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Une société de démesure et de paradoxes monstrueux se révèle à vous. Au fil de ces pages, vous trouverez le résumé du désespoir caché d’une génération devant le désastre civilisationnel de notre époque. Cet abécédaire, nourri de l’actualité moribonde et des mille faits qui provoquent la désertion de l’entendement, propose une lecture à la fois légère et profonde de notre monde. L’humour, l’intuition fulgurante, quelques petits raisonnements philosophiques et des anecdotes tirées du quotidien en irriguent les vingt-six chapitres.
À PROPOS DE L'AUTEUR
Bertrand Carroy, docteur en philosophie, est depuis plus de trente ans un observateur attentif de la société. Auteur de plusieurs ouvrages de poésie, l’écriture tient une place centrale dans son quotidien.
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Bertrand Carroy
Abécédaire apocalyptique
Essai
© Lys Bleu Éditions – Bertrand Carroy
ISBN : 979-10-422-4478-1
Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.
À la mémoire de Léon Bloy,
Louis-Ferdinand Céline et Frédéric Dard,
de leurs os, poussières, ou ce qu’il en reste,
en respectueux hommages
Une époque formidable !
Fatras atmosphériques, hallucinations collectives, y a plus de limites à la bêtise humaine ! Désormais licence d’autoroute du délire, tout un collectif narcissisé, une crue ravageuse, la haine sans entraves. Vive le digital !
Gouvernants girouettes à la boussole aimantée par la finance : ah ! le pouvoir et la richesse, bien au-delà des multitudes crasseuses édentées. Entre crapules à Rolex, le champagne coule à flots. Mammon a ses autels dans tous les palaces du monde.
Suceurs des ressources terrestres, accapareurs d’eau, ça vampirise à tout va : mines, océans, jusqu’à l’air que nous respirons.
Tandis que la masse hypnotisée – quatorze heures d’écran quotidiennement cumulées – comme des sardines en boîtes suivent les instructions subliminales, consommons, consommons, se tassent les vertèbres des travailleurs sous la pression d’innombrables règles et conseils.
Joug des lois, décrets, amendements grouillants de ses injonctions tels une fourmilière affolée : s’aplatit chaque jour davantage la société, explosée désormais en atomes individuels. Chacun pour sa gueule ! Je jouis virtuellement donc je suis ! Après moi, le déluge !
C’est qu’on est une société de paradoxes. Ça vous fabrique des bolides de plus de cinq cents chevaux, au luxe qui vous fait pâlir un palais de Maharadja, mais ça vous limite à cent trente sur l’autoroute, et ça crie famine dans les ressources pétrolifères… ça veut manger des fraises toute l’année, mais ça milite pour l’écologie planétaire… ça enlève les haies, les frontières, ça veut de la massification, de l’industrialisation, ça démesure pis que Babylone, et, en fin de compte, ça nous révèle à nous-mêmes !
Révélation, l’apocalypse, le chiffre de la Bête, l’effondrement c’est pour demain. Bienvenue à bord du Titanic planétaire ! Y a ceux qui se précipitent vers les canots, ceux qui courent dans tous les sens, appelant qui leur dieu, qui leur maman, qui l’armée, leur percepteur, la voisine, j’ai une tendresse particulière pour ceux qui, à l’orchestre, continuent à jouer…
J’vous confesse, y a des répétitions, faut m’excuser, c’est l’âge… j’suis sénior depuis trop longtemps, alors j’m’oublie, j’deviens grave sénile, radoteux, bavant, j’alzheimerise, je parkinsone des mots… ça se mélange parfois, j’oublie des lettres, j’les avale comme mes comprimés, et j’en invente – ça, c’est l’effet des comprimés !
Mais en même temps, vous verrez, tout se tient, y a une logique, bien forte, oppressante, ça colle comme de l’Araldite… (J’fais pas de placement de produits, j’vous jure, mais j’suis un enfant de la pub, à ma cervelle défendante, dépendante !) Y a un fil conducteur, surtout le lâchez pas, sinon vous resterez prisonnier, à perpet’ !
