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"Survivantes" est un enchevêtrement d’histoires de cinq femmes dont les vies ont été bouleversées par la tourmente et le chaos. Après avoir subi des agressions, des violences sexistes et de nombreuses injustices, elles ont trouvé la force de se relever et de chercher de l’aide. Ces femmes extraordinaires ont, non seulement, survécu à une cruauté inimaginable, mais elles utilisent désormais leur expérience pour inspirer et soutenir d’autres femmes. Embarquez pour un voyage à travers leurs regards et leurs récits.
À PROPOS DE L'AUTRICE
Chiara Campagnoli utilise la littérature comme un exutoire pour surmonter les périodes difficiles de sa vie. Trouvant refuge dans l’écriture, en particulier la poésie, elle exprime ses sentiments les plus profonds.
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Seitenzahl: 97
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Chiara Campagnoli
Survivantes
Nouvelles
© Lys Bleu Éditions – Chiara Campagnoli
ISBN : 979-10-422-4204-6
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Prologue
L’être humain a cette irrépressible pulsion de survie. Ce mécanisme de défense le protège contre vents et marées. Il ne peut s’empêcher de tout faire pour ne pas sombrer dans les ténèbres et rester sous la lumière étincelante du soleil. Lorsqu’il se sent pris au piège, sans espoir de s’échapper, il lutte tant bien que mal, de toutes ses forces, pour qu’un rayon de clarté, même infime, l’atteigne. Survivre peut ainsi devenir un combat de chaque instant pour se frayer un chemin et trouver une place dans ce monde.
Quand tout est noir, que les étoiles ne brillent plus dans le ciel de notre vie, il devient alors extrêmement difficile de s’imaginer retrouver la lumière que l’on a perdue et qui venait tendrement réchauffer nos rêves, nos désirs, nos espoirs. On veut se réveiller de cette noirceur qui nous colle à la peau, mais les cauchemars s’ensuivent. La survie, jour après jour, dans cette atmosphère horrifique, nous semble être loin de notre portée et on envisage de tout laisser tomber. Cependant, derrière chaque nuage menaçant à l’horizon, se cachent des étoiles à l’infini. Bien que nous ne les voyions pas, elles sont là, elles existent bel et bien et éclaireront à nouveau notre monde quand nous serons prêts et assez forts pour se défaire des démons qui nous enchaînent et entravent notre quête ne serait-ce que d’une lanterne pour poursuivre le sens que nous voulons donner à notre vie.
Lorsque l’on nous donne la vie, nous sommes contraints de tenter d’évoluer parmi les milliards d’autres êtres qui essayent de trouver du sens à ce qu’ils sont. Nous avançons du mieux que nous pouvons, aussi patauds qu’un albatros qui tangue sur un bateau. Malheureusement, il arrive que nous soyons entourés de marins qui veulent nous blesser, nous faire souffrir en riant tandis qu’ils nous coupent les ailes, nous privant ainsi de notre liberté de voler. La vie ne s’écoule alors plus de façon régulière comme le sang dans nos veines, mais bouillonne et nous pousse à nous battre pour survivre.
Malheureusement, il arrive que survivre ne suffise plus. On se retrouve alors à terre, mis à mal par un obstacle sur la route. Comment se relever de la terre, des cendres éparpillées sur le sol et renaître tel un phénix ? La ténacité qui nous habite doit remonter à la surface et nous envelopper de sa cape revigorante pour que l’on continue à avancer. Devrions-nous plutôt nous laisser couler, jouer avec les musiciens jusqu’à ce que la vague mortelle nous emporte ou bien nous saisir de toute aide que l’on peut trouver pour se hisser vers la vie qui nous attend là-bas, de l’autre côté du rivage ? Nous savons nous montrer forts et faire face à la tempête, mais il peut nous arriver de sombrer dans des eaux troubles et inconnues qui semblent vouloir nous engloutir et nous entraîner jusqu’aux abysses les plus profonds.
