Pour une dernière danse - Magali Laillé B. - E-Book

Pour une dernière danse E-Book

Magali Laillé B.

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Beschreibung

Lily, une jeune femme ambitieuse avec un avenir planifié, voit sa vie bouleversée par la rencontre inattendue de Manuel et Julia, deux danseurs. Cette rencontre remet en question toutes ses convictions et l’entraîne sur des chemins inexplorés, semés d’incertitudes et de défis. Confrontée à un choix crucial, restera-t-elle sur la voie prévue ou se laissera-t-elle tenter par l’inconnu, au risque de tout perdre ?


À PROPOS DE L'AUTRICE

Magali Laillé B. transporte ses lecteurs dans des univers enchantés, puisant son inspiration dans les contes qui ont marqué son enfance. Avec son sixième livre, Pour une dernière danse, elle nous plonge dans une romance envoûtante, mêlant subtilement le sombre et le sensuel, captivant ainsi tous ceux qui expérimentent les défis de l’amour.

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Magali Laillé B.

Pour une dernière danse

Roman

© Lys Bleu Éditions – Magali Laillé B.

ISBN : 979-10-422-2498-1

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Avertissement

Attention, cette histoire est une fiction qui contient des scènes pouvant heurter la sensibilité du lecteur.

Prologue

Debout dans la pénombre, devant la porte-fenêtre ouverte, je laissai mon regard errer sur le jardin plongé dans le noir.

La lune se reflétait sur la surface de la piscine et offrait un mince rayon de lumière.

J’avais profité de la nuit pour me dévêtir totalement. Les journées étaient chaudes et les soirées n’offraient aucun répit. L’air brûlant était saturé d’humidité et une légère transpiration recouvrait ma peau. L’orage allait certainement éclater d’un moment à un autre. Je percevais son roulement de tambour au loin.

Après avoir balayé les nuages sombres du regard, je me laissai tomber mollement sur le canapé. Malgré la chaleur, je me sentais bien. J’étais détendue et paisible. Je ne m’étais pas sentie aussi épanouie depuis des mois. Enfin, je me sentais complète, et comblée. J’avais la soirée pour moi seule et j’avais prévu de la passer en tête-à-tête avec un bon film.

D’un geste lent, je caressai distraitement la courbe de mes seins puis je laissai mes doigts glisser sur mon ventre. Ma peau était douce et chaude sous mes doigts. J’aimais cette sensation de ne plus avoir de contraintes et de ne plus être prisonnière de mes vêtements.

En poussant un soupir d’aise, j’allumai la télévision pour choisir un film. Je fis défiler les programmes des chaînes auxquelles nous étions abonnés. Un reflet bleu clignotant sur l’écran me fit froncer les sourcils. Cela provenait de l’extérieur. Paresseusement, je décidai de me lever pour aller voir de quoi il s’agissait.

Alors que je me rapprochai de la fenêtre, le tonnerre éclata enfin et me fit sursauter. Simultanément, un éclair illumina la pièce et de grosses gouttes de pluie se mirent à tomber arrosant bruyamment le jardin. Une sirène retentit.

En soupirant, je retournai finalement m’asseoir. Pour savoir ce qu’il se passait, il aurait fallu que j’aille regarder par la fenêtre de la cuisine, mais je n’en avais pas le courage. J’avais juste envie de profiter de ma soirée.

Pour une valse

Je posai le dernier carton sur le parquet brillant. Il contenait diverses babioles en porcelaine, des souvenirs de mon enfance. La boîte n’était pas très lourde, mais je me redressai en poussant un profond soupir et en me massant le creux des reins. Quoi qu’on en dise, déménager n’était jamais une partie de plaisir, même si l’on avait vingt ans et qu’on allait s’installer avec son petit ami.

Je souris en regardant autour de moi. En venant faire mes études de droit à Paris, je n’avais pas prévu d’emménager dans un loft en colocation. Je m’étais imaginée dans un studio minable pour étudiant fauché, et je m’étais préparée à cette perspective même si cela avait traumatisé mes parents.

Évidemment, c’était sans compter sur Chris, mon petit ami, avec qui je sortais depuis le début du lycée. Lui aussi avait décidé de poursuivre ses études dans la capitale.

