La fièvre du dimanche soir - Geoffroy Huynen - E-Book

La fièvre du dimanche soir E-Book

Geoffroy Huynen

0,0

Beschreibung

Arthur, un jeune homme courageux et audacieux, intègre les rangs d’une multinationale brassicole en tant que commercial. Tout semble idéal au début, mais très vite, il découvre les coulisses sombres de cette entreprise : une soif insatiable de bénéfices qui met en péril la qualité des produits et la santé publique. Témoin des mécanismes peu scrupuleux qui maintiennent les employés dans un silence servile, il s’engage à lutter pour un monde meilleur, où l’intégrité et le bien-être prévalent sur l’appât du gain. Saura-t-il faire preuve de détermination pour changer les choses et inspirer un avenir plus éthique ?


À PROPOS DE L'AUTEUR 


Depuis plus de vingt ans, Geoffroy Huynen s’investit dans le secteur commercial. Ses expériences professionnelles et ses lectures foisonnantes l’ont amené à écrire ce roman empreint de satire et d’humour, parfois sombre, mais toujours animé d’émotions vives.

Sie lesen das E-Book in den Legimi-Apps auf:

Android
iOS
von Legimi
zertifizierten E-Readern
Kindle™-E-Readern
(für ausgewählte Pakete)

Seitenzahl: 295

Das E-Book (TTS) können Sie hören im Abo „Legimi Premium” in Legimi-Apps auf:

Android
iOS
Bewertungen
0,0
0
0
0
0
0
Mehr Informationen
Mehr Informationen
Legimi prüft nicht, ob Rezensionen von Nutzern stammen, die den betreffenden Titel tatsächlich gekauft oder gelesen/gehört haben. Wir entfernen aber gefälschte Rezensionen.



Geoffroy Huynen

La fièvre du dimanche soir

Roman

© Lys Bleu Éditions – Geoffroy Huynen

ISBN : 979-10-422-0136-4

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Je dédie ce roman à toutes les personnes rêvant

d’un monde meilleur.

Rêver, c’est déjà ça…

Ce roman est une œuvre de fiction issue de l’imagination de son auteur. Toute ressemblance avec des personnes et des situations existantes ou ayant existé serait purement fortuite et involontaire.

Changer les âmes,

Changer les cœurs,

Avec des bouquets de fleurs.

La guerre au vent,

L’amour devant,

Grâce à des fleurs des champs…

Laurent Voulzy

Partie I

C’est pas l’homme qui prend la bière, c’est la bière qui prend l’homme.

Dicton populaire

Nouveau départ

Janvier 2023

C’était un matin d’hiver, froid et humide, Arthur traversait la Place Rihour pour se rendre à son rendez-vous chez l’opticien Miro, situé au numéro quarante-trois.

Les deux imposantes mallettes à roulettes qu’il devait traîner à longueur de journée lui paraissaient plus lourdes que d’habitude.

La pluie qui tombait depuis deux jours avait rendu particulièrement glissants les pavés du quartier piéton du vieux Lille.

Après quatre années passées à vendre des lunettes, il était temps pour Arthur de passer à autre chose, un métier plus amusant et diversifié où il pourrait rencontrer des gens moins austères que les patrons de magasin d’optique. Et apprendre de nouvelles choses.

Il aimait trop la vie pour continuer à se morfondre dans ce travail rébarbatif.

Vers dix-sept heures, ses journées terminées, Arthur, jeune trentenaire, mène une vie ordinaire, mais agréable.

Célibataire, il passe la plupart de son temps libre accompagné de son groupe de potes, à boire des coups dans les bars du centre-ville, essentiellement pour draguer les gonzesses au coin du zinc.

Bien qu’Arthur déteste qu’on le définisse comme un séducteur, il rencontre un succès certain avec la gent féminine.

Parfois, il lui arrive de fréquenter la salle de sports, souvent il lui préfère les salles de concert.

Grand, svelte, cheveux châtains, yeux verts, faussement mal rasé, il dégage quelque chose d’élégant dans son attitude, plutôt bien foutu sans avoir un physique parfait, ses cheveux mi-longs et son foulard autour du cou ajoutent une touche décalée à son charme naturel.

En quelques minutes, il peut réciter un poème de Jim Morisson :

Je peux me rendre invisible ou minuscule. Je peux devenir gigantesque et atteindre les choses les plus lointaines. Je peux changer le cours de la nature.

Pour ensuite fredonner du Gainsbourg :

Ils regardent la côte, ils s’aiment et la traversée durera toute une année, ils vaincront les maléfices. Jusqu’en soixante-dix.

En dernier recours, il lui arrive de sortir sa gratte et de jouer les trois accords en la, ré, mi qu’il a appris par cœur.

Infaillible pour faire craquer les nanas bohèmes du quartier branché Jean-Baptiste dans lequel il loue un appartement trois-pièces à la décoration moderne.

Arthur est sentimentalement attaché à cette région des Hauts-de-France où il vit depuis sa plus tendre enfance.