Dans ce monde souvent hostile et redoutable, la souffrance et le désespoir peuvent vite gagner nos cœurs. À chaque tournant nous attendent des épreuves parfois plus difficiles à surmonter les unes que les autres. Nous n’avons d’autre choix que d’avancer à l’aveuglette, tâtonnant pour chercher les sentiers les plus sûrs. Nous risquons de tomber, de faire une mauvaise chute et il est dur de se relever après de graves traumatismes. Cependant, nous arrivons à prouver que nous en sommes capables en puisant les ressources nécessaires au plus profond de nous.
Pourtant, toute notre vie, des questions nous assailliront de toutes parts sur la brutalité et la sauvagerie dont font preuve les êtres humains. Pourquoi une telle vague de souffrance déferle-t-elle sur des innocents ? Quelle folle espérance reste-t-il lorsque l’on est détruit par ceux que l’on croyait être nos égaux ? Abandonner peut sembler le choix le plus évident face à tant de haine et de malheur, mais nous n’avons pas dit notre dernier mot. Nous découvrons à peine qui nous sommes et avons encore beaucoup à apprendre sur nos habilités cachées dans les tréfonds de notre être.
Les femmes qui peuplent cette Terre sont la preuve même du courage et de la force impressionnante que les humains peuvent démontrer. Elles ont appris durant des millénaires à survivre dans un monde où l’on ne voulait pas d’elles, où elles étaient jugées comme trop faibles et inférieures aux hommes. Elles ont su se démarquer par leur volonté de fer pour faire plier le patriarcat, malgré les violences subies quotidiennement. Aujourd’hui encore, elles poursuivent le combat avec véhémence et, bien que certaines en meurent, elles se relayent toujours le flambeau dans l’espoir de voir naître un jour un monde plus juste.
Parmi ces femmes, toutes n’ont pas eu la chance de s’en sortir. La cruauté indomptable du monde où les hommes veulent dominer les a brisées jusqu’à ce qu’elles ne soient plus que poussières balayées par le vent. Certains hommes ont voulu les réduire à néant, mais ils ont échoué, car leurs esprits vivaces demeurent. En effet, elles sont toujours là, en chacune de nous, nos cœurs battent à l’unisson et elles font vibrer nos âmes. Nous n’oublierons jamais ces femmes dont le dessein était de porter haut et fort la voix de toutes, quitte à en mourir pour sauver les jeunes filles à naître et leur offrir la liberté d’être une femme.
Qu’est-ce qu’une femme dans la société ? Elle est un être humain que l’on veut posséder, faire taire, exclure. Dans le monde entier, les femmes sont vues comme fragiles, tout juste bonnes à donner des enfants. Cependant, cette vision patriarcale s’est toujours vue rejetée et les femmes mènent une lutte constante pour revendiquer leurs droits. Elles font preuve d’une grande bravoure et n’hésitent pas à mener des actions puissantes et symboliques pour clamer leur droit à une vie égale à celle des hommes. Elles ont survécu à bien des revers, mais ont toujours su se relever et avancer, ensemble.
Les femmes colorent le monde de mille et une couleurs. Elles sont inspirantes, inspirées par la beauté qu’elles savent insuffler en chaque chose. Elles peuvent accomplir de grands rêves même s’ils paraissent fous ou inaccessibles. Elles sont dotées de multiples qualités qui les mettent dans la lumière. Elles savent créer des merveilles qui embellissent le monde. Sans elles, la palette des couleurs de la vie serait beaucoup moins nuancée. Elles sont essentielles à la société.
Claire. Hannah. Amélie. Ornella. Sorenza. Ces cinq histoires fictives de femmes dont les initiales forment le mot chaos, qu’elles ont dû affronter, ont survécu à de terribles traumatismes. À un moment de leurs vies, elles ont connu des agressions et violences sexistes, mais ont su faire face à l’adversité. Elles sont des femmes vaillantes qui se sont révélées à elles-mêmes et au monde. Elles sont des survivantes.
