6,99 €
Jusqu’ici, leur vie a été marqué par la douleur et la perte, mais sauront-ils dépasser tout cela ensemble ?
Ils étaient amis à l'université jusqu'à ce qu'il lui demande de trahir ses valeurs.
Diehl Arenas revient sur ses terres après trois années d’absence. Elle souhaite retrouver ses proches, et le destin lui donne un coup de pouce : son père adoptif demande son aide sur un projet de construction. Lorsqu’elle prend la direction de Barcelone, elle ne pense pas avoir rendez-vous avec Paul Oscar Képhalé et son histoire personnelle. Diehl réussira-t-elle à faire la paix avec le passé pour se tourner résolument vers le futur, tout en profitant du présent ?
Paul Oscar Képhalé en est persuadé, il veut l’aider et l’accompagner dans ce travail, le restant de sa vie. Il a la volonté, mais la manière lui manque.
Il veut prouver qu'il a changé, qu'il a appris de ses erreurs. Des maladresses, des erreurs, du ressentiment, de la colère viendront-ils réduire à néant tous ses efforts ?
Il peut compter sur Alex, toujours bienveillant et présent, pour lui indiquer la voie vers le renoncement à soi, la tolérance pour l’autre et le pardon libérateur du cœur. Lorsque le travail les rapproche, Paul Oscar pense qu'il va enfin avoir une chance de se faire pardonner. Les choses ne se passent pas comme il aurait souhaité. Certaines peurs, angoisses, peines le fragilisent et il perd confiance.
Après une tragédie et des désillusions, la vie doit-elle simplement être supportée ?
Est-il encore possible de pardonner ?
Diehl et Paul Oscar réalisent que le Pardon c’est aussi un choix, une décision pour pouvoir donner une nouvelle chance à son cœur d’accueillir l'amour.
Ce roman chrétien contemporain est le deuxième tome de la série Képhalé : les choix de la vie de l'auteure Sorelle Meleugouo.
Le choix du destin est le premier tome de la série.
----------------------------------------------------------------------------------------------------------
Si vous aimez les histoires chrétiennes réconfortantes axées sur l'amour, la foi et la famille, ne manquez pas de consulter les autres livres Sorelle Meleugouo.
Autres livres de la série Képhalé : les choix de la vie
Le choix du destin
Le choix du pardon
Livre indépendant
Mi palomita negra (recueil de poème en langue espagnole)
Ce que les lecteurs disent à propos du livre Le Choix du Destin :
"J’ai fini de lire Le choix du Pardon et je peux affirmer que ce fût un régal. J’ai passé un agréable moment à le lire." Jamila Njuenfoura
"Le livre nous donne une très belle leçon sur le pardon et on comprend mieux le titre." Lysnoreen
Das E-Book können Sie in Legimi-Apps oder einer beliebigen App lesen, die das folgende Format unterstützen:
Veröffentlichungsjahr: 2021
Le Choix du Pardon, Tome 2 | Série Képhalé – « les choix de la vie »
© 2021 de Sorelle Meleugouo. Tous droits réservés.
Illustration de la couverture conçue par Vera Éditions.
Les textes bibliques mentionnés sont tirés de la version Louis Segond révisée, édition 1910, sauf indications contraires. Tous droits réservés.
Code ISBN : 9798788431550
Ceci est une œuvre de fiction. Les noms, les personnages, les lieux et les événements sont les produits de l'imagination de l'auteure. Ils sont utilisés de manière fictionnelle et ne doivent pas être interprétés comme réels. Toute ressemblance avec des événements réels, des lieux, des organisations ou des personnes, vivantes ou mortes, est une coïncidence.
Aucune partie de ce livre ne peut être reproduite, stockée dans un système de récupération, ou transmise sous quelque forme que ce soit ou par quelque moyen que ce soit, électronique, technique, photocopieuse, enregistrement ou autre, sans autorisation écrite expresse de l’auteure.
Not all books include dedications, but many authors choose to share a special thank you to someone(s) who have made an impact on the writing of the book. This may be on a personal or professional level and can range from heartfelt to comedic and anything in between.
Dedication text is traditionally center aligned.
Psaumes 130 : 4
« Sachez donc, hommes frères, que c'est par lui que le pardon des péchés vous est annoncé. »Actes 13 :38
« Nous pensons que le pardon est une faiblesse, mais ce n'est absolument pas le cas ; il faut une personne très forte pour pardonner. »TD Jakes
Philippiens 3 :13
Paul Oscar Képhalé ressentait la chaleur de juin qui commençait à être très intense. Qu’il fasse beau ou pas, le travail était rare, les journées très stressantes. Aujourd’hui, assis dans son bureau, il vérifiait une énième fois ses mails avant de rentrer. Une semaine s’était écoulée, et il était sans réponse d’un de ses partenaires, promoteur immobilier. Celui-ci avait promis de le recontacter le plus tôt possible, sans toutefois donner de nouvelles par la suite. Il constatait que tous les deux n’avaient pas la même conception de l’expression « le plus tôt possible ». Paul Oscar brûlait d’envie de le rappeler, sans donner l’impression de vouloir forcer la main à son interlocuteur concernant la signature d’un contrat.
Soupirant profondément, il se leva de son fauteuil ; il fallait qu’il évacue ce stress. Devant la fenêtre de son bureau il mit les mains dans les poches et observa la vue. Les maisons et les toitures environnantes étaient tout à coup toutes grises à ses yeux. Il y avait bien longtemps que le soleil ne lui souriait plus du tout et qu’il ne percevait pas un clin d’œil de la part de Dieu. Les affaires ne marchaient plus comme avant la crise économique. Depuis deux ans, l’entreprise familiale n’était plus la même. Il était à la tête de Képhalé Construction & Services depuis seulement un an quand les difficultés avaient commencé ; il avait perdu leurs plus gros contrats. Plusieurs entreprises pourtant fidèles partenaires de son père avaient mis un terme à leur collaboration ainsi que certains fournisseurs et associés. Paul Oscar savait la conjoncture difficile pour tout le monde, mais il avait gardé l’espoir qu’il arriverait à sauver KCS de la faillite totale. Aujourd’hui, deux ans plus tard, il se demande chaque matin en entrant dans son bureau si ce n’est pas le dernier jour de travail.
Essayant de tout son cœur de trouver un moyen de les sortir de ce chaos, il n’y arrivait pas. Ils s’enfonçaient de plus en plus. Un autre soupir traversa sa gorge serrée ; il passa les mains sur ses cheveux plus longs que d’habitude. Son apparence n’était pas si importante que ça ; il avait urgemment besoin de nouveaux matériels, d’un personnel adapté et d’un financement conséquent pour éviter la faillite à KCS. La crise ne pardonnait pas. Son père avait travaillé toute sa vie pour bâtir cette entreprise. Il y avait mis tout ce qu’il possédait et faillit y laisser sa vie. Très performante à l’époque, l’entreprise était le partenaire privilégié de la majorité des opérateurs de la ville de Valence en Espagne, et comptait plusieurs contrats à son actif. Aujourd’hui en regardant les dettes accumulées à la banque, il se demandait si cette époque avait jamais existé. Il faisait de son mieux pour garder le moral tout en cherchant un moyen de rendre ses lettres de noblesse à l’entreprise familiale. C’était plus facile à dire qu’à faire. Ils avaient été obligés de déménager de leurs locaux trois fois en deux ans, ne pouvant honorer un bail de plus de six mois. Ce qui lui servait maintenant de bureau était un taudis.
