Brochettes de pigeons à Quiberon - Christophe Chaplais - E-Book

Brochettes de pigeons à Quiberon E-Book

Christophe Chaplais

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Beschreibung

En ce début d’été, Arsène Barbaluc, patron du restaurant “L’Assiette du terroir”, est satisfait de la tournée qu’il vient d’effectuer auprès de ses fournisseurs. Plus qu’une seule nuit à Quiberon et il rentre à Brest !
Hélas, cette même nuit, l’un des propriétaires de l’hôtel où il loge est assassiné. Pour les enquêteurs, aucun doute n’est permis : le meurtrier ne peut être que l’un des clients de l’établissement. Arsène Barbaluc est obligé de prolonger son séjour sur la presqu’île. Alors que les touristes ne pensent qu’à la plage, à la baignade, au farniente et à leurs amours de vacances, Arsène Barbaluc se débat entre les mensonges des uns et les vérités inavouables des autres…


À PROPOS DE L'AUTEUR


Christophe Chaplais, né en 1965, partage son temps libre entre la Bretagne et la côte catalane. Après plusieurs années d’absence, il reprend les enquêtes d’Arsène Barbaluc, son héros favori, qui allie gastronomie et affaires criminelles. Intrigue aux petits oignons, personnages à la sauce aigre-douce, rebondissements entre la poire et le fromage… Rien de tel pour vous concocter des suspenses qui ne manquent pas de piment.

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Couverture

Page de titre

Cet ouvrage de pure fiction n’a d’autre ambition que de distraire le lecteur. Les événements relatés ainsi que les propos, les sentiments et les comportements des divers protagonistes n’ont aucun lien, ni de près ni de loin, avec la réalité et ont été imaginés de toutes pièces pour les besoins de l’intrigue. Toute ressemblance avec des personnes ou des situations existant ou ayant existé serait pure coïncidence.

IPOÊLÉE D’HÉLIANTIS AU RAIFORT

En ce début juillet, Arsène Barbaluc n’était pas mécontent. Après un printemps difficile – où il avait vu son associé accusé de meurtre* –, “L’Assiette du terroir”, l’établissement qu’il avait ouvert avec sa compagne Magali avait de nouveau fait le plein et le chiffre d’affaires du restaurant et de son épicerie fine n’avait jamais été aussi élevé. Il en allait de même pour le salon de thé et le “Kensington”, le pub de David Abilène, son partenaire, dans lesquels ils avaient également des parts. Comme il le faisait périodiquement, l’ancien critique du guide Le Gastronome français, avait effectué un petit voyage jusqu’en Touraine pour découvrir de nouvelles spécialités à mettre à sa carte. Comme son nom l’indiquait, le restaurant d’Arsène Barbaluc et de Magali Krommel proposait des assiettes gourmandes avec une thématique régionale qui fleurait bon les petits coins de France. Le client avait ainsi le choix suivant les saisons entre une assiette de spécialités dauphinoises, provençales, armoricaines, auvergnates, catalanes, alsaciennes, béarnaises, basques… Tous deux avaient bien envie d’en proposer une nouvelle reprenant quelques spécialités du Val de Loire.

Mais, Arsène Barbaluc était exigeant. Il était hors de question de servir à ses clients des produits industriels. Il voulait de la qualité et celle-ci se trouvait auprès de petits artisans au savoir-faire souvent extraordinaire. C’est ainsi qu’il avait trouvé un fabricant d’andouillettes de Vouvray qui étaient de pures merveilles, mais aussi un pêcheur professionnel officiant sur la Loire qui fumait lui-même ses poissons. Les filets de brochets, de sandres et d’anguilles étaient tout simplement délicieux. Le patron de L’Assiette du terroir avait également dégoté un petit fromager qui proposait un chèvre de Sainte-Maure de Touraine qui serait parfait pour cette composition. Il en avait poussé jusqu’à Sancerre pour visiter l’un de ses amis vignerons, et sur le chemin du retour il avait dégusté un Chinon bio qui ne tarderait pas à intégrer lui aussi la carte des vins de son restaurant et les rayons de l’épicerie. En effet, la particularité de son établissement était que l’on pouvait retrouver tout ce que l’on avait dégusté dans son épicerie ainsi qu’une foule d’autres produits capables d’émoustiller les papilles les plus délicates.

