Les Ailes - Tome 2 - Laëtitia Burgun - E-Book

Les Ailes - Tome 2 E-Book

Laëtitia Burgun

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Beschreibung

Le secret de Lux est plus que jamais en danger. Elle doit continuer son infiltration auprès de la milice angélique pour obtenir plus d’informations sur l’arme que les anges ont inventé pour éliminer les démons. À cause des soupçons de certains anges sur sa véritable nature, la princesse de l’enfer, à moitié ange, devra se dévoiler davantage pour assurer sa sécurité et celles des personnes qu’elle aime sur Terre. Sa relation naissante avec Ethan sera mise à mal à cause de sa double vie, mais parviendra-t-elle à l’abandonner ? Et si le danger ne venait pas de là où ils l’attendent ?


À PROPOS DE L'AUTEURE

Fascinée dès sa tendre enfance par les aventures d’Harry Potter, Laëtitia Burgun a toujours une ou plusieurs histoires en tête qu’elle doit faire sortir. À présent, elle consacre pratiquement tout son temps libre à l’écriture. Noir immoral est la suite de son roman Les Ailes dont le tome I s’intitule Blanc pur.

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Laëtitia Burgun

Les Ailes

Tome II

Noir immoral

Roman

© Lys Bleu Éditions – Laëtitia Burgun

ISBN : 979-10-377-8393-6

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122- 5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122- 4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335- 2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

À ma Maman,

Les livres ont toujours été mon plus beau cadeau

Chapitre 1

Lux

Je me prélassais sur le canapé devant la télé. Effectivement, il y avait plus de chaînes ici, en enfer, que sur Terre. Ce qui ne m’empêchait pas de chercher les programmes que j’appréciais. Je n’avais pas envie de regarder autre chose de toute manière.

— S’il y a bien une chose que je n’ai pas oubliée, c’est que tu apprécies d’être servie.

Je tournais la tête pendant que mon père revenait de la cuisine. Il portait deux tasses. Je savais qu’il y avait du café à la noisette dans l’une d’elles, c’était la meilleure découverte depuis le chocolat selon lui, alors que je me contentais d’un chocolat chaud. Pourquoi prendre la deuxième meilleure découverte quand je pouvais avoir la première ?

— J’ai de qui tenir de toute manière… lâchai-je.

Ce n’était pas comme si le roi de l’enfer préparait lui-même tous ses repas ou était forcé de faire le ménage dans son immense palais. Il y avait assez d’employés de maison pour le faire. Ce qui ne l’empêchait pas d’avoir une immense cuisine ouverte à disposition avec une machine à café débordante d’options. Ce qui signifiait que la cuisine ne lui servait qu’à ça. À faire du café et des boissons chaudes en général. Il ne fallait pas croire que le roi de l’enfer était un chef confirmé. Même s’il avait eu le temps d’apprendre après toutes ses années d’existence, ce n’était pas le cas. Je n’étais même pas certaine qu’il était capable de faire un sandwich mangeable. Ce qui voulait dire que je ressemblais bien à mon père sur ce point. Il devait y avoir les mêmes denrées dans ses placards que dans les miens, même si je n’étais pas certaine qu’il y ait toujours autant de bonbons maintenant que je ne vivais plus ici.

Je récupérais la tasse qu’il me tendit en arrivant à mon niveau. C’était exactement un chocolat chaud comme je l’appréciais avec tout un tas de petites guimauves qui flottaient à la surface. Avec moi, il fallait toujours que ce soit le plus sucré possible.

— Et voilà, dit-il en me tendant ma tasse, la princesse est servie.

— C’est bien ce que je suis, non ? le narguai-je.

— Bien sûr. J’y ai veillé. Tu es la princesse et l’héritière de l’enfer. Mais je te signale quand même que je reste ton roi.

Je levais ma tasse dans sa direction sans dissimuler mon sourire.

— On n’a qu’à dire que je suis heureuse d’avoir été servie par mon roi alors.

Il rit, pas frustré le moins du monde que je me montre aussi insolente avec lui. Je le respectais. C’était une évidence. Sauf que j’avais été élevée pour être capable de tenir tête à n’importe qui. Je le faisais donc également avec lui. Il était même très fier quand je réussissais à lui fermer le clapet. J’étais la seule à pouvoir le faire sans risquer de mourir sur place. Ça devait lui faire du bien que quelqu’un lui parle franchement après toutes ces années où personne n’avait jamais réellement pu lui tenir tête. Même si des fois, j’aurais aimé être aussi respectée qu’il pouvait l’être.

Il continuait de sourire en s’installant sur son fauteuil attitré. Ce n’était pas comme pour Lilith. Je n’essayais pas de l’énerver en lui volant son fauteuil. Je le lui laissais parce que je savais que ça l’énervait vraiment que je puisse le lui piquer. Je ne savais pas pourquoi il y tenait tellement. Il disait que son fauteuil avait pris exactement la forme de son corps et qu’il était parfaitement placé en face de son énorme télé qui faisait de l’ombre aux écrans des salles de cinéma des humains. Alors que je trouvais qu’on était bien mieux installé quand on se trouvait sur le canapé. Il fallait croire que tout dépendait des goûts de chacun.

— Bon. Maintenant que tu es calmée, est-ce qu’on peut discuter un peu plus posément de ce que tu as pu apprendre hier soir ?

Je levais les yeux au ciel. D’accord, je m’étais un peu… Emballée. Mais il ne pouvait pas dire que j’étais énervée. J’avais été énervée quand j’avais découvert. Ce n’était que la veille que j’avais appris le plan des anges et la création de leur nouvelle arme. Maintenant, j’avais juste envie de trouver une solution. J’avais envie que mon père trouve une solution. Normalement, il avait toujours des solutions à tout. Sauf qu’hier soir, il avait préféré écouter en me disant que la nuit portait conseil. Puis il avait quitté la salle du trône, me laissant bouche bée pendant un instant devant son trône désormais vide. Il y avait également le mien à côté, mais je n’y prêtais pas attention. Ce n’était pas comme si j’aimais particulièrement poser mes fesses dessus. C’était incroyablement inconfortable ce genre de truc.

J’avais fini par le suivre en tentant de courir, ce qui n’était pas simple en portant des talons. J’avais l’impression d’être une espèce de cigogne. Même si ça ne m’avait pas empêché de rattraper mon père dans le hall du palais principal.

Bien entendu, ce palais était énorme. Il était entièrement creusé dans la falaise, ce qui faisait qu’on ne pouvait rien deviner de ses dimensions quand on y parvenait après avoir suivi une longue allée bordée de braseros. Heureusement, une fois qu’on était dans le palais, on revenait enfin à la modernité. Il n’y avait plus d’éclairage à l’ancienne avec des flammes et enfin de l’électricité. Il allait sans dire que mon père gardait ce décor uniquement parce que tout le monde pensait que l’enfer ressemblait à ça. Pendant ce temps, mon père avait un palais tout simplement énorme et bourré de nouvelles technologies.

