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Sur les traces d’artefacts légendaires enfouis près de Carcassonne, Arthur, passionné d’histoire, s’engage dans une quête en compagnie de ses fidèles amis, Victoria et Joe. Guidés par quatre précieux parchemins anciens, ils traversent les contrées de l’Aude, se confrontent à des énigmes redoutables et déjouent des pièges. Chaque étape de leur voyage les plonge plus profondément dans un dédale de secrets oubliés, où le passé semble renaître sous leurs yeux. Dans cette aventure périlleuse, où chaque détour recèle un danger imminent, réussiront-ils à percer les mystères ancestraux et à dévoiler l’inestimable héritage enseveli depuis des siècles ?
À PROPOS DE L'AUTEUR
Passionné par la chasse au trésor et les aventures,
Hadrien Geraci a consacré de nombreuses années à l’exploration des grandes quêtes historiques. Ses recherches l’ont naturellement conduit à écrire son premier roman, "Nostra cartis – Les parchemins oubliés".
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Seitenzahl: 189
Hadrien Geraci
Nostra cartis
Les parchemins oubliés
Roman
© Lys Bleu Éditions – Hadrien Geraci
ISBN : 979-10-422-4764-5
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Le grand cloître du musée des Augustins à Toulouse bourdonnait d’excitation. Des centaines de personnes, journalistes, experts et curieux, s’étaient rassemblées pour l’inauguration de l’exposition la plus attendue de l’année. Victoria et moi, à l’origine de la découverte sensationnelle, étions prêts à la révéler au public pour la première fois.
Je me tenais près de la grande porte en bois, observant la foule avec un mélange de fierté et de nervosité. Tout ce monde présent n’était vraiment pas pour moi une chose que j’aimais et dont j’étais habitué. J’ai jeté un coup d’œil à Victoria, mon amie de longue date. Elle, élégante comme toujours, ajustait les derniers détails de son discours avec une concentration intense.
« Tu es enfin prête, Victoria ? » lui ai-je demandé en m’approchant d’elle, ma voix trahissant une légère appréhension.
« Autant que possible, m’a-t-elle répondu avec un sourire encourageant. Nous avons travaillé si dur pour ce moment. Il est temps de partager notre trésor avec le monde entier. »
Les portes du musée se sont ouvertes, laissant entrer un flot continu de visiteurs émerveillés. Des murmures montaient dans les airs tandis que les regards se tournaient vers le centre du grand cloître, où trônait une vitrine massive et magnifiquement éclairée. À l’intérieur, scintillaient une collection d’objets en or, de reliques anciennes, de monnaies antiques, et une quantité impressionnante de pierres précieuses.
Nous sommes montés sur la petite estrade, prêts à prendre la parole. Les flashs des appareils photo crépitaient, capturant chaque instant de cet événement historique. J’ai pris une grande inspiration avant de commencer :
« Mesdames et Messieurs, et amis, ai-je commencé, ma voix résonnant avec peu d’assurance dans le grand cloître. C’est avec une immense joie et une grande émotion que nous vous présentons aujourd’hui une découverte qui, nous l’espérons, marquera l’histoire de l’archéologie et enrichira notre compréhension du passé. Pour Toulouse, c’est un moment exceptionnel, un événement qui place notre belle ville rose au centre de l’attention mondiale. »
Je me suis tourné vers Victoria qui me sourit en signe d’approbation. « Ce trésor, trouvé au fond d’une vaste grotte, témoigne de la richesse et de la complexité d’une époque passée. Chaque artefact que vous voyez ici raconte une histoire, une histoire que nous avons à cœur de partager avec vous. »
Mes paroles plongèrent la salle dans un silence respectueux, l’admiration des gens était palpable. Les visiteurs s’approchèrent lentement des vitrines, les yeux brillants de curiosité et d’émerveillement. L’exposition était inaugurée, et avec elle, un chapitre fascinant de l’histoire venait de s’éveiller dans la belle ville de Toulouse. Victoria prit la parole à son tour pour présenter chaque objet que nous avions découvert. J’étais heureux de la voir si fière de notre réussite après toutes les épreuves que nous avions vécues.
