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Comment s’adapter à une quête de maternité longue et semée d’embûches ? Une vie rythmée par les protocoles médicaux ? Comment affronter cette épreuve sans qu’au sein du couple l’un des deux s’égare ? Comment faire face au manque de tact de certains praticiens, aux remarques désobligeantes d’autrui ignorant tout de ce combat que nous menons ? Comment continuer à croire en une issue positive lorsque le chemin pour y arriver est si incertain et douloureux ? S’armer de patience est crucial dans cette longue traversée, mais « patienter patiemment » s’avère bien difficile lorsque le désir d’enfant est si fort.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Sandrine Rabineau offre un témoignage empreint d’empathie et d’une profonde volonté de partager les réalités de la vie à travers sa plume. Son récit aspire à insuffler un message d’espoir aux femmes qui affrontent l’endométriose, une maladie invisible, mais profondément invalidante.
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Seitenzahl: 72
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Sandrine Rabineau
Patienter patiemment
© Lys Bleu Éditions – Sandrine Rabineau
ISBN : 979-10-422-2176-8
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À mon fils, Esteban
Nous sommes dans la salle d’attente de mon gynécologue. Situation banale sauf que pour nous elle ne l’est pas…
C’est en juillet 2000 que j’obtiens mon ticket d’entrée pour le monde de l’enseignement. Quelle n’est pas ma surprise lorsque je découvre mon lieu d’affectation : académie d’Amiens. Non pas que je sois nulle en géographie, mais cette région française m’est complètement inconnue. Et surtout je vais me retrouver à six cents kilomètres de mon chez-moi, loin des miens.
Je me souviens encore des paroles de la formatrice de l’Institut Universitaire de Formation des Maîtres lors de la première réunion d’information aux tout jeunes enseignants que nous étions. Nous venions tous d’horizons différents et lors d’un tour de table de présentation, connaissant à présent mes racines bretonnes, la formatrice me lance « Ah ils sont loin les chalutiers bretons ! »
Quelque temps avant cette première rentrée scolaire, je partais à la recherche d’un logement. Mon père m’accompagnait dans ce nouveau périple. Quelques mois auparavant il me soutenait par sa présence à mes côtés lors de mes épreuves orales du concours. À l’époque mes parents et moi ne savions pas encore qu’une autre épreuve nous attendait : celle des « au revoir » !
Lors de mon départ définitif en septembre, je revois la mine déconfite de mes parents, le visage baigné de larmes de ma mère. Je suis leur unique enfant. Épreuve difficile pour eux que de me voir larguer les amarres et me savoir seule dans une ville inconnue.
À vrai dire je n’étais pas seule. Mon chien faisait partie des bagages et de ma nouvelle vie. Ensemble nous allions explorer cette ville inconnue.
Bien que déracinée j’étais heureuse de ma vie professionnelle. J’y trouvais rapidement un équilibre. Mes parents me rendaient souvent visite et de mon côté les vacances scolaires me permettaient le retour aux sources si essentiel à mon équilibre.
Un évènement vint cependant bouleverser celui-ci. Lors des vacances d’été 2001, je fis la rencontre de celui qui, par la suite, deviendra mon mari. Et pourtant rien ne prédisposait à cette rencontre, car j’étais persuadée que ma vie amoureuse se déroulerait là où je vivais.
D’ailleurs quelques semaines après cette brève rencontre je reprenais la route vers ma terre d’exil.
Aux vacances suivantes, au mois d’octobre 2001, je contactais Yann afin de le revoir. Seule ma maman était dans la confidence.
Cette seconde rencontre fut une évidence : Yann et moi nous étions trouvés.
Rencontre prometteuse et fusionnelle : nous voulions avancer ensemble et vite.
Et c’est ce que nous avons fait puisque depuis notre rencontre notre vie n’a été qu’une avalanche de projets. Tout s’est très vite enchaîné. J’ai pu obtenir mon affectation dans le Finistère en juin 2002. Cet été-là, nous avons acheté un appartement. L’été suivant nous nous sommes mariés. La vie nous souriait. Il nous semblait que rien n’aurait pu ternir cette belle vie qui s’offrait à nous…
Et pourtant si nous sommes ici dans cette salle d’attente ce 5 mai 2004, c’est parce que le ciel est nuageux.
L’enfant que nous désirons si fort depuis si longtemps, depuis 2 ans, refuse d’entrer dans notre vie.
Lors de notre emménagement dans notre nouvel appartement, nous y avions préparé sa chambre, car nous pensions qu’il allait faire partie de notre vie aussi vite que l’avait fait notre amour.
En mai 2003 j’arrête la pilule. J’avais peur d’être enceinte pour notre mariage en juillet 2003. Je craignais que mon ventre de femme enceinte m’empêche d’enfiler ma robe de mariée. Arrêter la contraception deux mois avant nous paraissait raisonnable.