Le frère aîné de Chris qui venait de terminer son cursus lui avait proposé de prendre sa place dans la colocation qu’il occupait depuis trois ans. Chris avait sauté sur l’occasion. Il avait appris que plusieurs chambres se libéraient dans le loft moderne où habitait son frère, James. Certaines étaient beaucoup plus spacieuses que la sienne et comprenaient un petit espace de toilette avec un lavabo et un miroir. Il m’avait aussitôt proposé de venir m’installer avec lui dans l’une de ces grandes chambres. J’étais enchantée, tant par le fait d’avoir trouvé un logement sympa avec un loyer correct que de m’installer avec mon petit ami.

En parcourant la chambre des yeux, je pus constater que Chris n’avait pas encore déballé ses affaires. Pourtant, il était arrivé depuis plusieurs semaines. Tant pis pour lui, j’allais m’installer et ainsi choisir le côté du placard que je souhaitais utiliser.

En ouvrant le premier carton, je tombai sur mes cadres photo. Deux d’entre eux contenaient des souvenirs de moments passés avec Chris et nos amis d’enfance. Je les déposai sur les tables de chevet. Le troisième contenait une photographie de mes parents. Ils posaient en souriant à mes côtés. Sur cette photo, je devais avoir cinq ans. Ma mère souriait et ce sourire atteignait ses yeux couleur noisette, si identiques aux miens. Je ressemblais tant à ma mère, qu’en regardant cette photo, je pouvais déjà imaginer la femme que je serais dans quelques années. De mon père, je n’avais hérité d’aucun caractère physique, mais il m’avait transmis sa persévérance et son ambition. La famille posait, en tournant le dos à la mer. Je ne me souvenais plus de ce moment. Cette photo représentait un instant éphémère qui avait dû passer trop vite. Je ne possédais pas d’autres photos avec mes parents. Je soupirai. Je ne savais pas où mettre ce cadre. Finalement, il finirait dans l’armoire avec mes vêtements.

Occupée à vider mes cartons et ranger mes affaires, je ne vis pas le temps passer et fus surprise lorsque Chris arriva quelques heures plus tard. Il m’enlaça en riant :

— Te voilà enfin à Paris ! Bienvenue chez nous, mademoiselle, Lily !

Il déposa un léger baiser sur mes lèvres avant de m’enlacer étroitement. Il m’embrassa de nouveau, cette fois en glissant sa langue dans ma bouche. Je me pressai contre lui et glissai mes doigts dans son épaisse chevelure qui me ravissait. Comme nous étions à peu près de la même taille, chaque courbe de mon corps épousait celles de Chris. Je sentais les muscles fermes de ses cuisses pressées contre les miennes. Son torse comprimait mes seins. Je laissai mes doigts dériver le long du dos de mon petit ami avant de saisir ses fesses et les pétrir avec les paumes de mes mains. Chris était sportif et chacun de ses muscles roulait sous mes doigts. J’appréciais la fermeté de son fessier ainsi que ses courbes rebondies. Chris, comprenant mon invitation, glissa une cuisse entre les miennes afin de me faire basculer sur le lit. Il couvrit mon visage puis mon cou de baisers légers comme des ailes de papillons. Je frémis et entrepris de lui ôter ses vêtements. Nous nous retrouvâmes rapidement nus et Chris me pénétra très vite. Je me dis que j’avais dû lui manquer. Cette pensée me traversa sans s’attarder. Chris était doux et ses mouvements de bassin étaient amples et réguliers. Il jouit rapidement. Je sentis les parois de mon vagin se contracter. Un vague de chaleur me submergea avant de retomber comme une vague qui se serait retirée avant de toucher le rivage. J’étais maintenant habituée à cette sensation fugace que j’assimilais à la jouissance. Chris se retira délicatement et je me détendis.

Je me sentais bien. Chris avait été mon premier amant et je n’avais pas connu d’autres hommes. J’étais satisfaite d’avoir perdu ma virginité avec un garçon que je connaissais bien et avec qui j’imaginais ma vie future. Après avoir terminé nos études, nous avions prévu de trouver un travail et de nous installer ensemble. Nous en parlions souvent, en imaginant déjà comment nous allions décorer notre intérieur ou quel mobilier nous allions choisir.

