Tatianna, la chasseuse blanche - Tome 3 - Stéphane Chauvin - E-Book

Tatianna, la chasseuse blanche - Tome 3 E-Book

Stéphane Chauvin

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Beschreibung

Dans l’ombre, l’Apocalypse guette. Sélène a disparu et l’énigmatique scientifique caché dans le ciel prétend vouloir anéantir le mal dans le cœur des Hommes. Le temps, lui aussi, dissimule bien des mystères. Tatianna devra rassembler son courage pour sauver ses sœurs perdues, affronter plusieurs dangers et découvrir enfin le vrai pouvoir des éléments.

À PROPOS DE L'AUTEUR

Geek et otaku, Stéphane Chauvin se passionne pour le Japon, les jeux vidéos et la culture populaire. S’inspirant de son vécu et de ses expériences, il place la magie de son héroïne dans un monde qui pourrait être le vôtre.

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Stéphane Chauvin

Tatianna, la chasseuse blanche

Tome III

Secrets du ciel et du temps

Roman

© Lys Bleu Éditions – Stéphane Chauvin

ISBN : 979-10-422-1444-9

Le code de la propriété intellectuelle n’autorisant aux termes des paragraphes 2 et 3 de l’article L.122-5, d’une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective et, d’autre part, sous réserve du nom de l’auteur et de la source, que les analyses et les courtes citations justifiées par le caractère critique, polémique, pédagogique, scientifique ou d’information, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite (article L.122-4). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L.335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle.

Chapitre I

Message chiffré

Cela faisait deux jours que nous étions rentrées de Paris. Nous avions fait la découverte de mon fragment de plaque, mais également d’un nouvel ennemi, un Cavalier de l’Apocalypse. Et surtout, plus terrible encore, en rentrant, nous nous étions aperçues qu’Hortense était inconsciente dans son potager et que Sélène avait disparu.

J’étais terriblement inquiète et je m’en voulais, car c’était moi qui avais voulu aller à Paris. Même si désormais, il ne manquait plus qu’un seul fragment à ma plaque, je ne me pardonnerais jamais de les avoir laissées seules au manoir.

Je m’éveillai d’une courte nuit peu réparatrice et j’allai dans la chambre d’Hortense. Nous l’avions couchée dans son lit. Toujours inconsciente, Éliane la veillait.

« Tu as réussi à dormir ?

— Un peu, oui. Toujours aucun changement ?
— Non, elle ne réagit pas.
— Si seulement je n’avais pas…
— Et pour la centième fois, ce n’est pas ta faute. Tu ne pouvais pas deviner. »

Elle se leva et vint me prendre dans ses bras. J’avais bien évidemment essayé de soigner Hortense quand nous étions rentrées, mais elle n’avait aucune blessure physique. Et comme Sélène avait disparu…

J’allai ensuite me chercher un gâteau à la cuisine puis j’allai voir Océane. Elle prenait souvent des nouvelles d’Hortense, mais elle passait le plus clair de son temps dans notre QG. Elle était obsédée par le fait de comprendre ce qui s’était passé. Je la retrouvai derrière ses écrans.

« Bonjour, Tatianna, ça va ?

— Pas vraiment, et toi ?
— Je me concentre sur mon diagnostic du système du manoir.
— Tu as trouvé quelque chose ?
— Pour l’instant, tout ce que j’ai trouvé c’est qu’une backdoor dans le système a été installée depuis l’intérieur du manoir. Quelqu’un depuis le PC d’Eliane a créé un accès à mon système. Le plus bizarre, c’est que la seule chose qu’il ait faite, c’est de maintenir le système en mode nominal pendant environ dix minutes puis il a tout supprimé. J’ai passé une journée à corriger la faille du système et cela ne se reproduira plus.
— Mais qui a eu accès à l’ordinateur d’Eliane ?
— Malheureusement, cela ne peut être que Sélène elle-même. Hortense a encore du mal ne serait-ce que pour se servir d’un interrupteur alors faire ça impossible. J’ai vérifié les logs et c’est sa session qui a été utilisée. Elle s’en servait pour commander ses cartes de jeux.
— Elle ne nous aurait pas trahies quand même ? Je me mis à pleurer.
— Non, car, et je viens de trouver cela à l’instant, une espèce de message chiffré a été sauvegardé dans l’ordinateur juste avant la déconnexion. Je pense qu’elle nous a laissé ça pour nous expliquer ou du moins nous dire quelque chose. Le problème, c’est qu’il faut une clé pour le déchiffrer et je n’ai aucune idée de ce que c’est.
— Tu peux voir ce qui s’est passé avec les caméras de surveillance ?
— Par respect pour notre vie privée, les seules caméras internes au manoir sont dans le QG. Je ne pensais pas qu’on aurait un jour besoin de s’espionner.
— Ce n’est pas ta faute. On n’y comprend rien. Même si j’ai trouvé le morceau de ma plaque, je…
— Arrête de te sentir coupable. Je ne dors jamais et encore moins tant que je n’aurais pas trouvé ce qu’il s’est passé. Je vais essayer de remonter l’adresse IP que j’ai récupérée, mais cela va prendre du temps. Et Hortense, toujours pareille ?
— Oui. Hélas… je vais aller m’entraîner un peu à côté. S’il y a quoi que ce soit…
— Je t’appelle.
— Merci. »