À l’automne, je consulte mon gynécologue qui me prescrit un boostant : clomid, que je prends pendant deux mois. J’espérais doper ma fertilité, mais mes espoirs sont déçus.
Au printemps suivant, je réalise une hystérographie2 qui permettra de voir si mes trompes sont opérationnelles. De cette consultation je sors soulagée, car le radiologue ne détecte aucune anomalie sur les clichés.
Mon corps semble bien fonctionner. Mes inquiétudes sont moindres.
Aujourd’hui nous consultons à nouveau pour d’éventuels autres examens, car les mois se succèdent, les années défilent et bébé n’est toujours pas là.
Dans cette salle d’attente, je feuillette un magazine et je tombe sur un article dont le sujet est l’endométriose. À sa lecture je m’aperçois que les symptômes de cette maladie correspondent aux miens : règles très douloureuses, fortes douleurs abdominales, difficulté à rester debout…
« Drôle » de coïncidence lorsque mon gynécologue examine mes radios d’hystérographie effectuées deux mois auparavant : il y voit des lésions d’endométriose3.
Tous deux sortons de cette consultation déconcertés, désemparés et abasourdis par les annonces du gynécologue. Notre insouciance primaire commence à s’envoler et la pose du diagnostic de l’endométriose nous effraie.
Je me renseigne sur internet et découvre que beaucoup de femmes sont atteintes de cette maladie et souffrent d’infertilité.
Au fil de mes recherches, je découvre, outre l’infertilité, d’autres conséquences touchant les femmes atteintes d’endométriose.
Des images de souvenirs anciens surgissent et défilent devant mes yeux : j’ai quinze ans lorsque je m’effondre de douleur dans le salon de mes grands-parents chez lesquels j’étais venue déjeuner ce jour-là après l’école. Je me souviens que les douleurs étaient très fortes, si fortes que dans la rue, prise de malaise, j’avais peiné à atteindre leur maison. Ma grand-mère, affolée, avait contacté le médecin qui, afin d’apaiser ma souffrance, m’avait administré de la morphine mélangée à de l’eau.
Mes souvenirs sont encore aujourd’hui très vifs tant ma douleur l’était également.
C’était le début d’une longue série de maux liés à l’endométriose. Mais je ne le savais pas encore.
J’ai seize ans et chaque mois je suis absente aux cours au lycée au rythme de mon cycle menstruel. Impossible pour moi de me lever, de rester debout, je reste couchée en me tordant de douleur. J’essaye d’adopter des positions qui réduisent mes souffrances. Mais en vain ! Même la bouillotte et les coussins de soie que ma mère posait délicatement aux endroits douloureux ne parvenaient pas à faire taire le mal. C’est comme si un ennemi invisible m’assaillait de coups de couteau. Et pire encore me lacérait l’intérieur de l’abdomen sans laisser de traces apparentes. J’ai longtemps comparé cette douleur si vive à une araignée tissant sa toile en moi. C’est une maladie silencieuse, mais terriblement handicapante.
La nausée m’accompagne aussi pendant ces quelques jours mensuels.
Aux souffrances physiques s’ajoute le flot abondant des règles. Je les nomme les vilaines. Ce terme leur convient parfaitement.
Face à mes souffrances, ma mère m’accompagne chez sa gynécologue. Selon celle-ci, les douleurs dues aux règles sont tout à fait normales chez une adolescente. Il faudra espérer que cela passe avec le temps.
Par la suite mon médecin généraliste me prescrira divers médicaments pour cesser ou du moins atténuer mes douleurs. Mais cela se révélera inefficace. Je consulte à nouveau plusieurs gynécologues qui auront le même discours que la première gynécologue. Chose courante que d’avoir des douleurs abdominales quand on a ses règles ! De plus, rien n’est décelé sur les clichés d’échographie. L’une de ces médecins me dira que je devais certainement être douillette.
Alors j’essaie d’apprivoiser ces douleurs, les anticiper pour m’y préparer psychologiquement et tenter de mieux les vivre physiquement. Chaque mois, j’ai mal. Je vis avec.
Aujourd’hui j’ai 31 ans et je viens d’apprendre que je souffre d’endométriose. Je peux enfin mettre un mot sur les maux dont je souffre depuis tant d’années.
Aujourd’hui je pense à toutes ces professionnelles de la santé qui m’avaient assuré de la normalité des douleurs. Et je m’adresse à elles silencieusement : Non ! Non ce n’est pas normal d’avoir des règles si douloureuses ! Non je ne suis pas douillette ! Cette araignée porte un nom et elle tisse sa toile en moi autour d’elle. Cet assaillant invisible ne l’est plus. Je suis juste atteinte d’une maladie, invisible aux yeux de tous certes, mais bien réelle. Elle porte un nom : c’est l’endométriose.