Perdue dans mes pensées, je laissais mes doigts glisser sur le dos de Chris qui, blotti contre moi, reprenait son souffle silencieusement. Après quelques minutes, je tournai la tête vers lui pour lui parler, mais je constatai qu’il s’était endormi. Je souris et j’en profitais pour l’observer comme j’aimais le faire. Dans son sommeil, Chris ressemblait à un enfant. Ses cheveux blonds et épais étaient ébouriffés et tombaient sur son front. Sa peau était encore bronzée. Ses vacances avaient été ensoleillées. Nous avions passé quelques jours ensemble, mais j’avais dû rejoindre mes parents en Angleterre. Chris avait terminé de bronzer sans moi. Il était rasé de près, sa peau était douce. En continuant mon observation, je remarquai des zones d’ombres sous ses yeux. Il avait l’air fatigué. Peut-être était-ce pour cette raison qu’il n’avait pas encore ouvert ses cartons ? Après tout, il avait déjà repris les cours depuis deux semaines et emménager dans une capitale comme Paris représentait un grand changement. Je me fis la promesse de l’aider à s’installer. Je laissai mon esprit divaguer encore quelques minutes puis je finis par m’endormir en regardant l’homme que j’aimais.

Pour une samba

À mon réveil, j’étais seule. Chris avait déposé une couverture sur moi et j’avais chaud. Je m’étirai longuement, profitant de ce confort. Reprenant doucement mes esprits, je distinguai des voix de l’autre côté de la porte. Je ne comprenais pas ce qu’elles disaient, mais je pouvais déjà dire qu’il y avait plusieurs personnes, au moins trois. Une pensée dérangeante me fit m’agiter. Mince, la salle de bain commune était de l’autre côté du loft. J’aurais dû prendre une douche avant de m’endormir. J’allais devoir me rhabiller sans me laver. Je fis la grimace. J’allais rencontrer mes nouveaux colocataires en sentant le sexe. Il y avait mieux comme première rencontre ! J’allais certainement me sentir mal à l’aise. Je soupirai et me levai. Je pouvais au moins me brosser les dents et prendre un bonbon à la menthe. C’était toujours ça. Je pris quelques minutes pour me vêtir et attacher mes longs cheveux châtain clair avec un élastique. Un peu de parfum et je pris mon courage à deux mains pour sortir de la chambre.

Comme je l’avais entendu, il y avait bien plusieurs personnes en train de discuter dans la cuisine commune. Chris me voyant arriver me prit la main et me présenta au groupe :

— Je vous présente Lily. Nous sommes ensemble. Elle entame de longues études en droit.

Une fille rousse ressemblant à un lutin s’écria :

— Super ! bienvenue. Moi je suis Emma, fac de droit également, mais en deuxième année. Si tu as besoin d’un coup de main, n’hésite pas, je suis dans la chambre trois.

Je me sentis rassurée.

— Merci, c’est sympa.

Un garçon avec la carrure d’un rugbyman s’inclina élégamment devant moi.

— Moi, c’est Quentin, je suis plutôt scientifique et j’occupe la chambre numéro deux.

Une fille et un garçon, tous les deux métis, se tenaient en retrait. Je me tournai vers eux. La fille aux formes rebondies me sourit :

— Moi, je suis Clarence et voici mon copain, Marc. Appartement numéro un.

Elle nous adressa un clin d’œil, à moi et à Chris.

— Ne vous inquiétez pas si vous entendez… eh bien, disons d’étranges bruits nocturnes ou pas, venant de notre chambre.

Sa plaisanterie légère détendit l’atmosphère et tout le monde se mit à rire. Quentin brandit une bouteille :

— Pour commencer cette nouvelle année et arroser notre colocation comme il se doit, je vous propose un petit apéro. Ta dam !

D’un geste, il retira un torchon qui recouvrait un plateau que je n’avais pas remarqué. Il y avait là différentes verrines et plusieurs toasts.

— Surtout, ne vous y habituez pas, je n’ai pas l’intention de préparer tous les repas. En gros, mis à part ces mises en bouches et les pâtes bolognaises, je ne sais pas trop cuisiner.

Emma rit bruyamment :

— Moi, je cuisine très bien, mais le ménage ce n’est pas mon truc. Je suis prête à échanger mon tour d’aspirateur contre la préparation d’un steak-frites, ou une bonne pizza maison.
— Super, on devrait bien s’entendre. Je propose qu’on organise nos tours de corvées et les passages dans la salle de bain autour de cet apéro. Vous êtes d’accord ?