J’vois venir, avec de gros sabots, les savants engommés, l’air suffisant-complice, la pupille gauche abaissée de celui à qui on ne la fait pas : contempteurs des « c’était mieux avant » ! Mais bien sûr, et sans nostalgie encore ! Quoique… Ma grand-mère avec son certificat d’études avait plus de connaissances, des vraies et des bien utiles, que les bacheliers d’aujourd’hui : les rivières, les départements de France et leurs préfectures et sous-préfectures, les ères géologiques, le nom des champignons, les vénéneux et ceux qui rentrent dans une bonne omelette, les dates fondatrices de l’histoire, la chronologie (et non les thèmes qui vous perdent le sens commun, définitif), Villon, La Fontaine, Corneille, tous par cœur ! Vous pouvez m’accuser d’être un aigri, teigneux, bilieux, d’avoir le foie malade… Aujourd’hui c’est Annie Ernaux qui remplace Balzac, la messe est dite ! Mais constatez-vous-même, rien que l’usage de la langue. Ah, la belle évolution qui divise par deux, dix, cent le nombre de mots couramment utilisé. Évolution oui, mais dans quel sens, pathétique, dramatique, sanguinolent, c’est César assassiné par Brutus et consorts !
Qu’est-ce qui a bien pu se produire ? Qu’est-ce qui a m… dans notre société ? D’aucuns accuseront mai 68, d’autres diront que c’est la faute de Vatican II et des calotins, je ne suis pas loin de mettre tout sur le dos des Américains… Vous verrez plus loin… Ce qui est certain c’est que l’après-guerre, bien que difficile, a suscité dans notre pays des personnes flamboyantes, du génie, oui, j’ose, dans tous les secteurs d’activités : les arts, les lettres, les sciences… Le Général (de Gaulle), même s’il était loin d’être parfait, en avait. Son successeur immédiat restait un homme de culture qui portait haut la civilisation. Depuis… des technocrates dévots au dollar et aux marchands, puis à la finance. « Le poisson pourrit par la tête », dit un proverbe chinois : chez nous, depuis cinquante ans on élève les vers ! C’est la grande décomposition, le festival de la pourriture, on s’est malheureusement mithridatisé, l’habitude fangeuse, la proximité avec la charogne… ça pue pourtant, innommable, quand on revient du désert…
Comparaison n’est pas raison, pour sûr ! Mais le futur de ces années-là était gros de promesses : au progrès matériel s’associait l’éducation intellectuelle et morale, soutenue par des valeurs universelles. Les films d’Hollywood nous ont proposé du rêve : Clark Gable, Cary Grant, Gregory Peck, Burt Lancaster, John Wayne, Rita Hayworth, Elisabeth Taylor, Audrey Hepburn, Lauren Bacall, Ingrid Bergman, Raquel Welsh, Hedy Lamarr, Grace Kelly, Greta Garbo… ah ! Je m’emballe, j’ai des palpitations, le cœur fragile. Quel style ! Quelle classe ! Quel jeu ! Notre futur : des androïdes au mieux en silicone, carbone et plastique, ou bien retour à la guerre du feu. On nous prédit l’Apocalypse écologique, Mad Max ou un aller simple vers d’autres planètes, c’est l’horizon réjouissant, y a pas à dire !