J’allai ensuite sur le terrain d’entraînement. Océane m’avait prêté ses clés pour les râteliers d’armes. Je ne voulais pas qu’Eliane quitte Hortense alors j’avais décidé de m’entraîner seule avec les fusils. Je pris d’abord un pistolet 9 millimètres. Après avoir compris son maniement, je commençai à tirer quelques coups. Ma précision augmenta rapidement et je fis mouche au bout de trois essais. Je vidai plusieurs chargeurs. Je pris ensuite un fusil de sniper léger. C’était ma catégorie d’armes « favorite ». Je me mis en position et fis apparaître des cibles au fond du stand. Je fis un carton. Alors que je reposai le fusil pour aller déjeuner, mon bracelet bipa.

« Océane, Tatianna ! Hortense commence à bouger et à se réveiller, venez vite. »

Je remontai aussi vite que je pus avec Océane. Nous arrivâmes dans la chambre. Hortense bougeait comme si elle faisait un cauchemar, elle respirait rapidement. D’un coup, elle prononça un mot :

« Dominaria, Dominaria…

— C’est quoi ce mot ?
— Aucune idée, mais je l’ai déjà entendu ou lu quelque part. »

Brusquement, Hortense se rendormit. Elle semblait de nouveau paisible. Ses chats étaient tous là auprès de leur maîtresse. Je m’étais occupée d’eux depuis que nous étions rentrées. Ils allaient au quatrième étage pour se nourrir et faire leurs besoins puis revenaient pour veiller sur leur maîtresse. Océane prit son téléphone et rechercha le mot qu’Hortense avait prononcé.

« Cela vient de Sélène. Dominaria est l’un des mondes où se déroule l’histoire de son jeu de cartes.

— C’est bien joli, mais cela ne nous avance pas.
— Attends une seconde, le message chiffré, si ça se trouve, c’est la clé pour le décoder.
— Comme un mot de passe ?
— Oui. Je retourne au QG. »

Océane redescendit. Je restais auprès d’Hortense le temps qu’Eliane aille nous chercher un repas à la cuisine. Je mangeai sur le pouce. Puis Océane m’appela de nouveau.

« Tatianna, j’ai trouvé. Descends, s’il te plaît. »

Je redescendis aussitôt.

« Le mot Dominaria n’était pas un mot de passe. C’est le nom d’un fichier qu’elle a caché dans le PC d’Eliane. Et ce fichier permet de décoder le message chiffré. Sélène a de sacrées compétences en informatique. Elle est presque aussi douée que moi.

— Tu peux le lire ?
— Le décodage sera fini dans quelques secondes. »

Nous attendîmes puis un texte apparut sur l’écran, nous le lûmes ensemble :

« Mes sœurs, j’espère que ce message vous parviendra. Depuis que vous êtes parties à Paris, je suis victime de quelqu’un qui communique avec moi au niveau télépathique. La première chose qu’il ait faite est de m’empêcher de vous prévenir. Mais contrôler quelqu’un de cette façon est complexe. Je me sers de la partie de mon esprit qui vous aime comme d’un refuge. Quand il m’a ordonné d’aller sur l’ordinateur dans la salle de jeux pour m’infiltrer dans le système, j’en ai profité pour laisser ce message chiffré pour vous. J’ai alors ressenti une attaque mentale vers Hortense. Juste de quoi la mettre KO. J’ai juste eu le temps de lui envoyer par télépathie la clé de ce message. J’ignore qui et ce qui se passe, mais je sais que vous m’aiderez. Soyez prudentes, car quelqu’un ou quelque chose qui peut atteindre l’esprit d’une déesse doit être d’une puissance extraordinaire. Je vous aime. Sélène. »

Je relus plusieurs fois le message. Un profond soulagement me traversa, car Sélène ne nous avait pas trahies. J’eus honte de moi d’avoir douté d’elle. Océane dit :

« Petite sœur, je jure de trouver qui a fait ça et de te ramener parmi nous. Courage.