La salle de bal se trouvant au rez-de-chaussée était au moins deux fois plus grande que la salle de conférence de la Tour Angel. Et ce n’était pas la seule chose qu’on pouvait trouver au rez-de-chaussée du palais. Il y avait une salle à manger dont la table était tellement longue que même en prenant de l’élan, on ne pouvait pas la traverser entièrement en glissant. Je le savais, je l’avais déjà tenté avec Bali. Il fallait bien qu’on s’occupe de temps à autre. De préférence en nous enduisant de savon, tout comme la table. Ce qui voulait dire que ça avait fini en soirée mousse. Même mon père avait participé. Ça ne le frustrait pas le moins du monde qu’on ait fait ce genre de connerie. Bien au contraire.

Il y avait également une multitude de salons privés, le grand bureau de mon père ou encore les immenses cuisines dans lesquelles je recevais toujours des biscuits quand j’allais y traîner. Autant dire que j’y allais souvent quand j’étais encore petite… Et même ensuite.

Au premier étage, il y avait une bibliothèque qui prenait pratiquement tout l’espace. Mon père avait une collection absolument phénoménale. Je n’étais pas du genre à lire beaucoup, mais j’avais souvent apprécié d’aller y faire un tour. Mon père m’avait montré certains de ses trésors. Des premières éditions de nombreux classiques de la littérature, des livres datant du Moyen âge et qui étaient encore écrits à la main ou encore toute une section qui était dédiée aux mythes que les humains pouvaient raconter sur les démons. Je ne comprenais pas son délire, mais il me disait que c’était ironique. Tout ce que je savais, c’était qu’il y avait pas mal de bouquins qui étaient placés sous des plaques en verre et que je n’avais pas le droit de toucher. Notamment sa précieuse bible de Gutenberg. Oui, c’était aussi ironique à mon avis.

Le second étage ressemblait aussi étrangement à un musée. Il y avait des objets de toutes les époques que je n’avais absolument pas le droit de toucher. Si les humains n’avaient pas eu aussi peur de l’enfer, ils auraient pu prendre une leçon d’histoire avec mon père. Il y avait des sceptres héqa de certains pharaons, parce que mon père avait vraiment un truc avec l’Égypte, des reliques grecques ou encore des objets qui se trouvaient sur le Titanic. Même si je ne savais pas du tout comment il avait pu obtenir ça. À mon avis, il était sur le Titanic et il avait emporté des souvenirs quand le bateau avait décidé de couler. Ce n’était pas impossible.

Il restait ensuite trois étages. Comme si mon père avait besoin d’un palais avec cinq étages. Comme si qui que ce soit pouvait avoir besoin d’un palais aussi grand. Deux des étages comptaient des suites pour les invités. Elles n’étaient pas souvent utilisées. De temps à autre, des membres de la garde personnelle de mon père ou de la mienne séjournaient sur place ou encore des démons qui habitaient assez loin dormaient au palais lors des fiestas que mon père pouvait donner. Je ne savais pas si quelqu’un s’y trouvait pour le moment. Mis à part cet imbécile de Gaziel qui était le bras droit de mon père et qui vivait au palais en permanence. Dommage que je ne puisse pas le supporter.

Au final, on ne pouvait pas se supporter tous les deux. En venant au monde, j’avais complètement remis en question l’organigramme de l’enfer alors qu’il était resté inchangé depuis des millénaires. Jusqu’à ce que ma mère vienne me déposer dans les bras de mon père, c’était lui le numéro deux de l’enfer. Maintenant, c’était moi. Je n’avais pas besoin de le préciser, mais il fallait croire qu’il l’avait assez mal pris.

C’était l’une des raisons qui faisait que mon père ne résidait plus au dernier étage de son palais. Quand il avait découvert qu’il avait une fille, il avait dû être assez perturbé. Ce que je pouvais comprendre. Mais on ne décontenançait pas bien longtemps le roi de l’enfer. Il avait rapidement compris que j’étais devenue une cible pour de nombreux démons qui n’appréciaient pas que je sois à moitié ange. Ou qui n’appréciaient pas que j’existe, tout simplement. Au lieu de vivre dans le palais en lui-même, on résidait dans une annexe.

Pour y accéder, il fallait emprunter une porte qui se situait dans ce qui semblait être un placard, à côté du bureau de mon père. On suivait un nouveau couloir avant d’arriver dans une maison, qui était tout sauf petite. Elle était un peu plus à taille humaine, mais plutôt au niveau des critères des stars de Hollywood qui vivaient à Calabasas. J’avais donc poursuivi mon père jusqu’à là pour qu’on poursuive notre conversation, ce qu’il avait évidemment refusé.

Au moins, il y avait uniquement un étage. Au rez-de-chaussée, on trouvait l’immense pièce de vie dans laquelle on se trouvait maintenant. Il y avait donc la cuisine pour faire le café, l’espace salle à manger et le salon. Je ne savais pas trop à quoi il servait puisqu’il y avait également une salle de projection dans laquelle mon père adorait regarder des matchs de la NBA. Parce que oui, le démon le plus craint, ou presque, de tous les anges aimait se vautrer devant un match de basket et hurler sur des joueurs qui ne pouvaient pas l’entendre. Sinon, il y avait également un hammam et un sauna. Dans lesquelles je n’allais jamais. Ce n’était pas mon truc de rester assise pendant je ne savais pas trop combien de temps à transpirer.

À l’étage, il y avait uniquement ma suite et celle de mon père. Il me suffisait de penser à ça pour comprendre pourquoi j’étais aussi à l’étroit dans la minuscule chambre de stagiaire que j’avais pu avoir à la Tour Angel. Il y avait donc ma chambre, un salon, un bureau et une salle de bain. Même si le bureau avait longuement été ma salle de jeux. Ah, et un immense dressing. À mon avis, j’aurais pu y mettre ma chambre de la Tour Angel alors que ça ne servait qu’à ranger mes vêtements.

Pour la première fois depuis des mois, j’avais dormi dans mon lit. Je n’avais jamais beaucoup de mal à m’endormir, mais j’avais dormi exceptionnellement bien, malgré ce que j’avais pu apprendre sur Terre. J’avais même poussé jusqu’à faire une grasse matinée. Ce qui voulait dire que je n’avais pas pris de petit-déjeuner avec mon père, mais un brunch. Il m’avait ensuite laissé, le temps de régler quelques petites choses, et il venait à peine de revenir. Il fallait croire qu’il avait besoin d’avoir un café entre les mains pour endurer une conversation avec moi. Ça allait être le cas quand j’allais vraiment m’énerver.

— Tu crois que je n’ai pas le droit d’être énervée ? rétorquai-je alors.

Mon père prit le temps de se laisser aller en arrière sur son fauteuil et de poser sa cheville droite sur son genou avant de me répondre :

— Je ne dis pas que tu n’as pas le droit d’être énervée, Luxie. Tu as tous les droits. Sauf que ce n’est pas en t’énervant que tu vas résoudre les problèmes.

— Comment tu fais pour rester aussi calme ? Je te signale quand même qu’ils pourront nous supprimer comme s’ils allumaient simplement la lumière !

Ils n’auraient qu’à appuyer sur une gâchette en tout cas. Quelque chose me disait qu’ils n’allaient pas se gêner pour le faire.

— Je côtoie les anges depuis bien plus longtemps que toi. On parle d’une guerre qui dure depuis des millénaires. Je ne peux même pas dire depuis la nuit des temps puisque je n’ai pas toujours été un démon… Et qu’avant que j’en devienne un, les autres démons n’existaient pas.