Tout le monde acquiesça. La soirée se déroula dans une ambiance détendue. Marc s’avéra être un vrai professionnel de l’organisation. En un tour de main, il prépara des plannings pour le nettoyage des parties communes. Pour les repas, chacun devait s’engager à préparer un repas commun par semaine. Pour les autres, il fallait se débrouiller. Les passages dans la salle de bain furent également organisés. Certains l’utiliseraient le matin, d’autres le soir. Comme il y avait une douche et une baignoire, les couples pouvaient y aller ensemble.

Je me demandais un peu comment ces plannings théoriques allaient tenir dans le temps. Néanmoins, nous avions de la chance. Nos colocataires étaient sympas et faisaient preuve d’un bon esprit. Je me sentais déjà à l’aise avec les filles. Emma était dynamique, et Clarence était un vrai boute-en-train. La soirée n’était pas terminée que nous avions déjà décidé d’aller faire les boutiques ensemble ainsi que de participer à diverses activités comme le jogging et la natation.

Enfin, satisfaits, nous finîmes par retourner dans nos chambres respectives. J’avais fait un brin de toilette rapide avant de me coucher. Chris se glissa tout contre moi :

— Je suis heureux que tu sois là. Nous allons enfin pouvoir dormir ensemble toutes les nuits. Ça va être super. Quand nous nous installerons dans notre propre logement, nous serons prêts.

Je souris, charmée par cette vision future.

— Oui, maintenant nous vivons vraiment ensemble.

Je me tournai sur le côté pour le serrer dans mes bras et l’embrasser. Je sentais son sexe en érection contre ma cuisse. Je n’étais pas certaine d’avoir envie de faire l’amour de nouveau. Avoir rencontré nos voisins me gênait un peu. Je me demandais si les sons pouvaient être entendus d’une chambre à l’autre. Chris sentit mon hésitation. Il repoussa une mèche de cheveux derrière mon oreille :

— Qu’est-ce qu’il se passe ?
— Je me demande si l’on peut entendre ce qu’il se passe d’une chambre à l’autre.

Il éclata de rire dans mon cou.

— Ça m’étonnerait beaucoup. Les murs sont épais.
— Ah. Tant mieux, tu me rassures.
— Hum, hum. Allez, viens dans mes bras.

Je me blottis contre lui. J’inspirai son odeur. Chris sentait la mer. J’avais toujours l’impression qu’il venait de plonger dans les vagues. Sa peau avait l’odeur et le goût du sel. Je lui donnai quelques petits coups de langue dans le cou. Il gémit et m’embrassa profondément. Il termina son baiser en mordillant mes lèvres, sans vraiment appuyer. J’adorais cette sensation, et mon désir s’enflamma. Excitée, je décidai de le chevaucher. Je savais que Chris préférait être au-dessus de moi, mais ce soir ça ne serait pas le cas. J’allais donner le rythme à notre étreinte. Cette fois, la petite vague qui prit naissance au creux de mes reins m’embrasa les cuisses. C’était bon. Je me laissai tomber à côté de Chris en soupirant d’aise. Il avait joui rapidement. Nous étions sereins.

Alors que le sommeil me saisissait, une pensée traversa mon esprit embrumé. Finalement, peu importait que les murs soient ou non épais comme des feuilles de cigarettes, nous ne faisions aucun bruit en faisant l’amour.

Pour un madison

La faculté de droit à Paris. J’étais dans tous mes états. Mon premier jour à la prestigieuse faculté était enfin arrivé. J’étais déjà venue plusieurs fois admirer l’extérieur du bâtiment historique, mais je n’étais pas encore rentrée à l’intérieur. J’avais effectué mon inscription en ligne et j’allais découvrir mon nouvel environnement. Chris était déjà parti en cours, et Quentin s’était proposé de m’accompagner. Il faut dire que cela faisait plusieurs jours que je leur faisais part de mon angoisse mêlée d’excitation à l’idée de commencer enfin les études que j’avais choisies.