Tel un gamin, cette petite escapade avait été d’autant plus un bon moment qu’il avait pris la route avec sa MG B GT V8 de 1973, cadeau de son associé et patron du Kensington à qui il avait sauvé la peau. Amateur de vieilles voitures, Arsène Barbaluc possédait plusieurs carrosses dont le plus récent était de 1976. Il détestait les “baignoires” modernes et aseptisées. Pour rien au monde il n’en aurait acquis une. Il n’était jamais aussi heureux que sur les chemins au volant de l’un de ses bolides sans âge. Depuis son départ, il ne se lassait pas de sa petite anglaise au parfum si british et au doux ronflement d’américaine. Il jeta un œil à sa montre. Parfait ! Il serait à l’heure pour son dernier rendez-vous avec l’un de ses fournisseurs de légumes anciens et oubliés tels que raifort, arroche, cerfeuil tubéreux et autre hélianthi. Ce cousin du topinambour était des plus intéressants et Magali Krommel souhaitait qu’il en réserve pour l’hiver prochain. Elle avait quelques idées pour l’accommoder avec des truffes du Périgord ! Si tout se passait bien, il serait à Brest en milieu de soirée et pourrait même donner un coup de main en salle. Et après, il retrouverait le sourire, les beaux yeux verts et la chaleur des bras de son épouse. Arsène Barbaluc culpabilisait toujours un peu quand il partait en tournée. Il aurait préféré de loin que Magali l’accompagne. Mais pour le moment, elle était toujours indispensable derrière les fourneaux. Mais ses deux aides ne tarderaient pas à pouvoir la remplacer de temps en temps… C’est du moins ce qu’espérait le couple.

Après Auray, il prit la direction de Quiberon et bifurqua pour s’arrêter dans la cour d’une exploitation un peu avant Ploemel. La femme de Loïc Le Moing, Éloane, l’accueillit chaleureusement comme à chacune de ses visites. Le chien de la ferme tournait autour d’eux et ne put s’empêcher de marquer son territoire en urinant sur les roues de la voiture sous l’œil furibond de Barbaluc. Malheureusement, lui annonça madame Le Moing, son mari était retenu à une réunion en préfecture et ne serait pas là avant au moins trois bonnes heures au minimum.

— Le mieux serait que vous repassiez demain, lui expliqua-t-elle. Parce qu’à mon avis, après l’entrevue avec le préfet, le connaissant lui et ses amis syndicalistes, ils vont rejouer la négociation dans l’un des bars de la ville.

Arsène Barbaluc connaissait bien l’engagement de Loïc Le Moing et sa volonté de se battre pour une agriculture bio, ou au moins raisonnée. Il avait, lui et ses amis, du mal à se faire entendre par les autorités, mais également par d’autres agriculteurs qui croyaient encore aux vertus de l’ancien monde et de la chimie à tous crins. Mais revenir le lendemain n’était pas si simple. Deux bonnes heures pour rentrer sur Brest le soir même, et quatre pour un aller-retour ! Mieux valait passer une nuit ici, et tenir le rendez-vous avec son agriculteur le plus tôt possible le matin. En tenant ce programme, il pouvait être à midi à L’Assiette des terroirs. Ce serait un moindre mal.

— Vous savez, Loïc est vraiment désolé. Il n’y a pas de problème, demain à 8 heures, je m’engage à ce qu’il soit à votre disposition.

— Bien, il ne me reste plus qu’à trouver un hôtel dans le coin.

— Cela ne va pas être facile en cette saison. Mais j’ai une amie à Quiberon qui travaille à l’office de tourisme. Si vous le souhaitez, je peux l’appeler ?

— Essayez toujours !

Arsène Barbaluc commençait à se dire qu’il était bon pour faire un aller-retour à Brest, quand Éloane Le Moing apparut tout sourire.

— Si cela vous convient, elle vous a trouvé une place à “l’hôtel du Menhir” à Quiberon.

— C’est bien ?

— Milieu de gamme m’a-t-elle dit.

— Parfait, je prends.

Il profita que l’agricultrice rappelait son contact pour, lui-même, prévenir Magali. Il avait bien senti qu’elle était déçue qu’il ne rentre pas le soir même, mais elle aussi pensait qu’il était plus raisonnable de dormir sur place.

— Et puis je te retrouve demain sur les coups de midi. J’arriverai à survivre, avait-elle ajouté en riant.

Avec le retour des plages et malgré la mise en circulation du Tire-Bouchon – ce train qui, durant les deux mois d’été, faisait la navette entre Auray et Quiberon et desservait les plages de la presqu’île – le goulot d’étranglement de Penthièvre portait toujours aussi bien son nom.

Il se souvenait de vacances lointaines avec ses parents, il y avait plusieurs décennies de cela. Sa mémoire lui renvoya des images de grandes plages de sable fin et de balades sur la côte sauvage. Depuis, il n’était jamais revenu à Quiberon.

Il se dit que ce serait bien d’y passer un week-end avec Magali, mais hors-saison. Parce que passer les vacances cul à cul avec les touristes, très peu pour lui. Seule satisfaction à cet embouteillage, son bolide jaune était en pleine forme et ne chauffait pas.