Je connaissais l’histoire. Mon père était un archange. Lucifer, qui signifiait le porteur de lumière en latin. Mon prénom n’avait pas été choisi par hasard… Bien au contraire. Lux signifiait lumière en latin. Les anges m’avaient dit que mes parents avaient bien choisi, mais ils ne se rendaient pas compte d’à quel point c’était le cas. Mon père trouvait ça marrant de son côté.

Mon père était donc un archange comme ses quatre frères, Michel, Raphaël, Gabriel et Uriel. À mon avis, ils auraient déjà dû se poser des questions dès le départ. Tous ces prénoms rimaient alors que celui de mon père dénotait déjà. Ça ne pouvait rien apporter de bon et c’était le cas.

Le patron d’en haut n’était pas du genre commode. Ses archanges étaient là pour faire régner l’ordre et sa bonne parole. Il n’était pas connu pour sa pitié. Il suffisait de voir ce qu’il avait fait aux Égyptiens quand ils avaient réduit les Hébreux en esclavage. Après avoir changé les eaux du Nil en sang, il avait provoqué une invasion de grenouilles, de mouches et de sauterelles parmi d’autres choses tout aussi glauque, pour finir par tuer les premiers-nés de tous les Égyptiens. Pas très angélique tout ça.

C’était ça, le patron d’en haut. Il avait édicté les règles et il punissait ceux qui ne les respectaient pas. Comment il les punissait ? Il envoyait ses archanges qui obéissaient comme les braves petits soldats qu’ils étaient. Jusqu’à ce que Lucifer, mon père, commence à se poser des questions et demande à avoir son libre arbitre.

Apparemment, c’était le truc qu’il ne fallait pas demander. Les archanges devaient être là, obéir et c’était tout. Face aux demandes de mon père, le grand patron avait décidé de le punir en le bannissant du paradis, il était donc devenu un ange déchu et le premier démon, mais également le roi de l’enfer qui était devenu sa place. Sauf que le patron d’en haut n’avait pas spécialement réfléchi puisqu’il lui avait porté une attaque à l’épée qui l’avait fait saigner. Des gouttes de son sang étaient nés les démons supérieurs ainsi que les démons inférieurs. Ce qui avait marqué le début des ennuis.

Mon père, en devenant le roi de l’enfer, était devenu le souverain de tous ces démons tout neufs. Sauf qu’à ce moment, le patron d’en haut n’avait pas encore d’anges. Il avait alors commencé à en créer de son côté, ce qui avait provoqué le début de la guerre. Qui, comme mon père le disait, durait depuis des milliers d’années. Au moins, ça avait permis au mec tout là-haut de se calmer un peu. Ce n’était plus les humains qui étaient directement punis quand ils ne respectaient plus ses commandements puisque toutes les fautes incombaient maintenant aux démons. C’était bien pratique tout ça.

— Je sais tout ça, soupirai-je, sauf que ça ne me dit pas pourquoi tu es aussi calme.

— Parce que ça fait des centaines d’années que les anges trouvent tous les moyens pour nous pourrir la vie. À chaque fois, on a su rebondir. On va également trouver une solution aujourd’hui.

— Ah ouais ? Tu sais comment résoudre ce problème, toi ?

Il me regarda en affichant un sourire en coin. C’était bon. Je voyais très bien le démon qui se cachait derrière l’homme de cette manière.

— Ça me semble plutôt simple, Luxie. Je pensais même que tu trouverais toi-même la solution…

Je levais les yeux au ciel. Il était le seul à me donner ce surnom. Et je ne savais pas trop s’il était en train de sous-entendre que j’étais débile ou un truc dans le même genre.

— Pourquoi ? Qu’est-ce que j’aurais dû trouver ?

— C’est pourtant simple, est-ce que ton chef du comité a montré un prototype ? A fait une démonstration ?

J’ouvris la bouche, avant de la refermer. C’était bon. Je commençais tout doucement à comprendre où il voulait en venir. Je n’eus même pas besoin de répondre avant qu’il ne poursuive :

— En fait, ça veut simplement dire qu’ils ont un prototype fonctionnel. Ils sont encore aux phases de test. Ce qui signifie qu’on peut encore enrayer la machine avant qu’ils ne commencent la production et qu’ils n’équipent les équipes de la milice. On va les prendre de court.

Je hochais lentement la tête. Il n’avait pas tort. En plus de ça, j’allais pouvoir me sentir utile.

— C’est là que j’interviens, non ?

Mon père se pencha en avant en me regardant dans les yeux. Je savais ce que ça voulait dire. Il allait me passer un savon…

— En fait, je dois bien dire que j’aurais préféré que ce ne soit pas le cas…

Je dus prendre sur moi pour ne pas me ratatiner sur mon siège. Et après on se demandait pourquoi je n’étais pas encore descendue en enfer. C’était simplement parce que je n’avais pas envie de me faire gronder comme si j’avais encore cinq ans et que je venais de me faire surprendre la main dans le pot de biscuits. Je le savais parce que c’était déjà arrivé. Mon amour pour tout ce qui était sucré ne datait pas d’hier.

— Je ne pense pas que ça puisse être l’idée la plus judicieuse de l’année de t’infiltrer au sein de la Tour Angel. Après ce que tu as pu voir hier, qu’est-ce qu’ils te feraient s’ils parvenaient à savoir… Ce que tu es ?

Je me renfrognais, croisant mes bras sur ma poitrine. Je savais que ça allait arriver. Ce n’était pas pour autant que j’acceptais de prendre les choses gentiment et calmement. Comme si lui, il n’avait jamais pris de risques. Il avait été jeté du paradis parce qu’il voulait commencer à réfléchir par lui-même sans écouter simplement les consignes. Je ne pensais pas qu’il pouvait me donner des leçons par rapport aux risques que je pouvais prendre.

— Le but est donc de ne pas me faire remarquer… maugréai-je.

— Le but était surtout de ne pas te jeter dans la gueule du loup, me corrigea mon père.

— C’était l’idée de Lilith à la base.

Oui, j’étais une cafteuse. Je l’assumais tout à fait. Même si ça fit flamboyer les yeux de mon père pendant un instant et que je venais de mettre l’autre tarée dans le caca. C’était bien fait pour elle. La prochaine fois, elle jouerait au moins un peu plus le jeu quand je lui demandais quelque chose. Si elle n’était pas morte.

— C’est… Bon à savoir, lâcha mon père.

Je haussais les épaules pour toute réponse. C’était hors de ma portée maintenant. Si je voulais vraiment que la situation soit ingérable pour Lilith, j’aurais pu dire que je n’étais pas d’accord à la base et qu’elle m’avait forcé. Mais je n’étais pas démoniaque à ce point.

— Mais je ne comprends toujours pas comment tu as fait pour accepter. Je dois avouer que j’étais à deux doigts de t’ordonner de revenir quand j’ai appris ce que tu étais en train de faire.

— Parce que tu crois que j’aurais accepté ? m’offusquai-je.

— Parce que tu crois que je t’aurais laissé le choix ?

Je commençais littéralement à faire la tête. C’était bon. J’avais de nouveau cinq ans.

— Pourquoi tu ne l’as pas fait alors ?

— Je voulais voir ce que ça donnait. Et je sais que je suis capable de raser toute leur tour s’il devait t’arriver quelque chose. Ça a quelque chose de réconfortant de le savoir…

Je levais à nouveau les yeux au ciel. Je savais qu’il était capable de le faire. Il était même capable de raser toute la ville s’il le voulait. Déjà que c’était également mon cas à la base, il ne fallait pas s’étonner que mon père soit plus puissant que moi.