Ce qu’il souhaitait, c’était sortir de la routine quotidienne.

Un soir, tout en regardant le derby du nord à la télévision, il scrutait les offres d’emploi sur internet, blotti bien au chaud dans son canapé Pochtronèsofà en cuir noir.

À la mi-temps, Lille menait au score d’un but, Arthur décapsula une Fukinger Pils bien fraîche et poursuivit ses recherches, son attention fut attirée par une annonce en particulier.

À la Brasserie TricaBev, nous proposons à nos collaborateurs de s’enivrer de bonheur via une expérience professionnelle hors du commun.

Nous brassons avec passion la Fukinger Pils, la bière la plus vendue et la plus appréciée au monde, mais également de délicieuses bières de tradition comme la Triple Pakotille, la Beauregard, la Coranus, la Klaque, la Cheffe et la Foujardin.

En tant qu’agent commercial TricaBev, vous rejoindrez une équipe dynamique qui partagera votre désir d’être numéro un. Toute autre place est considérée comme un échec.

Votre mission, si vous est sélectionné :

– Optimiser le volume en HL de bières des clients de la divisionnorden exécutant les instructions de votre District Manager ;
– Assurer le suivi des contrats de location et les investissements ;
– Accompagner les clients de votre secteur dans le respect des dix visites journalières établies par le control-planning ;
– Être ambassadeur de l’image de nos exceptionnels produits que les consommateurs adorent.

Vous êtes orienté vers les résultats, vous disposez d’un esprit flexible et vous avez un diplôme en vente ou marketing (être célibataire sans enfant constitue un avantage) ?

Nous sommes une méritocratie dans laquelle seuls les meilleurs éléments auront leur place.

Chez TricaBev, nous accordons de l’importance à la diversité chez nos collaborateurs et nous encourageons vivement tous les candidats, quels que soient leur sexe, leur couleur de peau, leur identité sexuelle, leur handicap (excepté les personnes atteintes de nanisme), minorité ethnique, nationalité à nous rejoindre.

Dépêchez-vous avant qu’il ne soit trop tard ! Vous en aviez rêvé, TricaBev l’a fait.

Postulez dès maintenant en cliquant sur ce lien : https://fr.linkDbiL.com/jobs/TricaBev.

Arthur fut étonné, car il n’était mentionné aucune connaissance du milieu brassicole ni même un certain intérêt. Probablement y aurait-il des formations internes poussées à ce sujet ?

Quant au salaire, il supposa que ce serait abordé par la suite si sa candidature était reçue.

Ce serait plus attrayant que son métier actuel dont il avait fait le tour.

Il cliqua sur le lien et suivit les indications pour envoyer sa candidature en ligne.

Son attention fut détournée à plusieurs reprises par les goals de Yilmaz, Bamba, Ikone et Yazici qui ponctuèrent le large succès quatre buts à zéro des dogues face aux Lensois.

Satisfait de la tournure de la soirée, Arthur gagna son lit et s’endormit presque instantanément.

Le surlendemain, sur le coup de dix-neuf heures, Arthur se défoulait sur un vélo elliptique du Basic Park situé à quelques encablures de chez lui, son casque audio diffusait « Sweet Child O’Mine », le riff de guitare et la puissance de la chanson lui donnaient l’énergie nécessaire pour enchaîner les coups de pédale.

Au beau milieu du morceau, alors qu’Axl Rose semblait lui demander Where do we go now ?Where do we go ?Ooh, oh, where do we go now ? il fut interrompu par la sonnerie de son portable.

Arthur décrocha sans regarder qui l’appelait. Il entendit une voix féminine à l’accent étranger lui proposer un entretien d’embauche en visioconférence avec Marlène Markovic, district manager de la division nord de TricaBev.

Il fit l’effort de retenir la date et l’heure de l’entrevue et poursuivit sa séance, galvanisé par cette nouvelle.

Where do we go now ?

Ay, ay, ay, ay, ay, ay, ay, ay !

Where do we go now? Ha ha ha ha !

Son interview aurait lieu vendredi à huit heures, ce qui lui laissait deux jours pour se documenter.

Il passa chercher un sandwich shawarma de bœuf aux Délices de Tripoli et rentra chez lui.

Une fois son repas ingurgité, il ouvrit son ordinateur et glana le maximum d’informations sur la société TricaBev. Il parcourut en premier lieu les chiffres de l’entreprise, c’était du lourd.

Note de l’auteur :

Chiffres clés de la Brasserie TricaBev durant l’année 2022.

– 481,7 millions d’hectolitres de volume de bière vendus.
– 54 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
– 16,2 milliards d’euros d’EBITDA1.
– 5,4 milliards d’euros de bénéfice net.
– 2.146 cafés ou bar leur appartenant avec un taux d’occupation de 88 %.
– 152.000 collaborateurs de 108 nationalités différentes à travers le monde, dont 28 % de femmes.
– 234 milliards d’euros : valeur boursière de TricaBev.
– 20.700 licenciements pour faute grave.
– 349 suicides recensés parmi les membres du personnel.
– 26.341 arrêts maladie pour cause de burn-out.