Arsène Barbaluc mit un temps fou pour rejoindre Quiberon. Lui qui était plutôt réfractaire à la modernité reconnaissait que le téléphone avec son GPS était une formidable invention. Le petit appareil le guida parfaitement, lui faisant emprunter depuis la gare la rue de Verdun puis la rue Victor Golvan avant d’enfiler celle du Manémeur. Dans les premiers hectomètres de la route du Vivier, il bifurqua dans une impasse. Au bout de celle-ci trônait l’hôtel du Menhir, une belle bâtisse tout en longueur sur trois niveaux qui devait dater du début du XXe siècle et dont la façade aurait mérité un bon ravalement. Noyées dans un joli parc arboré, on devinait deux maisonnettes de chaque côté du corps principal du bâtiment. Le parking affichait complet et il ne restait plus qu’une petite place dans laquelle Arsène Barbaluc glissa son engin. Sur le côté, on entendait des cris en provenance du terrain de boules et un peu plus loin ceux d’une bande de gamins qui jouaient au ballon.

*Voir Bouillon de minuit au Conquet, même collection.

IICRÈME BRÛLÉE

Derrière la banque d’accueil, une femme et un homme de cinquante, soixante ans s’activaient. Quand Arsène Barbaluc entra, la patronne de l’hôtel du Menhir leva les yeux de ses papiers. Le visage avenant tranchait avec le chignon sévère qui enserrait ses cheveux.

— Bonjour, Monsieur.

— Bonjour, Madame, on m’a réservé une chambre au nom de Barbaluc.

— Tout à fait, mon frère va s’occuper de vous. Daniel ?

— Très bien, venez vers moi s’il vous plaît, dit l’homme en lui faisant signe de la main.

Son crâne presque rasé ne cachait pas une calvitie déjà bien développée. Le visage carré et marqué par de profondes rides était mangé par une barbe grisonnante coupée, elle aussi très courte. Il chaussa les petites lunettes qui pendaient à son cou.

— Alors, monsieur Barbaluc, dit-il en recherchant le nom de ce nouveau client dans les entrailles de l’ordinateur. Voilà, j’y suis. Vous ne restez avec nous qu’une seule nuit, c’est bien cela ?

— Oui, tout à fait.

— Dînerez-vous ici ?

Après quelques secondes de réflexion, le patron de L’Assiette du terroir répondit par l’affirmative. Il n’avait pas envie de courir la ville au milieu de la foule des estivants, pour finir dans une crêperie à touristes. L’homme tourna la tête vers l’horloge murale.

— Le service commencera dans un quart d’heure et nous ne prenons plus de client après 21 heures.

— Parfait.

— Vous avez la chambre numéro 1, au premier étage. L’escalier et l’ascenseur seront sur votre droite, énonça-t-il en posant le badge de la chambre sur le comptoir.

— Le buffet du petit déjeuner est ouvert de 7 heures à 10 heures. Je vous souhaite un bon séjour à l’hôtel du Menhir.

Arsène Barbaluc avait dédaigné l’ascenseur. Sur le palier du premier étage, un long couloir à la peinture ocre s’ouvrait sur sa gauche. Tout le long de celui-ci, des photographies imprimées sur toile mettant en valeur les paysages de la région l’égayaient un peu. Sa chambre était la première sur la gauche. Elle n’était pas très grande, mais bien suffisante pour lui. Sur un des murs couleur coquille d’œuf, une reproduction d’une affiche des chemins de fer de Paris à Orléans, datant des années vingt, vantait la beauté et le calme de la presqu’île de Quiberon. Il déposa sa valise sur un coffre bas. Il tâta avec satisfaction la dureté du matelas, regarda par la fenêtre qui donnait sur l’entrée du parc et d’où il pouvait apercevoir au loin l’océan. Il prit une douche rapide, envoya un SMS à Magali pour lui dire qu’il était bien installé. Il soupira en pensant qu’au restaurant ce devait être le coup de feu.

Alors que Barbaluc descendait pour le dîner, il suivit dans l’escalier un couple d’un certain âge. Il avait rarement vu un duo aussi mal assorti. Lui était petit, maigre comme un clou alors que son épouse avait une tête de plus que lui et des formes plus que généreuses. Ils pénétrèrent ensemble dans la salle de restaurant. La plupart des tables étaient déjà occupées. On conduisit le couple à l’une d’entre elles, où il semblait qu’ils avaient leur habitude. Quant à Barbaluc, il échoua dans l’angle opposé avec comme voisins d’un côté le mur et de l’autre des parents accompagnés d’une petite fille d’à peine dix ans. Ils se saluèrent silencieusement.

Affichant une moue dubitative, Arsène étudia la carte déposée devant lui. Après un examen attentif, cela aurait pu être pire. À la jeune serveuse venue prendre sa commande, il annonça en entrée des couteaux à la bretonne, puis un filet de lieu au beurre blanc, le tout accompagné d’un pichet de muscadet.

— Monsieur prendra un apéritif peut-être ?

Il hésita, mais se dit que Magali n’étant pas là, il pouvait bien exceptionnellement faire une entorse à la règle qu’ils s’étaient fixée. À savoir : pas d’alcool fort en semaine !

— Un petit whisky, s’entendit-il dire, comme si le mot petit amenuisait sa faute.