Avant de vous dévoiler le contenu de ce fabuleux trésor et de vous raconter comment le destin nous y a conduits, permettez-moi de revenir au début de cette incroyable aventure. Il y a environ un an, Victoria et moi menions une vie tout à fait ordinaire, sans la moindre idée que notre routine serait bientôt bouleversée de manière aussi spectaculaire. À cette époque, nos journées se succédaient paisiblement, rythmées par le travail, les loisirs et les moments partagés avec nos proches. Jamais nous n’aurions pu imaginer que nous serions entraînés dans une quête extraordinaire qui allait nous conduire à une découverte d’une telle importance historique et culturelle.
Tout a commencé, avec des indices discrets et des coïncidences troublantes qui ont peu à peu tissé la toile de notre aventure. Replongeons-nous ensemble dans les événements qui ont marqué le début de cette quête, pour comprendre comment le fil du destin nous a guidés jusqu’à ce trésor légendaire.
Le voyage fut ardu, semé d’embûches et de moments de doute. Nous avons traversé des terrains difficiles, exploré des lieux fascinants, et fait face à de nombreux obstacles. Mais chaque pas en avant nous rapprochait un peu plus de notre objectif. Finalement, après de longues semaines de recherches et de persévérance, nous avons trouvé ce que nous cherchions.
C’est au fond de cette grotte, dans un recoin obscur et oublié, que nous avons découvert ce trésor inestimable. Les objets en or, les reliques anciennes, les monnaies antiques et les pierres précieuses scintillaient dans la pénombre, témoignant de la richesse et de la splendeur d’une période de l’histoire révolue. Oui, nous avions trouvé un trésor et pas n’importe lequel ! La sensation de découvrir ces artefacts pour la première fois était indescriptible, une combinaison de triomphe, d’émerveillement et d’humilité face à l’histoire qui se révélait à nous.
Maintenant que vous avez compris le but de notre quête, permettez-moi de vous emmener plus loin dans les détails fascinants de notre découverte. Chaque artefact, chaque objet que nous avons trouvé, a une histoire à raconter, une histoire que je suis honoré de partager avec vous à travers ces pages.
Je réalise aujourd’hui que cette histoire, bien plus qu’une simple recherche de richesse, m’a ouvert les yeux sur des vérités bien plus profondes. Je n’aurais jamais pu y parvenir seul. La résilience et la persévérance dont Victoria et moi avons fait preuve nous ont menés inexorablement à notre objectif. Nous avons passé d’innombrables heures à déchiffrer les énigmes semées sur notre chemin. Ce fut réalisable, car nous avions cette certitude profonde, cette conviction que notre quête était authentique, nous l’avions ressentie dès le départ. Cette aventure, dans laquelle nous nous sommes plongés corps et âme, a littéralement bouleversé nos existences. Victoria ne le niera pas : ce que nous avons vécu aurait pu être tiré d’un film d’aventure, où le simple hasard se transforme en signes, puis en évidences. Les rencontres qui jalonnent notre parcours parlent d’histoire, de légendes, de symboles, mais surtout de mystères.
On pourrait dire que tout commença le jour où je fis la connaissance de Victoria. Nous étions au collège, et dès les premiers instants, une certaine connexion s’établit entre nous. Ce qui m’attirait et m’intriguait chez cette jeune fille, c’était son intérêt pour des sujets peu communs pour son âge. En dehors des cours, nous avions l’habitude de nous retrouver avec un petit groupe d’amis. Nous avions des personnalités variées, mais tous animés par une soif de débats politiques, de discussions sur la spiritualité, le paranormal, et nous nous questionnions sur des sujets existentiels.
Victoria se distinguait des autres par son esprit vif et aiguisé, sa répartie incisive, et sa soif de connaissance. Elle avait ce quelque chose en plus qui m’attirait irrésistiblement, qui agissait sur mon esprit, lentement mais sûrement. Nos échanges étaient passionnants, empreints de cette innocence juvénile et d’une curiosité insatiable.