J’vous confesse, j’suis un nostalgique des peuples nomades, quand on était tous à courir le gibier et à ramasser ce que la forêt et les plantes sauvages nous offraient… Pêche, chasse, tradition, voilà… c’était bien avant le glyphosate, Wall Street, la télé, la SNCF, le porno, les « Sport Utility Vehicule » à cinq cents chevaux – ça fait une sacrée harde ! – et même l’agriculture, la pollution et la surpopulation des villes. Rendez-vous compte : sur toute la surface du globe, des petites tribus, des clans d’une vingtaine d’individus, qui occupaient, tout tranquille, l’espace d’un département français ! On était au large, y a pas à dire ! Le travail, c’est quoi ? Fallait bien sûr avoir de la condition physique, n’est pas nomade qui veut, la sélection naturelle fonctionnait à fond, mais bon, on peut voir, dans le rétroviseur de l’histoire qu’y avait pas mal d’avantages…
Qu’on vous assène encore que l’immigration a toujours existé, qu’on est le fruit d’un grand brassage, dans la cuve de la planète, houblonneur qu’a abusé oui, plutôt ! La bière, elle a bon dos ! Les migrations de population, on les connaît dans l’histoire : qu’y avait Attila, et ses huns terribles, que même là où ils chevauchaient, l’herbe elle repoussait plus (c’était avant le glyphosate, une version au moins respectueuse de la nature) ! Puis tous les alamans, goths, ostrogoths, wisigoths, vandales qui vous fuyaient l’humidité obscure et froide de leurs forêts de sapins pour s’abattre comme des sauterelles (encore que leur nombre n’était pas si élevé) sur les doux pays méditerranéens et leurs nombreuses populations pacifiées… que la civilisation gréco-romaine en a pris un coup, amochée, déboulonnée, dégonflée, tombée de ses arcs de triomphe, à terre, définitif, que c’en est devenu les rois fainéants qui s’entredéchiraient avec des noms pas possibles, des Brunehaut, des Frédégonde, que ça se faisait tirer par les cheveux d’un char au galop, ça se trucidait facile entre chefs de clan ! Pouvez pas me contredire, j’ai mon certificat d’études ! J’suis tamponné par l’Éducation nationale ! Des études supérieures, même ! Certifiées ! Bon, pas avant mai 68, mais quand même !
Il n’empêche que dans les clans même barbares, y avait une certaine homogénéité… que la cohabitation se faisait sur la durée et l’intégration naturelle, passé le premier heurt – y avait de l’espace, on manquait de bras pour défricher, ça embauchait sévère, fallait mettre du cœur à l’ouvrage ! Qu’aujourd’hui, allez chercher un brin de cohérence sous le chapiteau de la République sacro-sainte citoyenne, nous voilà ! Qu’à force d’être étiré, ça se déchire de partout… le tissu social, c’est pas le pantalon de gros velours côtelé, à la papa, qui résistait pendant vingt ans, qu’on rapiéçait et renforçait alors avec du cuir… non, aujourd’hui c’est de la chemise achetée chez Zara qui vous craque sous l’aisselle à la moindre contrariété, c’est coloré, ça épate l’œil, mais ça tient pas ! Qu’ils nous pathétisent avec l’immigration et toute la misère du monde, la France, refuge de la liberté, de la démocratie, de la Sécurité sociale, des trente-cinq heures ! Venez tous, les réprouvés de la terre, les économiques, les politiques, les culturels, les sous-culturels ; du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie, du Vietnam, de Chine, de Cochinchine, d’Indochine, d’Afghanistan, du Balouchistan, d’Irak, d’Iran, du Bangladesh, des Comores, du Niger, du Tchad ; Burkinabés, Peuls, Toucouleurs, Bambaras, Wolofs… France, terre d’accueil ! De la baguette et du saucisson pour tous ! La tour Eiffel ! Notre-Dame ! Venez, venez, y en a partout, sur les trottoirs, sous les ponts, c’est la crise du logement ! L’inflation ! Partout, ça inflationne, la monnaie, l’immigration, le prix du mètre carré, les denrées alimentaires… tout augmente, mais les paniers se vident ! Qu’on réfléchit aussi bien qu’un poisson rouge dans son bocal : on a déjà du mal à trouver un logement décent pour ceux installés sur le territoire, j’parle même pas du travail ! Et plus ça va, pire c’est, on accélère le mouvement, comme une spirale infernale, un tourbillon qu’on est déjà au fond du trou, l’abîme océanique, sans le savoir… Faites vos jeux… les dés sont jetés ! Rien ne va plus !