Autour de lui, les conversations allaient bon train. On sentait les gens détendus. Pour la majorité, ou peut-être même la totalité, il devait s’agir de vacanciers qui après une dure année de labeur s’offraient une parenthèse sur ces terres bretonnes tonifiantes et noyées sous un beau soleil. Il croisa le regard d’une femme seule, au décolleté plus qu’avenant, qui lui décocha son plus beau sourire.

On lui apporta son “petit” whisky en même temps qu’on servit à ses voisins un soda pour la gamine, un spritz orange flashy à la dame et ce qui devait aussi être un whisky, mais double, à son compagnon. Leurs verres tintèrent l’un contre l’autre.

— À toi ma chérie !

La chérie en question, plus jeune que son compagnon d’une dizaine d’années, lui répondit d’une voix douce et un peu triste, puis glissa sa main jusqu’à la poser sur celle de son mari. La petite fille fit tchintchin aussi.

— On n’est pas si mal que ça, ici ?

— Certes, mais je ne comprends pas du tout pourquoi tu veux absolument venir ici depuis trois ans. Je sais bien que c’est un souvenir d’enfance, mais tout de même. En plus, quand nous sommes à Quiberon, tu parais toujours tendue.

— Ce n’est pas vrai, l’air de l’océan me fait beaucoup de bien, au contraire.

— Quand je pense que notre maison nous attend à Sainte-Maxime… Mais, comme je te l’ai proposé, si tu veux absolument venir sur la côte Atlantique, nous pourrions choisir La Baule par exemple. Les Richardier disent que c’est très bien. Quand je pense que notre maison nous attend à Sainte-Maxime, répéta-t-il en secouant la tête.

— Mais nous y allons après, s’impatienta la jeune femme. Je ne demande pas grand-chose. Alors tu peux bien m’accorder ce séjour ici une fois par an.

Arsène Barbaluc n’entendit pas la suite de la conversation, car la grande table qui était dans son dos se peupla d’un coup. Une horde d’adultes et de gamins tirèrent les chaises bruyamment. Il eut l’impression qu’une tornade avait envahi la salle de restaurant. Il reconnut les boulistes aperçus lors de son arrivée. Il crut qu’il avait de la chance en voyant les six adultes s’installer de son côté laissant les gamins de l’autre. Quelle erreur ! On a toujours des préjugés stupides. Il aurait mieux valu côtoyer les enfants qui se tenaient très bien tandis que les parents se croyaient seuls au monde. Il n’avait pas terminé ses couteaux à l’ail et au persil – se demandant bien ce que signifiait “à la bretonne” – qu’il avait appris que ses sans-gêne de voisins s’étaient rencontrés ici même, il y avait cinq ans, qu’ils avaient sympathisé immédiatement et que depuis ils passaient toutes leurs vacances d’été à l’hôtel du Menhir pour leur plus grand plaisir… et le désespoir de leurs voisins. Lorsqu’on déposa devant lui une tarte aux fraises un peu trop sucrée à son goût et qui n’était certainement pas de Plougastel, il avait appris qu’un des couples était opticien à Valence, que les plus jeunes vivaient au Havre et que celui qui parlait le plus haut et le plus fort était directeur commercial à Tours, qu’il était le roi de la négociation et ne désespérait pas d’acheter une grosse Mercedes d’ici la fin de l’année.

— Je te félicite, lui dit sincèrement l’opticienne. Mais tu ne vas plus vouloir nous fréquenter.

— Ne t’inquiète pas, Sabrina, je sais d’où je viens…

« De pas très loin », songea Arsène Barbaluc qui commençait à être épuisé par ce volume sonore.

— … et puis je ne pourrais me passer de mes amis et de leurs moitiés respectives qui sont un régal pour les yeux.

— Qu’est-ce que tu peux être lourd ! lui reprocha son épouse.

— Mais ne t’inquiète pas ma Nathalie, la rondeur de tes fesses et de tes doudounes n’ont pas d’égal.

Toute la tablée éclata de rire.

Arsène expédia son café et se réfugia au plus vite dans sa chambre. En quittant la salle, il échangea un regard de connivence avec l’homme qui rêvait de sa villa sur la Côte d’Azur.

La journée avait été chaude et il ouvrit la fenêtre pour que l’air du soir lui apporte un peu de fraîcheur. Il regarda ses e-mails avant de s’allonger sur son lit et tripota quelque temps la télécommande de la télévision avant que celle-ci ne daigne fonctionner. Il zappa un bon moment, puis fixa son choix sur un vieux film policier en noir et blanc que diffusait Arte. Peu avant minuit, Magali l’appela. La soirée à L’Assiette du terroir s’était bien déroulée. Ils avaient dû refuser du monde. L’ancien inspecteur gastronomique se félicitait tous les jours d’avoir sauté le pas en créant sa propre entreprise avec sa compagne et ses amis Éva et David Abilène. Leur concept avait immédiatement plu aux Brestois et aux touristes.