Malheureusement, nous n’avons jamais pensé à consigner nos idées. Avec le recul, je réalise à quel point ces moments ont été précieux, révélant l’égrégore puissant qui émanait de nos échanges et soulignant l’importance des relations humaines. Le partage, la fraternité, la compassion ont été des valeurs qui ont élargi nos horizons. Je n’ai jamais eu le courage de révéler à Victoria mes sentiments. J’avais peur de compromettre notre amitié.
Même des années plus tard, je me souviens encore parfaitement de son visage angélique, de son parfum envoûtant aux notes de musc et de patchouli. Son regard intense, dans lequel je me perdais avec délice, hante encore mes pensées. Je me rappelle ses réflexions passionnées lors de nos débats, sa façon unique de chercher ses mots, de parler avec assurance. Je la contemplais en souriant, et elle me surprenait toujours en demandant : « Qu’est-ce qu’il y a, Arthur ? Pourquoi me regardes-tu comme ça ? »
Je lui répondais simplement : « Rien, tu es belle quand tu réfléchis. » Elle me souriait en retour.
Nous sommes parvenus à rester en contact pendant longtemps, mais la vie nous a peu à peu éloignés. Les années ont passé, et nous avons perdu le fil de nos échanges. Pourtant, je pensais souvent à Victoria. Nous étions restés amis sur les réseaux sociaux, ce qui me permettait de suivre ses aventures, ses voyages en Australie, ses rencontres avec des animaux exotiques. Elle continuait de m’émerveiller à distance, une véritable aventurière des temps modernes. En regardant ses photos, fière et souriante, une certaine nostalgie m’envahissait. Elle me manquait, mais je n’osais pas interférer dans sa vie, craignant que le moment ne soit pas opportun.
Je me souviens de ce matin-là, le 27 avril, comme si c’était hier. Le ciel était encore gris et lourd après l’orage de la nuit précédente quand je me suis dirigé vers le bureau. Je travaillais pour une société toulousaine qui reconditionnait du matériel informatique et téléphonique. En arrivant à quelques rues de mon lieu de travail, j’ai vu des colonnes de fumée noire s’élever dans l’air. Mon cœur s’est mis à battre plus vite, une mauvaise intuition s’insinuant en moi. En tournant sur route d’Espagne, la scène qui s’est dévoilée devant moi m’a coupé le souffle.
Les locaux de notre entreprise étaient en flammes. Les pompiers étaient déjà sur place, luttant contre l’incendie avec acharnement, mais il était évident que le bâtiment était perdu. Les vitres étaient éclatées, et des éclats de verre jonchaient le trottoir. Les murs noircis témoignaient de la violence des flammes qui avaient ravagé l’intérieur.
Je suis resté planté là, impuissant, regardant les restes de notre entreprise partir en fumée. Mes collègues, arrivant les uns après les autres, avaient le même air hébété, certains au bord des larmes. C’était un spectacle désolant, et la réalité s’est lentement imposée à nous, nous étions sans travail.
La matinée passa dans un flou, entre les questions des enquêteurs, les regards échangés avec mes collègues et l’odeur persistante de brûlé qui semblait imprégner chaque parcelle de l’air. Il n’y avait rien que nous puissions faire, si ce n’est regarder les ruines de notre ancien lieu de travail. Vers midi, le feu était maîtrisé, et nous avons été autorisés à partir, sans aucune certitude sur l’avenir.
Sur la route du retour, alors que les klaxons résonnaient autour de moi, je me sentais à la fois détaché du monde extérieur et hypnotisé par ses agitations. Ce matin avait été loin d’être ordinaire. Je suis rentré chez moi, mes pensées tourbillonnant dans ma tête. Mon appartement me semblait étrangement calme et ordonné comparé au chaos que je venais de quitter. J’ai déposé mes affaires et me suis assis lourdement sur le canapé, essayant de comprendre ce que j’allais faire ensuite.