Le brasseur numéro un mondial qui s’intéressait à un ch’tit gars du nord comme lui, il ne pouvait pas laisser passer sa chance.

Lors de ses recherches, Arthur apprit que les origines de l’entreprise remontaient à 1912 lorsque la Brasserie Patvache fut fondée en Belgique, rachetée quelques années plus tard par l’association brassicole Tricartois située dans l’Hexagone.

Dans les années soixante-dix, elle absorba la numéro trois du pays, MegaBrew et devint la Brasserie nationale TricaBrew.

S’ensuivirent plusieurs acquisitions, joint-ventures et autres cessions entre différents groupes brassicoles à travers le monde pour aboutir en 2002 à TricaBev, la structure actuelle, issue de la fusion entre les Français de TricaBrew et les Américains de Carabev.

Une saga digne des Traîtres de l’orge !

Le siège social était resté à Paris, l’actionnariat étant majoritairement français.

Son président-directeur général s’appelait Pablo Ladrao, quarante-quatre ans, d’origine portugaise, il dirigeait le groupe depuis neuf ans.

Arthur se dit qu’il en savait suffisamment sur le sujet et termina sa soirée par une petite virée à l’Alchimiste, le pub du coin dans lequel il avait ses habitudes.

Afin de parfaire ses connaissances pratiques, il s’envoya quelques bières de la gamme TricaBev dans le gosier.

Il choisit de déguster dans l’ordre, une Coranus, une Klaque, une Triple Pakotille, une Foujardin et termina son exploration bibitive par une Beauregard fruits rouges.

L’alcool commençait à faire son effet, si bien qu’il accepta volontiers les avances d’une charmante antillaise à la poitrine généreuse et au galbe arrondi. Il serait incapable de dire son prénom.

Ivre de bonheur, il passa la nuit chez elle à l’honorer de sa semence aux relents houblonnés.

Ce job était fait pour lui.

De bon matin, Arthur se réveilla, posa son regard sur sa conquête affalée dans le lit et la trouva nettement moins affriolante que la veille. Il se rhabilla et quitta instantanément les lieux.

Il était étonné d’avoir une migraine, il n’avait pourtant pas l’impression d’avoir vraiment exagéré.

Il acheta une boîte d’aspirine, en avala deux d’un coup et rentra dans une librairie pour y acheter le nouveau Guide Pochette des bières.

Sans aucune motivation, il alla travailler, fit bonne figure face à ses clients du jour et parvint à leur fourguer une trentaine de montures de la nouvelle collection. Arthur était un commercial hors pair.

Arrivé à son appart, il commença la lecture du guide remplissant au passage plusieurs pages de notes, voulant mettre toutes les chances de son côté pour son entretien d’embauche.

Il se surprit à trouver l’ouvrage passionnant, on y dressait un panorama complet du paysage brassicole français, les fondamentaux en matière de dégustation étaient abordés. Un passage relatait l’histoire et la fabrication de la bière. Le livre présentait également les meilleures bières goûtées par les spécialistes en la matière.

Étrangement, aucune de la Brasserie TricaBev ne figurait au palmarès, mais Arthur n’en avait cure.

Il se sentait pousser des ailes et était prêt à épater Marlène Markovic.

Vendredi 13 janvier, 7 heures 57

Arthur avait choisi une chemise unie bleu clair, sobre et passe-partout. Il avait coiffé ses cheveux vers l’arrière et avait pris soin de tailler sa barbe. Il se trouva présentable.

Il testa le retour de la caméra de son ordinateur pour vérifier que le tableau A very married woman de Jack Vettriano accroché au mur n’apparaissait pas dans le champ de vision.

Il n’était pas convaincu qu’une femme en soutien-gorge se regardant dans un miroir serait du goût de son interlocutrice.

Son pouls était légèrement plus élevé qu’à son habitude.

Une fois installé devant son MacBoob, il disposa ses notes devant lui, suivit le lien reçu par mail et rejoignit la réunion virtuelle.

Marlène apparut une poignée de secondes plus tard.

— Salut Arthur, j’espère que tu vas bien. On se tutoie, ce sera plus sympa.

Je me présente, Marlène Markovic, district manager de la division nord à la Brasserie TricaBev depuis dix ans. Comme tu peux le constater, je fais passer mes entretiens par visioconférence, ça permet de gagner du temps. Et le temps est précieux chez nous.

On se fait souvent une image inexacte des gens par écran interposé, toutefois Arthur ne s’attendait pas à voir apparaître le visage d’une dame d’une soixantaine d’années. D’apparence mince, ses traits tirés lui donnaient un air fatigué malgré l’excès de maquillage. Elle avait les cheveux gris attachés et portait un pull ras de cou de couleur vermeil. Aucun bijou apparent. Il n’aurait pas pu la décrire davantage, il était trop concentré sur ce qu’il allait dire.