Arsène Barbaluc dormit mal. Le directeur commercial, sa famille et surtout sa grande gueule le réveillèrent quand ils rejoignirent la chambre située juste en face de la sienne. Le mur derrière sa tête donnait sur la cage d’ascenseur qui n’était pas des plus silencieuses. Il eut l’impression toute la nuit qu’il y avait des va-et-vient permanents dans le couloir, jusqu’à ce qu’il soit totalement réveillé par des « au feu ! », suivi d’un brouhaha dans le couloir et l’escalier. Par habitude, il regarda sa montre : 4 h 40.

Une vague odeur de brûlé provenait de l’extérieur de l’hôtel. Barbaluc se précipita à sa fenêtre et en se penchant vit des flammes jaunâtres et rougeoyantes qui s’élevaient depuis l’une des maisonnettes du parc. En bas, plusieurs clients de l’hôtel couraient. Il reconnut deux des sans-gêne de la veille au soir. Il s’habilla rapidement et, comme tous les pensionnaires de l’hôtel, il se retrouva dans le parc. Les “boulistes” avaient tiré un tuyau d’arrosage et tenté d’éteindre ce qui était bien un début d’incendie. Le feu avait dévoré ce qui devait être la porte d’entrée du pavillon et commençait à lécher le bord du toit. Un jeune homme en caleçon et pieds nus revenait du parking en courant aussi vite qu’il le pouvait sur les graviers, un extincteur de voiture à la main. Arsène Barbaluc fit immédiatement demi-tour, se morigénant de sa propre bêtise. Dans le hall, il arrêta deux hommes et une femme qui débouchaient de l’escalier.

— Prenez les extincteurs d’étage, vite ! ordonna-t-il.

Il attrapa lui-même celui qui était face à la réception et fila vers les lieux du sinistre. Tout en s’activant, il dégoupilla l’extincteur et arrosa de poudre le bas de la porte. Au loin, il entendit le pin-pon caractéristique des voitures des pompiers. Grâce à trois autres engins du même type, combiné à l’action du tuyau d’arrosage, le feu cessa sa progression. La lance à eau des hommes du feu finit de maîtriser en quelques minutes l’incendie qui avait ravagé un bon quart de la maison.

— Mais où est Daniel ? demanda avec anxiété la propriétaire de l’hôtel du Menhir. Monsieur Bidard, laissez-moi passer ! Je veux voir où est mon frère.

— Laissez faire les pompiers, madame Ribrac. Tout danger n’est peut-être pas écarté !

Le directeur commercial tourangeau remontait dans l’estime de Barbaluc. Grand et costaud, il agissait avec une grande douceur avec l’hôtelière.

Les premiers pompiers qui avaient pénétré dans la maison émergèrent enfin des décombres. Ils discutèrent un moment avec leur chef qui s’éloigna, son téléphone à la main.

— Est-ce que quelqu’un sait qui occupait ce pavillon ? questionna un des soldats du feu.

— Oui, bien sûr. C’est mon frère Daniel.

— Venez avec moi, Madame !

Arsène Barbaluc avisa un jeune pompier qui avait lui aussi exploré la maison.

— Qu’est-ce qui se passe ?

— On a retrouvé le cadavre d’un homme.

Sirènes hurlantes, les gendarmes ne mirent que quelques minutes à prendre possession des lieux. Alors que les pompiers finissaient de sécuriser le pavillon pour éviter toutes reprises de feu, on demanda aux clients de l’hôtel de se reculer, puis de se regrouper dans la salle de restaurant. Certains, dont Arsène Barbaluc, en profitèrent pour remonter dans leur chambre et s’habiller plus décemment. Alors qu’il se changeait, de nouveau l’ascenseur émit un bruit métallique plus qu’inquiétant. Il s’était promis depuis la veille au soir d’en parler aux tenanciers de l’hôtel du Menhir… mais maintenant ils auraient d’autres préoccupations que celle de régler la câblerie, et la tringlerie de leur monte-charge !

En bas, en l’absence de Jocelyne Ribrac, la propriétaire de l’établissement qui était restée avec les gendarmes, les habitués de l’hôtel s’étaient permis de mettre en route les cafetières et les théières. Chacun, les yeux bouffis par le manque de sommeil, échangeait des regards inquiets. Par les baies vitrées, ils pouvaient voir gendarmes et pompiers s’activer. Celui qui semblait commander le détachement de militaires, accompagné de madame Ribrac, s’était enfermé dans le petit bureau qui juxtaposait l’accueil. Parmi les vacanciers, de petits groupes s’étaient constitués et discutaient en chuchotant. Arsène Barbaluc s’assit seul dans un coin, une tasse de café brûlant dans les mains. La femme seule, qui lui avait souri avec insistance lors du dîner de la veille, s’était laissée choir sur une chaise à côté de lui.

— Qu’est-ce que j’ai eu peur ! avoua-t-elle en posant sa main sur son épaule.