Le téléphone a sonné plusieurs fois cet après-midi-là ; des amis, des collègues, tous cherchant à comprendre ce qui s’était passé et comment nous allions nous en sortir. Étant l’un des plus anciens de l’entreprise, mes collègues et responsables se sont toujours appuyés sur mes conseils, ce qui était très pesant, car je n’avais aucun intérêt personnel, n’ayant aucune responsabilité. Je n’étais qu’un simple employé.
Mais moi ce jour-là, je n’avais aucune réponse à leur offrir. Tout ce que je pouvais faire, c’était essayer de mettre de l’ordre dans mes propres pensées, je n’avais même pas la force de les réconforter. Pour une fois, je pensais à moi uniquement.
Je me suis levé et j’ai fait les cent pas dans le salon, regardant sans vraiment les voir les objets qui m’entouraient. Chaque détail semblait soudainement prendre une importance démesurée. Le livre sur la table basse, un souvenir de mes études, les photos de mes amis, ma famille et la photo encadrée de Victoria et moi lors d’une de nos randonnées que je gardais précieusement. Même les vieux magazines empilés près du fauteuil retenaient mon regard hagard, tout me rappelait les moments de stabilité et de routine que je venais de perdre.
Je devais trouver un moyen de rebondir, de ne pas me laisser abattre par cette tragédie. L’idée de rester sans rien faire me terrifiait autant que l’incertitude de l’avenir. Je savais que je devais trouver une nouvelle direction, un nouveau projet pour canaliser mon énergie et mes compétences.
Et c’est ainsi que, sans le savoir, je me préparais à une aventure qui allait changer ma vie à jamais.
J’errais chez moi, sans trop savoir quoi faire de ma journée soudainement libre. Après avoir passé le début d’après-midi à lire derrière les baies vitrées de mon salon, je pris la décision d’aller au Bistrologue en fin de journée. Le froid qu’il faisait ce jour-là bien que nous étions fin avril me poussa à chercher la chaleur du bar, où Pierre, le patron, m’accueillit chaleureusement comme à son habitude. Les lumières tamisées du bar contrastaient avec la froideur de la journée.
Les convives, attablés dans des coins confortables, étaient enveloppés dans une belle ambiance fraternelle. Je m’installai comme à mon habitude au comptoir, laissant la chaleur du lieu m’envahir. C’était la place idéale pour observer les gens et me changer les idées. Pierre, derrière le bar, s’affairait avec une aisance naturelle, distribuant des sourires et des conseils avec la même générosité que ses boissons.
« Arthur ! Viens donc goûter cette bière de l’île Maurice, ça devrait te plaire ! » déclara-t-il avec enthousiasme, me tendant une bouteille ornée d’un oiseau en flammes.
« C’est la Phénix ! Dis-moi ce que tu en penses ! » ajouta-t-il avant de partir servir d’autres clients. Je contemplai la bouteille, le phénix ressuscitant de ses cendres. Ce symbole me ramena à l’incendie du matin et à mes préoccupations quant à mon avenir incertain. C’était aussi un rappel qui me fit penser à Victoria et à notre propension à voir des signes partout. Mais depuis longtemps, ces signes semblaient m’échapper. Pourtant, en observant l’étiquette, une sensation étrange m’envahit, comme si ce petit signe avait ravivé une étincelle endormie en moi depuis longtemps.
Après avoir siroté cette bière aux arômes ensoleillés, je m’adressai à Pierre : « Eh bien, la Phénix n’est pas mal du tout. Merci pour cette découverte, Pierre. Bonne soirée. » Je laissai un billet sous la bouteille et décidai de rentrer chez moi, emportant avec moi une lueur d’espoir retrouvée.
Une fois de retour à l’appartement, mon esprit était toujours tourmenté par une multitude d’interrogations. « Si tout se passe comme prévu, je serai en chômage technique, mais qu’est-ce que je vais faire de tout ce temps libre ? » me dis-je à voix haute.