— Elle a donc été enlevée ?
— Oui. Maintenant, je dois trouver d’où provient l’adresse IP. Je parie que celui qui a fait ça s’est servi de la backdoor pour empêcher les alarmes de se déclencher ou pour neutraliser le bouclier le temps d’enlever Sélène. »

Cela prit plusieurs heures. Océane trouva finalement.

« Ce malin s’est protégé derrière des serveurs à VPN. Mais ce doit être un radin, il en a utilisé un gratuit. Ces services conservent les logs de connexions pour les revendre. Ce n’est pas illégal et c’est comme ça qu’ils se financent. Bref, je me suis introduite dans leur base de données et j’ai trouvé la source : la bibliothèque de notre quartier. Pas très loin du lycée.

— Ce n’est pas dangereux de faire ça ?
— Peu importe, je ferai tout pour retrouver Sélène.
— C’est quoi la prochaine étape ?
— On va aller à la bibliothèque. Trouver le poste qui a été utilisé et voir d’où ça vient. Tu m’accompagnes ?
— Et comment ! »

Nous avertîmes Eliane. Elle voulut rester auprès d’Hortense. Océane et moi prîmes la voiture.

« J’ai également averti Bastien de la disparition de Sélène. Il a commencé une enquête discrète, mais comme il doit remplir ses fonctions de capitaine de police, il ne peut pas faire ça à plein temps. Il m’a dit que si j’avais besoin, je pouvais l’appeler. »

Chapitre II

La bibliothèque

La bibliothèque était située à trois rues du lycée. Océane se gara devant un grand bâtiment à deux étages. Nous étions en fin d’après-midi et pendant les vacances il n’y avait pas foule. Nous rentrâmes. L’intérieur ressemblait beaucoup à notre bibliothèque. Océane alla nous inscrire à l’accueil.

« Nous sommes étudiantes dans le lycée voisin. Nous voudrions nous inscrire pour étudier.

— Bien sûr, mesdemoiselles. Vous êtes motivées en pleines vacances d’été. »

Une fois l’inscription faite, Océane demanda :

« Un ami m’a laissé un travail sur un des postes informatiques, j’ai son autorisation pour le récupérer. C’est le poste numéro 6. Pouvez-vous m’indiquer ?

— Le poste numéro 6 est au deuxième étage. Section histoire et géographie.
— Merci beaucoup.
— Je vous en prie, bon courage pour vos études. »

Nous montâmes au deuxième étage. Tout l’intérieur sentait le papier. Il n’y avait pas grand monde. Je reconnus quand même un ou deux élèves de notre lycée. Ils nous saluèrent. Au Japon, les études étaient prises très au sérieux et beaucoup d’élèves continuaient à travailler même pendant les vacances ou les fêtes. Nous arrivâmes dans la section histoire et géographie. Le poste était situé au fond de l’allée près d’une fenêtre. Océane s’y installa, car il était libre. Elle sortit son propre ordinateur, brancha une clé USB sur un des ports et ouvrit une session.

« Voyons, l’attaque contre le manoir a bien été menée d’ici. L’IP correspond. Il va me falloir un peu de temps.

— Nous sommes en fin d’après-midi, tu vas avoir le temps ?
— La bibliothèque ferme tard en été. Prends un livre en attendant, il vaut mieux faire le moins de bruit possible.
— D’accord. »

Je parcourus la section géographie et me choisis un livre sur l’archipel d’Hawaï. Je m’installai à une table avec un petit cahier en faisant semblant de prendre des notes. Bien sûr, je n’en avais pas besoin grâce à mon omniscience, mais je voulais me fondre dans le décor. À un moment, je levai le nez vers la fenêtre et je remarquai une perturbation, comme un flou dans l’air devant le carreau. Je ne sentais aucune aura magique. Je me levai et cela disparut. Aurais-je mal vu ?