Les investisseurs lui avaient tourné le dos, et la banque ne cessait de lui donner des ultimatums. Il était clair que les conséquences de la crise avaient plus d’effets sur certains que sur d’autres. Il n’arrivait toujours pas à comprendre pourquoi c’était si difficile ; il demandait à Dieu tous les jours de le sortir de là, mais il avait l’impression qu’il n’était pas écouté. C’était le silence total ; Paul Oscar croyait en Lui, mais il ne voyait pas ce qu’Il faisait pour lui. Au contraire tout se dégradait de jour en jour. Et ce promoteur qui ne le contactait toujours pas !
Paul Oscar entretenait toujours sa frustration quand entra brusquement sa petite sœur Briella.
— Salut Junior ! Tu as une minute ?
Avec tous les problèmes qu’ils avaient eus ces dernières années, Briella était devenue indispensable au sein de l’entreprise. Avec ses études en administration et en gestion, elle avait été embauchée par son père tout de suite après l’obtention de son diplôme. Il avait eu raison ; ses capacités de gestionnaire leur avait été salutaires pour prévenir et gérer certaines situations qui auraient été fatales pour l’entreprise. Pour dire vrai, elle gérait le stress bien mieux que lui. Chaque matin elle était là, souriante et confiante que tout irait bien, pendant que Paul Oscar commençait à perdre la foi.
— Dis-moi hermana1 !
Elle avança avec son stylo à la main. Elle n’avait pas une bonne nouvelle à lui annoncer. Elle était préoccupée.
— Tu es au courant de ce qui se passe sur le chantier Apergia ?
— Qu’est-ce qui se passe ? Ce matin Iván m’a expliqué qu’on avait pris du retard, mais il m’a rassuré que la situation était sous contrôle…
— Eh bien tout le personnel a prévu une grève ! Elle commence dès demain matin.
— Quoi ? La panique gagna son cerveau. Ils ne peuvent pas faire ça. Nous devons terminer à temps si nous voulons recevoir toutes les indemnités.
— Et dans le cas contraire nous risquons des poursuites, parce que Monsieur Martinez m’a encore appelée ce matin reprit-elle en croisant les mains. C’était l’un des trois contrats que nous avions encore pour le reste de l’année. Si on les boucle à temps, on pourrait sauver l’année prochaine en réglant la moitié de nos dettes. On n’a pas droit à l’erreur cette fois-ci. L’hiver dernier a été atroce. Il fallait profiter de cet été pour rattraper le temps perdu.
— Et qu’est-ce qu’ils veulent ?
Elle enleva ses lunettes et soupira.
— Ils veulent leur dernier salaire impayé de l’année dernière.
— Mais on s’était mis d’accord qu’à la fin de ce contrat, ils allaient tous le recevoir en plus de leurs primes.
— Eh bien ! Ils veulent tout avoir maintenant.
— Il ne manquait plus que ça ! — Paul Oscar retourna s’affaler sur sa chaise — Mon Dieu ! Je vais finir par devenir fou. Si le personnel entre en grève, on va prendre du retard et on ne va pas pouvoir finir à temps pour être payé en conséquence. C’est un véritable cauchemar.
— Junior il faut que tu fasses quelque chose !
Elle avait raison, mais quoi ! Ils étaient dans leur droit. Le représentant du syndicat lui avait déjà envoyé un mail le mois dernier. C’était une manière de lui mettre plus de pression. Comme s’il n’en avait pas déjà assez !
— Je vais essayer d’aller leur parler. — dit-il finalement en se levant — Mais je ne suis pas vraiment sûr que ça change quoi que ce soit. Je leur ai déjà fait beaucoup de promesses.
En enfilant sa veste, il se demandait bien comment il allait les convaincre de ne pas le laisser tomber maintenant. Oh, mon Dieu, j’ai besoin de toi ; jusqu’à quand ça va durer ?
Le chantier était à vingt-cinq minutes vers le nord de Valence. Leurs bureaux actuels étaient assez proches de la plage pour qu’il entende le bruit des vagues qui s’échouaient sur la rive. Ce qui lui rappelait que ça faisait longtemps qu’il n’avait pas pris de vacances, ni un temps à part pour lui. Il ne restait qu’une heure avant la fin de la journée de travail. Il fallait qu’il fasse vite. Il entra dans son 4x4 et démarra. Il fallait qu’il les convainque de ne pas le laisser tomber. Mais comment ?
Il n’avait pas eu une bonne journée depuis bien longtemps. Même si c’était difficile à admettre, ils avaient tous raison. Cependant les temps étaient difficiles, que pouvait-il faire d’autre ? Il ne savait même pas par où commencer pour les dissuader d’entamer une grève. La plupart de ces travailleurs faisaient partie du personnel de KCS depuis des années maintenant. Il avait toujours admiré la relation qu’ils entretenaient avec son père ; ils faisaient partie de la famille. Ils se connaissaient tous si bien, et il pouvait comprendre que chacun craigne pour son avenir et celui de sa famille. Tout ceci était bien trop lourd à supporter, Paul Oscar ne pouvait en vouloir à personne si ce n’était à lui-même. La crise ne leur avait pas donné d’autres alternatives que de licencier la moitié du personnel. Il ne pouvait pas les payer tous et il n’y avait pas assez de ressources pour tout le monde. Et maintenant, il se retrouvait à cours de stratégie pour faire relancer l’entreprise. Son père avait bien essayé de l’aider autant qu’il pouvait. Toutes les semaines quand ils se voyaient au repas familial, il lui disait toujours qu’il y arrivera. Au début Paul Oscar l’avait cru, mais plus le temps passait, plus il perdait espoir. Il se rendait juste compte qu’il n’était pas son père et qu’il n’avait ni sa dextérité ni sa sagesse. Il fallait bien l’admettre tôt ou tard ; tout le monde le regardait en pensant qu’il allait faire un miracle tout comme lui. C’est Dieu qui était l’auteur des miracles pas Paul Oscar. Pourquoi ne m’aides-tu pas Seigneur ? Pourquoi tu ne m’aides pas ? Paul Oscar n’avait même pas été capable de maintenir l’entreprise de son père en vie comme il avait toujours rêvé : c’était cela qui le rendait encore plus triste. Son père avait passé toute sa vie à bâtir KCS et il n’avait fallu que deux ans et une crise pour la mettre à l’eau. Pourtant Paul Oscar croyait aux miracles. D’une manière ou d’une autre, il était convaincu que Dieu n’en avait pas encore fini avec lui.
Il put éviter quelques embouteillages et arriva à temps pour discuter avec tout le personnel du chantier Apergia. Après avoir écouté Iván et les revendications, il réussit à les convaincre de lui laisser du temps afin de régler la situation. Les deux parties avaient besoin l’une de l’autre. Ils allaient devoir se battre ensemble pour ne pas tout perdre. La solidarité était le meilleur moyen de ne pas sombrer. Paul Oscar promit de tout faire pour qu’ils puissent s’en sortir en échange de leur engagement à mener le chantier à son terme. Trouver un compromis dans ce genre de situation était très difficile, étant donné l’attachement relationnel créé par plusieurs années de service au sein de la même entreprise. Ils avaient été compréhensifs, ce qui étonna Paul Oscar. Tous avaient décidé de s’entraider. Bien entendu, ça n’avait pas du tout été facile. Dieu avait fait un miracle, et la patience avait pris la place de la protestation.
Toutefois, certains jours étaient plus difficiles que d’autres.
J’avais juste besoin d’un peu plus de temps, pour me poser et pour bien organiser mes idées. Et c’était bien ça le problème. Il ne me reste plus assez de temps.
Finalement, Paul Oscar rentra à la maison très fatigué et à court d’idées concernant la situation. Il avait failli passer de situation inquiétante à situation critique. Il leur fallait un financement direct le plus tôt possible ; c’était le plus grand besoin de l’heure. Il le savait depuis bien longtemps, et la seule façon d’en trouver c’était de chercher des investisseurs. Mais qui serait prêt à investir dans une entreprise qui est déjà presqu’une épave ? Personne, même lui, ne le ferait pas. Paul Oscar envoya un sms à Briella pour l’informer que la situation était de nouveau sous contrôle. Mais s’il ne trouvait pas une solution très rapidement, la fin de cet été, sonnerait aussi la fin de cette entreprise. Il avait réellement besoin d’un miracle. Très vite !
