voiture ou tu viens avec moi la voir ?
— Je t’attends dans la voiture, file-moi les clés.
C’est ce qu’il fit avant de prendre le chemin que j’avais pris quelques minutes avant. Je fis le chemin inverse pour me rendre à la voiture qui était garée devant la clinique. Je m’assis derrière le volant de ma Maserati avant d’appuyer sur le bouton « Star/Stop » en embrayant de mon pied gauche pour entendre le moteur se mettre en route. Le bruit qu’elle faisait m’arrachait presque un râle de satisfaction. J’avais toujours adoré les gros moteurs, mais celui-ci m’avait toujours plu plus que les autres. Je passais ma marche arrière pour sortir de la place de parking où Harlem s’était garé : soit dit en passant comme un pied. Je fis un rapide tour du quartier au volant de la voiture adorant voir les regards sur celle-ci lorsque j’accélérais. La plupart des Milanais savaient que cette voiture m’appartenait au même titre que les autres qui dormaient dans mon garage. À cette heure, les rues étaient bondées et j’essayais de me frayer un chemin entre les piétons, étant contraint d’emprunter cette rue pour retourner à la clinique afin de récupérer mon frère qui venait de m’envoyer un message.
— Briva’, entendis-je à travers la fenêtre ouverte côté passager de ma voiture. Je détournais mon visage et il se décontracta en voyant la personne qui avait osé passer sa tête dans ma voiture pour m’interpeller. Mëvae.
— Qu’est-ce que tu fais là toi ? lui dis-je en freinant pour qu’elle arrête de marcher à côté de ma voiture.
— Je vais voir maman.
— Monte, je dois aller chercher Harlem, je vais te déposer.
Elle ne se fit pas prier pour poser son cul dans ma voiture. Je détaillais rapidement sa tenue : elle devait rentrer du taf vu sa tenue.
— Alors le taf ? demandai-je à ma petite sœur à mes côtés.
— J’ai fini ma garde à 9 h au lieu de 7 h 30, accouchement d’urgence, j’étais la seule gynéco présente, donc j’ai pas pu partir plus tôt.
— Ton travail me fascinera toujours tu le sais ça ? dis-je en roulant des yeux sachant qu’elle passait ses journées à voir des chattes.
— Et le tien alors on en parle ? me piquait-elle en souriant de toutes ses dents.
Ma sœur me ressemblait énormément. Les cheveux longs et bruns actuellement attachés sur le haut de son crâne avec deux tresses. Son visage était similaire au mien : un nez retroussé, des joues creuses, un regard sombre et le même regard que moi, froid.
— T’as fini de me regarder comme ça, tu me fais limite peur Bri’. Me riait-elle au nez en descendant de la voiture devant la clinique voyant Harlem arriver.
— Ah mon second frère préféré, dit-elle en le prenant dans ses bras tandis que Harlem dépose un baiser sur ses deux joues.
Leur relation avait toujours été aussi fusionnelle. Tous les trois, nous avions toujours été inséparables. Ma mère nous disait souvent que les gens nous prenaient pour des triplés quand nous étions petits. Ça nous faisait extrêmement rire de savoir que notre complicité était visible de l’extérieur malgré notre réserve lorsque nous étions en public.
— Harlem bouge-toi, on a des choses à faire, criai-je à mon frère à travers la portière que ma sœur venait d’ouvrir pour en sortir quelques secondes plus tôt.
Aussitôt dit, aussitôt fait, il avait posé son cul sur le siège passager de ma Maserati. J’embrayai mon pied gauche sur la pédale de gauche avant d’appuyer sur le bouton pour démarrer le moteur et rouler vers chez moi. Les alentours étaient très calmes ces temps-ci, ce qui contrastait bien l’état d’esprit dans lequel je me trouvais.
— T’as l’air tendu Briva’, me dit Harlem sur le siège passager finissant de pianoter sur l’écran de son téléphone.
— Qu’est-ce qui te fait dire ça ? lui répondis-je tout en fixant la route devant moi en regardant les Italiens en train de conduire comme si le permis était facile à avoir une fois perdu.
— Tu roules à 90 alors que c’est limité à 50 peut-être ?