— Tu m’as donc laissé le bénéfice du doute ?

— On va dire ça. C’est surtout que je me suis dit que je ne t’avais pas élevé pour que tu deviennes subitement suicidaire.

— Bien sûr que je ne suis pas suicidaire !

— Tu vis quand même dans une tour où tout le monde aurait envie de te tuer…

Il venait de sortir ça comme s’il me parlait du temps qu’il pouvait faire sur Terre. J’avais vraiment des discussions étranges avec mon père.

— Ils ne l’ont pas fait parce que je ne leur donne pas de raison de le faire. Et que je ne compte pas leur en donner.

Mon père hocha lentement la tête sans me quitter des yeux.

— De toute manière, le jour où tu pourrais avoir un problème, je compte sur toi pour prévenir ta garde. Et pour faire le nécessaire afin de t’échapper. Tu n’imagines pas ce que je pourrais être capable de faire s’il t’arrive quelque chose…

Je déglutis avant de hocher lentement la tête. Je ne voulais surtout pas imaginer ce qu’il pourrait faire, mais j’en avais tout de même une petite idée. Qui impliquait la reconstruction de toute une ville.

— Je suis tout à fait capable de m’échapper si j’en ai besoin.

— Je le sais. Et je compte sur toi pour le faire. Tu ne dois pas prendre tes sentiments en compte si ta vie est en jeu.

J’ouvris la bouche avant de la refermer. Je ne savais pas quoi dire. Et je ne savais même pas comment il pouvait être au courant de certaines choses. Tout en le sachant déjà. Les démons étaient de vraies commères.

— Je ne vois pas du tout de quoi tu parles… protestai-je.

Je pouvais moi-même entendre que ma voix était trop faible pour paraître crédible. Il n’avait pas tort au final. Est-ce que je serais capable de faire du mal à Ethan si ma vie en dépendait ? Je ne pouvais pas en être certaine. Tout comme je ne pouvais pas l’être à l’idée d’en faire à Elijah, Chelsea ou Mila. Même si cette dernière m’avait un peu trop maltraitée la veille en me coiffant, je ne savais pas ce que je ferais si je devais la blesser intentionnellement.

— Lilith m’a dit que tu te chargeais de te rapprocher des membres de ton équipe. Je sais que tu es trop angélique sur certains points. Tu tiens aux personnes qui sont proches de toi. Il suffit de voir ce que tu as pu faire pour Bali.

Je me renfrognais une nouvelle fois. Je savais que ça allait être mis sur le tapis.

— Qu’est-ce que j’aurais dû lui faire ? Le laisser se faire torturer pendant que je dormais à quelques étages de lui ?

— Oui, c’était ce que tu avais à faire. Et tu le sais très bien.

J’étais sur le point de dire quelque chose, mais mon père leva la main, m’intimant le silence. Je refermais donc la bouche, pas très heureuse de ne pas pouvoir m’expliquer.

— Bali est un membre de ta garde, tout comme Lilith, Paymon et Abalam. S’ils se trouvent sur Terre actuellement, c’est pour te protéger. Normalement, la personne protégée ne va pas sauver la personne qui la protège d’après ce que je peux savoir de la logique de la protection des personnes.

— Il ne fait pas uniquement partie de ma garde. C’est aussi un ami. Je ne pouvais pas laisser un ami se faire torturer, surtout que les anges voulaient l’interroger pour savoir qui j’étais.

À cause de mes ailes à plumes noires. Les mêmes que mon père avait, même s’il ne les montrait pas pour le moment. Ce n’était pas pratique de les arborer quand on voulait se vautrer dans un fauteuil.

— Tu sais très bien que Bali n’aurait rien dit qui aurait pu te mettre en danger.

— Bien sûr que je le sais !

S’il l’avait fait, mon père se serait chargé de son cas. Même si j’aimais également croire que Bali m’appréciait suffisamment pour ne pas me trahir.

— Mais ça n’enlève rien au fait que je ne voulais pas laisser mon ami dans cette situation, terminai-je alors.

— C’est donc bien ce que je disais. Le jour où tu seras en danger, tu pourrais ne pas faire le nécessaire pour ne pas blesser tes nouveaux amis. Et je suis même certain que tu as envie de changer les mentalités des anges.

Pourquoi est-ce que je me mettais à rougir ? Ah oui, parce qu’il avait touché dans le mille. Il me connaissait vraiment trop bien.

— Tu ne crois pas que c’est possible ? Qu’on puisse être accepté un jour ? Ce ne serait pas mieux que de faire une nouvelle guerre ?

— Bien sûr que ce serait mieux, mais tu ne crois pas qu’on y a déjà pensé ? Qu’on a déjà essayé de le faire ? Luxie, on est en guerre avec les anges depuis aussi longtemps qu’on existe. On a déjà essayé de faire la paix, ça ne les empêche pas de nous attaquer. Je pense que tu as pu en avoir la preuve avec la nouvelle invention des anges. Sans parler de ta mère qui a simplement décidé de te laisser ici. Elle aurait pu essayer de changer les mentalités. Pour toi.

Je savais que mon père n’essayait pas de se montrer cruel. Il parlait toujours sans prendre de tour et de détour. Ce qui ne m’empêcha pas de me sentir blessée. Même si c’était la vérité. Ma mère m’avait laissée à mon père sans essayer de voir si elle pouvait me faire accepter par le reste de sa communauté.

— Qu’est-ce qu’on va faire pour la nouvelle invention des anges alors ? demandai-je pour changer de sujet.

Mon père prit le temps de boire une gorgée de son café avant de me répondre. Son sourire en coin m’indiquait clairement que le plan était diabolique.

— Tu vas te renseigner sur les laboratoires de recherche qu’ils peuvent avoir à la Tour Angel de New York. Je ne suis pas forcément d’accord avec ton plan d’infiltration, mais tant que tu n’es pas en danger immédiat, tu peux continuer de nous rapporter des informations. Même si je ne te répéterais jamais assez de faire attention. Et si je demande à ce que tu viennes me voir et que tu me fais attendre aussi longtemps que ça a pu être le cas jusqu’à maintenant, ça ne se passera pas de la même manière non plus.

Je hochais lentement la tête pendant qu’il me jaugeait du regard. Je savais que j’avais littéralement joué avec le feu en ignorant ses demandes de venir le voir à chaque fois qu’un des démons de ma garde m’en avait parlé. Je voulais uniquement qu’il puisse voir que mon rôle d’infiltré servait bien à quelque chose avant qu’il ne puisse me dire de ne plus le faire. Je pouvais être contente que mon père ait un minimum de patience parce qu’il aurait pu m’ordonner de tout arrêter directement. Il était le roi de l’enfer et je devais obéir à ses règles.

— Et ensuite ? demandai-je.

— Ensuite, on se chargera de détruire les armes que les anges auraient déjà pu fabriquer, mais également tous leurs plans. Ce sera même plus simple de nous charger de tous leurs laboratoires. Les anges sont tellement confiants que ça ne m’étonnerait même pas qu’ils n’aient pas de copies de leurs recherches.

— C’est un début, mais ça ne veut pas dire qu’ils ne pourront pas recommencer.