Diehl Arenas récupéra sa valise et passa le dernier contrôle de police. L’agent de douane lui sourit la laissant passer sans poser de questions. Elle était très heureuse de pouvoir rentrer rapidement sans perdre de temps à l’aéroport. Après ces trois jours intenses à Milan, elle était épuisée par des réunions avec des dossiers difficiles. À l’issue d’âpres négociations, son équipe avait fait des propositions. Son équipe et elle avaient décidé de rentrer à Londres, profiter de la fin de l’été en attendant la décision des clients. À la sortie, Diehl repéra très facilement un taxi. Il était déjà 21 h et il faisait nuit noire. Elle avait hâte d’être chez elle, de prendre une bonne douche avant d’aller se coucher. Les rues de Londres étaient encore éclatantes et bondées.
Quand le taxi s’arrêta devant son immeuble, elle sortit avec empressement. Avant de monter elle regarda sa boite aux lettres, se doutant qu’il n’y aurait aucun courrier pour elle. La majorité de son courrier arrivait au bureau et son incroyable assistante Kessy s’en occupait pour elle. En pensant à Kessy, Diehl se rendit compte que celle-ci ne l’avait pas appelée. D’habitude, à peine elle sortait de l’avion qu’elle recevait soit un message, soit un appel pour avoir des nouvelles. C’était bizarre de sa part.
Diehl s’engouffra dans l’ascenseur, espérant ne pas avoir à croiser la voisine dans le hall. Elle avait la fâcheuse habitude de toujours lui demander où elle était et ce qu’elle faisait. Diehl espérait que la voisine et ses deux garçons étaient partis en vacances quelque part très loin. Elle ne supporterait pas les bruits et le chaos de l’autre côté du mur. Elle était même peut-être beaucoup trop fatiguée pour se plaindre de ses bambins de neuf ans.
Quand elle glissa la clé dans la serrure, elle prit le soin de ne pas faire de bruit. Il ne restait plus qu’elle sorte lui proposer une sortie au parc avec ses enfants ou le déjeuner qu’elle avait déjà reporté plusieurs fois le mois passé. Elle ne pourrait pas s’éclipser cette fois-ci parce qu’elle prenait officiellement trois semaines de vacances.
Diehl laissa sa valise dans le hall d’entrée et commença à déboutonner sa chemise. Elle se dirigea directement vers la cuisine et sortit de là avec son pot de glace à la vanille. Elle y avait pensé durant tout le vol. Elle se mit sur son fauteuil au salon et allongea ses pieds sur la table basse, la cuillère à la main. Avant de mettre sa première cuillérée dans la bouche, son téléphone commença à vibrer sans s’arrêter. C’était bien là le signe que Kessy était à l’autre bout du fil. Diehl ne décrocha pas. Elle prit le temps de savourer quelques bouchées de sa glace. Oh, mon Dieu que c’est bon ! se dit-elle en soupirant longuement les yeux fermés, pendant qu’une pluie de sensations envahissait ses papilles. Elle était dans un moment de pur bonheur. Quand le téléphone arrêta de vibrer, elle le saisit et ouvrit l’application WhatsApp. Il n’y avait rien que Kessy ait voulu lui dire au téléphone, qu’elle n’ait pas déjà écrit. Mais avant de lire son message, elle remarqua une note vocale d’Alex, son père adoptif. Ça faisait longtemps qu’ils ne s’étaient pas parlé. Et il ne me laissait pas souvent de note vocale, alors Diehl conclut que c’était important. Elle appuya sur lecture sans hésiter.
« Hola hija, comment tu vas ? J’espère que l’été se passe bien de ton côté. Ici nous aussi nous allons très bien. Je m’inquiète un peu pour toi et je sais ce que tu vas me dire. Que tout va bien comme d’habitude ! N’empêche que tu me manques beaucoup. Dee… j’ai un service à te demander. Je sais que tu dois être très occupée, mais on est sur le point de commencer un nouveau projet de construction d’une église à Albentosa dans la province de Teruel.Et j’ai pensé que tu pourrais nous dessiner les plans. J’ai une idée assez claire de ce que je veux, mais j’aimerais beaucoup bénéficier de ton aide. Bien entendu, ta participation sera rémunérée. Je ne voudrais pas utiliser ton temps sans contrepartie. La vérité c’est qu’on a besoin de quelqu’un d’expérimenté pour ce projet et tu es la meilleure que je connaisse alors... Dis-moi ce que tu en penses cariño. Sabes que te quiero... »
Alex était plus qu’un pasteur pour Diehl. Il était son ami, le père qu’elle aurait voulu avoir. Elle l’aimait beaucoup et il lui manquait énormément. Ce projet de construction devait vraiment lui tenir à cœur. S’il voulait lui confier les plans, ça devait être du sérieux. Depuis qu’elle était diplômée, il ne lui avait jamais demandé de lui rendre ce genre de service avant, pourtant les occasions ne manquaient pas. L’église participait de temps en temps à des projets de construction ici et là. Diehl avait toujours pensé qu’il était déçu de sa décision de s’installer à Londres tout en quittant définitivement Barcelone. Tout le monde croyait qu’elle resterait dans les parages et qu’ils continueraient à être une famille, se disait-elle intérieurement. Tellement de choses s’étaient passées. En soupirant Diehl se rendit compte qu’elle avait envie d’aller à Barcelone, passer ses vacances. Ça faisait trois ans qu’elle n’avait pratiquement pas eu de vraies vacances, depuis son départ de l’Espagne.
Tout ce qu’il y avait là-bas lui manquait. Alex et Joanna sa femme ; Marc et Paqui sa meilleure amie. Soudain elle fut remplie de nostalgie. Elle avait passé de bons moments avec eux. Il lui semblait que ça faisait une éternité qu’ils s’étaient séparés. À l’époque, elle ne pensait pas partir pour si longtemps. Depuis, quatre années s’étaient écoulées. Peut-être qu’il fallait qu’elle profite de l’offre d’Alex pour aller passer quelques semaines dans leur petite municipalité. Elle avait besoin d’une pause. Rester à Londres, toute seule chez elle, n’était pas du tout attirant.
Kessy appela à nouveau et Diehl décrocha cette fois-ci en souriant. Elle avait pu attendre dix minutes avant de la rappeler : c’était son nouveau record. Elle mit le téléphone en main libre et le déposa sur la table.
—Oui Kessy, je suis à la maison, saine et sauve, en train de manger une énorme glace à la vanille.
Kessy ne se fit pas prier pour répondre avec empressement.
— Tes vacances n’ont même pas encore commencé que tu prends déjà de mauvaises habitudes.
— Je te promets, je prendrais soin de ma ligne, lui dit-elle en mettant une autre cuillère dans sa bouche.
— Tu as intérêt. À ton retour on aura beaucoup de travail. On aura besoin que tu sois à 100% concentrée.
— Je suis toujours concentrée.
Kessy laissa entendre un sourire.
— Oui c’est vrai. De nous deux, tu es toujours la plus concentrée. Au fait comment était le vol ?
— Long. Je suis très fatiguée, mais le contrôle a été rapide. C’est pourquoi je suis contente d’être assise dans mon fauteuil à l’heure actuelle.
— D’accord. Qu’est-ce que tu as prévu faire pendant tes vacances ?
Diehl sauta sur l’occasion pour lui faire part de sa décision :
— Justement, je viens de penser à l’instant. Je devrais aller à Barcelone. Je vais passer du temps en famille, puis aller à la plage.
— Ça me semble une bonne idée. Tu veux que je te réserve un vol ?