Je jetais un coup d’œil à l’écran face à moi qui m’indiquait en effet que j’étais bien au-dessus de la limitation, et l’adrénaline qui me parcourut me fit enfoncer un peu plus mon pied sur l’accélérateur pour augmenter ma vitesse sortant de la ville me permettant de pleinement rouler comme je le souhaitais.
Les routes italiennes en dehors des grandes villes étaient connues pour leurs aspects désertiques et rocailleux. J’adorais sentir ma voiture faire voler la poussière autour d’elle. Harlem à côté de moi souriait en profitant de la musique qui passait et de l’air d’été qui émanait de l’extérieur de la Maserati.
Le portail en ferraille de ma propriété s’ouvrait sous l’effet de la pression que j’avais procurée à la télécommande. La gigantesque maison typiquement américaine se dressait devant moi et je me pressais de garer ma voiture au milieu des autres. La façade blanche contrastant avec les menuiseries noires apportait un merveilleux charme à cette maison qui pourtant renferme tant d’atrocités. Harlem descendait de la voiture après moi pour observer la façade de plus près.
— Ça fait du bien d’être à la maison, me dit-il en tapant mon épaule de sa main pour m’entraîner avec lui à l’intérieur.
Nous rentrons l’un à côté de l’autre en souriant. Le silence régnait à l’intérieur de la propriété, ce qui me fit froid dans le dos de voir cette maison si vide. Je l’avais connue pleine de vie et toujours pleine. L’entrée n’avait pas changé, un grand miroir orné d’or trônait face à la porte d’entrée. L’escalier à notre gauche montait à l’étage tandis que de l’autre se trouvait un bureau : mon bureau. J’avançais petit à petit dans la maison parcourant le grand salon, la salle à manger, la cuisine américaine ouverte et les énormes baies vitrées donnant sur les kilomètres de jardins qu’elle offrait aux alentours. La piscine et son eau bleue m’appelaient presque pour que je m’y prélasse, mais malgré la chaleur étouffante, le travail m’appelait comme toujours.
— Briva’ je vais en haut j’ai mis en route l’ordinateur et la box du bas, me dit mon frère
— Grazie, dis-je simplement en allumant ma cigarette en glissant mon pouce contre la pierre de mon briquet aux couleurs sombres. La flamme s’écrasait contre le bout de ma cigarette pour l’enflammer et me laisser aspirer ma première bouffée d’air toxique.
J’ouvrais la baie vitrée refusant catégoriquement depuis que ma mère était malade de fumer à l’intérieur de la maison. Même si elle n’y habitait plus, je désirais garder cette habitude d’avoir un environnement sain pour qu’elle revienne dans la maison qu’elle avait laissée telle quelle.
Je descendis les marches de la terrasse pour retrouver en contre bas la piscine et la salle de sport extérieure. Les baies vitrées de la salle de sport de la maison étaient encore ouvertes, me donnant la confirmation que le sol séchait encore.
— Monsieur De Rehayem ! Je viens à l’instant de finir, me dit la dame de maison qui s’occupait de ma maison en mon absence.
Léanor était une grande femme autant physiquement qu’intérieurement. Elle servait ma famille depuis des années, quand ma mère s’était liée d’amitié avec elle lorsqu’elle n’arrivait pas à payer les frais de son fils qui avaient eu un grave accident de voiture. Depuis ce jour-là, ma mère l’avait embauché, et avait payer intégralement les frais médicaux de son fils qui malheureusement nous avait quittés il y a de cela 1 année.
— Vous faites encore et toujours un si bon travail Léanor, je ne vous remercierai jamais assez de tout ce que vous faites pour ma famille. Vous avez rencontré les nouveaux employés, je suppose ?
— Arrêtez de m’envoyer de l’aide, j’y arrive toute seule Monsieur, cela doit vous coûter une somme astronomique.
— Ne vous préoccupez pas de ça, est-ce que ses employés font l’affaire ?
— Le cuisinier est bien, le paysagiste est prometteur, et les jardiniers ont taillé l’intégralité des arbres et des arbustes de la propriété dans la matinée.
— Ravie que cette nouvelle équipe vous plaise Léanor, vous devriez aller voir ma mère demain, prenez du temps pour vous.