— Il n’y a plus rien à craindre maintenant, assura Arsène Barbaluc en se dégageant en douceur.

— Ce genre de situation est tellement anxiogène quand on est une femme seule, se confia-t-elle en se rapprochant encore un peu plus de son voisin.

Il avala d’un trait son café, se brûlant le palais.

— Je vais me chercher un autre café. En voulez-vous un ?

— Non, merci ! J’ai peur de ne pas dormir.

En fuyant cette femme un peu trop collante à son goût, il se dit que, de toutes les manières, vu la tournure des événements, ils n’étaient pas près d’aller se coucher. Il regarda sa montre, il était 5 h 50. Encore une bonne heure avant que l’aube ne chasse la nuit. Avec l’arrivée du jour, les catastrophes devenaient toujours plus supportables.

Une grosse demi-heure s’écoula encore avant que l’officier de gendarmerie et un de ses hommes ne fissent leur entrée dans la salle de restaurant.

— Mesdames et Messieurs, je vous demande toute votre attention. Au vu du drame qui vient de se dérouler et de ses circonstances, je vous demande de regagner vos chambres respectives. Vous ne devez quitter l’hôtel sous aucun prétexte. Je répète bien : il vous est interdit de sortir de l’établissement.

Un murmure interrogatif parcourut l’assemblée.

— Nous commencerons dès que possible les auditions de chacun afin que cette situation ne perdure pas. J’allais oublier : exceptionnellement, le petit déjeuner sera servi à 8 h 30 !

IIIMYSTÈRE CARAMEL AU BEURRE SALÉ

Arsène Barbaluc, comme les autres clients, remonta dans sa chambre. Il se posta à la fenêtre. De sa position, il voyait les sapeurs-pompiers finir leur travail, mais surtout, il distinguait très nettement les deux plantons qui filtraient les entrées et sorties de l’enceinte de l’hôtel du Menhir. Le personnel de l’établissement, qui se présentait au portail, devait montrer patte blanche. Il attendit 6 h 30 pour appeler Magali, et lui expliquer la situation dans laquelle il se trouvait.

— Dans quel bourbier t’es-tu encore fourré ?

— Je n’y suis pour rien !

— Je le sais bien, dit-elle en soupirant. Crois-tu que cela va durer longtemps ?

— Je ne sais pas, mais j’ai un mauvais pressentiment. Le pompier que j’ai interrogé n’était pas à l’aise. Comme si l’incendie n’était pas accidentel, ou quelque chose dans ce genre.

Il promit de la tenir informée, dès qu’il en saurait un peu plus.

Il s’allongea un moment, et dut s’assoupir. Quand Arsène Barbaluc ouvrit un œil, il était presque 9 heures. Il se hâta de descendre prendre son petit déjeuner. Dans le hall, le couple de personnes d’un certain âge si mal assorti quittait le bureau administratif réquisitionné par les gendarmes. Une femme et un homme leur succédèrent. Il reconnut celui qui était allé chercher son extincteur dans la voiture. Les autorités avaient organisé également un second lieu d’audition dans une petite pièce attenante aux cuisines pour accélérer les interrogatoires. Dans la salle de restaurant s’étaient rassemblés la plupart des clients de l’hôtel. Le personnel de l’établissement avait pris les choses en main. L’ambiance était morose et les conversations se tenaient à voix basse. Même le clan des boulistes avait perdu de sa superbe. Une des enfants qui protesta un peu trop fort parce que son frère lui avait “piqué” son pain au chocolat reçut de son père, l’opticien de Valence, une gifle sonore s’attirant les regards noirs de l’ensemble de ceux qui étaient présents. Son épouse le réprimanda avec force. L’auteur se cherchant une contenance se dirigea vers le buffet pour remplir son verre de jus d’orange.

Comme à son habitude, Arsène Barbaluc ne prit qu’un grand café noir sans sucre. À côté de lui, il reconnut l’homme qui avait été un des premiers à déployer le tuyau d’arrosage.

— Comme vous dites en France, c’est un joyeux bordel, lui dit-il avec un fort accent britannique.

— Hope we will be free soon ! renchérit la femme qui l’accompagnait.

— I am sure, lui répondit Arsène Barbaluc dans son anglais hésitant.

— Nous ne sommes là que pour une dizaine de jours et nous voudrions profiter de la plage, expliqua l’homme. Je ne me suis pas présenté. Mon nom est Peter Lansborough. Enchanté !

— Enchanté également, Arsène Barbaluc.

— Nous vous souhaitons une bonne journée quand même, assura le sujet de la perfide Albion.

En sortant de la salle de restaurant, les Anglais cédèrent le passage à la femme seule qui semblait s’intéresser à Barbaluc. Elle s’était mise sur son trente et un, comme pour un entretien d’embauche ou un rendez-vous galant. Sa robe moulante zébrée de noir et de blanc ne l’amincissait pas vraiment. Arsène Barbaluc piqua le nez dans son bol, tandis qu’elle traversait la salle perchée sur de hauts talons laissant dans son sillage les effluves d’un parfum entêtant, avant de frapper à la porte de l’arrière-cuisine.