Ah la belle France que voilà, mon doux et beau pays, sa capitale scintillante ! Paname et les centres-villes historiques devenus vides, propres, aseptisés ; reléguons la racaille loin des touristes… Qu’ils dépensent sereinement leur argent dans les boutiques Louis Vuitton, Chanel, Gucci… En banlieue, les survêtements abrutis informes, les couloirs suintant, l’urine sur les poubelles, les grèves des transports… Oh les jolis dépotoirs sociaux, pas Neuilly bien évidemment, non, plus au nord, dans les marais déshumanisés, regroupons tous ceux qui viennent du Sud, Maghrébins, Africains, les Roumains déshérités de l’Europe. La Babel des pauvres, on voudrait recommencer l’histoire de la tour, unifier tous les mondes, les langues, alors on vous fait miroiter les avantages, la mixité, l’hybridation totale, que même à force y aura peut-être bien une nouvelle race… on sait jamais… donc, on vous rassemble par grands paquets, on vous déloge, on vous déracine, et vous vous retrouvez tout nu, dans un pays où l’hiver faut mettre des peaux de bêtes pour pas geler, alors que là d’où vous z’êtes, c’est l’été toute l’année… Mais comme la nature est tenace, voilà que vous vous regroupez par continents, pays, régions, tribus : y a ceux qui baguettent des sushis, ceux d’à côté c’est les nems, faut pas confondre ! ceux qui pratiquent les burgers, en guerre contre ceux qui mangent des pizzas… C’est partout New York des années trente ! Immigration, émigration, pas en tous sens, remarquez… Que ça alimente les gangs, la Mafia, les terroristes… Alors vous avez les quartiers, les blocs d’immeubles, les jaunes, les noirs, les rouges… Y vous taylorisent la ville, y sont trop le nez dans le guidon, z’arrivent pas à voir, à concrétiser le plan d’ensemble…
Construisent des petites tours, pas la Babel qui voudraient, le plan leur échappe, pourront pas recommencer l’histoire de la grande Tour, la vraie Babel unifiant toute l’humanité, la stratégie sournoise pour avoir le vieux Barbu et le détrôner… confusion de la quantité avec la qualité ! Moi j’dis c’est la faute aux architectes : quand vous voyez leurs productions, faut bien vous accrocher les mirettes, qu’elles vous exorbitent pas, prenant leur indépendance loin de tout ce ciment, béton abominable ! Crime contre l’humanité, rien que ça ! Collabos qui veulent nous entasser, tasser, emboîter, qui vous construisent de vraies termitières, qui tiennent pas sur la durée, en plus… Avec des vices de forme, des vices cachés, des vis rouillées, de la plomberie qui fuit, des placards impraticables, des parois minces comme du papier crépon, des murs qui se fissurent, vous pouvez consulter… la liste interminable ! À croire qu’un architecte, il a jamais habité dans un vrai logement, que dans sa tête c’est un labyrinthe pas vivable, un chaos dépressif ou un vide d’avant le Big Bang (ça dépend des hypothèses), qu’y faudrait les trépaner pour les empêcher de faire des dégâts si considérables… vrai, j’en connais, j’ferais une pétition pour réclamer leur corps pour la science, ouvrir le crâne pour analyse ! On comprendrait mieux les choses, ce serait drôlement édifiant !
Et puis z’avez les politicards avaricieux, qui vous brandissent la mixité sociale comme slogan ultime depuis des dizaines d’années, « Touche pas à mon pote ! » – La belle et vaste blague, étendue, longue comme la mer du Nord, si elle glace les ours polaires auront la belle vie ! On voit qu’eux aussi, comme les architectes, y vivent pas là où ils « travaillent » ! Devraient faire des stages en immersion avant de proférer de telles âneries ! Non, mais, z’avez-vous vu la queue le long du boulevard Ney, au nord du dix-huitième arrondissement de Paris, tout juste devant le bureau des réfugiés ? Deux kilomètres de jeunes hommes – pas une seule femme européenne – à qui on a vendu du rêve kitch télé, la sécu gratos et le chômage ! Les pourtours débordant d’abris de fortune, certains dorment dans des locaux techniques défoncés, d’autres le long des Maréchaux, des milliers, vivent sous des cartons, de la tôle ondulée, du carton – faut voir quand il pleut ! – d’autres encore sous les ponts des autoroutes et aux jonctions des voies rapides… Les plus chanceux, les réguliers, en barres d’immeubles, HLM défoncés, zone de non-droits, drogue à tous les étages ! Le rêve du pavillon de banlieue du Français moyen des années 60 chamboulé, transformé en cauchemars pour immigrés…