— Et nous, on pourra le faire encore et encore. Souviens-toi qu’il n’y a pas plus borné qu’un démon.

J’approuvais donc son plan. Je savais que mon père savait ce qu’il faisait. Et qu’il n’en était pas à son premier combat contre les anges.

— Je pourrais vous aider pendant que vous le ferez et…

— Non. Tu ne le pourras pas. Ton aide sera essentiellement de nous ramener les informations nécessaires.

Je me vexais. Je n’avais pas envie qu’il puisse me couver. J’avais déjà mené une bataille contre la Tour Angel.

— Pourquoi ? Je suis tout à fait capable de le faire !

— Je sais que tu en es capable, mais la priorité est de préserver ta couverture. Tu n’étais pas présente en tant qu’ange lorsque vous avez délivré Bali. Que tu ne sois pas là alors que tous les anges ont été appelés en renfort, ça passe une fois. Pas deux. Tu assisteras à ce moment en tant qu’ange s’ils appellent des renforts. Par contre, je crois qu’il est grand temps de leur rappeler que j’existe de mon côté…

J’affichais alors le même sourire que lui. Un vrai sourire de démon. Parce que je savais que les anges perdraient automatiquement leurs moyens en voyant mon père.

Il se trompait par contre sur un point. Je savais que je ne pourrais rien faire pour changer les mentalités de tous les anges. Je ne perdais pas espoir avec Ethan, mais j’avais fini par comprendre que ce n’était pas en leur montrant notre gentillesse qu’on se ferait accepter. Je ne savais pas encore comment on pourrait y parvenir, mais ce ne serait pas de cette manière.

— Je pense également que je prendrais Bali avec moi. En plus des autres. Il commence à tourner en rond ici et je crois qu’il est en train de me rendre dingue…

— Il n’est pas chez lui ?

— Non. Je l’ai gardé ici. Il est toujours un membre de ta garde et je veux qu’il soit à proximité si je dois me rendre sur Terre en catastrophe.

Je n’eus pas besoin de plus d’explications pour comprendre. S’il devait se rendre sur Terre pour me sauver si je devais être démasqué. Il y avait quand même un résident au palais finalement… Il fallait que j’aille le voir avant de rentrer sur Terre.

— Maintenant, tu peux me raconter comment les anges sont formés pour traquer les démons. Je crois que je suis assez curieux sur ce point.

Je commençais à lui conter ce que j’avais pu faire depuis que j’avais été accepté comme stagiaire. Ce qui allait bien le faire rire…

Chapitre 2

Ethan

Comme d’habitude, j’avais l’impression d’être un imbécile. Je regardais autour de moi, en me balançant sur mes pieds. Ce qui ne devait pas être une très bonne idée vu le quartier où je me trouvais…

Je savais qu’il continuait d’y avoir des quartiers un peu plus mal famés que d’autres dans la ville. C’était déjà le cas avant l’Ère du Chaos et les choses ne pouvaient pas changer facilement, surtout après les dégâts qu’il y avait eu après cette longue guerre entre les anges et les démons. Je connaissais cette situation. Il nous arrivait de patrouiller dans ces quartiers où on se demandait qui étaient les plus dangereux. Les démons ou les gangs qui continuaient de régenter ces zones.

Ce devait être l’une des raisons pour lesquelles j’étais aussi mal à l’aise maintenant. Je m’étais déjà fait dévisager plusieurs fois depuis que j’avais quitté la station de métro et j’avais à chaque fois accéléré le pas. Je n’étais pas à l’aise dans ce genre de situation. Je savais que j’avais les capacités de me défendre si quelqu’un essayait de m’agresser, mais je ne voulais pas avoir à le faire. Si un humain s’en prenait à moi, je trouvais ça injuste de l’attaquer avec mes pouvoirs d’ange alors qu’il n’était pas capable de se défendre. Je n’étais pas un démon, je ne faisais pas ce genre de choses. Je préférais donc prendre la poudre d’escampette en espérant ne pas me retrouver dans ce genre de situation.

Je savais que je pouvais avoir l’air d’un type tout à fait normal puisque je ne portais pas mon uniforme de la milice angélique. On pouvait très bien me prendre pour une cible, surtout que je n’avais pas l’air sûr de moi, pour ne pas changer. Ce devait également être pour ça qu’on me regardait de cette manière. Je n’avais jamais remarqué que c’était le cas quand je me trouvais en poste dans ces secteurs avec mon équipe. Je me rassurais en me disant que si ces personnes croisaient mon regard, elles comprendraient que je n’étais pas totalement humain et me laisseraient partir. Même si ce n’était pas la seule chose qui me perturbait. Loin de là.

Je ne comprenais pas spécialement bien ce qui se passait. J’avais l’impression que le bal d’hier soir se passait bien avec Lux. Jusqu’à ce qu’elle parte pratiquement en courant. Elle était partie de la salle de conférence quand elle avait eu un appel et je l’avais juste rattrapé avant qu’elle ne file parce que sa tante s’était blessée. Je lui avais bien proposé de partir avec elle. Si elle se rendait à l’hôpital, ça pouvait prendre du temps. Des anges guérisseurs se trouvaient dans les différents hôpitaux du pays, mais ils n’intervenaient pas sur les cas les moins graves. Le but restait que les humains ne soient pas totalement dépendants de nous. Les médecins continuaient de se charger de certains cas. L’attente pouvait rester longue dans ce genre d’endroit. Mais Lux m’avait littéralement laissé sur place sans me laisser le temps de discuter avant de filer.

Je comprenais sans mal qu’elle ait pu avoir une urgence. Ce que je ne comprenais pas, c’est qu’elle parte de cette manière et aussi qu’elle ne réponde pas au téléphone, alors qu’elle m’avait dit qu’elle me tiendrait au courant. J’avais donc fini par croire qu’il y avait autre chose.

J’avais forcément fait quelque chose de mal. Je n’arrivais juste pas à mettre le doigt dessus. Est-ce qu’elle avait été mal à l’aise que je l’embrasse devant tout le monde ? Est-ce que je lui avais dit quelque chose à un moment qui ne lui plaisait pas ? Je ne savais pas. J’étais complètement dans le flou. Ce qui expliquait ma présence ici. Devant son immeuble.

Je ne savais pas si j’avais eu raison ou tort de venir ici. Tout ce que je savais, c’était que j’avais besoin de réponses. Même si je risquais de passer pour un gros lourd. Ça m’avait au moins permis de comprendre pourquoi Lux avait préféré vivre à la Tour Angel. C’était compliqué de se retrouver dans une rame de métro à l’arrêt pendant trente minutes entre deux stations. Encore plus quand on était stressé comme moi.

Et maintenant, je me retrouvais devant l’immeuble à ne pas savoir si je devais entrer ou partir dans l’autre sens. J’étais vraiment ridicule…

Je finis cependant par me décider. Et pas uniquement parce qu’un groupe de personnes se dirigeait vers moi et qu’ils n’avaient pas l’air particulièrement sympas. Je me sentais donc doublement ridicule une fois que j’eus poussé la porte d’entrée. Parce que je fuyais des gens alors que rien ne me prouvait qu’ils me voulaient du mal ou parce que je venais pour vérifier que tout se passait bien avec Lux alors que j’avais le sentiment que ce n’était pas le cas ? Je ne savais pas du tout. Ce devait être un mélange des deux.