Je me permis un moment d’immobilité quand j’atteignis la rue où se trouvait l’entrée du bâtiment. Sur le fronton trônait le nom de mon nouvel environnement : « Sorbonne, Université de Paris ». Bien qu’ancien, l’édifice ne dépareillait pas dans son environnement. Bien au contraire, il s’y intégrait tel un élément intemporel du paysage. Tout, autour de lui, avait changé et évolué au fil du temps, mais la Sorbonne se dressait devant moi, intégrée dans l’environnement, défiant le temps et l’urbanisme modernes.

Quentin m’accompagna jusqu’à la porte. Je l’avais imaginée impressionnante, mais ce n’était pas le cas. Cet accès qui symbolisait mon premier pas vers mon avenir avait plutôt un aspect rassurant. Une majestueuse porte bleue, élégante comme dans les livres d’histoire. Étudier dans un établissement aussi prestigieux était un privilège, mais également motivant comme si cet élément ajoutait une solennité particulière au défi que je m’étais donné.

Mon premier cours magistral de la journée était un cours de droit civil, mais j’étais tellement occupée à observer mon nouvel environnement que mon attention fut limitée. Alors que je me dirigeais vers le cours de droit public, je me détendis un peu et commençai à m’intéresser à mes camarades. J’espérais rapidement me faire des amis afin de me sentir plus à l’aise. Malheureusement, l’heure du déjeuner arriva sans que j’aie échangé un seul mot avec d’autres étudiants. Je pris mon repas seule à la cafétéria. Me sentant un peu dépaysée, je décidai de faire un tour et d’appeler Chris. Il devina tout de suite mon malaise.

— Salut, ma belle. Comment se passe ta première journée à la fac ?
— Bien, bien.
— Tu as une petite voix.
— Oui, je suis juste fatiguée. Je n’ai pas encore discuté avec les autres étudiants.
— Ça va venir. Tu vas vite repérer ceux qui ont des cours en commun avec toi. En première année, vous avez un socle commun, mais essaie de repérer ceux qui font les mêmes travaux dirigés de langue vivante que toi.

Je souris face à ce conseil, même si je savais que Chris ne me voyait pas. Son pragmatisme était rassurant et pouvait à lui seul le définir.

— Oui, tu as raison. Ça m’a fait du bien de te parler. Je dois y retourner.
— À ce soir. Je t’embrasse.

Requinquée après avoir parlé à mon petit ami, l’après-midi fut plus agréable même si je ne fis aucune rencontre. Toutefois, en quelques jours, je m’installai dans une routine rassurante.

Chaque soir, lorsque je rentrais, Chris m’interrogeait longuement. Il souhaitait ardemment que je me sente bien dans ma nouvelle vie. Je trouvais son attention adorable et à chaque fois qu’il fronçait les sourcils, exprimant ainsi son inquiétude, je l’enlaçais tendrement pour le rassurer. Je n’étais pas particulièrement inquiète. Il ne faisait pas partie de ma personnalité de faire le premier pas pour établir des relations amicales. J’étais réservée, et je n’accordais pas ma confiance facilement. Chris qui me connaissait depuis l’école élémentaire le savait, et c’est pourquoi il s’inquiétait. Il était attentif à chacune de mes émotions, et il m’entourait de tendresse. Il me faisait l’amour chaque soir en me murmurant qu’il m’aimait et qu’il avait hâte de construire une vie de famille avec moi.

Finalement, je ne fus abordée par un étudiant que le quatrième jour après le début de la scolarité. Je sortais de mon cours d’anglais lorsque je sentis qu’on me tapait sur l’épaule. Je me retournai pour me retrouver face à un gars qui mesurait bien plus d’un mètre quatre-vingts. Je dus lever la tête pour croiser son regard.

— Salut, je m’appelle Théo. Je suis en anglais avec toi, et j’ai vu que tu prenais beaucoup de notes. Mon ordinateur portable vient de me lâcher, et je voulais savoir si je pouvais éventuellement récupérer les cours d’aujourd’hui auprès de toi. J’aurai une nouvelle batterie demain.
— Oui, pas de souci. Moi, je m’appelle Lily. J’ai une clé USB dans mon sac. Nous pourrons faire ça après les cours.
— Merci. Si tu veux, pour te remercier, je t’offre un verre. Il y a un bar sympathique où nous pourrons éventuellement brancher ton ordinateur si besoin.
— D’accord. On se retrouve après les cours alors.
— Bien. À tout à l’heure.