Tous ces siècles, les femmes ont servi de miroirs, dotés du pouvoir magique et délicieux de refléter la figure de l’homme en doublant ses dimensions naturelles.
Virginia Woolf
C
Dans les ténèbres abyssales, je plonge et me noie. Tout est différent, plus sombre, plus cruel. J’existe à peine dans l’obscurité de la chambre où je suis prostrée. Jamais plus je ne me relèverai, la douleur me paralyse. Le monde s’écroule autour de moi, un puits sans fond s’est ouvert sous mes pieds. La lumière de la Lune filtre timidement à travers les rideaux tirés, tentant en vain d’éclairer ma pauvre âme souillée. Clair de Lune. Claire, mon prénom est aux antipodes de ce que je ressens là, en cet instant.
Est-ce un mauvais rêve passager ou bien le cauchemar est-il bien réel ? Je n’ai plus aucune notion du temps, il peut bien s’être écoulé des heures depuis que je me suis jetée sur mon lit. Les larmes refoulées coulent à l’intérieur de mon corps. Mais cette chose immonde qui ne m’inspire plus que du dégoût m’appartient-elle encore ? J’ai perdu le contrôle, j’ai tout perdu. Mon esprit torturé est déchiré par les râles des mourants qui m’invitent dans un dernier souffle à les rejoindre.
Personne ne pourra jamais effacer ce qui s’est passé, personne ne pourra me sauver de ces souvenirs gorgés de désespoir qui me hanteront pour le reste de mes tristes jours. Pourquoi ne pas mettre un terme à cette souffrance ? Claire, dans un ultime éclair de clarté, tire sa révérence de ce monde brutal qui écrase tout sur son passage. Comment survivre après un tel déchaînement de perversité, d’inhumanité ? Devrais-je me laisser emporter par la vague et dériver au loin en espérant qu’une main me soit tendue ou vais-je disparaître sous les flots glacés à tout jamais ?
Le terrible poison a pénétré en moi, il s’est engouffré partout. Mes lèvres tremblotantes ne peuvent qu’avaler la maudite vérité et se craquellent un peu plus à chaque douloureuse inspiration. J’ai goûté à la douleur la plus vive de ma misérable existence et plus rien ne ravivera le sourire qui autrefois fendait ma bouche. Celle-ci ne prononcera plus une parole, car aucun mot ne saurait décrire ce que j’ai subi. En tant qu’écrivaine, manquer de phrases pour m’exprimer est ce qu’on appellerait l’ironie du sort.
Je suis seule dans la pénombre prégnante et pourtant tu es là, tu le resteras à tout jamais. Je ne te considère ni comme un ami ni comme un ennemi, seulement un voleur qui attendait son heure de l’autre côté de la porte. C’est ma faute, j’aurais dû voir au-delà des apparences, mais j’ai perdu pied dans toute cette mascarade. Ai-je provoqué ce destin funeste ? Peut-être bien… J’ai laissé le profiteur aux si belles manières entrer dans mon monde et il s’est emparé de la bulle qui m’entourait et me protégeait. Qui es-tu donc pour t’être octroyé le droit de réduire ma vie en fumée et continuer à me tourmenter dans mes pensées couvertes de cendres ?
Mon cerveau tourne au ralenti et je n’arrive toujours pas à bouger. Soudain, un son transperce le silence. Le téléphone vibre un moment puis s’arrête et le bruit assourdissant de mes réflexions reprend son cours dans mon esprit malade. Rendez-vous manqué. Il doit être près de minuit, car c’est à cette heure-là que je devais retrouver ma sœur. Mais cette nuit est sans doute ma dernière alors à quoi bon tenter de lui expliquer l’indicible ? Elle se fera une raison et trouvera le courage d’avancer sans moi. Les gens changent constamment, rien n’est permanent alors je ne m’en fais pas, elle s’en remettra. Pas moi.