— Pas la peine de te déranger Kessy je peux le faire.
— Non, ça ne me dérange pas. Je sais que tu es fatiguée alors je vais le faire. De plus je suis ton assistante alors c’est à moi de m’en occuper.
Diehl ne voulait pas se faire prier. Alors, elle accepta. Kessy était une assistante géniale et elle ne pouvait pas le nier. Elle lui facilitait littéralement la vie sur tous les plans. Elle était reconnaissante à Dieu pour Kessy parce que son travail à la compagnie était cinq fois plus rapide grâce à son aide.
Le lendemain, pendant qu’elle réfléchissait sur quoi mettre dans sa valise, Kessy appela à nouveau. Elle était bien ravie de la distraction.
— Il y a des vols prévus demain, mardi. Quand est-ce que tu prévois le retour ?
Diehl n’y avait pas pensé. Elle ne voulait pas du tout y réfléchir à l’instant.
— A vrai dire je n’en sais rien ; prends juste un aller simple.
— Mais Diehl !!!! Tu dois programmer rapidement un jour pour ton retour. Tu sais que le mois prochain, nous avons un sérieux travail à faire sur le dossier de Milan.
— Oui, bien sûr que je le sais ! Tu me le rappelles tout le temps. Mais je ne sais pas vraiment ce qui m’attend à Barcelone et je ne veux pas un retour trop vite anticipé.
—Je pense que…
— Kessy, un aller simple s’il-te-plait.
— D’accord.
— Envoie-moi le nécessaire par mail dès que ce sera fait. Merci.
L’une des grandes qualités de Kessy était son efficacité. Elle savait très bien effectuer son travail et régler avec précision l’emploi du temps de Diehl. Elle était objective et agissait toujours selon les priorités. Diehl n’avait jamais à s’inquiéter pour les détails. C’était bien pour cela qu’elle était son assistante. Cependant, Kessy avait ceci de particulier qu’elle n’aimait pas les contretemps. Ce voyage à Barcelone pouvait en être un. Diehl au contraire, l’une des choses qu’elle détestait le plus, c’était faire les valises. Elle ne savait jamais quoi y mettre ou pas. C’était un cauchemar ; surtout que l’été était tellement différent à Barcelone.
Finalement, elle se décida à prendre ses sandales à cordes bleues. Elle n’avait presque pas eu l’occasion de les porter à Londres. Entre le bureau, les réunions et les voyages d’affaires, le moment idéal pour les porter ne se présentait pas. Le climat de Londres était aussi ennuyeux que pluvieux. On se demandait bien comment la ville attirait autant de touristes chaque année.
Tout compte fait, elle s’était habituée à l’Angleterre en un rien de temps. Elle aimait bien son impression de temps maussade, les étés tempérés et la densité de la population. Elle avait toujours eu l’impression qu’il y avait du monde partout. C’est vrai que le travail l’absorbait énormément. Elle prenait toutefois le temps d’aller se promener sur les rives de la Tamise, au moins une fois par mois, afin de profiter de l’air frais de l’été. Néanmoins, ces derniers mois avaient été plus que mouvementés avec de nouveaux contrats, des plans à dessiner, et l’implantation de succursales dans quatre pays de l’Europe de l’Ouest. Ces obligations l’avaient obligée à beaucoup voyager ; ce qu’elle aimait dans une certaine mesure.
Rentrer à la maison était une joie inégalable, surtout pour les vacances ; des vacances bien méritées. Elle avait prévu de rester chez elle pendant ce temps de repos, profiter de l’été au frais à la maison, lire le dernier livre de Priscilla Shirer et regarder un film des frères Kendrick. C’était un plan plutôt bien élaboré ; elle n’en avait pas de meilleur d’ailleurs. Elle voulait juste profiter de son temps libre pour lire, cuisiner et s’occuper un peu d’elle. Cependant, la note vocale d’Alex avait tout chamboulé. Ils ne s’étaient pas vus depuis deux ans, même s’ils s’appelaient de temps en temps pour prendre des nouvelles. Il était sa famille et Diehl aimait se savoir comme faisant partie de la tribu d’Alex.
Son téléphone sonna de nouveau, la troisième fois depuis le matin. Diehl était à peu près sûre que c’était Kessy. Elle espérait juste qu’elle avait réussi à lui trouver une place pour un vol demain.
— Oui Kessy, dis-moi !
— Eh bien demain 10h15, ça te convient ?
— Parfaitement oui ! La compagnie est correcte ?
— Oui ne t’inquiète pas. Tu voyages en classe affaires et une voiture t’attendra à l’aéroport. La maison sera aussi prête à ton arrivée. J’ai déjà discuté avec Ana. Je t’envoie toutes les informations par mail.
— Excellent ! Merci beaucoup Kessy. Je te vois à mon retour.
— Et moi je t’appelle avant.
— J’y comptais bien.
Diehl était certaine à cent pour cent qu’elle tiendrait parole. De plus, elle lui faisait assez confiance pour gérer tout souci au bureau pendant son absence. Ce qui est certain, c’est qu’à la première occasion elle l’appellerait, pour la rappeler à l’ordre et demander quand était prévu son retour.
1 Sœur
Cantique des cantiques 2 :11
Paul Oscar se retourna vers son père Oscar Képhalé. La frustration qui l’empêchait de dormir, refit surface.
— Papa, j’ai l’impression que tu ne comprends pas de quoi je parle…
— Junior, dans une situation comme celle-ci tu as besoin d’analyser les choses avec calmement.
Si tu t’affoles le premier, les choses iront de mal en pis, lui dit son père. Toujours aussi serein, Oscar Képhalé était installé dans son fauteuil, et venait d’apprendre par son fils que la faillite de l’entreprise pourrait être plus proche que prévu.
Les deux hommes avaient une fois de plus cette discussion sur les difficultés rencontrées par l’entreprise. Ça faisait des mois que Paul Oscar essayait de faire comprendre à son père la nécessité de changer les conditions de travail et la stratégie de l’entreprise, mais il avait l’impression de parler à un mur.
— Je pense que nous sommes déjà au pire de la situation. Ça ne sert à rien de mâcher nos mots, grommela-t-il.
— Junior ! Son visage se froissa.
C’était peut-être un peu agressif de parler comme cela, mais Paul Oscar savait qu’il avait raison. KCS était en train de couler et il n’avait aucune carte à jouer pour empêcher cela. Son père ne voyait-il donc pas qu’il était à bout ?
— Tout ce que je dis papa, c’est que j’ai besoin d’un peu plus de temps.
— Du temps pour quoi faire ? Nous sommes en train de faire faillite, tu l’as toi-même dit.
Pour une fois qu’il allait dans le même sens que son fils et disait les choses comme elles étaient, il fallait qu’il lui donne aussi un ultimatum.
— La faillite a commencé bien avant papa, pendant la crise. On a beaucoup trop perdu.
Aujourd’hui, je n’ai pas d’autre alternative, il nous faut injecter des capitaux. Et des capitaux conséquents.
— C’est pour cette raison que je te demande de prendre une pause. Tu as été inhibé dans ce climat bien trop longtemps.
— Mais papa…
— C’est ma faute —l’interrompit son père— Je n’aurais pas dû te mettre dans cette position si tôt.
— Je ne suis plus un enfant, papa. J’ai vingt-huit ans. Et cela a toujours été mon rêve de faire ce que je fais.
— Oui, mais accéder à la tête de la direction était beaucoup trop prématuré, lui dit son père en s’adossant sur son siège de manière pensive.