— Bonjour Marlène, merci de me recevoir, je veux dire, merci de m’écouter, dit Arthur sur un ton peu assuré.
— Détends-toi Arthur, j’ai parcouru ton C.V. et tu sembles avoir le profil idéal.

Maîtrise en commerce à l’EDEC, quatre ans d’expérience dans la vente, tu parles anglais.

Tu es encore relativement jeune et tu présentes bien, du moins à l’écran.

Le but aujourd’hui est de connaître ta personnalité, je vais te poser quelques questions, je te demande d’y répondre de façon rapide et instinctive.

Tu es prêt ? Allons-y. Arthur, si je te dis, l’eau ça monte, que réponds-tu ?

— Je vous réponds, enfin je te réponds, non l’eau ça coule.
— Oui habituellement, mais si moi ce matin, j’ai décidé que l’eau, ça montait, que ton employeur avait décidé que l’eau, ça montait et que tu devais être d’accord, le serais-tu ? insista Marlène.
— Oui, je serais d’accord, acquiesça Arthur sentant bien que ce serait la meilleure réponse à donner.
— Excellent Arthur. Vraiment excellent. Et maintenant, je vais te montrer un petit carton, comme si j’étais arbitre de football. Alors, de quelle couleur est-il ?
— Il est jaune.
— Non Arthur, il est rouge. Regarde bien le carton, je te dis qu’il est rouge. Es-tu d’accord avec cette affirmation ?
— Oui, en effet, il est rouge. Arthur pensa que c’était une nouvelle technique pour tester la réactivité des candidats et ne voulait en aucun cas la contrarier.
— Maintenant une question plus complexe à laquelle beaucoup de candidats échouent. Peux-tu me citer trois bières produites par la Brasserie TricaBev ?
— Je peux même énumérer la totalité de la gamme, s’enthousiasma Arthur. Ce qu’il fit sans la moindre difficulté.
— Formidable Arthur, j’ai rarement vu un candidat aussi à l’aise dans cet exercice.

Marlène lui demanda de citer « sa principale qualité et son principal défaut », ce à quoi Arthur répondit du tac au tac « l’adaptabilité et l’obstination ».

— Bravo ! Tu seras tenu au courant des résultats très rapidement. Si tu es sélectionné, tu auras une entrevue avec Peggy Vadia, notre DRH, concernant les conditions salariales et les modalités pratiques. As-tu encore des questions ?
— C’est déjà terminé ? J’avais appris plusieurs choses sur le groupe TricaBev et étudié la fabrication de la bière, j’aurais été ravi de t’en faire part.
— Je te félicite pour ta proactivité Arthur, mais ce ne sera pas nécessaire, ça ne fait pas partie du processus de recrutement.

Je te dis au revoir et peut-être à bientôt.

Arthur était décontenancé, quinze minutes, trois questions ridicules. Il devait y avoir un piège, mais lequel ? Il préféra ne plus y penser.

Lundi matin, il reçut un appel de Peggy Vadia, elle lui expliqua que Marlène avait été impressionnée par son attitude, ses compétences et sa faculté d’adaptation.

Elle enchaîna en lui annonçant qu’elle serait ravie qu’il rejoigne l’équipe de la division nord et lui proposa un salaire de dix pour cent supérieur à ses revenus actuels, ainsi que divers bonus qui lui seraient détaillés par la suite.

— Il n’y a plus de visioconférence prévue ou de test de vente à effectuer ?
— Ce ne sera pas nécessaire, nous n’avons aucun doute sur le fait que tu seras un renfort de choix pour notre entreprise. Plus de deux cents candidatures nous sont parvenues, la tienne sort du lot Arthur, tu as l’immense privilège d’être sélectionné, répondit Peggy.

Arthur était sur un nuage, dans un élan de lucidité, il demanda qu’elle lui fasse parvenir la proposition de contrat par mail, ce à quoi elle répondit :

— Ce ne sera pas possible pour des raisons évidentes de confidentialité. Tu signeras ton contrat le jour de ton arrivée parmi nous.
— Toutes mes félicitations, Arthur, tu as été choisi, bienvenue à la Brasserie TricaBev !

Malformation

Son préavis presté, Arthur s’était octroyé quelques jours de détente à la Côte d’Opale en compagnie de Maeva, une blonde aux ravissants seins en cloche, rencontrée la veille sur Finder.

Elle adorait le Chardonnay et les fellations, le combo parfait pour un séjour réussi.

La tête et les bourses vidées, c’est rempli d’allégresse qu’il se présenta à la première journée de formation à la Brasserie TricaBev.

De : [email protected]

A : [email protected]

Cc : [email protected]; [email protected];

Bonjour Arthur,

Je t’attends ce jeudi 4 mai à 8 heures dans nos bureaux de la division nord (adresse ci-dessous).

Tu auras la chance d’avoir deux jours de formation en interne.