« Océane, je crois que j’ai vu quelque chose par la fenêtre.

— Hein ? Excuse-moi, mais…
— Continue, je vais voir. »

Je sortis de la section et je retournai aux escaliers. Il y avait un accès au toit. Je me dis que ce serait la meilleure solution. Je montai une volée de marches puis je m’appuyai sur la barre de la porte. Elle était ouverte. Je sortis sur le toit. Il n’y avait rien mis à part le toit bétonné et une ou deux craquelures dans le sol. J’allai au-dessus de la fenêtre où j’avais cru voir quelque chose. Il n’y avait rien. Je commençai à me dire que mon inquiétude pour Sélène allait me rendre folle. J’entendis un message par la porte :

« Mesdames, messieurs, la bibliothèque va fermer ses portes dans cinq minutes, veuillez-vous diriger vers les sorties, merci. »

Mon bracelet bipa.

« Je n’ai pas encore fini, je vais essayer de me cacher pour qu’on se fasse enfermer ici. Où es-tu ?

— Je suis sur le toit. J’ai cru voir un truc, mais ce n’était rien.
— Reste là-haut et dis-moi quand les employés seront partis.
— OK. »

Je vis les visiteurs quitter la bibliothèque puis les employés fermèrent les portes et s’en allèrent.

« C’est bon, il ne doit plus y avoir personne.

— Ouf, ce n’est pas évident de se cacher sans Sélène. Bon je m’y remets. »

Le soleil baissait et je me demandais vraiment ce que j’avais vu. J’étais encore plongée dans mes pensées quand je vis non pas une, mais deux taches floues se diriger vers moi. Je ne sentais aucune magie. D’un seul coup, deux espèces de machines volantes noires apparurent. Elles avaient des sortes d’armes et des caméras sur le devant. Elles semblaient me viser. Un faisceau rouge me traversa alors le corps, mais je ne ressentis rien. Je ne bougeais pas, car je ne savais pas comment réagir. D’instinct, j’aurais bien démoli ces trucs, mais je craignais de faire du bruit et surtout des dégâts. Le problème fut réglé quand j’entendis un bip et que l’une d’entre elles me tira dessus avec un missile. Je me transformai aussitôt et me protégeai de mon bouclier. Le missile explosa dessus. L’autre me contourna et m’en envoya un aussi. Même résultat. Je n’avais plus le choix. Tout en modérant ma magie, j’envoyai une volée d’aiguilles de lumière dans leur direction. Elles les esquivèrent. Océane arriva en trombe par l’escalier.

« Qu’est-ce que tu fais ? »

Elle vit les deux machines autour de moi. Passer l’étonnement, elle me cria :

« Ce sont des drones de combat. Démolis-les ! »

Il ne m’en fallut pas plus. Je tendis ma main gauche pour en ralentir un avec ma magie du temps puis j’activai ma lance et je le coupai en deux. Il explosa et je reportai mon attention sur l’autre. Il me tira dessus avec sa mitrailleuse. Je me protégeai à nouveau. Océane se transforma à son tour et d’un jet d’eau le déstabilisa. Je m’élançai pour l’achever de la même façon. Les restes des deux machines retombèrent sur le toit.

« Bon sang, mais c’est quoi ce cirque ?

— Je n’en sais rien, ils sont apparus comme ça, d’un coup.
— Il vaut mieux filer avec le bruit qu’on a fait. Je vais juste récupérer mon ordinateur et je vais effacer les enregistrements des caméras de la bibliothèque sinon, on est grillées. »

Océane redescendit rapidement et alla chercher son ordinateur. Nous allâmes ensuite dans la salle de sécurité et elle prit soin d’effacer les enregistrements, mais en fit une copie avec sa clé avant. Nous ressortîmes par le toit puis, en sautant, nous atterrîmes sur le parking. Océane démarra la voiture. Une voiture de police nous croisa un peu plus loin.

« Décidément, j’aimerais bien comprendre ce qui se passe.

— Moi aussi.
— Tu les as vus de la fenêtre ?
— J’ai vu une sorte de flou devant le carreau puis quand ils me sont arrivés dessus.
— Ces engins sont de la technologie militaire. Je n’en avais jamais vu d’aussi perfectionné en plus. Mais cela ne m’étonne qu’à moitié. Celui qui en a après nous doit avoir de sacrés moyens ! »

De retour au manoir, nous tînmes une réunion avec Eliane.