Ainsi, débuta enfin ma vraie vie d’étudiante. Grâce à Théo, je découvris plusieurs bars où les étudiants se retrouvaient le soir pour décompresser. Je pris l’habitude de m’y rendre avec lui ou d’y rejoindre Chris et nos colocataires. Nous prenions un verre en refaisant le monde, puis nous rentrions à la maison pour préparer nos dîners. Ça aurait pu paraître monotone, mais Chris et moi voulions réussir nos études et nous consacrions beaucoup de temps à nos cours.

Les études de droit étaient difficiles et je me sentais fatiguée, voire souvent stressée. Cela faisait maintenant presque deux mois que la scolarité avait débuté, et certains étudiants avaient déjà déserté les magnifiques amphithéâtres de la Sorbonne.

Pour ma part, abandonner était hors de question. Je n’y pensais même pas, et je m’étonnais face à ces abandons. Mon projet était de devenir avocate. Mes parents, étant médecins, nous avions longuement discuté de mes études et de mes choix. Ils ne m’avaient pas caché que des études supérieures n’étaient pas des vacances lorsqu’on voulait vraiment réussir.

Néanmoins, à l’approche de Noël lors d’un repas en commun, Emma et Clarence nous interpellèrent sur notre absence de sorties nocturnes. Emma, que je surnommais « le petit lutin », lança l’offensive :

— Chris et Lily, vous travaillez trop.

Clarence surenchérit :

— Tout à fait. Vous êtes trop sérieux, mes chouchous. Vous devez profiter de vos années à l’université pour vous amuser. N’oubliez pas que ce sont vos plus belles années.

Je haussai les sourcils :

— Que veux-tu que nous fassions ? Je ne tiens pas à aller en cours en cuvant mon vin comme certains. J’ai besoin d’être concentrée. Le droit c’est difficile.

Emma ricana.

— Oui, j’en sais quelque chose, j’ai fait deux premières années. Mais ce n’est pas pour cette raison que vous devez aller vous coucher à vingt et une heures !
— Tu exagères, ce n’est pas le cas.
— Peut-être, mais c’est très proche de la réalité. On ne vous a jamais vus dans un bar de nuit ou une discothèque. Vous savez danser au moins ?

Chris décida enfin de nous défendre :

— Bien sûr que nous savons danser. C’est juste que pour nous tout ça c’est nouveau. La vie parisienne, le temps passé dans les transports…
— C’est nouveau !

Emma regarda Clarence avec un air entendu.

— Clarence, je crois que nous allons devoir initier ces deux tourtereaux avant Noël.
— Oui, tu as raison. Que dirais-tu de les emmener dans une petite soirée salsa ?
— Hé ! Mais nous sommes là !

Quentin qui ne disait rien jusqu’à présent s’en mêla :

— Ne t’inquiète pas, Lily, les soirées salsa ne se terminent pas forcément tard, mais on y danse et l’on s’y amuse. N’est-ce pas les filles ?

Emma et Clarence hochèrent la tête de concert. Chris leva les mains en signe de reddition.

— D’accord. Les vacances de Noël approchent. Lily, je pense qu’on peut s’accorder effectivement une vraie soirée détente, non ?

Je soupirai. Il avait raison. Ils avaient tous raison. Peut-être que je prenais mes études trop à cœur, et que je devais me détendre. Après tout, cela ne pouvait qu’être bénéfique pour lutter contre le stress.

— D’accord, mais pas la semaine prochaine. J’ai plusieurs devoirs à rendre.
— C’est entendu, dit Emma, nous irons la semaine avant les vacances.

Nos colocataires étaient gentils et nous nous entendions bien. Je ne leur en voulais pas de vouloir nous entraîner dans leurs sorties nocturnes. Ce soir-là, une fois allongés l’un à côté de l’autre, Chris et moi discutâmes de notre façon d’aborder nos années universitaires. À vrai dire, c’est lui qui aborda le sujet en premier.

— Elles ont raison, Lily. Nous sommes trop tendus, nous devons apprendre à décompresser. Nos parents nous ont mis la pression et c’est bien normal vu le coût de nos études à Paris, mais je pense que nous sommes capables de réussir tout en nous amusant.
— Oui. Je veux bien essayer, mais ça m’angoisse un peu. J’ai si peur d’échouer que je ne pense qu’à ça.
— Raison de plus pour faire cette sortie. On va se détendre sans excès et tu verras les choses différemment.
— Oui, je l’espère.