Le premier sera en ma compagnie et le second se déroulera au siège de la division centrale à Paris (adresse ci-dessous, en dessous de l’adresse de la division nord).

Ce sera en compagnie d’Andy Mol (talent professional training manager)

Viens en tenue casual, on est cool chez TricaBev !

Bien à toi.

Marlène

PS : Je t’inviterai pour le lunch ;-)

Adresse du jour : Centre des affaires Euralille, avenue Willy Brandt, 102/5, 59777 Euralille.

Adresse pour vendredi : Zone industrielle de Paris-Est, Impasse Hépaire, 1, 7144 Emerainville.

Jeudi 4 mai

Arthur avait opté pour un pull en coton à col en V gris souris, un t-shirt noir, un jeans slim fit bleu foncé et une paire de New Talent.

Un foulard à motifs discrets complétait sa tenue. Malgré un ciel dégagé, une légère brise soufflait par intermittence.

Il marcha durant quinze minutes et se présenta à 7 heures 49 au 102 de la rue Willy Brandt.

Les bureaux se trouvaient dans l’imposante tour de verre à l’allure futuriste. Il sonna et reconnut la voix de Marlène.

— Hello Arthur, je t’ouvre, c’est au cinquième étage à gauche, tu dois emprunter l’escalier, tu n’as pas accès à l’ascenseur sans ton badge. Je suis impatiente de faire ta connaissance.

Rassuré par ce contact vocal chaleureux, Arthur gravit les marches quatre à quatre, impatient de rentrer dans le vif du sujet.

Marlène l’attendait devant la porte d’entrée.

De corpulence mince, elle mesurait environ un mètre soixante-dix. Cheveux attachés en chignon, elle portait un chemisier Le temps des Framboises de couleur cerise, une jupe droite, des collants foncés et des bottes noires. Aucun bijou ni autre artifice, excepté du maquillage. Elle paraissait un peu plus jeune en vrai. Arthur estimait qu’elle devait avoir cinquante-six ans (elle n’en avait en réalité que cinquante-trois). Elle fut probablement une jolie femme dans sa jeunesse. Actuellement, elle n’était ni belle ni laide.

Note de l’auteur :

Dans le passage qui va suivre, pour un meilleur confort de lecture, les termes internes à TricaBev seront traduits entre parenthèses. Dans ce genre de boîte, la mode est de mélanger l’anglais et le français pour créer des expressions usuelles.

Le plateau de travail était désert.

— Il n’y a personne dans les bureaux aujourd’hui ?
— Non, hormis les lundis matin pour notre weekly meeting (réunion hebdomadaire), tes collègues sont sur la route.
— Et il n’y a pas d’autres employés présents ? Des secrétaires, des comptables, je ne sais pas moi, les autres équipes de vente ?
— Des secrétaires ? s’esclaffa Marlène. On est plus dans les années quatre-vingt-dix Arthur. Il n’y a que notre équipe qui occupe ce bureau. La comptabilité et le customer service center (service clientèle) sont à Jessor au Bangladesh, pour une question d’optimisation. Tu peux les contacter uniquement par mail en anglais, pour une question d’uniformisation. Le service marketing ainsi que le juridique se trouvent à la division centrale, tu auras l’occasion de voir tout cela demain avec Andy.

Nos collègues du département retail (magasins) de la division nord sont affectés à d’autres bureaux, pour une question de confidentialité. Donc ici, il n’y a que nous, tranquillement installés dans ce petit coin de paradis.

Suis-moi, je vais te faire la visite, ce sera rapide.

On est installé ici depuis trois ans, nettement mieux que nos anciens bureaux datant de mathusalem. Ici, c’est l’open space (espace ouvert), chacun s’installe où il veut, c’est plus convivial.Tu peux y consulter tes mails et imprimer tes documents le lundi après notre réunion.

Il s’agissait d’un espace moderne et austère sans la moindre décoration, hormis un cadre qui affichait le portait d’un homme d’une quarantaine d’années en chemise blanche à col mao avec des cheveux noirs hirsutes, pommettes saillantes. Il semblait fixer gravement Arthur de son regard sombre. En dessous de son visage, il était écrit :

« Together pour un monde Better ! » (Ensemble pour un monde meilleur !)

— Je te présente Pablo Ladrao, notre PDG, il dirige le groupe depuis plusieurs années. Il est hautement apprécié des actionnaires. Un conseil d’amie, ne surtout pas le contrarier.

La visite se poursuivit par la relax room (salle de détente), équipée d’une machine à café, une table sur laquelle trônait une corbeille de mandarines, des chaises, un frigo contenant de l’eau minérale ainsi qu’un baby-foot semblant n’avoir jamais servi.