Dis-moi où tu habites, je dirais qui tu es : dans ces zones en décor de film d’horreur, on y trouve les zombies, des tas d’espèces, des purulents vicieux, des syphilitiques, des abominables, sûr, faut pas les croiser, ils sont capables de vous sucer le sang à défaut de vous casser la voiture et de vous emporter votre téléphone portable ! Horde barbare qui guette, bientôt lâchée à la moindre défaillance du système. Un relâchement et hop, la marée, un tsunami emporte tout, la violence guette comme la braise sous un carton de dynamite oublié…
Et ce n’est pas qu’à Paris, comme je vous l’disais… ça a commencé chez les Amerloques, et maintenant dans les grandes villes de Gaule, même les petites. Z’entendez les règlements de compte entre Albanais et Georgiens, Maliens contre Nigérians, Colombiens contre Mexicains… ça vous tranche les différends à la Kalach, à l’AK47, à la hache, au couteau de boucher, au tournevis ! Les guerres, le monde en miniature… tout se reproduit, se répand, la gangrène atteint même la cité des anges, Los Angeles, c’est pas peu dire ! Comme la plupart des grandes villes américaines, sans compter les déjà trop connus bidonvilles du tiers-monde, les favelas, les camps de réfugiés palestiniens… Mère Teresa, vous pourriez la multiplier par cent, mille, cent mille, qu’elle serait de toute façon débordée… La banlieue progresse dans chaque pays, et dans tous les pays, la misère progresse. C’est la banlieue universelle, Mad Max dans quelques années si l’on suit la pente, ça s’accélère, mes amis, comme dans les engins à vomir de la Foire du Trône !
Mégalopoles formidables, y en a aussi pour les très riches qui veulent pas se mélanger avec la bouillabaisse avariée, qui z’ont l’épiderme délicat et la relation sélective : y a même des projets, pensés par des architectes – c’est dire ! – qui vous construisent des villes dans le désert, sans voiture, tout en longueur, cent mètres de large et deux cents kilomètres de long, avec une promesse : z’aurez tout à cinq minutes à pied : le MacDo, la piscine, le cinéma, le Centre commercial (y disent Mall pour faire plus à la page), tous en télétravail sinon. Rêve du futur ! La banlieue aseptisée notre avenir à tous… les vieilles villes, avec leurs ruines, les monuments en pierre, le passage des ans, des siècles, l’histoire inscrite à chaque pas, tout ça, c’est pour les touristes… surtout pas habiter des lieux de mémoire, des fois qu’on se souviendrait des choses… On veut du neuf, de l’écologique, de l’habitation à énergie positive ! La vieille maison de pays : à fuir comme le choléra, c’est pas citoyen ! Que diable, on est au second millénaire (y en aura pas un troisième, j’vous jure !) Faut du rêve !
Agenouillés, dévots, frappez-vous bien la coulpe ! Hypocrites ! Tout boueux de compromission avec le monde, prêtres en Burlington et Ray-Ban, bonnes sœurs acariâtres (rien qu’à voir certaines, on court se convertir à l’Islam, promis !), le curé avec son smartphone dernière génération, non c’est un Apple – don d’une paroissienne énamourée nul doute ! Et les dîners parisiens ou entre notables provinciaux : « où va-t-on placer son Éminence ? » Entre le préfet et l’actrice à la mode, argenterie, toute voile sortie, il siéra de parler de l’actualité, des gueux en grève, en manifestation, tout chaotique et purulences, les banlieues barbares… « Les Huns vous-dis-je, non des Alamans… » rires étouffés sous les petits-fours La Durée… « Il faudrait isoler la toiture du presbytère, l’humidité gagne les murs » – « mais bien sûr mon révérend père, ne vous inquiétez pas, nous organiserons une collecte »… Les crève-la-faim et SDF resteront dehors, l’humidité, ils connaissent et puis de toute façon, il y a les Restos du Cœur… « L’Abbé Pierre était un extrémiste, pensez-vous qu’il fût communiste ? » Et les affaires de mœurs, on y revient ? Honte, scandale absolu, infiltrés démons, hyènes suintantes. Pas possible, sinon, abomination, combien d’innocents y sont passés, hein, pervers abjects, dans tous les pays, sur tous les continents, catholique ça veut bien dire universel, non ?