Je me tournai vers lui et l’embrassai pour lui souhaiter bonne nuit. Chris m’enlaça pour me serrer contre lui. Je lui rendis son étreinte, puis je me mis sur le dos. Chris s’endormit rapidement. Moi, je ruminai un moment nos échanges sur notre manque de divertissements. Mes amies avaient certainement raison. La plupart des étudiants sortaient et s’amusaient. Nous allions devoir en faire de même.

Pour un pas de deux

Le week-end qui suivit cette discussion fut consacré de nouveau aux révisions. J’apprenais mes cours et passais mon temps à lire de la jurisprudence. Les jugements de divorces ou de filiations pouvaient parfois être vraiment cocasses. Je me disais que l’être humain pouvait faire preuve de déraison lorsque les sentiments le submergeaient. Les mêmes émotions comme la colère, la jalousie, la haine, voire l’amour, pouvaient pousser un homme ou une femme à adopter des postures ou formuler des demandes qui frisaient le ridicule, ou l’incompréhensible. Les minutes des tribunaux laissaient l’empreinte de ces comportements humains qui pouvaient passer pour déraisonnables dans notre société. Je découvrais avec avidité une vie cachée que je n’avais pu imaginer du fait de ma faible expérience de la vie. À vingt ans, j’étais loin d’imaginer certaines situations que je pouvais découvrir dans ces lectures. J’avais parfois l’impression de pénétrer dans l’intimité de ces familles qui se déchiraient lors d’un divorce autour d’un enfant ou d’un adultère. Je me disais que le plaisir que je prenais à lire ces décisions de justice était une forme de voyeurisme. Je gardais ces réflexions pour moi. Je ne pouvais pas en parler à Chris. D’une part, parce que je me sentais gênée, et d’autre part, parce que mon petit ami était lui-même plongé dans ses examens. Je ne voulais pas le déranger avec mes réflexions. Je faisais également le constat que, malgré les absences répétées de mes parents, j’avais grandi dans un environnement sécurisant où j’avais été protégée. Peut-être, étais-je sévère avec mes parents lorsque je leur reprochais leurs manquements ?

J’accordais peu de temps à Emma et Clarence, et les activités que nous avions prévu de faire ensemble n’avaient jamais vu le jour. Malgré tout, le repas en commun du samedi soir était devenu une habitude. C’était le moment où nous nous retrouvions tous les six autour d’un buffet dînatoire auquel chacun apportait sa contribution. Ce soir-là, Marc avait voulu tester plusieurs cocktails à base de curaçao bleu. Il s’était servi des verrines pour réaliser des shoots variés afin que chacun puisse goûter les différentes préparations. Emma avait préparé des mini-burgers et j’avais apporté ma touche personnelle avec une salade améliorée comprenant différents légumes et légumineuses.

Après quelques verres, les garçons étaient un peu éméchés et Quentin entreprit de nous parler des différentes soirées mouvementées auxquelles il avait participé. À en croire ses anecdotes, il était très apprécié des jeunes femmes qu’il rencontrait. Une chose en entraînant une autre, il nous décrivit les soirées salsa, notamment celles dans le bar où nous devions nous rendre avant les vacances. L’établissement invitait régulièrement un groupe de musiciens, et il organisait des soirées à thèmes telles que des soirées concours ou des soirées rencontres. Quentin avait déjà participé, il se vantait d’être un bon danseur.

— Vous n’allez pas renoncer, n’est-ce pas ? dit-il en se tournant vers Chris et moi.

Chris ricana :

— Oh ! non ! je compte bien venir, n’est-ce pas Lily ?
— Oui, oui bien sûr, mais là tout de suite, je dois retourner réviser un peu.

Emma m’agrippa le poignet.

— Quel rabat-joie ! Lily, la soirée ne fait que commencer.
— Continuez sans moi.
— Mais nous pourrions sortir boire un verre, qu’est-ce que vous en dites ?

Tout le monde acquiesça avec enthousiasme.

— Allez-y. Moi, je vais travailler et lorsque la soirée salsa sera là, je viendrai avec vous.
— Tu es sûre ?
— Oui, oui. Allez !