Ensuite, une salle de réunionclassique, des peintures murales aux effigies des bières TricaBev habillaient l’endroit :

– En face de la porte, un mur avec des photos des joueurs de l’équipe nationale de football fêtant un but. Au-dessus un logo représentant un aigle noir aux pattes rouges avec le slogan : « Fukinger Pils, soif de victoires ».
– Sur le mur de droite, un couple dégustant chacun une Klaque blonde et ambrée, la dame demandait : « Une autre Klaque dans la gueule ? »
– Le mur de gauche attira particulièrement l’attention d’Arthur. Il s’agissait d’une pub Coranus. On y voyait deux top-biches, de dos en bikini blanc sur lequel était écrit à hauteur des fesses « Casa Coranus ». Il y avait un paysage de sable fin et une mer turquoise en arrière-plan. Elles tenaient toutes les deux une bouteille de Coranus avec un quartier de citron enfoncé dans le goulot. Arthur eut immédiatement envie de boire cette bière et de faire l’amour aux deux jeunes femmes. Si possible le tout en même temps.

Marlène ponctua la visite en lui montrant les toilettes puis un petit couloir sans fenêtre au bout duquel se trouvait une porte fermée.

— C’est mon bureau, tu y viendras une fois par mois lors de ton évaluation si nécessaire.

Bien, maintenant allons finaliser la paperasse administrative.

Tu veux un café ?

Note de l’auteur :

Chiffres clés concernant Pablo Ladrao durant l’année 2002.

– 9,37 millions d’euros de salaire net (bonus compris).
– 16 nationalités différentes recensées parmi les 134 prostitué(e)s auxquelles il a fait appel, dont 12 % d’hommes.
– 312 grammes de diverses drogues et stimulants sexuels consommés.

Arthur trouva sa manager avenante et dynamique, ça le confortait dans sa décision de rejoindre la boîte.

Une fois les deux cafés coulés, ils s’installèrent dans la relax room, Marlène posa des documents sur la table :

— Voici ton contrat de travail ainsi la charte de bonne conduite. Tu dois parapher chacune de trente-deux pages et signer la dernière avec la mention « Lu et totalement approuvé ». Tu recevras une copie chez toi une fois que le tout sera enregistré et homologué.

Arthur s’exécuta et Marlène de poursuivre :

— Voici les clés de ta voiture, une Renique Scénaud, elle se trouve dans le garage au sous-sol, je te remets ton badge, un téléphone portable, ton PC et ta tablette, prends en soin, ce sera ta meilleure alliée au quotidien. Attention, ne jamais mettre ton téléphone en mode avion, c’est strictement interdit, excepté entre 21 heures et 7 heures.

Je vais maintenant t’expliquer le déroulement de tes semaines de travail.

Prends des notes si besoin, je n’aime pas me répéter.

Notamment au niveau des termes que nous utilisons, une fois que tu les auras retenus, ça te paraîtra évident.

Tous les lundis, weekly meeting (meeting hebdomadaire) ici de huit heures à midi. Ensuite, tu vas sur la route jusqu’à ce que tu aies terminé tes visites imposées.

Les autres jours de la semaine, morning call (appel matinal) de quinze minutes en visio à huit heures, ensuite tu démarres au plus vite en clientèle.

Tu dois visiter quarante-cinq PLOUCS (Point Locator Of Uniform Consommer. Désigne l’endroit où l’on consomme le produit TricaBev : bars, cafés, restaurants) par semaine.

Cinq PLOUCS à visiter les lundis, dix les autres jours, ça fait partie de tes targets (objectifs).

Ce n’est pas toi qui choisis dans quel PLOUC tu te rends, tu n’as qu’à respecter le control-planning de ta tablette.

C’est un programme qui te dit où aller et surtout les objectifs de ta visite.

Tu dois impérativement remplir tous les objectifs de ta visite avant de partir au PLOUC suivant, sinon tu n’atteindras pas tes targets, j’y reviens dans un instant.

Le programme est connecté en permanence, ce qui fait qu’on peut savoir en temps réel où tu te trouves.

C’est dans le but de t’aider à maximiser ton temps de travail, il ne faut pas le prendre comme un contrôle, évidemment.

Marlène était dans son élément, Arthur devait s’accrocher, tant son débit de parole était rapide

— Faisons une mise en situation, continua Marlène, tu verras c’est ultra simple.

Voici ton planning de la semaine prochaine, il est déjà encodé dans ta tablette tu n’as qu’à suivre les instructions, quel précieux gain de temps cette technologie !

Par exemple, lundi après notre meeting, première visite :

La Capsule

C’est un PLOUC qui appartient à TricaBev, avec obligation exclusive de toutes nos bières.

C’est indiqué dans le coin supérieur droit.

Tes trois objectifs sont indiqués en rouge :

1. Bières manquantes : Foujardin radler papaye, Cheffe caramel 00%.

2. Bières interdites : Despacitos, Westbergen.

3 : Retards de paiement : 830 euros pour nettoyage de la façade.

Concrètement, voici ce que tu dois faire.

1. Lui faire commander les trois bières TricaBev absentes de sa carte.

2. Retirer les deux bières concurrentes de son frigo, le plus efficace étant de le faire toi-même directement.

3. Lui signifier qu’il nous doit le montant de huit cent trente euros et demander qu’il fasse le paiement directement devant toi avec son smartphone.