« On n’avait pas assez des démons, maintenant ce sont des machines qui nous attaquent !

— La bonne nouvelle, c’est que j’ai récupéré les enregistrements avant de les effacer. On va pouvoir voir qui a manipulé l’ordinateur et comme je sais quand l’attaque a eu lieu.
— Et pour le toit ?
— On a juste détruit les deux drones. Je vais prévenir Bastien que c’est nous qui avons fait ça pour nous défendre. Il nous couvrira.
— Heureusement qu’il est de notre côté. »

Eliane retourna auprès d’Hortense. Je descendis au QG avec Océane. Elle brancha la clé sur un des ordinateurs.

« Bien, voyons, la backdoor a été utilisée à 14 h 10 quand nous étions en train d’atterrir. Il y a deux caméras par étage plus une à l’entrée et une sur le parking. Je vais remonter une heure avant. Je vais commencer par celle du deuxième étage où l’on voit le pc. »

Elle cala l’image une heure avant. On voyait l’intérieur de la bibliothèque en noir et blanc. Nous commençâmes à visionner en léger accéléré. On voyait l’heure en bas de l’image. Pendant près de cinquante minutes, personne ne vint dans la section ni se servit de l’ordinateur. Puis, brusquement, un jeune garçon s’approcha. Il s’assit devant et inséra une clé USB dedans. L’angle de la caméra permettait de voir ce qu’il faisait.

« Nom d’un chien. C’est bien lui. Regarde, il accède au système du manoir et… il désactive le bouclier et les détecteurs. C’est bien comme ça que Sélène a été enlevée. Sans bouclier, n’importe qui peut rentrer ici.

— Au fait, j’y pense, tu ne pourrais pas la localiser grâce au fait qu’elle alimente toujours nos défenses et le bouclier ?
— Hélas non, Sélène m’a un jour expliqué qu’elle alimentait le bouclier grâce à un puits d’énergie magique connecté au générateur du manoir. Elle peut être n’importe où sur la planète, cela fonctionne quand même. Dis-toi que tant qu’elle alimente, elle est en vie.
— Maigre consolation. »

Nous reportâmes notre attention sur les images. Le garçon devait avoir quatorze ou quinze ans, habillé en tenue d’été. Seul son comportement semblait un peu bizarre. Il avait les yeux dans le vague, comme quand on se réveille mal. Une fois son œuvre achevée, il reprit sa clé et partit. Océane le suivit avec les caméras jusqu’à l’entrée. Les employés ne firent pas attention à lui. Il ressortit et une fois sur le parking, il sembla attendre pendant une minute. Une rafale de vent balaya quelques feuilles puis, soudainement, il fit un pas en avant et disparut de l’image.

« Mais comment ?

— Rappelle-toi les drones, je te parie que c’est un dispositif de camouflage optique très perfectionné. Il a dû monter dans un véhicule ou un appareil équipé de ça.
— On fait quoi maintenant ?
— Le problème, c’est que je pense que c’est délibérément qu’ils ont lancé leur attaque ainsi. En se servant d’un poste public comme ça et d’un support physique, je ne peux pas retracer plus loin. Je vais essayer de retrouver l’identité de ce garçon.
— OK, je te laisse travailler. Je retourne auprès d’Hortense. »

Je remontai avec plus de questions dans ma tête que de réponses. Pourquoi ce jeune garçon nous avait attaquées ou du moins participé à l’enlèvement de Sélène ? Qui lui donnait ses ordres ?

J’arrivai à la chambre d’Hortense quand j’entendis un cri. Je me précipitai. Hortense venait de se réveiller pour de bon.

« Eliane, mais, qu’est-ce qui s’est passé ? J’étais au jardin et…

— Doucement. Là. Ne t’inquiète pas. Tu te sens bien ?
— Oui, j’ai l’impression d’avoir dormi pendant trois jours, mais sinon…
— C’est parce que c’est le cas, marmotte !
— Quoi ?
— On va t’expliquer, prends ton temps. »

J’avertis aussitôt Océane. Tous les chats d’Hortense fêtèrent son réveil par un concert de ronronnements. Elle les caressa tous.

« Vous étiez tous terriblement inquiets. Merci d’avoir veillé sur moi. »

Elle s’assit sur le bord de son lit. Océane arriva.

« Hortense ! Quel soulagement !

— Vous pouvez m’expliquer ce qu’il s’est passé ? »

Océane lui fit un résumé de la situation. Notre retour, nos découvertes et notre rencontre explosive sur le toit de la bibliothèque.