Je décidais de ne plus me poser de questions le temps de monter les étages qui me séparaient de l’appartement de la tante de Lux. Je ne savais pas si cette dernière se trouvait encore ici ou si elle était rentrée à la Tour Angel au départ, surtout maintenant qu’elle n’avait plus de couvre-feu à respecter. J’avais donc tenté ma chance chez elle un peu plus tôt. Je partais du principe que, comme elle ne m’avait pas répondu, c’était qu’elle n’était pas là. Ou qu’elle m’ignorait totalement. Au moins, je n’avais pas eu à faire de détour puisque je me trouvais déjà sur place. J’avais été réquisitionné pour remettre la salle de conférence en place. Par contre, je n’avais pas d’excuses pour me trouver ici maintenant.

Je toquais rapidement à la porte, me demandant comment Lux allait prendre le fait que je sois là. Je mis mes mains dans mes poches, me balançant sur mes pieds. Je sentais que mon cœur se mettait à battre plus vite alors que ma respiration se faisait également plus vive. Tout en me disant que j’étais encore une fois complètement stupide, je stressais d’autant plus quand j’entendis des bruits de pas de l’autre côté de la porte.

Je me raidis entièrement, un peu comme si je me préparais à faire un salut militaire. Je n’eus pas le temps de me dire encore une fois que j’étais réellement ridicule avant que la porte ne s’ouvre.

Je ressentis une pointe de déception en remarquant que c’était la tante de Lux qui venait de l’ouvrir. Je m’en voulus aussitôt de ressentir ça. C’était totalement incorrect. Et puis je m’en voulus également ensuite d’avoir pensé que Lux avait tenté de s’enfuir. Je pouvais voir que sa tante avait bien été blessée puisqu’elle avait un bandage au niveau du poignet. Je ne voyais pas pourquoi elle se serait baladée comme ça sinon.

Je me sentis encore plus mal ensuite quand elle me fit un sourire tout simplement radieux en me voyant.

— Bonjour… Ethan, c’est bien ça ?

— Oui, madame Estrella, répondis-je en lui serrant la main qu’elle me tendait, on a déjà pu se rencontrer il y a quelques semaines.

Je savais que c’était son nom de famille et qu’elle était la sœur du défunt père de Lux. Même si je ne voyais pas spécialement de ressemblance entre elle et Lux. Je savais que dans les familles, ce n’était pas forcément le cas. Je ne ressemblais pas trop à ma sœur non plus.

— Oui, je me souviens ! C’était au restaurant chinois, si je ne me trompe pas ?

Je souris avant de lui répondre. Je me souvenais qu’elle avait également été très enthousiaste au restaurant et qu’elle était tout simplement ravie que Lux fasse partie de la milice angélique.

— C’était bien ça. Est-ce que vous allez bien ? demandai-je en lui montrant son poignet.

Elle fit une grimace en regardant dans cette direction à son tour. Comme si elle était encore surprise d’avoir été blessée.

— Ce n’est pas grand-chose. Juste une petite entorse. Je suis stupide pour tout dire, je suis montée sur une chaise pour attraper quelque chose en haut d’un de mes placards, mais j’ai glissé et je suis tombée.

— Ah… Euh… Je pensais que ce serait plus grave que ça… Enfin, je ne veux pas dire que je voulais que vous soyez gravement blessée ! C’est juste que Lux est partie tellement vite du bal que j’imaginais que ce serait vraiment grave…

Je venais d’insinuer que ça ne me dérangeait pas le moins du monde de la voir blesser gravement. Mon père m’aurait tué sur place s’il avait entendu ce que je venais de dire. Heureusement, la tante de Lux ne sembla pas offusquée par ce que je venais de dire.

— Ne m’en parle surtout pas ! Lux fait tout un plat à chaque fois que j’ai le moindre petit truc ! Je pense que c’est parce que je suis la seule famille qu’il lui reste. Elle s’inquiète quoiqu’il se passe. Et elle peut souvent s’inquiéter parce que je suis une catastrophe ! Je suis d’une maladresse qui est pratiquement sans égal ! Je tombe toutes les cinq minutes, je me cogne partout et je ne sais pas comment je fais pour garder mon travail de serveuse puisque je casse au moins un verre à chaque service !

Je m’en voulus encore plus ensuite. Et je me sentis encore plus stupide. Si c’était possible. J’avais commencé à me demander pourquoi Lux avait couru pour partir de la Tour Angel pour une blessure aussi superficielle. Ce n’était rien de grave. Quand un ange avait ce genre de blessure, les anges guérisseurs ne se chargeaient pas forcément de la soigner. Alors que je n’avais pas réfléchi plus loin que le bout de mon nez.

Je savais que Lux avait perdu son père quelques mois plus tôt pendant que sa mère avait dû repartir se battre à peine après sa naissance. Elle était morte dans une bataille. Je n’avais pas réfléchi au fait que sa tante était le dernier membre de sa famille qu’il pouvait lui rester. Bien sûr qu’elle avait paniqué quand elle avait appris qu’elle était blessée. C’était tout à fait naturel et je me rendais encore plus compte de la stupidité de mes propres réactions. À croire que l’univers tout entier tournait autour de moi.

— Bien sûr, poursuivit-elle, dès que je lui dis que j’ai quelque chose, elle se précipite ici. Je lui ai dit qu’en fait, je n’avais plus trop mal une fois que j’avais mis de la glace, mais elle n’a rien voulu entendre et elle m’a traîné à l’hôpital. Elle n’a vraiment rien voulu entendre !

— Je suis content que vous n’ayez rien de grave en tout cas, tentai-je de me rattraper.

— Oh non, c’est rien du tout. Je vais plus être embêté qu’autre chose…

Je lui souris encore une fois avant de poser la question qui me taraudait depuis que j’étais arrivé.

— Au fait, est-ce que Lux est là ?

Je n’eus pas besoin que sa tante ouvre la bouche pour comprendre la réponse. Elle m’observa avec un air tellement désolé que je sus à quoi m’en tenir rapidement.

— Je suis vraiment désolée, Ethan. Elle n’est pas là. En fait, c’est tout simplement ridicule… Je devais aider un couple d’amis à déménager avec Pascal, mais je ne suis pas en état de le faire. Lux s’est alors proposée pour s’y rendre à ma place.

— Ah… D’accord.

Je n’arrivais pas à dissimuler ma déception, malgré tous les efforts que je pouvais faire. Je comprenais sans mal qu’elle ait pu partir de la Tour Angel rapidement maintenant, mais… En fait, j’aurais aimé la voir pour m’assurer que tout allait vraiment bien entre nous.

— Tu sais comment elle est. Elle veut toujours faire en sorte d’aider les autres. Je lui ai dit que ce n’était pas la peine de le faire parce qu’elle doit commencer le travail demain et qu’elle a eu une semaine bien chargée, mais elle n’a rien voulu entendre ! Comme quand je lui ai dit que ce n’était pas la peine de partir du bal pour mon petit bobo ! Elle pense aux autres avant de penser à elle-même. Elle va finir par s’épuiser si elle n’y fait pas attention !

Je souris en hochant la tête. C’était vrai que Lux faisait toujours tout pour aider les autres. J’avais déjà pu le remarquer.