Tu as trente minutes pour effectuer le tout.

Si tout est en ordre, tu l’indiques et les objectifs passent au vert.

Tu consultes le control-planning et tu files à ta deuxième visite.

Le Boudin Bar

C’est un PLOUC lié par un investissement contractuel.

Tes trois objectifs en rouge :

1. bières manquantes : Klaque vegan, Triple Pakotille zero sugar, Beauregard melon.

2. renouveler son contrat pour minimum cinq ans.

3. signer abonnement pour nettoyage de la tireuse à bières.

Sur la demi-heure que tu vas passer sur place, tu introduis les bières manquantes, tu négocies un nouveau contrat de cinq ans et pour finir, tu lui fais signer un abonnement annuel de 946 euros pour le nettoyage de la pompe à bière par notre service spécialisé.

Tu vois Arthur, il te suffit d’exécuter ce que le control-planning te demande, ajouta Marlène. Tu n’auras pas le temps de t’ennuyer, c’est à la fois diversifié et passionnant !

Surtout, ne t’avise pas d’encoder des informations erronées dans la tablette.

Nous avons mis en place un système épatant d’audit très performant.

Ce sont des contrôles aléatoires réalisés par une société externe. Ils passent dans tous les PLOUCS et vérifient si ce que tu as encodé est bien conforme à la réalité. En cas d’erreur, tu as intérêt à pouvoir te justifier.

Ton prédécesseur avait indiqué la présence de Coranus CBD dans un PLOUC alors que le produit n’était pas dans le frigo. Nous avons été contraints de le licencier pour faute grave. En résumé, si tu es honnête, tout se passera bien.

Arthur tentait d’emmagasiner toutes les informations et prenait des notes.

Marlène poursuivit, tel un moulin à paroles, en lui bourrant le crâne avec un tas de termes dont il ignorait jusque-là l’existence.

« Pour chaque nouvelle demande, tu dois introduire une DEMCOM… Pense bien à ta DN à chaque visite… Attention au capex et à l’opex… ensuite, il entendit les mots : competency review… KPI, ROI… MACO par HL, dirtool… »

(DEMCOM : demande commerciale, DN : distribution numérique, CAPEX : dépenses du capital, OPEX : dépenses d’exploitation, Competency review : revue de compétences, KPI : indicateur clé de performance, ROI : retour sur investissement, MACO par HL : marge commerciale par hectolitre, Dirtool : personne n’a jamais su de quoi il s’agissait ni osé le dire).

Tandis qu’Arthur se demandait à quel moment aurait lieu la partie explicative sur les différentes sortes de bière, leurs arômes, la façon dont elles étaient produites, le processus de brassage, Marlène suggéra :

— Pause lunch de quinze minutes et ensuite je t’explique tes targets (objectifs), c’est la partie la plus intéressante, car c’est ce qui va déterminer tes bonus !

Elle sortit une bouteille d’eau du frigo ainsi que deux paquets emballés chacun dans une serviette de papier : « Tu préfères rillettes ou jambon beurre ? »

Une fois leur festin gobé, la district manager reprit de plus belle :

— Tu as des targets journaliers, c’est les plus easy, il suffit de faire toutes tes visites prévues par le control-planning.

Ensuite, les targets hebdomadaires, tu dois avoir rempli en vert cent trente de tes cent trente-cinq objectifs de visite.

Tu auras ensuite ton target mensuel qui peut varier selon les priorités du moment, mais qui est principalement la somme de tes targets journaliers et hebdomadaires.

Si tu as atteint 90 % de tes targets, tu perçois une prime de quatre-vingts euros bruts, 100 %, cent euros bruts. Tu peux vite gagner beaucoup d’argent en bossant comme on te le demande Arthur.

— Et si j’ai moins que 90 % de mes targets ?
— Alors tu es mal parti. Si tes targets ne sont pas atteints, tu viens dans mon bureau pour mettre en place un recovery plan (plan de recouvrement).

Sept fois le mot target prononcé en moins de deux minutes, Arthur comprit que ça ne serait pas une partie de plaisir, mais il avait le privilège de pouvoir mettre ses compétences au service d’une entreprise de renommée internationale, il ferait tout pour en être digne.

La journée se poursuivit en parcourant les secteurs géographiques :

— Tu t’occupes de la région de Lille et périphérie.

Tes collègues, que tu rencontreras lundi, font les régions suivantes :

John s’occupe du Pas-de-Calais, Clément de la Somme, Vanessa de l’Oise et Henry va dans l’Aisne.

Marlène prit soin de lui toucher un mot sur ses futurs collègues :

John Ibigoud, trente-cinq ans, divorcé sans enfant, il est avec nous depuis deux ans, pour le moment il atteint ses trajets, mais je dois le secouer un peu trop à mon goût. Ses évaluations restent positives. Le principal souci, c’est son humour. Il ne peut pas rester deux minutes sans faire une blague, il ferait bien de la mettre en veilleuse, car ça commence à me pomper l’air.