Après une seconde tasse de café, le patron de L’Assiette du terroir rejoignit sa chambre pour attendre sa propre audition. Il mit en fond une des chaînes d’information permanente et se campa de nouveau à la fenêtre. La journée s’annonçait magnifique. Le soleil était déjà chaud et il n’y avait pas de vent. Sur sa gauche, si les sapeurs-pompiers avaient disparu, il pouvait voir la rubalise tendue par les gendarmes pour délimiter la zone du sinistre. Deux hommes en tenue blanche inspectaient le périmètre. « Certainement des gendarmes de la section scientifique », songea-t-il. Il vit également madame Ribrac, la propriétaire de l’hôtel, sœur de la victime, et deux gendarmes pénétrer dans la maisonnette. Presque devant lui, une petite troupe de gamins jouait à cache-cache autour des voitures sous l’œil amusé des militaires en faction au portail. Un garçon d’une dizaine d’années qui avait grandi trop vite plongea derrière sa MG. « Si jamais tu me la rayes, je te pulvérise », menaça-t-il en pensée. Son inquiétude fut interrompue par la sonnerie du téléphone de la chambre.

On le fit entrer dans la pièce qui donnait sur le hall. Petite et sans fenêtre, elle était encombrée par des étagères où s’empilaient classeur et dossier. L’écran et la tour de l’ordinateur de l’hôtel avaient été déposés sur un petit meuble bas. L’officier qui commandait le détachement la nuit dernière était assis derrière le petit bureau. Un peu décalé sur le côté, un second gendarme était prêt à prendre sa déposition sur son portable.

— Asseyez-vous ! Vous êtes bien Arsène Barbaluc ?

— Tout à fait, s’entendit-il répondre en tendant sa carte d’identité.

— Vous êtes domicilié à Porspoder dans le Finistère et vous êtes l’un des patrons du restaurant L’Assiette du terroir à Brest ?

— C’est bien ça, s’étonna-t-il.

Comment se faisait-il que cet homme en sache autant sur lui ? Avec son visage aux traits réguliers, ses yeux d’autant plus clairs que sa peau était sombre, et un sourire franc, l’officier, qui ne devait pas avoir plus de trente-cinq ans, inspirait confiance. Ce sentiment était accentué par sa voix posée et calme.

— Voulez-vous un café, monsieur Barbaluc ?

— Avec plaisir.

— Adrien, peux-tu nous ramener deux cafés ? Et prends-toi aussi quelque chose ! Te connaissant, tu n’as rien dû avaler depuis que nous sommes ici. Je ne me suis pas présenté. Je suis le lieutenant Ajouba.

Arsène Barbaluc lui rendit son salut d’un signe de tête.

— Connaissez-vous, le capitaine Beaumont ?

— Oui, bien sûr, répondit-il surpris.

Arsène Barbaluc avait passé beaucoup de temps avec cet officier de gendarmerie, pour débrouiller l’affaire dans laquelle était empêtré son ami et patron du Kensington. Si leurs relations au début de cette enquête avaient été plus que difficiles, elles s’étaient améliorées au fil du temps, pour finir par une franche collaboration.

— Pourquoi me demandez-vous cela ?

— Parce que j’ai eu une longue conversation avec lui ce matin à votre sujet, l’informa le gendarme.

— Comment sait-il que je suis ici ? s’étonna Arsène Barbaluc ne cachant pas sa surprise.

— Votre compagne l’a appelé ce matin pour l’informer de votre situation. Je crois qu’elle était inquiète pour vous.

C’était bien du Magali.

— Bref, poursuivit le lieutenant, le capitaine Beaumont n’a pas tari d’éloges sur vous. Il m’a précisé que vous aviez un peu l’habitude des affaires criminelles, mais surtout que vous étiez digne de confiance.

Le lieutenant le fixa quelques instants puis inclina sa tête vers lui.

— Pensez-vous que je puisse vous faire confiance, monsieur Barbaluc ? conclut-il en appuyant sur chaque mot.

— Oui évidemment, mais je…

— Vous allez comprendre.

Le plateau chargé de trois cafés, et d’une assiette débordant de viennoiseries, apporté par le chef Adrien Longeville manqua d’atterrir sur les genoux d’Arsène Barbaluc tant la petitesse de la pièce rendait tout mouvement périlleux. Chacun prit sa tasse.

— Qu’avez-vous à dire sur ce qui s’est passé cette nuit ?

— Eh bien, j’ai été réveillé par un homme qui criait au feu. Par la fenêtre j’ai vu des clients de l’hôtel qui se précipitaient vers l’un des petits pavillons d’où s’échappaient quelques flammes. Je suis descendu à mon tour pour prêter main-forte. En voyant l’un d’eux revenir du parking avec un extincteur de voiture, aidé par quelques autres nous avons pris ceux de l’hôtel et nous avons pu stopper ainsi la propagation de l’incendie jusqu’à l’arrivée des pompiers. Rien de plus.