Bien sûr, il fallait revenir à la case départ. Son père ne lui faisait plus assez confiance pour lui donner le poste de directeur. Paul Oscar avait l’impression de le décevoir, une fois de plus. Sa vie était vraiment un désastre. Tout ce travail et cette énergie déployée, c’était finalement pour rien du tout. Même sa famille pensait qu’il était un raté. Son cœur se serra et il admit :
— Je sais que je n’ai pas été à la hauteur papa, mais…
— Non junior, tu ne comprends pas. Ce n’est pas du tout cela. Le fait que cette entreprise ait survécu deux ans après la crise, relève du miracle. Je ne te blâme pas pour les difficultés que nous rencontrons maintenant. Ce que je dis, c’est que tu as besoin d’une pause. Donne-toi du temps mon fils.
— Papa…
À cet instant sa mère, Abigaël Képhalé entra dans le bureau et les interrompit :
— Eh, vous deux, venez manger tant que c’est chaud. Vous allez continuer votre discussion plus tard.
Son père se leva et lui dit :
— Junior, essaye d’y réfléchir. D’accord ?
Le dernier dimanche du mois, était celui consacré à la famille. Toute la famille se réunissait dans la demeure familiale pour le déjeuner. C’était la maison où il avait grandi ; sa mère préparait de bons plats qui lui rappelaient toujours son enfance. C’était l’occasion pour lui de voir sa petite sœur Jolly, étudiante en spécialisation de médecine obstétrique. Elle était vraiment brillante, la fierté de leur mère. C’était normal. C’était la seule qui avait décidé de suivre ses traces. Paul Oscar était déjà au bout du rouleau. Il commençait même ces derniers temps à vraiment douter de certains choix qu’il avait faits plus jeune. Ce qui le conduisait à ne pas être la fierté de quelqu’un dans cette famille.
Paul Oscar avait vendu son projet fraîchement élaboré après son diplôme d’ingénieur, pour aller à Singapour poursuivre ses études. Il avait gagné une petite fortune en le vendant au marché des constructeurs. Aller à Singapour pour lui, avait été d’un grand bénéfice. Il y avait beaucoup appris et était rentré différent ; totalement changé. Ces deux années à l’étranger lui avaient appris à être plus mature. Il pouvait assumer avec aisance sa position de chrétien. Il n’avait pas peur de prendre des risques dans la vie. Malheureusement, l’argent qu’il avait gagné était épuisé. Il avait tout investi dans KCS. Son père ne le savait pas, et il n’avait pas besoin de le savoir.
Paul Oscar n’était pas du même avis que son père. Il ne voulait pas se résoudre à fermer l’entreprise sous prétexte qu’il était dépassé par la situation. Il lui fallait juste un peu plus de temps pour trouver une solution. Son père ne voulait rien entendre. Il fallait que Paul Oscar en parle avec Briella. Elle au moins, son père l’écoutait. Peut-être réussira-t-elle à convaincre ce dernier de leur accorder un sursis.
Dans le jardin de ses parents, après le repas, Paul Oscar s’isola et s’assit sur une chaise. Il ne savait plus où il en était. Il n’arrivait pas à dormir cinq heures d’affilées. Chaque jour qui passait, semblait lui répéter qu’il n’était pas encore sorti d’affaire.
S’il perdait KCS, qu’est-ce qu’il allait faire d’autre ? Tout ce qu’il avait toujours voulu, depuis tout petit, c’était de prendre les rênes de l’affaire familiale. Il était en train de regarder son rêve s’écrouler sans aucune issue de sauvetage. Son père avait peut-être raison ; il fallait qu’il laisse tomber. Paul Oscar n’arrivait pas à s’y résoudre. Il n’avait tout simplement pas envie.
Seigneur, vas-tu me laisser couler sans rien faire? J’ai besoin de Toi, aide-moi.
À cette période de l’année, le jardin de sa mère était époustouflant. Les plantes et les fleurs formaient une combinaison de couleurs qui réussissait à apaiser le tumulte qu’il vivait au-dedans de lui. Sa mère en prenait grand soin. Elle interdisait à quiconque de les toucher. C’était son jardin secret. Elle y travaillait presque tous les jours depuis quelques mois maintenant.
— Alors tu prends du bon temps en compagnie de mes roses ?
Sa mère apparut soudainement dans le jardin avec une tasse de café dans chaque main. Il lui sourit.
— Touché ! Je crois que je suis tombé sous le charme des blanches. Elles sont belles, maman.
— Leur pureté et leur éclat donnent vraiment un sentiment d’apaisement n’est-ce pas ? lui demanda-t-elle en venant s’asseoir à côté de lui sur le banc, Elle lui tendit sa tasse de café en souriant.
— Je n’arrive pas à comprendre comment tu as fait pour te convertir en jardinière pro ?
— Ah ! Mon fils, je pense que j’ai cherché quelque chose qui pourrait m’occuper. Tu sais, les plantes sont délicates ; comme le corps humain, elles ont besoin de soin particulier tous les jours. Un peu trop d’eau elles meurent noyées, et en manque d’eau, elles se fanent.
Peut-être que sa mère n’était pas prête à déposer le bistouri. Elle allait bientôt prendre sa retraite et voulait avoir quelque chose à faire pour s’occuper, histoire peut être d’éviter d’être oisive. Après plus de trente ans de service, elle se découvrait un nouveau talent pour le jardinage.
— La chirurgie va te manquer hein ? Se risqua-t-il à demander.
— J’ai passé toute ma vie dans un bloc opératoire chéri. Mes mains ont toujours été occupées à sauver des vies et à ramener d’autres dans ce monde. Alors, c’est un peu comme ton père, le boulot, les planches, les dessins, ça lui manque énormément. — Elle regarda au loin, comme perdue dans ses pensées— Je sais que tu dois avoir l’impression qu’il marche sur tes plates-bandes, mais essaye de le comprendre…
— Oui maman, je sais. C’est juste que… c’est tellement difficile de le décevoir tout le temps !
Elle se retourna et le regarda avec étonnement.
— Mais non, tu te trompes. Il est tellement fier de toi ! Nous le sommes tous ! C’est un exploit que tu as fait là ; maintenir cette entreprise à flot jusqu’aujourd’hui. Le problème c’est que tu veux tellement l’impressionner par ton travail que tu t’oublies toi-même et nous voulons éviter que tu te stresses davantage à cause de cette entreprise.
— C’est l’entreprise familiale maman…
— Et elle le demeurera, lui dit-elle fermement. Toi prends juste un peu de recul. Repose-toi Junior.
— En faisant quoi ?
Il ne comprenait pas pourquoi elle aussi lui demandait cela ; se reposer signifiait pour lui « laisser tomber » et ce n’était pas une option à prendre en compte. Pourquoi personne ne comprenait ce qu’il disait ?
— C’est l’été mon chéri. Voyage ! Prends quelques semaines et va te détendre. Cette entreprise sera toujours là à ton retour.
Paul Oscar secoua la tête avec tristesse.
— Peut-être si, peut-être pas.
— Je dis juste que tu peux continuer à réfléchir sur une solution en étant un peu loin de cet environnement tant pollué par le désespoir…
Peut-être qu’elle avait raison. Mais qu’est-ce qu’il pouvait y faire ? Cette entreprise était tout ce qu’il avait, et tout ce qu’il lui restait. Il ne pouvait pas rester sans travailler. Il avait besoin de ce travail. Avant, il avait des projets et des rêves pour cette entreprise. Aujourd’hui, il arpentait les couloirs des bureaux en étant l’ombre de lui-même. Et il le vivait comme un cauchemar.
Ce soir-là, de retour à son domicile, Paul Oscar s’affala sur sa chaise en regardant ses messages. En entrant, il avait regardé sa boite aux lettres pour la énième fois de la journée. Il redoutait un courrier de la banque. Mais quel idiot ! La banque ne pouvait pas lui envoyer des messages un dimanche. C’était insensé. Il était déjà en train de devenir paranoïaque. Peut-être sa mère avait raison finalement, il lui fallait une pause. Ça devenait de plus en plus grave.