— J’ai essayé de l’appeler. Elle ne répond au téléphone…

Pourquoi est-ce que j’avais l’impression d’être un chouineur ? Ah, oui. Sans doute parce que c’était le cas. On aurait dit que je geignais parce que je n’avais pas eu les cadeaux que je voulais pour mon anniversaire.

— C’est normal. Elle est partie tellement rapidement ce matin qu’elle a oublié son téléphone ici. Et je ne peux pas compter sur Pascal pour me dire comment ça se passe comme il a toujours son téléphone en silencieux et qu’il ne répond donc jamais… C’est toujours l’enfer de le contacter !

Je ris devant sa réflexion. C’était également le cas avec Chelsea, mais elle, c’était parce qu’elle oubliait toujours son téléphone quelque part et qu’elle mettait des jours à le retrouver sous un coussin du canapé ensuite.

— Est-ce que vous pourrez dire à Lux que je suis passé si ça ne vous dérange pas ?

— Bien sûr que je lui dirais ! Je suis encore désolée que tu aies fait tout ce trajet pour rien…

— Ce n’est pas un problème. Je vais vous laisser le temps de vous reposer.

— C’est vraiment trop gentil de ta part…

Je pris congé pour quitter les lieux. J’étais réellement déçu, mais j’espérais que Lux allait finir par me rappeler à un moment. Même si elle devait être bien occupée pour le moment.

Je quittais rapidement l’immeuble pour rejoindre la station de métro un peu plus loin. J’aurais très bien pu voler pour rentrer chez moi, mais quand je me baladais en ville dans des vêtements civils, j’aimais agir de la sorte. C’était un privilège d’avoir des ailes, mais ça pouvait également être un fardeau. On me remarquait directement et j’aimais bien être un peu… Tranquille quand je marchais dans les rues de la ville. Même si ça voulait dire que je me faisais dévisager par des types un peu louches.

Je savais ce qui allait m’arriver une fois que je serais rentré. Mon père continuerait de me regarder d’un air bien trop content. Je voyais sans mal qu’il était réellement heureux de ce qu’il se passait avec Lux. Il m’avait dit que je souriais bien plus depuis quelques semaines. Pendant que Elijah avait passé le reste de la soirée d’hier à me regarder en ricanant. Je m’en fichais totalement. J’étais également content de ce qu’il se passait. Et je le serais encore plus une fois que Lux m’aurait rappelé.

Chapitre 3

Lux

Je plongeais mes doigts dans l’eau de la piscine à l’arrière de la maison. Je ne savais pas ce que j’essayais de vérifier. Elle était toujours à température idéale. Il faisait toujours chaud en enfer, ce qui réussissait presque à la maintenir à la bonne température. Même si une pompe aidait bien à tout réguler.

— Alors, princesse, tu as fini par revenir ?

Je me redressais, déjà souriante en me tournant vers l’origine de la voix. J’avais demandé à Mira, la gouvernante de la maison, de prévenir Bali que je voulais le voir. C’était il y a moins de cinq minutes et il était déjà présent. Ce qui voulait bien dire qu’il n’avait que ça à faire et qu’il s’ennuyait fortement. Je le connaissais suffisamment bien pour le savoir.

En attendant qu’il arrive, j’avais décidé de faire un tour dans le jardin. J’adorais cet endroit. Quand j’étais petite, j’avais tous les jouets possibles à disposition. J’en avais passé des heures à glisser sur le toboggan ou à faire de la balançoire. Quand Lilith devait me garder, elle se trouvait à hurler depuis la terrasse pour que je rentre, ce que je ne faisais pas, évidemment. Je trouvais déjà que c’était beaucoup trop amusant de la voir devenir rouge brique quand elle s’énervait de plus en plus.

J’avais réellement l’impression de me trouver dans un vrai jardin quand j’étais à l’arrière de l’annexe. Jusqu’à ce que j’aille sur Terre pour la première fois avec mon père, mon univers se résumait à ça. Au palais dans lequel je me cachais pour échapper à Mira quand je voulais la faire tourner en rond… Ou quand elle voulait me faire des cours à la maison. Je fuyais tellement vite qu’on aurait dit que j’avais été propulsé comme un missile balistique. J’avais de quoi faire au niveau des cachettes dans le palais. Le seul qui réussissait à me retrouver en à peine quelques instants, c’était mon père. Ce qui m’avait toujours désespéré.

Il y avait du gazon à l’arrière de la maison, ce qui créait un grand jardin. Bien sûr, il était totalement artificiel. Et les arbres qu’on y trouvait n’étaient pas vraiment des arbres. C’était des cactus. Il valait mieux éviter de s’y frotter.

Bien sûr, cet environnement ne m’avait jamais dérangé. Puis j’avais fini par comprendre ce que je loupais en ne me trouvant pas sur Terre…

J’aimais l’enfer. Je ne pouvais même pas dire que j’avais fini par haïr cet endroit. C’était l’endroit où j’avais toujours vécu et tout le monde avait toujours tout fait pour que je sois heureuse… En me pourrissant la vie de temps à autre.

Par contre, de vivre au grand air… C’était autre chose. J’avais grandi entourée de l’odeur du soufre, sans sentir le vent sur mon visage ou le soleil sur ma peau. La première fois que j’étais allée sur Terre, ça avait été comme une bouffée d’oxygène. J’avais eu l’impression de tout découvrir. Les odeurs, la sensation de la pluie sur ma peau et même les coups de soleil. Tout était une découverte pour moi. Même le jour et la nuit.

L’enfer suivait à peu près le cheminement de la journée. On était dans une grotte, mais il n’y faisait pas sombre comme si on était dans le trou du cul de l’univers. On n’avait pas besoin de mettre des lumières partout pour nous déplacer.

Je ne savais pas pourquoi c’était le cas. Comme si l’enfer lui-même avait décidé que les démons ne devaient pas vivre dans un environnement sombre en permanence même si ça ne voulait pas dire qu’il y faisait aussi clair qu’en pleine journée sur Terre. En fait, on aurait plutôt dit que le plafond ocre irradiait durant la journée et devenait plus sombre lors de la nuit. C’était encore plus simple ensuite… Ou plus compliqué. Parce qu’il ne faisait pas jour sur Terre en même temps partout. Mon père pouvait décider du fuseau horaire qui allait donner le ton sur les heures de jour et de nuit en enfer. On était à l’heure de Las Vegas pendant une grande partie de mon enfance et de mon adolescence. Tous les résidents de l’enfer étaient maintenant à celle de New York depuis que je me trouvais sur Terre. Je ne pouvais donc pas dire que mon père ne pensait pas à moi. Tout le monde était décalé à cause de moi maintenant.

Il faisait jour pour le moment même si la luminosité commençait à décliner. Simplement parce que nous étions en fin d’après-midi et que c’était ce qu’il était en train de se passer sur Terre. Ce qui ne m’empêcha pas de voir le grand sourire qu’affichait Bali depuis la porte-fenêtre qui permettait d’accéder à la terrasse. Il y avait une table où on déjeunait certains jours avec mon père, puisqu’on n’avait pas besoin de vérifier la météo pour nous installer dehors, mais aussi un salon de jardin dans lequel j’aimais me prélasser avec ma tablette de temps en temps.