« Je ne comprends pas. Je jardinais tranquillement quand j’ai eu brusquement une envie irrépressible de dormir. Au point de me coucher dans le jardin.

— Tu n’as rien remarqué de bizarre avant ? Même avec Sélène ?
— Non, rien. Mais comme elle ne parle pas…
— Ce n’est rien.
— La seule chose, c’est que j’ai rêvé plusieurs fois d’un mot. J’ai un peu de mal à me souvenir.
— Dominaria ?
— Oui, c’est ça.
— C’est Sélène qui te l’a transmis. Cela nous a permis de décoder son message. »

Au même moment, le téléphone d’Océane vibra. Elle mit le haut-parleur :

« Bonsoir Océane.

— Bonsoir Bastien.
— Je vous appelle pour vous dire que nos services ne vous soupçonnent pas pour l’instant pour ce qui s’est passé à la bibliothèque. L’enquête est en plein brouillard. Comment deux drones de technologie aussi avancée se sont-ils retrouvés détruits comme ça ? Bref, étant donné que vous vous êtes inscrites à la bibliothèque juste avant l’incident, il se pourrait qu’on vous convoque comme témoins, mais les militaires commencent déjà à mettre leur nez là-dedans. Toute l’affaire va sûrement finir dans les cartons.
— D’accord, on répondra qu’on y est allées pour réviser nos cours pour la rentrée et qu’on n’a rien vu. En revanche, je peux vous demander un service ?
— Évidemment.
— J’aimerais identifier quelqu’un sur les enregistrements que j’ai récupérés.
— Vous pouvez m’envoyer une ou deux photos de bonne qualité discrètement ?
— Oui, je vous envoie ça.
— Je vais vous donner une adresse électronique sécurisée dont je me sers pour mes activités “annexes”. Je vais faire au plus vite, mais je ne vous garantis rien.
— Faites au mieux, merci, Bastien.
— Comment va Hortense ?
— Elle vient de se réveiller. Elle va bien.
— Ha, tant mieux. Je vous laisse. Je vous recontacte dès que j’en sais plus.
— Merci. Bonsoir Bastien. »

Elle raccrocha. Nous passâmes le reste de la soirée avec Hortense.

Chapitre III

Invitation surprise

Le lendemain matin, Océane reçut une réponse de Bastien.

« Il n’a pas eu à chercher bien loin. Le jeune garçon est le fils de l’un des plus grands scientifiques américains spécialisé dans la technologie militaire. Il y a trois ans, il a disparu avec son fils alors qu’il venait de perdre sa femme. L’affaire a fait grand bruit à l’époque. Je me suis servie de certains de ses travaux pour créer le système de défense du manoir. Cela ne m’étonne pas qu’il ait pu désactiver nos défenses comme ça.

— Alors, c’est ce type qui a enlevé Sélène ?
— Peut-être, mais Sélène a été victime d’une attaque télépathique. Pour les drones, je veux bien, mais…
— De toute façon, on le trouve, on le démolit et on la récupère.
— Le problème est qu’on ignore où il est.
— Bastien n’a rien trouvé d’autre ?
— Non, toute l’affaire est marquée du sceau du secret aux États-Unis. »

Dans le QG, un bip se fit entendre.

« C’est quoi ?

— Juste le facteur qui vient de passer.
— Je vais y aller. J’ai besoin d’air.
— OK. »

Je remontai et je sortis. J’allai jusqu’au portail et j’ouvris l’arrière de notre boîte à lettres. Il y avait deux lettres. L’une d’elles venait d’Anthony et l’autre n’avait pas d’expéditeur. J’ouvris d’abord la lettre d’Anthony.

« Ma chère Tatianna, j’espère que tu vas bien et que tes vacances se passent bien. J’ai bien reçu tes lettres. Mais comme tu ne m’as pas laissé d’adresse en France, je t’écris chez toi. Pour ma part, mes vacances sont reposantes à défaut d’être agréable. Ma famille vit dans un endroit reculé. J’ai encore beaucoup de mal à communiquer avec mon père. Ma mère est en revanche fière de moi. J’aimerais un jour te les présenter.

Je passe mon temps à étudier et je participe à la vie de ma famille malgré tout. J’aimerais vraiment avoir des relations comme toi et tes sœurs. Cela doit te paraître idiot, mais il n’y a qu’à toi que je peux ouvrir mon cœur.