Le nom d’Alex attira son attention. Il lui avait laissé un message lui demandant de le rappeler au plus vite. Alex lui faisait signe régulièrement. La plupart du temps, Paul Oscar remettait à plus tard ces messages. S’il insistait autant sur le fait d’être rappelé, cela voulait dire que c’était une urgence. Il s’assit sur son fauteuil et posa ses pieds sur la table. Il était fatigué et il était déjà un peu tard, mais il lança l’appel.
— Allô Alex ?
— Oh, mais c’est lui ! Paul Oscar ! Comment va ce grand homme ?
— Bof, pas si grand que ça Alex.
— Qu’est-ce que c’est que cette mine affreuse Paul ? La journée a été mauvaise ?
— Si ce n’était que la journée, eh bien on s’en sortirait assez aisément, tu sais !
Paul Oscar soupira et attendit qu’il dise quelque chose.
— Tu veux en parler ?
— Oh non ! Je ne veux pas te déranger avec mes problèmes Alex. Dis-moi-toi comment tu vas ? Joana et les enfants ?
— Nous allons très bien. Vraiment le Seigneur a été fidèle et c’est époustouflant de voir comment il est à l’œuvre dans la vie de l’église.
— Bien, je suis content pour vous…
— En fait, je t’appelais parce que nous avons un projet de construction en cours et j’avais besoin de ton expertise sur certains détails.
— Ah bon ?
— Oui. Ce ne sera pas quelque chose de compliqué. J’ai juste besoin que tu viennes un jour ou deux pour nous donner ton avis. Qu’est-ce que tu en dis?
Paul Oscar ne prit même pas le temps d’y penser. Voilà l’occasion pour lui d’aller prendre de l’air comme sa mère lui avait dit plus tôt. Barcelone était une belle ville où il avait fait toutes ses années d’ingénierie. Peut-être, là-bas il retrouverait le courage et les forces dont il avait besoin pour affronter la faillite probable de son entreprise. Et le voilà pensant comme son père ; il fallait vraiment qu’il s’éloigne un peu de cet environnement. Et puis ce n’était que pour quelques jours, le temps d’aider Alex avec son projet.
— D’accord !
— Génial. J’espérais de tout cœur entendre cette réponse. Quand est-ce que tu viens ?
— Eh bien dans deux jours. Le temps pour moi d’arranger certaines choses.
— Parfait Paul ! Viens à la maison, il y a de la place pour toi.
— Non, Alex je ne veux pas vous déranger.
— Mais non, tu ne nous déranges pas. Joana et moi nous serons heureux de t’accueillir. Ne te fais pas prier s’il te plait!
— D’accord. C’est d’accord !
* * *
Diehl prit le temps d’admirer le ciel bleu en empruntant l’escalier roulant. L’atterrissage fut assez calme et le temps était parfait. À peine sortie de l’appareil, la chaleur collante et étouffante de Barcelone l’accueillit. Ce qui la fit amplement sourire : elle était bel et bien à la maison. Les trois dernières années, elle avait visité plusieurs pays, mais elle pouvait comprendre en piétinant le sol espagnol que son pays restait son pays. Il y avait un monde fou à l’aéroport. C’était comme si toute la ville avait décidé d’aller en vacances le même jour. C’était normal. Barcelone est une ville très touristique et prisée à cette période de l’année. Diehl se demandait comment Kessy avait fait pour lui trouver un vol aussi rapidement. Elle était vraiment douée.
En arrivant dans le hall d’entrée de l’aéroport avec son chariot, elle était attendue par un homme grand, vêtu d’un costume gris avec une cravate lilas. Il s’avança vers elle et la salua gentiment.
— Bonne après-midi madame ! Je suis Juan-Marcos Vilar, votre chauffeur. Avez-vous fait bon voyage ?
C’était sûrement une erreur, Diehl n’avait pas du tout fait appel à un chauffeur.
— Je suis désolée monsieur… Vilar, mais je crois que vous vous trompez.
Il ne parut pas surpris du tout, mais il sourit encore et lui dit avec beaucoup d’assurance :
— J’ai été engagé par Madame Kassandra Perry, et j’ai pour mission de vous escorter durant votre séjour.
À ce moment précis, Diehl compris clairement ce que Kessy essayait de faire. Elle avait tout préparé dans les moindres détails. Diehl tourna le dos à son prétendu chauffeur et prit son téléphone dans son sac… Après deux sonneries, Kessy était à l’autre bout du fil.
— …As-tu fait un bon voyage ?
— J’espère que cette histoire de chauffeur est une blague !
— Oh, tu as fait la rencontre de Juan-Marcos. Je veux juste que tu profites au maximum de tes vacances.
— Kessy, je n’ai pas besoin de quelqu’un pour me surveiller.
— Il n’est pas censé te surveiller. Il est juste là pour s’assurer…
— Que je rentre à temps pour le dossier de Milan. Ne me prends pas pour une idiote Kassandra !
— Non, bien sûr que non !
Elle se tut.
Diehl commença à regretter de l’avoir laissé prendre soin de toutes les réservations.
— Je suis chez moi à Barcelone. Je connais cette ville comme ma poche !
— Justement ! Ce qui rend les choses encore plus difficiles.
— Pardon ? Je ne comprends pas.
— Eh bien tu l’as dit toi-même, c’est chez toi là-bas. Et avec de l’expérience, je peux dire que tout peut arriver à Barcelone. Voir …N’importe quoi. Et nous n’avons pas besoin de mauvaises surprises ; pas maintenant que la compagnie est si près d’avoir sa nouvelle succursale en Italie. Il y a beaucoup trop de choses qui peuvent te distraire là-bas.
— Me distraire ? Si je suis venue ici justement, c’est pour me distraire —Diehl comprenait qu’elle s’inquiète de l’avenir de ce dossier ; mais pour une fois qu’elle était en vacances, elle allait tout faire pour en profiter— Je ne sais pas quand je rentre mais ça ne veut pas dire que je ne vais jamais rentrer. Je connais les enjeux de l’Italie. Ne t’inquiète pas Kessy. D’accord ?
— … D’accord
— Mais s’il te plait, laisse-moi respirer. Je ne veux pas de chauffeur.
— Un chauffeur, ça peut toujours servir…
— Oui mais pas pour moi. Paie ses honoraires et rappelle-le !
Ainsi dit, Diehl raccrocha avant qu’elle n’argumente à nouveau. Puis elle se retourna vers Juan-Marcos. Il était resté exactement où elle l’avait laissé avec son sourire agaçant au visage.
— Je veux bien que vous me déposiez chez moi, ensuite je n’aurai plus besoin de vous.
— Mais madame Kassandra a dit…
— Je sais ce qu’elle a dit ; maintenant c’est ce que je dis…. qui compte d’accord ?
Il avait l’air déçu ; il fit une moue bizarre et tendit la main vers son chariot. Diehl le lui céda sans résister. Sa voiture était garée pas très loin de la sortie. Il faisait chaud. Alors, retrouver la climatisation de la voiture fut très agréable.
Le trajet fut long. Elle ne se souvenait pas de distances aussi importantes pour rejoindre son cocon familial. C’était un appartement assez moderne situé au nord de Sabadell. Elle avait décidé de l’acheter, en pensant venir plus souvent. Le travail, devenu plus intense, ne lui avait pas donné beaucoup d’occasions de profiter de ce nid douillet. La ville était assez calme comme à l’époque de ses années universitaires. Il y avait du monde dans le centre-ville, là où étaient concentrés tous les commerces et le restaurant d’Alex. Elle aurait aimé s’y arrêter un instant, mais elle avait décidé de profiter du chauffeur pour arriver à la maison tôt et prendre une douche.