Bali ne ressemblait plus vraiment au démon torturé que j’avais laissé sur Terre il y avait à peine deux semaines. Il semblait de nouveau être lui-même, avec ses yeux pétillants de joie de vivre et son sourire contagieux. Je n’avais pas l’impression qu’il allait devenir dingue à force de rester inactif. Je savais que Bali était du genre à pouvoir larver pendant des heures… Ou même des jours. Peut-être qu’il réussissait à s’accommoder plutôt bien de la situation. Je l’espérais en tout cas.

Je l’examinais rapidement en me rapprochant de lui. J’avais l’impression qu’il avait pu reprendre du poids et ses poignets ne me semblaient plus marqués. Et il me regardait de nouveau comme avant. Il ne semblait plus m’en vouloir. C’était ce qu’il m’inquiétait le plus. Qu’il puisse encore m’en vouloir parce que je ne l’avais pas laissé se venger. Il aurait sa vengeance le jour où les anges ne pourraient plus rien dire en nous voyant nous promener tranquillement sur Terre. C’était suffisant. Il fallait que ce le soit.

— Qu’est-ce que tu veux, je commençais à avoir le mal du pays !

— Tu m’étonnes ! Cette odeur de soufre, on en rêve quand on n’est pas ici !

Je souris en secouant la tête. Au fond, il avait raison. J’avais beau avoir un millier d’odeurs à sentir tous les jours sur Terre, c’était vrai que l’odeur de la maison me manquait par moment. J’avais tendance à la rechercher. Les premiers jours sur Terre, c’était étrange pour moi de me réveiller en sentant l’odeur des pots d’échappement et de la pollution plutôt que celle de l’enfer. Ça devait être pour ça que Lilith faisait brûler les œufs qu’elle cuisinait tous les matins…

— J’ai l’impression que tu vas mieux… finis-je par lâcher.

Bali pencha la tête sur le côté pendant que je passais devant lui pour retourner dans le salon. Je comprenais sa réaction. Les démons n’étaient pas du genre à demander aux autres s’ils allaient mieux. Tant qu’on était capable de marcher, tout allait bien pour nous. Le reste n’était que des détails.

— Si tu veux savoir si je n’ai plus envie de déglinguer le premier ange que je croiserais, la réponse est non. Je n’en ai plus envie. Et si tu veux savoir si je t’en veux toujours de m’avoir empêché d’agir, la réponse est également non. J’ai bien compris pourquoi tu as fait ça. Même si je me vengerais le jour où j’en aurais le droit. Et tout le monde me donnera raison de ce que j’ai pu faire.

Je hochais lentement la tête en le regardant. Je comprenais son désir de vengeance. Et je le comprenais encore plus maintenant que je savais ce que les anges venaient d’inventer. J’en venais même à me demander si je n’aurais pas dû le laisser faire. De toute manière, essayer d’agir de la manière la plus humaine possible ne nous avait servi à rien. Je commençais sérieusement à me demander ce qu’on allait pouvoir faire… Le but n’était pas d’éliminer tous les anges pour pouvoir investir la Terre. Alors qu’ils ne se gênaient pas de leur côté.

En vérité, j’étais complètement perdue par rapport à mon but initial, qui était de trouver un moyen de nous faire accepter afin que tout le monde vive en harmonie. Je ne savais pas ce qu’on pourrait faire. Ce que je pourrais faire pour parvenir à un résultat. Je ne savais plus quoi penser ou quoi croire. Je préférais donc me concentrer sur mon nouveau but. Je devais faire en sorte que les anges n’utilisent pas leur nouvelle arme. On pourrait voir pour le reste plus tard.

— Je ne sais pas ce que le monde dira, mais ce n’est pas moi qui irais te contredire. Tu veux boire quelque chose ?

J’ouvris le frigo pour regarder ce que je pouvais y trouver. C’était bon, j’étais sauvée ! Il y avait du Coca ! Par contre, je ne comprenais pourquoi je pouvais également y voir un morceau de fromage qui semblait dater d’avant ma naissance… Il y avait du relâchement chez Mira. Ce n’était pas mon père qui aurait pu jeter quoi que ce soit à la poubelle.

— La même chose que toi. Même si je ne suis pas certain que les princesses doivent servir leurs sujets.

— Tu veux bien aller l’expliquer à Lilith ? Je crois qu’elle n’a pas trop compris le principe de son côté.

Si on suivait la logique de Bali, c’était à Lilith de tout faire pour que je sois à l’aise en permanence. Alors qu’elle ne se gênait pas pour essayer de me rendre encore plus folle que je devais l’être à la base.

— Tu crois qu’après tant d’années, je peux encore essayer de lui faire comprendre quelque chose ? Tu te trompes fortement ! Elle me regarderait de travers avant de partir dans l’autre sens !

Il éclata de rire pendant que je faisais la même chose de mon côté. C’était tout à faire son genre.

Je sortis deux canettes de Coca du frigo, en tendant une à Bali. On s’installa ensuite sur l’une des chaises de bar devant le plan de travail. On mangeait ici, de temps en temps, avec mon père. Notamment quand Mira avait sa soirée de libre et qu’elle nous laissait un repas froid pour dîner.

— Sinon, ça va ? Tu ne t’ennuies pas trop ?

— Oh si ! Ton père me donne du travail de temps à autre, mais s’il m’occupe de trop, c’est Gaziel qui râle parce que je prends son travail alors qu’il est le second de ton père.

— J’espère juste que tu lui rappelles que le second de mon père, c’est bien moi.

— Oui. Ce doit être pour ça que je l’énerve encore plus dès que j’ouvre la bouche. Mais de toute manière, je sais que je pourrais venir sur Terre dans quelque temps. Ça va me permettre de moins m’ennuyer.

Je levais un sourcil surpris dans sa direction. Ce devait être pour ça qu’il n’arrêtait pas de sourire alors qu’il avait l’air au bord de la dépression d’après les dires de Paymon et de Lilith.

— Comment est-ce que tu peux déjà le savoir ?

— J’ai croisé ton père en venant ici. Il m’a informé de ce qu’il se passe et m’a dit de recommencer à m’entraîner au lieu de glander toute la journée. Maintenant que j’ai une raison de le faire, je vais m’y remettre !

— Tu avais déjà une raison de le faire à la base. Il faut que tu restes au niveau.

C’était bien trop simple de perdre la main quand on ne s’entraînait pas. J’avais passé une heure à travailler avec mon père un peu plus tôt. Il avait également voulu voir comment fonctionnaient mes pouvoirs angéliques maintenant. Je ne savais pas s’il était fier de moi en me voyant les utiliser ou s’il en était dégoûté. Il s’était contenté de dire que c’était bien avant de partir.

— Je sais. Mais ce n’est pas facile de trouver la motivation de s’entraîner quand on ne sait pas quand on pourra de nouveau servir à quelque chose.

— Ne dis pas ça. Tu es utile ici.

— Peut-être. Mais je ne suis certainement pas à ma place au palais de ton père. Si encore je devais régenter mon propre territoire, je trouverais de quoi m’occuper, mais ton père m’a assigné à un poste ici. Je n’ai pas ma place dans ce palais, contrairement à toi. Et j’avais le sentiment d’avoir ma place sur Terre avec ma mission.

— Et nous, on va faire en sorte que tu aies une place sur Terre, mais pas uniquement pour une mission.

Bali leva sa canette de Coca vers moi, comme s’il voulait me porter un toast. Il semblait se retenir de rire.