Sache que quoi qu’il arrive, je t’aime et la pensée de te revoir me donne l’énergie pour déplacer les montagnes. J’attends ta réponse avec impatience. Avec tout mon amour, Anthony. »

Avec la lettre, il y avait une carte postale d’une région boisée à une centaine de kilomètres de Tokyo. Je relus la lettre plusieurs fois. En rentrant, Eliane remarqua que je la serrai contre mon cœur.

« Oh, toi, tu as reçu une lettre d’Anthony ! »

Je devins plus rouge que les tomates d’Hortense. Elle rigola.

« Je suis contente pour toi. Après tout, tu es celle qui mérite le plus d’avoir un petit ami. C’est quoi l’autre lettre ?

— Je ne sais pas. Je ne l’ai pas encore ouverte. »

Je la décachetai.

« Mesdemoiselles les déesses. Je me dois de me présenter. Je m’appelle Kévin et je suis le garçon que vous avez dû voir sur les enregistrements vidéo de la bibliothèque. Je suis bien celui qui a attaqué le système de votre manoir et permis le départ de votre amie.

Je tiens tout d’abord à vous dire que votre amie va bien et qu’elle est à mes côtés avec mon père. Si nous avons utilisé cette méthode pour le moins cavalière, c’est parce que nous travaillons sur un projet qui va changer la face de ce monde. Plus de guerre, plus de violence, plus de mal. Je ne puis vous en dire plus pour des raisons que vous comprendrez.

Notre grand projet nécessite l’intervention de votre amie. C’est pourquoi nous l’avons invitée contre son gré. Nous ne pouvions risquer un refus. À présent, je vous invite à votre tour à nous rejoindre. C’est la condition qu’a posée votre amie pour nous aider. Votre démonstration avec nos drones a convaincu mon père de votre puissance. Si vous êtes d’accord, rendez-vous ce soir à minuit sur le toit de la bibliothèque. Je vous y attendrai. Si je ne vois personne, je repartirai simplement. Sélène vous veut à ses côtés et une fois notre projet accompli, vous serez de nouveau ensemble et en plus, vous serez libres. En espérant vous rencontrer. Kévin. »

J’en avais les mains qui tremblaient. Celui qui avait enlevé Sélène osait nous écrire et nous inviter comme ça. Je retournai au QG et Océane lut la lettre.

« C’est gonflé quand même ! fit Eliane. Il kidnappe notre sœur et maintenant il nous invite.

— Ce serait quoi, ce grand projet sur lequel ils travaillent ?
— Je n’en sais rien, mais Sélène est la seule à avoir des pouvoirs télépathiques. Imagine qu’ils mettent au point une arme ou autre chose.
— Des humains qui veulent détruire Chaos et le mal ?
— On ignore les tenants de ce qu’ils font et pourquoi.
— En attendant, on fait quoi ?
— S’il y a une chance qu’on ramène Sélène, je vote pour qu’on y aille.
— Et si c’est un piège ?
— On les démonte.
— Hortense ?
— Je ne suis là que depuis…
— Tu as ton mot à dire comme nous toutes.
— Alors, je dis on y va. »

La décision fut prise à l’unanimité. Nous nous préparâmes bien que nous ne sussions vraiment pas ce qui nous attendait. Le soir, nous prîmes la voiture et allâmes jusqu’à la bibliothèque. Océane se gara. Visiblement, les stigmates de notre combat avaient été effacés efficacement. Un simple panneau sur la porte indiquait que l’accès au toit était désormais interdit. À l’heure qu’il était, il n’y avait pas un chat. Océane prit quelques instants pour neutraliser les caméras.

« Même méthode qu’eux. J’ai placé une backdoor dans le système de la bibliothèque. On ne risque rien. Je fais tourner les images en boucle pour que ce ne soit pas suspect. »

Grâce à Hortense, nous sautâmes sur le toit sans effort. Je regardai ma montre : vingt-trois heures cinquante. Nous inspectâmes le toit, mais il n’y avait rien. Minuit sonna. J’entendis brusquement un bruit de moteur qui semblait se noyer dans le vent.