En passant devant le grand parc qui menait au gymnase, Diehl se rendit compte que rien n’avait changé. Après près de quarante-cinq minutes, elle était enfin arrivée. Quand le chauffeur eut trouvé un emplacement de parking assez proche de la maison, il se gara et sortit les valises. Arrivée devant la porte, Diehl introduisit la clé dans un verrou déjà ouvert. Elle fut surprise par la porte qu’elle trouva déverrouillée. Un vent de panique était sur le point de l’envahir quand surgit devant elle une jeune dame toute souriante. Elle devait avoir la vingtaine. Son visage lui était familier mais elle n’arrivait pas à faire le lien. Elle continua de lui sourire en disant.
— Bienvenue Madame, comment était le voyage ? — Diehl ne répondit pas et la questionna du regard— Je suis Ana, je m’occupe de l’appartement en votre absence.
Bien sûr, elle avait complètement oublié la personne engagée pour prendre soin de la maison pendant qu’elle était à Londres. Elle ne se souvenait pas qu’elle était si jeune.
— Bien sûr Ana, comment tu vas ? J’ai failli paniquer en voyant que la porte n’était pas fermée.
— Oh, non, ce n’était que moi ! La Señora Perry m’a informée de votre arrivée et je suis venue m’assurer que tout était en ordre.
— Merci beaucoup Ana, mais ce n’était pas la peine. —Elle laissa sa valise et entra dans le salon. Effectivement, la maison était accueillante et respirait le bon vivre. Un bruit sourd se faisait entendre de l’autre côté de la pièce. Diehl remarqua que la climatisation était en marche. Le chauffeur quant à lui était toujours dans le hall, silencieux.
— Je vous remercie Monsieur Vilar, mais comme je vous l’ai dit je pense que je peux me débrouiller toute seule. Je n’aurais plus besoin de votre aide.
Il déposa la valise à l’entrée et sortit.
Diehl retourna dans le salon. Les canapés étaient en très bonne état. Décidément, Paqui avait eu raison ; le bleu allait très bien avec l’esprit de la maison. Celle-ci était très bien éclairée, et laissait découvrir de très beaux volumes d’une pièce à l’autre. Ce qui lui plaisait par-dessus tout c’était le balcon. Il permettait d’avoir une vue imprenable sur le parc en face de la maison. Avec un peu de chance elle allait pouvoir contempler l’éclairage des chutes d’eau cette nuit.
Tout était propre et bien rangé. Elle revint sur ses pas et remarqua que ses valises avaient disparu ainsi que son sac. Elle retrouva Ana dans la cuisine en train de ranger des courses dans le frigo. Lorsqu’elle la vit, elle lui sourit avec enthousiasme.
— Vous travaillez le mardi Ana ?
— Non Señora. Généralement je viens deux fois par mois. Je m’occupe de tout ce qui doit être nettoyé et je vérifie que tout est en ordre. Il n’y a pas souvent d’urgence, mais il faut toujours tout vérifier.
— Je n’arrive pas à croire que Kessy vous ait fait venir alors que ce n’était pas votre jour de service.
— Oh Señora, elle ne m’a pas demandé de venir. Je voulais juste m’assurer que votre chambre soit prête à vous accueillir. Il fallait bien que quelqu’un enlève tous les draps qui recouvraient le mobilier. Je savais aussi que vous arriveriez fatiguée alors je suis passée au supermarché vous prendre quelque chose. Comme cela vous ne resterez pas affamée, pas votre premier jour en tout cas.
— Oh, merci beaucoup Ana. Appelez-moi Diehl s’il vous plait. J’ai l’impression d’avoir cinquante ans.
Elle lui sourit encore.
— D’accord Señora… pardon… Diehl.
Après sa douche, Diehl s’installa dans la cuisine pour manger un sandwich ; ça faisait du bien de n’avoir presque rien à faire. Toutefois, elle savait que très bientôt elle allait commencer à s’ennuyer. Elle avait besoin de deux à trois jours pour se déconnecter de tout ce qui concernait Londres. Elle se souvint de ses dernières vacances. Une semaine avait été nécessaire pour qu’elle puisse commencer à profiter pleinement de son temps libre. Le fait qu’elle était restée chez elle à Londres ne l’avait pas du tout aidée.
Il faisait plus de 30°. C’était aussi cela Barcelone en été : chaleur étouffante et très humide. Elle se décida à sortir pour faire la surprise à Paqui. La météo annonçait un orage probable dans la soirée. Elle devait faire attention, parce que les pluies d’été à Barcelone étaient torrentielles. À son retour, il fallait qu’elle pense à passer un coup de fil pour voir comment elle pouvait louer elle-même une voiture.
Une fois sortie de la maison, Diehl se retrouva dans un bain de chaleur redoutable. Elle eut l’impression d’être dans un four. C’était bien « la Sabadell » qui lui souhaitait « bienvenue à la maison ». Elle ne put s’empêcher de sourire.
Il y avait du monde dehors : enfants et parents étaient dans le parc en train de jouer. Certains entraient pendant que d’autres sortaient. La ville avait gardé son dynamisme et sa fraicheur. La maison de Marc et Paqui n’était pas très éloignée de la sienne. Juste après leur mariage, ils avaient loué un appartement un peu plus haut dans le nord de la ville. Par la suite, grâce à des investissements et à l’aide du père de Marc, ils avaient pu prendre une hypothèque pour s’acheter une maison avec de gros volumes. Ceci s’expliquait par le fait qu’ils avaient le projet d’une famille nombreuse
Diehl se dirigea vers la porte, sans reprendre son souffle, et appuya sur la sonnette. À peine avait-elle sonné, que Paqui lui ouvrit la porte comme si elle l’attendait déjà depuis un moment.
— Surprise !
— Dee, mon Dieu ! Qu’est-ce que tu fais là ?
La jeune femme du même âge que Diehl bondit sur elle et l’embrassa avec force. Très surprise, elle n’en était pas moins très heureuse. Après une étreinte sans fin, Diehl ne parvenait presque plus à respirer.
— Oui, tu m’as aussi manqué Paqui ! lui dit-elle pour qu’elle la lâche enfin. Paqui portait une jupe mauve avec un décolleté qui lui allait à merveille. Comme d’habitude elle était rayonnante.
— Ce n’est pas possible que tu sois là ! Allez, entre ! J’étais sur le point de prendre le goûter avec Layana. Tu as mangé ?
— J’ai pris un sandwich avant de venir.
— D’accord. Il devrait y avoir de la place pour autre chose alors. On s’y met. Mais d’abord explique-moi. Comment se fait-il que tu ne m’aies rien dit ? J’aurais pu venir te chercher à l’aéroport.
Diehl savait que ce n’était que le début de l’interrogatoire qu’elle allait subir.
— Je voulais te faire une surprise, lui dit-elle en s’asseyant dans la cuisine. C’est moi où cette cuisine est super grande ?
— C’est toi ! dit-elle en riant. C’est la même. On a effectué quelques travaux l’année passée mais elle est intacte comme tu l’as laissée.
— Ok. Et Marc ? Et ma petite princesse ? J’ai hâte de la voir, continua-t-elle avec excitation
— Ils descendent dans une minute. Marc doit aller bosser.
C’est à ce moment que Diehl remarqua ses cheveux.
—Une minute, tu t’es coupé les cheveux !
— Oui, j’en avais un peu marre tu sais. Tu veux du thé ? J’ai aussi un gâteau à la banane et aux dattes fait maison.
— Donne-moi tout ce que tu veux. Ça fait longtemps que je n’ai pas mangé un vrai gâteau. Et j’aime trop ta nouvelle coupe.
— Ah oui ? Eh bien moi aussi. dit-elle en souriant.
Marc et la petite firent leur entrée dans la cuisine.
— J’ai cru entendre une voix. Diehl, quelle surprise ! s’écria-t-il.