Clément Lugner, il a vingt-trois ans et fait partie du programme VHP, very high potential (très haut potentiel), il a été recruté avant même la fin de son master en économie. Il reste quelques mois dans mon équipe et ensuite évolué dans la société. C’est un super programme pour formater des managers dans le mindset (état d’esprit) TricaBev vu qu’ils n’auront pas connu d’autres employeurs. Le gamin c’est une machine, dommage que je ne puisse pas le conserver plus longtemps.

Vanessa Henphaire, mariée, trente-deux ans, en place depuis quatre ans, elle abattait un boulot formidable, puis un jour elle a eu la mauvaise idée de tomber enceinte sans m’en parler avant. Depuis la naissance de son enfant, il y a deux ans, je passe mon temps à la rappeler à l’ordre. Elle a oublié ses priorités, et atteint rarement ses targets, prétextant devoir aller déposer ou rechercher sa progéniture à la crèche. Si tu as de l’ambition Arthur, je te recommande de ne pas t’encombrer d’une famille.

Henry Ramirez, quarante-huit ans, il fait partie des cinq intouchables, comme on les surnomme. Il est responsable syndical de la division nord, il y en a un par division, élu tous les cinq ans, c’est son deuxième mandat. Il bénéficie de certains avantages accordés par direction. C’est grâce à eux que vous profitez d’acquis non négligeables, comme vos bonus, votre Renique Scénaud, vos vingt-deux jours de congé, vos tickets resto et j’en passe. Pour que tu sois au courant de tout, Henry passe ses évaluations mensuelles directement à la division centrale avec Louis Saroyan, notre directeur opérationnel. Je n’ai malheureusement pas mon mot à dire sur son rendement.

— Ah oui, j’allais oublier, tu verras aussi Gustave Felief, le gestionnaire immobilier qui vient une fois par mois assister à notre meeting lorsqu’il fait sa tournée dans les Hauts-de-France.

Voilà Arthur, c’est tout pour aujourd’hui, as-tu des questions ?

— Oui, tu connais le programme de demain ? Je suppose qu’on parlera en détail des produits, je t’avoue qu’il me tarde de visiter la Brasserie !
— Demain, tu dois être au siège de la division centrale à neuf heures. Andy te briefera sur la culture d’entreprise et nos projets pour un monde meilleur, tu verras, c’est un type très chouette donc pas de stress.

À 18 heures 30, Arthur prit possession de son monospace noir métallisé flambant neuf.

L’aigle Fukinger Pils était apposé sur les portes arrière. Sur le coffre, l’inscription : « Fukinger, les conducteurs savent pourquoi. »

Il ne parvenait pas à cerner Marlène. Tour à tour avenante ou inquiétante. Elle lui inspirait un malaise, mais pourquoi ?

Arthur connecta sa playlist Douzer et démarra, pressé d’en finir avec cette première journée trop théorique à son goût.

L’intro jouée au violon par le London Session Orchestra sur la chanson « Whatever » d’Oasis plongea Arthur dans son monde Better à lui.

C’est en chantant à tue-tête qu’il s’engagea sur le Pont des Flandres.

I’m free to be whatever I, Whatever I choose, and I’ll sing the blues if I want

I’m free to say whatever I, Whatever I like if it’s wrong or right, it’s alright

Vendredi 5 mai

Tenant à être ponctuel, Arthur était parti de Lille à 5 heures 45.

Durant les trois heures de route pour arriver à siège de la division centrale, il tentait de se convaincre qu’il avait fait le bon choix en rejoignant TricaBev.

Exceptionnellement, il n’écoutait pas de musique afin de rester parfaitement attentif à la circulation.

« Aujourd’hui, je vais découvrir la Brasserie et la visiter, Andy Mol va me former en me détaillant les étapes du brassage, je rencontrerai probablement le maître brasseur en personne ainsi que les grands patrons, je vais déguster de façon professionnelle plusieurs sortes de bière, oui vraiment, cette journée va éloigner mes derniers doutes ».

Après avoir emprunté la sortie Emerainville, il suivit son GPS pour parvenir à destination.

Il aperçut un immense bâtiment de briques rouges derrière un portique de sécurité, sur la partie la plus élevée de l’édifice, une enseigne en lettres découpées noires ne laissait planer aucun doute : TricaBev : Together pour un monde Better !

Arthur descendit la vitre de sa Renique, sonna et expliqua le but de sa visite :

— Bonjour, Arthur Doulto, je suis un nouvel agent commercial. J’ai rendez-vous à neuf heures avec Andy Mol.
— Un instant, je vérifie. Reste bien immobile, la caméra scanne ton visage. C’est OK Arthur, tu peux suivre les panneaux « Bâtiment B », une fois devant, gare ta voiture sur le parking et marche jusqu’à l’entrée. Je préviens Andy que tu es arrivé. Bon courage pour la suite.