— Ne vous inquiétez pas pour moi, Monsieur De Rehayem.
Je hochais simplement la tête en fumant ma cigarette. Je la vis partir à l’intérieur de la maison. Mes yeux se posaient sur le terrain qui entourait ma propriété. Une forêt et des vignes, j’adorais voir la nature à perte de vue. Ma maison était la seule à des kilomètres de la ville, et les terrains alentour appartenaient à ma famille. Nous avions décidé de nous lancer dans la production de vin. Ayant construit un caveau grandiose aux abords de la propriété pour pouvoir produire notre propre vin, sous le nom de ma mère Antinori.
La production ne pouvait pas se faire au nom De Riesgo Rehayem de mon nom complet. Mon père trop connu dans le monde pour son trafic. Donc nous avions décidé de mettre tout l’empire viticole au nom de la première femme de ma vie. Ma sœur ayant changé de nom pour prendre celui de ma mère c’était elle qui se rendait à toutes les promotions, réunions, ou accords importants.
Je ne pouvais évidemment pas m’y rendre moi.
— Tu regardes ton empire ? me demanda mon frère derrière moi.
— Je ne t’avais pas entendu arrivé Kenan, lui dis-je en serrant la main qu’il me tendait.
— Je suis là depuis hier, me dit-il en allumant sa cigarette à son tour.
— T’es rentré de Tunisie quand ? demandai-je en m’asseyant sur les marches de la terrasse que j’avais descendues quelques minutes avant. Kenan s’assit à mes côtés.
— Hier après-midi, les passeurs avaient du mal avec moi, ils pensaient te voir toi, ils m’ont fait chier, quand ils ont eu Harlem au téléphone ils se sont vite calmés.
— Tu leur as foutu une balle à chacun j’espère ? On ne doute pas d’un Riesgo Rehayem compris ?
— Évidemment Brivael. Toujours partant pour notre entraînement ?
— Oui toujours, je dirais à Harlem d’aller au rassemblement pour me représenter si on finit tard.
Mon frère écrasait sa cigarette sous sa chaussure tandis que je fis de même avant d’aller jeter le mégot dans un cendrier sur la marche la plus haute de l’escalier en dessous de nous.
— Je vais me changer et on commence ? dis-je à Kenan qui hochait la tête.
Je lui tournais le dos pour le laisser sur la terrasse montant dans ma chambre. Elle était très sombre, cependant elle avait un charme avec les énormes fenêtres qui ornaient les 2 murs de ma chambre. Elle avait sa propre salle de bain, et son dressing. C’était la seconde plus grande chambre de la maison après la suite de mes parents où Harlem s’était installé après avoir rénové toute cette partie de la maison à son goût, gardant l’esprit de la maison comme je l’avais souhaité avec ma sœur. Je troquai mon bas de costume et ma chemise bleue pour un short de boxe et un tee-shirt large noir qui finirait sûrement sur un des bancs de la salle de sport durant l’entraînement. Une fois mes mocassins mis dans l’armoire et le linge dans la panière de linge, je descendis rejoindre mon frère.
— Tu tapes dans le sac comme un débutant, lui fis-je remarquer. Ses coups étaient ridiculement lents, et mal placés. Si tu comptes me battre comme ça on va bien s’amuser Kenan.
— Je m’échauffe tu vas voir ta face après le combat Brivael.
Je ricanais en prenant place sur le ring de boxe que nous avions installé dans la grande salle de sport. Le rêve de tout sportif : tapis de course, elliptique, rameurs, bancs de musculations, abducteurs, et adducteurs, yoga, poids, etc. Il ne manquait qu’une piscine olympique pour avoir la salle de sport parfaite. Ayant déjà un centre équestre, un parcours de golf, un terrain de tennis dans la propriété, nous n’avions pas de quoi nous ennuyer plus jeunes. Je repris mes esprits en sentant mon frère monter à son tour sur le ring de boxe, torse nu. J’ôtais mon tee-shirt et mis mon protège-dents pour finir de m’échauffer rapidement.
— Honneur au plus jeune pour le premier round, dis-je en lui souriant, dévoilant mon protège-dents.