— Salut Marc !
Diehl l’embrassa rapidement avant de se courber en ouvrant grands ses bras.
— Comment va ma princesse préférée ?
— Tante Dee ! La petite fille à la peau couleur caramel courut vers elle et Diehl la prit dans ses bras avant de la soulever pour faire un tour sur elle-même.
— C’est fou, ce que tu as grandi ! Dis-moi combien tu fais déjà ?
La petite répondit avec enthousiasme.
— Cent six centimètres !
— Oh mais voyez-vous ça ! Tu es super grande princesse !
La petite fille lui sourit en hochant la tête. Elle était vraiment un personnage à part. Diehl ne pouvait dire avec précision à qui elle ressemblait le plus.
— Oui, papa dit que bientôt je serai aussi grande que lui.
— Ça c’est vrai ! renchérit-il. Et tous dans la cuisine éclatèrent de rire.
Le goûter fut un véritable régal, mais Marc devait partir pour l’hôpital. La relation qu’il avait avec sa fille Laya était incroyable. Elle restait près de lui tout le temps et ils parlaient en permanence. Marc était clairement le héros de Laya.
Vint le moment de partir. Il prit sa veste et étreignit longuement Laya. Il fit promettre à cette dernière d’obéir à sa mère. Diehl et lui s’embrassèrent et il s’en alla. Diehl remarqua une certaine froideur entre Paqui et Marc. Ni Marc, ni Paqui ne se dirent un mot. Pas un regard, pas un câlin. Il prit juste ses clefs en se dirigeant vers la porte tandis que Paqui rangeait la cuisine. Ce constat surprit grandement Diehl. C’est vrai qu’elle n’avait pas été près d’eux pendant un long moment, mais la tension entre eux était bien palpable. Peut-être que Diehl se trompait et que ce n’était qu’une impression, ou une conclusion hâtive voir prématurée, après une heure ensemble.
Ils avaient passé toutes leurs études universitaires dans le même environnement. Paqui avait été sa colocataire jusqu’à son mariage. Elle pouvait aisément dire qu’il y avait quelque chose de troublant. Ceci n’était tout bonnement pas normal. Il y avait peut-être quelque chose qui lui échappait, mais elle finirait bien par en avoir le cœur net.
Seigneur j’espère que Paqui et Marc vont bien. Je ne veux pas me mêler de ce qui ne me regarde pas mais ce sont mes amis. Prends soin d’eux!
— Tu ne dis rien ! À quoi penses-tu ?
Paqui interrompit ses pensées. Elle était postée devant elle avec son tablier. Elle lui avait vraiment manqué. Diehl voulait qu’elle lui parle de Marc, mais c’était peut-être trop tôt.
— Je pense à quel point cette atmosphère m’a manqué. Marc, ma petite Laya et toi.
Paqui s’assit en face d’elle avec un sourire radieux en croisant les bras. Elle regarda au loin Laya qui était devant la télé et dit pensivement :
— C’est clair que pour Laya, c’est un rêve devenu réalité que tu sois là pour les vacances. Elle va en profiter, je te l’assure.
— J’y compte bien moi aussi.
— Mais s’il te plait ne cède pas à tous ses caprices…. J’ai besoin de la garder lucide, même si ce sont les vacances. Je sais à quel point ses yeux sont envoûtants.
— C’est une princesse, mais ne t’inquiète pas. J’ai toujours mon arme secrète. Les chatouillis pour détourner l’attention.
Elles se mirent à rire joyeusement ; leurs moments de rires comme celui-ci lui avaient aussi manqué. En fait tout ce qu’il y avait ici lui manquait. La ville, l’ambiance, Paqui et Laya. Elle ne s’était jamais vraiment sentie chez elle à Londres. Mais ici à Sabadell, elle savait qu’elle était à la maison.
— J’aimerais vraiment que Marc pense comme toi. Il accorde à Laya tout ce qu’elle lui demande. Ça devient de plus en plus impossible de l’arrêter.
Diehl remarqua tout de suite le ton et la manière dont ses sourcils se froncèrent quand elle parlait de Marc. Elle se dit qu’elle avait visé juste. Il y avait de la tension entre ces deux-là. Ce n’était pas vraiment ce qu’elle s’attendait à trouver. Mais ce n’était probablement pas le moment de creuser. Plus tard peut-être.
— Comment vas-tu Paqui ?
Elle lui sourit, et se frotta les mains. Elle faisait ça quand elle réfléchissait à ce qu’elle devait dire ; ce qui signifiait qu’elle n’allait pas exprimer exactement ce qu’il en était.
— Je vais bien Diehl. Comme tu vois je n’ai pas changé. Je suis toujours où tu m’as laissée.
Diehl crut déceler une ombre de reproches dans sa réponse, et bien que ce soit rare qu’elles se disputent, elle ne voulait pas soulever des malentendus aujourd’hui. Elles venaient à peine de se revoir. —Mais toi dis-moi, comment se fait-il que tu sois ici ?
— Eh bien ! Un coup de tête comme je te l’ai expliqué. J’ai reçu un message d’Alex. Il a besoin de mon aide sur un projet de l’église et je me suis dit : pourquoi ne pas passer mes vacances à la maison ?
— Si j’avais su qu’il fallait juste un projet comme celui-là pour te ramener, j’aurais suggéré à Alex depuis bien longtemps de t’en parler !
— Quoi ? C’est toi qui le lui as demandé ?
Paqui hocha la tête.
— Oui, nous avons eu quelques problèmes et je lui ai dit que sûrement tu nous sortirais d’affaire. Mais, le fait que tu sois là est une bonne chose. Nous allons pouvoir passer du temps ensemble.
Diehl commençait à penser que peut-être ce projet était plus compliqué que ça n’en avait l’air. Alex ne lui avait presque rien expliqué et elle était venue sans lui demander.
— Quel genre de problèmes ?
— Oh, ne t’inquiète pas ! Fais juste de ton mieux avec les plans et moi je m’occupe du reste.
* * *
Le lendemain matin, Diehl finit de défaire toutes ses valises. Elle était rentrée tard la veille, après avoir discuté avec Paqui jusqu’à épuisement. Celle-ci lui avait raconté que son travail au cabinet était devenu beaucoup plus important. Elle était passée associée junior un an plus tôt. Leur cabinet était devenu l’un des plus importants de la région et Paqui en était extrêmement fière. Elle travaillait dur pour pouvoir être promue au poste d’associée senior. Elle avait toujours su ce qu’elle voulait. Diehl de temps en temps pouvait douter, mais Paqui ne s’était jamais laissée distraire par quoi que ce soit. Rien n’avait changé ici, hormis la relation entre Marc et Paqui qui était bizarre.
Diehl prit son téléphone sur la table. Il fallait qu’elle dise à Alex qu’elle était dans la ville avant qu’il ne l’apprenne par quelqu’un d’autre. Ça n’allait pas être une partie de plaisir.
— Allô Alex !
— Hey cariño1, quelle joie de t’entendre enfin !
— Oui, comment tu vas ?
— Bien, Ça fait longtemps que j’attends de tes nouvelles. Je voulais que nous discutions calmement quand tu aurais le temps.
— J’ai reçu ton message et j’ai fait vite de venir pour que tu m’expliques quel est le problème.
— De venir? Oùça ?
— Je suis arrivée hier dans l’après-midi. Alors dis-moi quand est-ce que tu veux qu’on se pose pour discuter ?
— C’est une blague hein ? Tu sais que je n’aime pas ce genre de blague.
— Non Alex, je suis à la maison. On peut se voir quand tu veux.
— Oh mon Dieu ! Quelle bonne surprise ! Tu ne peux pas savoir combien je suis heureux !
— Et moi donc ? —Diehl savait qu’il serait enthousiaste mais pas à ce point — Comment va Joana ?
—