L’idée de partir quelques jours dans l’Aude, où ma famille possédait une maison, me vint rapidement à l’esprit. Pendant mon enfance, nous passions nos étés dans cette vieille demeure, héritage de mon arrière-grand-père et rénovée au fil des générations. Située à Saint-Polycarpe, un petit hameau paisible, cette maison avait toujours exercé sur moi une fascination particulière. Je me souvenais des mots de ma grand-mère avant qu’elle nous quitte : « Chacun vient trouver ce qu’il cherche dans l’Aude. » C’était décidé, j’allais m’y rendre pour un certain temps, pour me ressourcer et m’évader de mes préoccupations.
Les jours précédant mon départ furent remplis de préparatifs minutieux. Je voulais m’assurer d’avoir tout ce dont j’aurais besoin pour un séjour confortable et agréable. Je fis une liste détaillée des affaires à emporter, mais aussi des livres, et même quelques outils de bricolage pour d’éventuelles réparations dans la maison. Je passai également du temps à organiser mes activités pour mon séjour à Saint-Polycarpe. Je prévoyais des promenades dans la campagne environnante, des visites aux marchés locaux pour redécouvrir les produits régionaux, et des après-midi de détente à lire et me reposer dans le jardin de la maison familiale. De quoi puiser des énergies positives, mais aussi et surtout réfléchir à ce que je pourrais faire par la suite.
Le jour de mon départ, j’étais à la fois excité et apaisé, j’avais besoin d’oublier ce qui venait de m’arriver. Bizarrement, le stress que je subissais à Toulouse commençait déjà à disparaître comme par magie. Je chargeai ma voiture avec précaution, veillant à ce que tout soit bien arrimé pour le voyage. Ensuite, je pris une dernière fois le temps de fermer l’appartement, vérifiant chaque fenêtre et chaque porte, pour m’assurer que tout soit en ordre en mon absence.
Je décidai de partir en fin d’après-midi en direction de Saint-Polycarpe. Le paysage défilait lentement devant mes yeux, ponctué par les champs verdoyants et les collines douces de la région. J’avais hâte de retrouver cette atmosphère familière, où le temps semblait s’écouler à un rythme différent, plus paisible que la grande ville.
Arrivé à destination, je fus accueilli par le calme du village, baigné dans la lumière dorée du soleil couchant. La maison se dressait fièrement au bout d’une petite rue pavée, ses volets bleus contrastant avec la pierre ancienne de ses murs. Un sentiment de bien-être m’envahit alors que je franchissais le seuil de cette demeure chargée d’histoire, prêt à savourer chaque instant de mon séjour dans l’Aude. En regardant par la fenêtre du salon, je pouvais voir les rayons du soleil caresser la campagne, réveillant la nature endormie. Les oiseaux chantaient avec entrain, les plantes s’éveillaient à la vie en ce mois d’avril, et l’air frais embaumait les senteurs printanières.
Je me laissais bercer par la musique qui passait à la radio que j’avais installée à l’extérieur, lorsque soudain, une chanson particulière retentit : Le coup de soleil de Richard Cocciante. C’était notre chanson, celle que Victoria et moi écoutions en boucle. Était-ce un simple hasard ou un signe du destin ? Le doute m’effleura un instant, mais je chassai rapidement cette pensée. Je choisissais de voir dans ces signes une invitation à embrasser pleinement cette nouvelle étape de ma vie, avec confiance et sérénité. L’atmosphère paisible de Saint-Polycarpe m’envoûtait immédiatement. Malgré l’herbe folle qui avait envahi le jardin depuis le dernier passage de l’un de mes cousins, je ressentais déjà les bienfaits de cet éloignement du tumulte de la ville.
Le premier jour, je me consacrai donc à la remise en ordre, suivant le rituel familial transmis de génération en génération. Ramasser les feuilles mortes, tondre la pelouse, balayer la terrasse, chaque geste semblait chargé de sens. Une manière de renouer avec mes racines et de me préparer mentalement aux jours à venir.
Après une nuit réparatrice, je me sentais déjà plein d’énergie et prêt à explorer les environs que j’aimais tant. Mon intention initiale était de gravir le Bugarach, ce mont mythique entouré de légendes et de mystères.