— Vous n’avez pas été témoin de quoi que ce soit d’étrange avant l’incendie, ou hier soir quand vous êtes arrivé ?

Arsène Barbaluc fit non de la tête. Le lieutenant Ajouba inspira profondément comme s’il avait pris une décision.

— Ce que je vais vous dire à partir de maintenant est sous le sceau du secret.

— Cela va de soi.

— Il ne s’agit pas d’un simple incendie accidentel. Le feu a pris près de la porte d’entrée qui avait été préalablement arrosée d’un produit type solvant ou essence. Les analyses en cours nous le diront avec précisions. Mais surtout, à l’intérieur nous avons trouvé, allongé sur le sol de sa cuisine, le cadavre de Daniel Ribrac, copropriétaire avec sa sœur de l’hôtel du Menhir. Le corps de la victime montrait des traces autour des poignets et des chevilles indiquant qu’il avait été longuement attaché. Il portait sur le corps des coupures et des brûlures indiquant qu’avant d’être assassiné il a été très certainement torturé. Les premiers éléments à notre disposition nous laissent à penser que l’on a mis le feu à sa maison pour masquer son assassinat. Je précise que la maison a également été fouillée de fond en comble, mais selon sa sœur et après une rapide inspection il semble que rien ne manque. Même son portefeuille avec sa carte de crédit et un peu de numéraires n’a pas été emporté. Mais, toujours d’après elle, son frère ne possédait rien de valeur.

— Ce Ribrac était-il connu de vos services ?

— Oui, mais pas dans le sens où vous l’entendez. C’est un ancien gendarme. À la mort de sa femme, il y a cinq ou six ans, il a fait valoir ses droits à la retraite. Il vit dans la région parisienne, mais six mois par an il vient seconder sa sœur avec qui il est propriétaire à parts égales de l’hôtel du Menhir. Hôtel dont ils ont hérité à la mort de leurs parents. Ribrac était un homme bien connu et apprécié à Quiberon. Il paraissait dur et il était impressionnant par sa carrure et sa grosse voix, mais c’était un homme gentil et bienveillant, aimé de tous.

Arsène Barbaluc se remémora l’homme qui l’avait accueilli lors de son arrivée la veille au soir. Avec son crâne rasé, son visage large et carré, marqué de profondes rides, mangé par une barbe grisonnante coupée très court, il n’aurait pas dit qu’il inspirait la sympathie.

— Et vous avez une idée de qui est derrière ce meurtre ?

— Non, mais a priori, nous pouvons exclure une agression venant de l’extérieur de l’hôtel. Le coupable est forcément un des clients.

Devant l’air interrogatif de son interlocuteur, le lieutenant Ajouba s’expliqua en désignant le matériel informatique de l’établissement.

— Les portes de l’hôtel sont fermées à minuit. Chaque client possède son propre passe magnétique pour sortir s’il le souhaite. Celui-ci commande également le portail du parking et le portillon réservé aux piétons. Or, si l’hôtel lui-même ne possède pas de réseau de caméras de surveillance, ce n’est pas le cas du mur et du grillage d’enceinte. Il y en a suffisamment pour que personne ne pénètre dans le parc sans qu’on le sache. Nous avons visionné les films de la nuit dernière et personne ne s’est introduit dans le parc. Le meurtrier est donc nécessairement quelqu’un qui réside à l’hôtel. Et c’est dans ce contexte que j’ai besoin de vous !

— Je ne vois pas très bien en quoi…

— Vous allez comprendre, l’interrompit le lieutenant. Au vu de la situation, en accord avec le parquet nous allons demander à l’ensemble des clients de rester à l’hôtel, le temps de l’enquête. Mais pour débusquer l’assassin de monsieur Ribrac, nous avons besoin de quelqu’un à l’intérieur. Le capitaine Beaumont vous tient en grande estime. Au-delà de votre expérience des affaires criminelles et du fait qu’il se porte garant de votre probité, il pense que votre sens de l’observation, votre instinct, votre manière de réfléchir quelque peu… particulière et votre côté un peu buté pourraient être un atout pour nous.

— En clair, vous me demandez de jouer le rôle de la taupe.

— C’est exactement ça.

Arsène Barbaluc eut une pensée pour Magali qui l’attendait pour la mi-journée. Elle ne serait pas ravie d’apprendre qu’une nouvelle fois, il se retrouvait face à un assassin. Mais, taupe ou pas taupe, il serait coincé à l’hôtel du Menhir le temps de l’enquête, alors autant être dans l’action que de rester passif. Et puis, s’il était tout à fait honnête avec lui-même, il n’aurait pas pu s’empêcher de se mêler de cette enquête. Autant avoir un rôle officiel !