« Je n’ai jamais entendu d’appareil faire ce bruit ! Ce n’est pas un hélicoptère ni… »

La seconde d’après, un appareil noir assez grand se matérialisa sous nos yeux. Dans la nuit, même mes yeux ne l’avaient pas vu venir. Une rafale de vent accompagna son arrivée. Il avait deux moteurs à l’arrière et semblait flotter dans les airs. Il se posa et les moteurs se rétractèrent dans la structure. Le bruit disparut. Une porte à l’arrière bascula. Le jeune garçon descendit. Il était seul et sans arme à première vue. Ses yeux étaient toujours dans le vague. Sa voix était claire en revanche.

« Bonsoir, mesdemoiselles les déesses. Je vous remercie de ne pas m’avoir abattu dès que vous m’avez vu.

— Commence par nous dire où est Sélène avant que je m’énerve ! fit Eliane.
— Je me doutais que vous auriez cette réaction. Votre amie va bien et attend votre venue. Je vais vous conduire à elle, mais si vous souhaitez parler, je vous prierais de monter à bord. Nous ne sommes pas en sécurité sur ce toit. »

Nous hésitâmes puis je pris la tête et je montai. L’engin était divisé en deux, un cockpit avec deux sièges et un écran devant et un grand espace à l’arrière pour les passagers. Mes sœurs montèrent derrière moi. Le garçon monta en dernier et appuya sur un bouton. La porte se releva et se ferma rapidement.

« Bienvenue à mon bord. Vous pouvez vous asseoir. Nul besoin de vous attacher. Cet appareil est conçu pour amortir les vibrations et les accélérations. L’une d’entre vous peut même venir devant avec moi. »

Il alla s’asseoir dans le fauteuil de gauche et j’allai avec lui dans celui de droite. Le tableau de bord était simple. Un écran et des commandes. Rien de plus. L’appareil se remit à faire du bruit sans que ce soit désagréable. Je sentis une légère secousse et nous décollâmes. J’entendis les moteurs se remettre en place et nous filâmes à une vitesse impressionnante. Il n’avait pas touché aux commandes.

« Notre vol est entièrement automatisé. Nous en avons pour deux heures environ.

— Vous êtes bien le jeune garçon des images ?
— Et je pense que vous connaissez déjà mon identité.
— Vous êtes le fils de l’un…
— Des plus grands scientifiques militaires, etc. J’ai entendu cette rengaine des centaines de fois. Le vol va être long. Je vais donc vous raconter mon histoire. Mais d’abord, j’aimerais connaître vos prénoms afin de pouvoir vous parler sans détour.
— Je m’appelle Tatianna. Je suis celle qui manie la lumière.
— Je suis Océane. Je suis la fille de l’eau.
— Je suis Hortense. Fille de la terre et de la vie.
— Et je suis Eliane, maniant le feu.
— Merci. Le reste de vos histoires ne me regarde pas. »

Il tourna son fauteuil vers l’arrière et j’en fis autant.

« Je suis effectivement le fils d’un des chercheurs américains les plus éminents. J’ai aujourd’hui 15 ans. Mon père travaillait pour la DARPA, l’organisme américain de recherche militaire. Les drones et cet appareil, que nous appelons aérojet, sont un exemple de ce que mon père a développé. Ma mère quant à elle était une journaliste. Elle avait accepté le fait que mon père ne pouvait pas tout lui dire. C’était un contrat entre eux.

Il y a trois ans et demi, ma mère commença à investiguer sur totalement autre chose. Quelque part au Colorado, un événement très étrange avait eu lieu. Dans une zone très retirée, une vingtaine de corps humains avaient été découverts. Un véritable massacre. Les corps portaient des blessures très étranges et aucune arme ne fut découverte. Les services de police locaux et même le FBI n’avaient aucune piste. Toutes les victimes étaient des marginaux, voire des gens sans aucune identité. L’affaire fut rapidement oubliée, mais ma mère s’acharna à découvrir la vérité. Elle réussit à remonter la piste d’un des groupes grâce à des tatouages sur les corps. Des glyphes que les légistes avaient pris pour de simples symboles gothiques. Ma mère était convaincue que c’étaient les marques d’une secte. Elle parvint à localiser un repaire dans une petite ville non loin. Elle essaya donc d’infiltrer ce groupe. Malheureusement, elle découvrit trop tard que les personnes sans aucun pouvoir n’intéressaient pas ces gens et surtout qu’ils étaient le mal incarné. Ma mère fut retrouvée écorchée vive avec un glyphe gravé sur le ventre. »

Il s’arrêta un instant. Je ne percevais presque aucune émotion chez lui.