Quand j’étais enfant, j’adorais écouter les histoires que mon grand-père, Maxime, me racontait. Une de mes préférées était celle de cette Montagne, Bugarach. Il avait toujours été fasciné par les mystères de l’Aude, et ses récits étaient empreints d’une magie qui me captivait.
J’entends encore ses histoires qui résonnent au fond de ma mémoire. L’Aude était autrefois, me racontait-il, une plaine immense et fertile sur laquelle veillaient des fées et des lutins. Les fées, armées de longues piques, chassaient les dragons et autres créatures qui infestaient le pays et dispersaient les nuages malfaisants pour permettre la levée des récoltes. Les lutins, petits dieux des bois et des taillis, chassaient les vipères et dénichaient les corbeaux et les pies ainsi que les rapaces.
Le peuple audois bénissait ces esprits bienfaisants, leur élevait des autels et décorait les frontons des maisons de leurs images protectrices. D’après mon grand-père, parmi ces fées et ces lutins, il y avait la déesse Nore et les lutins Bug et Arach qui étaient les plus honorés. En revanche, Cers, fils d’Éole et père des vents et des tempêtes, voyait son temple abandonné par les bons paysans. Ils l’accusaient de ravager les récoltes, de dépouiller les arbres de leurs fleurs et parfois même de découronner les toits des maisons. En vain, les fervents de Nore et des lutins Bug et Arach les suppliaient ardemment d’intervenir auprès de Jupiter pour conjurer les méfaits de Cers. Ceux-ci avouaient en toute loyauté qu’ils se sentaient impuissants contre le fils d’un dieu et petit-fils de Jupiter.
Un jour, alors que la tempête avait fait rage plus que de coutume, la fée Nore, prise de pitié pour le malheur des paysans, résolut d’implorer directement le grand dieu Jupiter. Touché par cette sainte audace, le maître du tonnerre promit à la petite déesse de calmer les colères de Cers et de veiller sur la contrée qu’elle aimait.
Encouragés par l’exemple de Nore, les lutins Bug et Arach décidèrent eux aussi d’implorer Jupiter pour qu’il délivre la région des colères malfaisantes de Cers. Mais afin de se faire mieux entendre du Maître des Cieux, Bug grimpa sur les épaules d’Arach au sommet d’une colline et fit sa prière à Jupiter. Le grand dieu accepta d’écouter leurs paroles ; il dressa alors un promontoire protecteur, au sommet du même mont sur lequel s’étaient placés les deux lutins pour l’implorer.
Ce promontoire protecteur allait devenir la montagne de Bugarach. À l’abri de ce nouveau rempart, toute la plaine des Corbières ne craignait plus les colères désastreuses de Cers. Cette montagne, la plus haute de l’Aude, bloquait les nuages les plus menaçants. Pépé Maxime concluait toujours son récit en disant que la montagne de Bugarach restait un symbole de protection et de bienveillance, grâce aux prières des courageux lutins et à l’intervention de la fée Nore. Chaque année, Maxime avait pris l’habitude de faire un pèlerinage au sommet de Bugarach pour honorer la fée et les lutins, tant qu’il en avait la force.
Je restais souvent éveillé bien après la fin de l’histoire, les yeux grands ouverts, imaginant les lutins et les fées veillant sur les montagnes et les plaines. Ces récits nourrissaient mon imagination et mon amour pour les légendes locales. Alors que je repense à cette histoire, je sens toujours la même fascination enfantine qui m’habitait autrefois.
« Est-ce que ces lutins existent vraiment ? me demandais-je souvent en souriant à moi-même. Qui sait ? Les légendes ont souvent un fond de vérité. Et puis, c’est ce qui rend ces histoires si captivantes, non ? »
Les récits de mon grand-père continuent de vivre à travers moi, je prends toujours plaisir à raconter ses légendes, nourrissant ma fascination pour cette région magnifique de l’Aude.
Mais le vent violent qui balayait la campagne me fit changer de plan. Les arbres se courbaient sous la force de son souffle, et les nuages se précipitaient dans le ciel, annonçant une journée agitée. Visiblement, Cers avait trouvé ce jour-là le moyen de s’imposer.